Les Chinois peints par eux-mêmes/Les classes

Calmann Levy (p. 80-82).


LES CLASSES


On distingue en Chine quatre classes ou catégories de citoyens, selon les mérites et les honneurs que la coutume et les lois du pays accordent à chacune d’elles. Ces classes sont formées par les lettrés, les agriculteurs, les manufacturiers et les commerçants. Tel est l’ordre de la hiérarchie sociale en Chine.

Les lettrés occupent le premier rang, comme représentant la classe qui pense ; les agriculteurs ont la seconde place, comme représentant la classe qui nourrit ; les manufacturiers jouissent aussi d’une assez grande considération en rapport avec leur industrie ; mais la classe des commerçants est la dernière.

À vrai dire, les deux classes estimées et honorées sont les deux premières ; elles constituent l’aristocratie de l’esprit et du travail. Nos gentilshommes ne pourraient inscrire dans leurs armes parlantes qu’une plume — je veux dire un pinceau — ou une charrue ; dans l’une le ciel pour horizon, dans l’autre la terre. Ne semble-t-il pas que les seules préoccupations de l’homme aient été de tout temps tournées vers ces deux pôles, vers ces deux limites : le ciel, c’est-à-dire l’invisible et l’inconnu pour la pensée ; et la terre que foulent les pieds pour le travail manuel ? Ce sont les sources naturelles du labeur humain ; nous en avons respecté la disposition pour fixer les distinctions sociales.

Si la science est la plus haute des spéculations, la plus noble et la plus honorée, c’est qu’elle fait les hommes capables de gouverner et que c’est parmi les lettrés que se recrutent les fonctionnaires de l’État. Mais la préférence est accordée aux travaux de l’esprit et elle n’est pas exclusive. L’agriculture est également honorée parce que la terre est le principal objet des taxes. Comparée à l’industrie et au commerce, l’agriculture est appelée la racine et ceux-ci les branches.