Au Vatican, par ordre exprès du Saint-Pontife, l’an dernier du regne de la papauté [1797] (p. 28-34).

CONFÉRENCE TROISIÈME.

Entre LOUIS XV, roi de Carreau ; LA DUBARRY, madame de Carreau ; LA POMPADOUR et les Gourgandines du Parc au Cerf ; item le PAPE et RICHELIEU, valet de Carreau.
LOUIS XV, roi de Carreau.

Honnorables putains, objets de mon amour,
Amusez votre roi dans ce triste séjour,
Que chacune de vous, déployant la luxure,
Mérite le sur-nom d’une agréable impure,
Toutes, vous le savez, ah ! j’ai tout fait pour vous,
Pour me plaire, inventez ces passe-temps si doux,
Ces beaux coups de poignets, ces charmantes secousses,
J’abandonne à vos jeux et mon vit et mes bourses,
Autrement dit mes couilles, en pur et bon français,
Puisqu’auprès de vos cons, ne débandant jamais,
De vous foutre sans cesse on m’envia la gloire,
Sur ce membre foutu obtenez la victoire.
Ici je ne crains pas ce trop funeste mal,
Dont le cruel progrès me devint si fatal,
Dans les enfers on peut se foutre à tour de rôle,
Sans craindre le danger d’attraper la vérole.

LA POMPADOUR.

Paillard roi des Français, craint pourtant ce fléau,
Qui, tu sais, te coucha dans un profond tombeau,

Quand le vagin flétri, (montrant la Dubarry) de cette gourgandine,

Sans respect pour un roi, a su pourrir ta pine.


LA DUBARRY, dame de Carreau.

Juste dieu ! Pompadour, comme vous faites la petite bouche ; croyez-vous que nous ignorions vos lubriques actions, je fus putain royale, j’en conviens, Richelieu le maquerau me plaça dans le lit de ce vieux débauché, qui, dégoûtant et crapuleux, m’assimiloit à ses plaisirs. J’y fis ma fortune, c’est encore une vérité, mais je ne le trompai pas, et abstraction faite de quelques fouteries consommées à l’échappée avec d’Aiguillon, j’aurais été la plus vertueuse garce du royaume, et ce sans vous compter.

LA POMPADOUR avec dignité.

Que peut-on me reprocher ?

LA DUBARRY, dame de Carreau.

Vos déréglemens, coquine ! et pendant que le sot Louis XV, tranquille sur votre fidélité, branloit des cons au Parc-au-Cerf, et se faisoit travailler les génitoires, vous foutiez avec Saint Florentin ; le marquis de Marigni, votre frere, a fait maintes stations sur votre moniche ; il n’est pas jusqu’au lieutenant de police de votre temps, qui n’ait eu vos bonnes graces pour des lettres de cachets.

LOUIS XV, roi de Carreau.

Allons paix, silence, toutes deux vous êtes des femmes perdues, et aux enfers par-dessus le marché. Point de bachanal ici, nous n’y sommes pas les maîtres, Lucifer y ordonne despotiquement, et nous pourrions y avoir les étrivières ; quand à moi, mesdames, je n’en hais pas le régime, plus d’une fois je n’ai bandé qu’avec le secours du fouet des furies, loin de me châtier, elles ont augmenté mes plaisirs ; mais vos fesses délicates pourroient en être furieusement endommagées. Tenez, à cet égard, consultez le pape qui entre avec mon pourvoyeur de femmes, qui si connoît ; la Saint Vincent n’a pas épargné son énorme fessier.

(Richelieu et le Pape augmentent
la conférence).
LE PAPE.

Salutem omnibus, Domine sit semper pax vobiscum.

LOUIS XV, roi de Carreau.

Allons vieux pédant, sers toi de la raison du premier calotin de l’Europe ; à quatre-vingt ans on doit en avoir ; viens mettre à la raison ces femelles criardes, elles se disputent pour quelques lignes de vit ; il y a de quoi en perdre la tête.

LE PAPE présentant ses deux doigts comme
au temps passé.

Dominus vobiscum.

LA DUBARRY.

Eh ! va te faire foutre, enculeur italien.

Eh ! mais en vérité ne te semble-t-il pas que nous soyons jalouses de ton Dominus vobiscum ? Point de paix entre nous, encore moins avec les fripons de ton costume.

Et nous ne songeons qu’à bien boire,
Comme Grégoire.

LOUIS XV, roi de Carreau.

Grégoire étoit un pape.

LE PAPE.

Oui, mais un pape qui se borna à des pécadilles ; il disoit son bréviaire et enculoit les novices du couvent des Dominiquains ; il célébroit la messe, et se branloit devant l’image du jeune roi David. Il consacroit un peu de vin et de pain, et avoit ordinairement quarante plats à sa table, sans compter les estaffiers décorés qui lui baisent les pieds, pour se remettre en grace avec le seigneur.

LOUIS XV, roi de Carreau.

Vous, vieux penard, vous ne vous amusez à autre chose ; accoutumé aux badineries innocentes des poignards et des stilets, en sortant vous faites assassiner froidement les citoyens honnêtes gens ; mais pour vous ce sont des bagatelles et des jeux d’enfans.

UNE PUTAIN du Parc-au-Cerf.

Compagnes laissons-là ce triste olibrius,
Sa pantouffle, sa mine et sur-tout ses agnus,
Allons, roi des putains, des plaisirs de la fille,
Nous allons célébrer l’honneur de ta famille.

Toutes les garces du roi de Carreau
chantent ensemble.
LA DUBARRY.

Dans mon con en triste roi,
Ton vit se barbouille,
Et de ce plaisir, la loi,
Amuse ta couille,
Par mon brûlant clitoris,
Je fis crier tout Paris,
Ce n’est pas ma faute ô gué,
Ce n’est pas ma ſaute.

(Toutes les putains font chorus.)

LA POMPADOUR.

De Louis triste Jeannot,
J’ai fais la conquête,

Son successeur fut un sot,
Il en perdit la tête,
C’est qu’il falloit sans raison,
Qu’il s’amusat près d’un con,
Ce n’est pas ma faute ô gué,
Ce n’est pas ma faute.

LA MAILLY.

J’ai réuni les plaisirs
Dans la cour de France,
Tout y flattoit mes désirs,
Le foutre et la bombance.
Mais maintenant aux enfers,
Plus de vits dans l’univers,
Ce n’est pas ma faute, ô gué,
Ce n’est pas ma faute.


En ce moment un coup de tonnerre annonce un changement ou au moins une révolution dans l’empire infernal ; chacun se sauve, et la quatrième conférence commence ci-après.