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Leibniz
L’Analyse des transcendantes
diffère de la géométrie de Descartes[1]
Texte établi par C.I. Gerhardt (GM5p. 278-279).


X.
NOUVELLES REMARQUES TOUCHANT L’ANALYSE DES TRANSCENDANTES, DIFFÉRENTES DE CELLES DE LA GÉOMÉTRIE DE M. DESCARTES.[1]

Il n’est pas mal-aisé à ceux qui sont versés dans l’Algébre ordinaire, de calculer par des exposans en lettres, tout comme en nombres, lorsque ces lettres ou ces nombres signifient les grandeurs connues. Mais lorsqu’elles signifient les grandeurs mêmes qu’on demande, ou qui ne sont pas déterminées, personne n’a encore montré la façon d’y calculer. Dans le second mois de la première année des Actes de Leipsic[2], je proposai cet exemple aisé, il y a déjà dix ans. Soit l’équation xx + x = 30, on demande la valeur du nombre x. Il est visible que 3 y satisfait, car 33 + 3, c’est-à-dire 27 + 3 fait 30. Mais comme il arrive souvent que la grandeur demandée n’est pas trouvable en nombres rationels, comment faire ? Je réponds qu’alors elle n’est pas même trouvable en grandeur ou nombres irrationels, qui se puissent obtenir par la Géométrie ordinaire, ou par les méthodes de la Géométrie de Mr. Descartes. Car une telle équation n’est d’aucun degré connu ; et le problème ne sçauroit être plan, ni solide, ni quarré-quarré, ni sursolide etc. Et par conséquent pas une des lignes que Mr. Descartes veut que nous croyions seules géométriques, ne le peut construire. Ainsi il faut recourir aux lignes d’une nouvelle espèce, que j’appelle transcendantes, parce qu’il n’y a point de degré qu’elles ne passent, rajouterai qu’encore les tetragonismes (excepté certain cas) dépendent de ces courbes et de ces équations transcendantes. Et Mr. Descartes a été obligé d’exclure toutes ces choses de sa Géométrie, pour maintenir ce qu’il avoit avancé, que tous les problèmes géométriques se peuvent résoudre par sa methode, ce qui n’est point. Je mettrai ici un exemple de la solution d’un tel problème par les logarithmes. Comme il est aisé, il servira à me faire mieux entendre.

Soit cx = a, b(x-1)/. , on demande x. Je réponds que ce nombre sera égal à ce qui provient, lorsque le logarithme d’a moins le log. de b est divisé par le log. de c moins le dit log. de b. En voicy le calcul. En vertu de l’équation donnée et par la nature des logarithmes il y a : x , log. c = log.a + (x — 1) log. b. Donc x, log. c - x, log. b = log. a — log. b, et par conséquent x est log. a — log. b divisé par log. c — log. b. On a rencontré de tels exemples, en raisonnant sur l’intérêt.

  1. Journal des Sçavans de l’année 1692.
  2. Siehe die Abhandlung : De vera proportione circuli ad quadratum circumscriptum in numeris rationalibus.