Les Causes de la révolution/Séance Royale

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APPENDIX.

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SÉANCE ROYAL DU 23 JUIN 1789.

Ayant promis dans la note p. 87, de faire mes éfforts pour tacher de me procurer les discours et declarations du roy à la séance royale le 23 juin 1789, et en cas de réussite de les publier : je tiens ma parole avec d’autant plus de satisfaction, que cela me met à même de montrer en quelque façon un port assuré au vaisseau délabré de la France, lorsqu’enfin les matelots révoltés, reconnaitront que pour résister efficacement à la tempête, il faut qu’ils se mettent sous la direction d’un pilote et qu’ils remplacent celui, que dans leur folle rage, ils ont fait périr.

La premiere déclaration consiste presqu’entièrement, en arrangemens pour la police de la tenue der états de 1789. Les concessions que le roy offre dans la seconde, sont telles qu’elles pourraient même entrer dans le système de la république de Platon ; il y a cependant bien quelques articles qui semblent se contredire où qui sont oiseux ; ce qui est plus important est écrit en lettres Italiques. ― Il y a des papiers démocrates, qui ont foins l’occasion de dire des invectives au roy, pour la répétition des termes je veux, j’ordonne, le roy veut : il est sùr qu’ils sont souvent répétés : cependant, il faut convenir qu’on doit avoir bonne envie de queréller, pour songer à cette vétille : c’était une matiere de forme en usage depuis des siecles et qu’une nation voisine a imité depuis la conquête de certain Duc de Normandie : ces termes n’avaient pas beaucoup plus de poids que le roy veut, ainsi soit fait, prononcé par le héraut d’arme du parlement de la Grande Bretagne ! .... non, non, la seule chose qui manquait à ces déclarations, c’était de n’être pas appuyées par l'ultima ratio regum.

Si Louis XIV dans sa gloire, et Henri IV à la tête de son armée avaient faits de telles concessions à leurs sujets ! de quelles expressions flatteuses, l’histoire ne se servirait elle pas, pour leur donner les louanges qu’ils auraient mérités. ... tels sont les hommes, les bienfaits d’un monarque humain et paisible, ne sauraient les toucher -- ce n'est pas sans raison, que les anciens représentaient Jupiter armé de la foudre, et quoique pere et bienfaiteur commun des Dieux et des hommes, faisait trembler l’univers en fronçant le sourcil.


Premier Discours du Roy.


" Messieurs, je croyais avoir fait tout ce qui était en mon pouvoir pour le bien de mes peuples, lorsque j'avois pris la résolution de vous assembler ; lorsque j’avois surmonté toutes les difficultés dont votre convocation étoit entouré ; lorsque j’étois allé, pour ainsi dire, au devant des vœux de la nation ; en manifestant à l’avance, ce que je voulais faire pour son bonheur.

Il sembloit que vous n’aviez qu’à finir mon ouvrage, et la nation attendait avec grande impatience, le moment où par le concours des vues bienfaisantes de son souverain, et du zéle éclairé de ses représentans, elle alloit jouir des prospérités que cette union devait lui procurer. Les États Généraux sont ouverts depuis près de deux mois, et ils n’ont point encore pu s’entendre sur les préliminaires de leurs opérations. Une parfaite intelligence aurait dû naitre du seul amour de la patrie, et une funeste division jette l’alarme dans tous les esprits. Je veux le croire, et j’aime à le penser, les Français ne sont pas changés, mais pour éviter de faire des reproches à aucun de vous, je considere que le renouvellement des États Généraux après un si long terme, l’irritation qui la précédé, le but de cette convocation, si différent de celui qui rassembloit vos ancêtres, les restrictions dans les pouvoirs et plusieurs autres circonstances, ont dû nécessairement amener des oppositions, et des prétentions éxagérées.

Je doit au bien commun de mon royaume, je me doit à moi-même de faire cesser ces funestes divisions. C’est dans cette résolution, messieurs, que je vous rassemble de nouveau autour de moi ; c’est comme le pere commun de tous mes sujets, c'est comme le défenseur des loix de mon royaume, que je viens vous en retracer le véritable ésprit et réprimer les atteintes qui ont pu y être portées.

" Mais, messieurs, après avoir établi clairement les droits respectifs des différens ordres, j’attends du zéle pour la patrie des deux premiers, j’attends de leur attachement pour ma personne, j’attends de la connoissance qu’ils ont des maux urgens de l’état ; que dans les affaires qui regardent le bien général, il seront les premiers à proposer une réunion d’avis et de sentimens, que je regarde comme nécessaire dans la crise actuelle, et qui doit gérer le salut de l’état.

Après ce discours, le garde des sceaux lut la declaration suivante :

Premiere Declaration.


Art. I. Le roy veut que l’ancienne distinction des trois ordres de l’état soit conservée en son entier, comme essntiellement liée a la constitution de son royaume, que les députés librement élus par chacun des trois ordres formant trois chambres, délibérant par ordre et pouvant avec l’approbation du souverain, convenir de délibérer en commun, puissent seuls être considérés, comme formant le corps des représentans de la nation. En conséquence, le roi a declaré nulles les délibérations de l’ordre du tiers état, le 17 de ce mois, aine que celles qui auraient pu s’ensuivre, comme illégales et inconstitutionelles.

Art. II. Sa majesté declare valides, tous les pouvoirs vérifiés et à vérifier dans chaque chambre, sur lesquels il ne s’est point élevé où ne s’élevera point de contestation : ordonne sa majésté, qu’il en fera donné communication respective entre les ordres. Quant aux pouvoirs qui pourraient être contestés dans chaque ordre, et sur lesquelles les parties intéressées se pourvoiraient, il y fera statué pour la présente tenue des états généraux seulement, ainsi qu’il sera ci après ordonné.

Art. III. Le roi casse et annulle, comme anticonstitutionelles, contraires aux lettres de convocation, et opposées à l’intérêt de l’état, les restrictions de pouvoirs, qui en gênant la liberté des députés aux états généraux, les empêcheroient d’adopter les formes de délibérations prises séparément par ordre, où en commun par le voeu distinct des trois ordres.

Art. IV. Si, contre l’intention du roi, quelques uns des députes avoient fait le serment téméraire de ne point s’écarter d’une forme de délibération quelconque, sa majésté laisse à leur consciente, de considérer si les dispositions qu’elle réglera, s’écartent de la lettre où de l’ésprit de l’engagement qu’ils auroient pris.

Art. V. Le roi permet aux députés, qui se croiront génés par leurs mandats, de demander à leurs commettant un nouveau pouvoir ; mais sa majésté leur enjoint de rester en attendant aux états généraux, pour assister à toutes les délibérations sur les affaires pressantes de l’état, et y donner un avis consultatif.

Art. VI. Sa majésté déclare, que dans les tenues suivantes d’états généraux,elle ne souffrira pas que les cahiers, où les mandata puissent étre jamais considérés comme impératifs ; ils ne doivent état que de simples instructions confiées à la conscience et à la libre opinion des députés dont on aura fait choix.

Art. VII. Sa majésté ayant éxhorté, pour le salut de l’état, les trois ordres à se réunir pendant cette tenue d’états seulement, pour délibérer en commun sur les affaires d’une utilité générale, veut faire connaitre ses intentions, sùr la maniere dont il pourra y être procédé.

Art. VIII. Seront nommément exceptées des affaires qui pourront être traitées en commun, celles qui regardent les droits antiques et constitutionels des trois ordres, le forme de constitution à donner aux prochains états généraux, les propriétés féodales et seigneuriales, les droits utiles et prérogatives honorifiques des deux premiers ordres.

Art. IX. Le consentement particulier du clergé sera nécessaire pour toutes les dispositions qui pourroient intéresser la religion, la discipline ecclesiastique, le régime des ordres et corps séculiera et réguliers.

Art. X. Les délibérations à prendre par les trois ordres réunis, sur les pouvoirs contestés et sùr lesquels les parties intéressées se pourvoiroient aux états généraux, seront prises à la pluralité des suffrages ; mais si les deux tiers des voix dans l’un dee trois ordres, réclamoient contre la délibération de l’assemblée, l’affaire sera rapportée au roi, pour y être définitivement statué par sa majésté.

Art. XI. Si dans la vue de faciliter la réunion des trois ordres, ils désiroient que les délibérations qu’ils auront à prendre en commun, passassent seulement la pluralité des deux tiers des voix, sa majésté est disposée à autoriser cette forme.

Art. XII. Les affaires qui auront été décidées dans les assemblées des trois ordres réunis, feront remises le lendemain en délibération, si cent membres de l’assemblée se réunissent pour en faire la demande.

Art. XIII. Le roi désire que dans cette circonstance, et pour ramener les ésprits à la conciliation, les trois chambres commencent à nommer séparément, une commission composée du nombre de députés qu’elles jugeront convenable, pour préparer la forme et la distribution des bureaux de conférence, qui devront traiter les différentes affaires.

Art. XIV. L’assemblée générale des députés des trois ordres sera presidée par les présidens choisis par chacun des ordres, et selon leur rang ordinaire.

Art. XV. Le bon ordre la décence et la liberté même des suffrages, éxigent que sa majésté défende, comme elle le fait expressément, qu’aucune personne, autre que les membres des trois ordres, composant les états généraux, puissent assister à leurs délibérations, soit qu’ils les prennent en commun où séparement."

Mr. le Garde des Sceaux ayant fini la lecture de cette declaration, le roi prononça ce discours.

Second Discours du Roy.


" J’ai voulu aussi, messieurs, vous faire remettre sous les yeux, les différent bienfaits que j’accorde à mes peuples. Ce n’est pas pour circonscrire votre zéle dant le cercle que je vais tracer, car j’adopterai avec plaisir toute autre vue de bien public qui sera proposée par les états généraux ; je puis dire, sans me faire illusion, que jamais roi n’en aura autant fait pour aucune nation ; mais qu’elle autre peut l’avoir mieux mérité par ses sentiment, que la nation Françoise ? je ne craindrai pas de l’exprimer, ceux qui par des prétentions éxagérées, où par des difficultés hors de propos, retarderoient encore l’effet de mes intentions paternelles, se rendraient indignes d’être regardés comme François."

Lorsque le roi eut fini de parler, le garde des sceaux remonta vèrs le trône, fléchit le genou comme la premiere fois, revint à sa place, et lut cette seconde déclaration, monument glorieux des bonnes intentions du roi, et sur le quel on ne peut fixer les yeux sans les sentir baignés de pleurs.

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Seconde Declaration.


Art. I. Aucun nouvel impôt ne sera établi, aucun ancien ne sera prorogé au dela du terme fixé par les loix, sans le consentement des représentans de la nation.

Art. II. Les impositions nouvelles qui seront établies, où les anciennes qui seront prorogées, ne seront que pour l’intervalle qui devra s’écouler jusqu’à l’époque de la tenue suivante des états généraux.

Art. III. Les emprunts pouvant devenir l’occasion nécessaire d’un accroissement d’impôts, aucun n’aura lieu sans le consentement des états généraux, sous la condition toute fois, qu’en cas de guerre, où d’autre danger national, le souverain aura la faculté d’emprunter sans délai jusqu’à la concurrence d’une somme de cent millions (4 millions sterling) ; car l’intention formelle du roi, est de ne jamais mettre le salut de son empire dans la dépendance de personne.

Art. IV. Les états généraux éxamineront avec soin la situation des finances, et ils demanderont tous les renseignemens propres à les éclairer parfaitement.

Art. V. Le tableau des revenus et des dépenses sera redu public, chaque, année, dans une forme proposée par les états généraux, et approuvée par sa majésté.

Art. VI. Les sommes attribuées à chaque département, seront déterminées d’une maniere fixe et invariable, et le roi soumet cette régle générale, les fonds mêmes qui sont destinés à l’entretien de sa maison.

Art. VII. Le roy veut, que pour assurer cette fixité des diverses dépenses de l’état, il lui soit indiqué, par les états généraux, les dispositions propres à remplir ce but, et sa majésté les adoptera, si elles s’accordent avec le dignité royale et la célérité indispensable du service public.

Art. VIII. Les représentans d’une nation fidéle aux loix de l’honneur et de la probité, ne donneront aucune atteinte à la foi publique, et le roi attend d’eux, que la confiance des créanciers de l’état, soit assurée et consolidée de la maniere la plus authentique.

Art. IX. Lorsque les dispositions formelles, annoncées par le clergé et la noblesse, de renoncer à leurs priviléges pécuniaires, auront été réalisées par leurs délibérations, l’intention du roi est de les sanctionner, et qu’il n’éxiste plus, dans le paiement des contributions pécuniaires, aucune éspéce de privilége où de distinction.

Art. X. Le roi veut, que pour consacrer une disposition importante ; le nom de taille soit aboli dans son royaume, et qu’on réunisse cet impôt, soit aux vingtiemes, toit à toute autre imposition territoriales où qu’il fois enfin remplacé de quelque maniere, mais toujours d’après des proportions justes, égales, et sans distinction d’état, de rang, et de naissance.

Art. XI. Le roi veut que le droit de franc fief *[1] soit aboli, du moment où les revenus et les dépenses fixes de l’état, auront été mises dans une éxacte balance.

Art. XII. Toutes les propriétés sans exception, seront constamment respectées, et sa majesté comprend expressément, sous le nom de propriétés, les dîmes, cent, rentes, droits et devoirs féodaux et seigneuriaux, et généralement tous les droits et prérogatives utiles où honorifiques, attachés aux terres et aux fiefs, où appartenant aux personnes.

Art. XIII. Les deux premiers ordres de l’état continueront à jouir de l’éxemption des charges personelles ; mais le roi approuvera que les états généraux s’occupent des moyens de convertir ces sortes de charges es contributions pécuniaires, et qu’alors tous les ordres de l’état y soient assujettis également.

Art. XIV. L’intention de sa majésté est de déterminer d’après l’avis des états généraux, quelles seront à l’avenir les emplois et les charges qui conserveront le privilège de donner et de transmettre la noblesse. Sa majésté néanmoins, selon le droit inhérent à sa couronne, accordera des lettres de noblesse à ceux de tes sujets, qui par des services rendues au roi et à l’état se seraient montrés dignes de cette récompense.

Art. XV. Le roi désirant assurer la liberté personnelle de tous les citoyens, d’une maniere solide et durable ; invite les états généraux à chercher et à lui propofer les moyens lei plus convenables de concilier l’abolition des ordres, connus sous le nom de lettres de cachet, avec le maintien de la surété publique, et avec les précautions nécéssaires, soit pour ménager dans certains cas, l’honneur des familles, soit pour réprimer avec célérité les commencemens de sédition, soit pour garantir l’état, des éffets d’une intelligence criminelle avec les puissances étrangeres.

Art. XVI. Les états généraux éxamineront et feront connoitre à sa majesté le moyen le plus convenable, de concilier la liberté de la presse, avec le respect dû à la religion, aux moeurs et à l’honneur des citoyens.

Art. XVII. Il sera établi dans les diverses provinces où généralités du royaume, des états provinciaux, composés de deux douziemes de membres du clergé, dont une partie sera nécessairement choisie dans l’ordre épiscopal, de trois dixiemes de membres de la noblesse, et de cinq dixiemes de membres du tiers état.

Art. XVIII. Les membres de ces états provinciaux seront librement élus par les ordres respectifs, et une mesure quelconque de propriété fera nécessaire pour être électeur où éligible.

Art. XIX. Les députés à ces états provinciaux, délibèreront en commun sur toutes les affaires, suivant l'usage observé dans les assemblées provinciales, que ces états remplaceront.

Art. XX. Une commission intermédiaire choisie par ces états, administrera les affaires de la province, pendant l’intervalle d’une tenue à l’autre, et ces commissions intermédiaires devenant seules responsables de leur gestion, auront pour délégués, des personnes choisies uniquement par elles, et par les états provinciaux.

Art. XXI. Les états généraux proposeront au roi, leurs vues pour toutes les autres parties de l’organisation intérieure des états provinciaux, et pour le choix des formes applicables à l’élection des membres de cette assemblée.

Art. XXII. Indépendamment des objets d’administration dont les assemblées provinciales sont chargées, le roy confiera aux états provinciaux l’administration des hopitaux, des prisons, des dépots de mendicité, des enfans-trouvés, l’inspection des dépenses des villes, la surveillance sur l’entretien des forêts, sur la garde et la vente des bois, et sur d’autres objets qui pourraient être administrés plus utilement par les provinces.

Art. XIII. Les contestations survenues dans les provinces, où il éxiste d’anciens états, et les réclamations élevées contre la constitution de ces assemblées, devront fixer l’attention des états généraux, et ils feront connoitre à sa majésté, les dispositious de sagesse et de justice qu’il est convenable d’adopter, pour établir un ordre fixe dans l’administration de ces mêmes provinces.

Art. XIV. Le roy invite les états généraux à s’occuper de la recherche des moyens propres, à tirer le parti le plus avantageux, des domaines qui sont dans ses mains, et de lui proposer également leurs vues sur ce qu’il peut y avoir de plus convenable faire, relativement aux domaines engagés.

Art. XXV. Les états généraux s’occuperont du projet, conçu depuis long temps par sa majésté, de porter les Douanes aux frontières du royaume, afin que la plus parfaite liberté règne, dans la circulation intérieure des marchandises nationales où étrangéres.

Art. XXVI. Sa majésté désire que les facheux effets de l'impôt sur le sel, et l’importance de ce revenu, soient discutés soigneusement, et que dans toutes suppositions, on propose au moins, des moyens d'en adoucir la perception.

Art. XXVII. Sa majésté veut aussi, qu’on éxamine attentivement les avantages et les inconvénients, des droits d’aide et des autres impôts, mais sans perdre de vue la nécessité absolue, d’assurer une éxacte balance entre les revenus et les dépenses de l’état.

Art. XXVIII. Selon le voeu que le roi a manifesté par sa déclaration du 23 Septembre dernier, sa majésté éxaminera avec une sérieuse attention, les projets qui lui seront présentés relativement à l'administration de la justice, et aux moyens de perfectionner les loix civiles et criminelles.

Art. XXIX. Le roi veut que les loix qu’il aura fait promulguer, pendant la tenue et d’après l’avis, où selon le voeu des états généraux, n’éprouvent, pour leur enrégistrement et leur éxécution, aucun retardement et aucun obstacle, dans toute l’étendue de tout son royaume.

Art. XXX. Sa majésté veut que l’usage de la corvée pour la confection et l’entretien des chemins, soit entièrement et pour toujours aboli dans son royaume.

Art. XXXI. Le roi désire que l’abolition de droit de main morte, dont sa majesté a donné l'éxemple dans ces domaines, soit étendue dans toute la France, et qu’il lui soit proposé les moyens de pourvoir à l’indemnité qui pourroit être due aux seigneurs en possession de ce droit.

Art. XXXII. Sa majesté fera connoitre incessamment, aux états généraux, les réglemens dont elle s’occupe, pour restreindre les capitaineries, et donner encore dans cette partie, qui tient de plus près à ses jouissances personelles, un nouveau témoignags de son amour pour ses peuples.

Art. XXXIII. Le roy invite les états généraux, à considérer le tirage de la milice dans tous ses rapports, et à s’occuper des moyens de concilier ce qui est dû à la défense de l’état, avec les adoucissemens que sa majésté, désire pouvoir procurer à ses sujets.

Art. XXXIV. Le roi veut, que toutes les dispositions d’ordre public, et de bienfaisance enver ses peuples, que sa majésté aura sanctionnées par son autorité, pendant la présente tenue des états généraux, celles entre-autres, relatives à la liberté personnelle, l’égalité des contributions, à l’établissement der états provinciaux ne puissent jamais être changées sans le consentement des trois ordres pris séparément. Sa majésté les place à l’avance, au rang des propriétés nationales, qu’elle veut mettre comme toutes les autes propriétés, sous la garde la plus assurée.

Art. XXXV. Sa majésté après avoir appellé les états généraux, à s’occuper de concert avec elle, des grands objets d’utilité publique, et de tout ce qui peut contribuer au bonheur de son peuple ; declare de la maniere la plus expresse, qu’elle veut conserver, en son entier, et sans la moindre atteinte l'institution de l’armée, ainsi que toute autorité, police et pouvoir sur le militaire, tels que les monarques François en ont constamment joui.


Lorsque le garde des sceaux eut achevé la lecture de la seconde declaration,l’assemblée restant dans le plus profond silence, le roi se leva et parla ainsi.

Troisieme discours du Roy.


" Vous venez, messieurs, d’entendre le résultat de mes disposition et de mes vues, elles sont conformes au vif désir que j’ai d’opérer le bien public. Si par une fatalité loin de ma pensée, vous m’abandonniez dans une si belle entreprise : seul, je ferai le bien de mes peuples ; seul, je me considererai comme leur véritable représentant ; connoissant vos cahiers, connoissant l’accord parfait, qui éxiste entre le voeu le plus général de la nation et mes intentions bienfaisantes, j’aurai toute la confiance que doit inspirer une si rare harmonie, et je marcherai vèrs le but auquel je veut atteindre, avec tout le courage et la fermeté qu’il doit m'inspirer. Refléchissez, messieurs, qu’aucun de vos projets, aucunes de vos dispositions, ne peut avoir force de loi sans mon approbation spéciale : ainsi je suis le garant naturel de vos droits respectifs, et tous les ordres de l’état, peuvent se reposer sur mon équitable impartialité. Toute défiance de votre part seroit une grande injustice, c'est moi, jusqu’a présent, qui ai fait tout pour le bonheur le mes peuples : il est rare peut-étre, que l'unique ambition d’un souvrain soit d’obtenir de ses sujets, qu’ils s’entendent allez, pour accepter ses bienfaits. Je vous ordonne messieurs, de vous séparer tout de suite et de vous rendre demain matin, chacun dans le chambres affectées à votre ordre, pour y reprendre vos séances, j’ordonne en conséquence au grand maitre des cérémonies de faire préparer les salles. "

Le Roi ayant fini de parler se retira, suivi de la noblesse et du clergé. On a vu p. 88. avec quelle insolence ces declarations bienveillantes, furent reçues de Mirabeau et des autres enragés, (comme on les appellait alors) on peut aussi se rappeller avec douleur, la faiblesse cruelle, et vraiment surprenante par son excès, avec laquelle, le Roy retracta trois jours après, tout ce qu’il avait dit et de la hardiesse qu’elle inspira aux factieux : quant à la revolution dont elle peut fixer l’époque, quoique le soulévement général et la prise de la Bastille n’eussent lieu, que trois semaines après, on serait trop heureux de pouvoir l’oublier. Les excès qui l’ont accompagné, seront longtemps presents la memoire des hommes et l’horreur qu’ils inspirent, fait plus de tort la cause de la vraie liberté, que n’auraient pu faire mille Nerons, où Caligulas.

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  1. Le droit de franc-fiéfs appartenait à la couronne.