Les Chants du bivouac/Prière au « jeune Bon Dieu »

Texte établi par Avec une préface de M. Maurice BarrèsLibrairie Payot et Cie (p. 189-194).


PRIÈRE AU « JEUNE BON DIEU »














 


 

PRIÈRE AU « JEUNE BON DIEU »

I

Jeune bon Dieu qui, dans la Crèche,
Rajeunis ton Éternité,
Toi, dont la tendre Loi ne prêche
Que l’Amour et la Charité,


Doux Roi du plus doux des Royaumes,
C’est Toi que nous invoquerons
Et non les vieux dieux des Guillaumes,
Des Attilas et des Nérons :

« Jeune Dieu rayonnant de Gloire
Aux yeux clairs jamais courroucés,
D’un Geste accorde la Victoire
Aux descendants de tes Croisés ;

Cette Victoire — très prochaine —
Nous la demandons par Clovis,
Par Jeanne la bonne Lorraine,
Par Bayard et par Saint Louis ;

De Toi, fils de la Vierge pure,
Nous l’implorons par la douleur
De nos vierges que la Luxure
Traque et viole sans pudeur ;

Nous l’exigeons de Toi, le Tendre
Qui fus l’ami des tout petits,
Par les cris que tu dois entendre
D’enfants meurtris par des bandits ;

Tous nos chers blessés en détresse
Te la réclament à genoux
À Toi dont le gibet se dresse,
Croix rouge, entre le ciel et nous ;


Nous l’implorons de Toi, le Juste
Mort pour expier nos péchés,
Par nos fils au trépas auguste
Sur leur calvaire, aussi, couchés !

Par les pleurs de millions d’êtres :
Épouses, vieillards endeuillés ;
Par les massacres de tes prêtres ;
Par tes Sanctuaires souillés ;

Par Louvain, par Senlis croûlantes
Et par Reims qui, près de mourir,
Tend vers Toi ses tours suppliantes
Comme les moignons d’un martyr ;

Par notre farouche Endurance ;
Par nos otages en exil,
Jeune bon Dieu, rends à la France
Justice et Gloire !…
Justice et Gloire !…Ainsi soit-il. »