Les 120 journées de Sodome/26

Numérisation : Jean Franval (p. 201-202).

(XXVI)

Vingt-deuxième journée

Il résulta de ces bacchanales nocturnes que l’on fit très peu de choses ce jour-là ; on oublia la moitié des cérémonies, on dîna en l’air, et ce ne fut guère qu’au café que l’on commença à se reconnaître. Il était servi par Rosette et Sophie, Zélamir et Giton. Curval, pour se remettre, fit chier Giton, et le duc avala l’étron de Rosette ; l’évêque se fit sucer par Sophie et Durcet par Zélamir ; mais personne ne déchargea. On passa au salon ; la belle Duclos, très malade des excès de la veille, ne s’y offrit qu’en battant l’œil, et ses récits furent si courts, elle y mêla si peu d’épisodes, que nous avons pris le parti de la suppléer et d’extraire au lecteur ce qu’elle dit aux amis. Suivant l’usage, elle raconta cinq passions.

La première fut celle d’un homme qui se faisait branler le cul avec un godemiché d’étain que l’on remplissait d’eau chaude, et qu’on lui seringuait dans le fondement à l’instant de son éjaculation, à laquelle il procédait de lui-même et sans qu’on le touchât.

Le second avait la même manie, mais on y procédait avec un bien plus grand nombre d’instruments ; on débutait par un très petit, et augmentant peu à peu, et de ligne en ligne, on arrivait jusqu’à un dernier dont la taille était énorme, et il ne déchargeait qu’à celui-là.

Il fallait beaucoup plus de mystère au troisième. Il s’en faisait d’entrée de jeu mettre un énorme dans le cul ; ensuite on le retirait ; il chiait, mangeait ce qu’il venait de rendre, et alors on le fouettait. Cela fait, on remettait l’instrument dans son derrière, on le retirait encore. À cette fois, c’était la putain qui chiait et qui le fouettait, pendant qu’il mangeait ce qu’elle venait de faire. On renfonçait pour la troisième fois l’instrument : pour cette fois, il lâchait son foutre sans qu’on le touchât et en achevant de manger l’étron de la fille.

Duclos parla, dans le quatrième récit, d’un homme qui se faisait lier toutes les articulations avec des ficelles. Pour rendre sa décharge plus délicieuse, on lui serrait même le col, et, en cet état, il lâchait son foutre en face du cul de la putain.

Et, dans son cinquième, d’un autre qui se faisait fortement lier le gland avec une corde ; à l’autre bout de la chambre, une fille nue passait entre ses cuisses le bout de la corde et le tirait devant elle en présentant les fesses au patient ; il déchargeait ainsi.

L’historienne, véritablement excédée après sa tâche remplie, demanda permission de se retirer ; elle lui fut accordée. On polissonna quelques instants, après quoi on fut se mettre à table, mais tout se sentait encore du désordre de nos deux acteurs principaux. On fut également aussi sage aux orgies qu’il était possible que de tels libertins le fussent, et tout le monde fut au lit assez tranquille.