Le venin des vipères françaises/Chapitre 5

Librarie J. B. Baillière et Fils (p. 66-92).

CHAPITRE V

L’envenimation vipérique chez l’homme. — Pathologie.


§ 1. — Envenimation en général.

Chez l'homme, comme chez l’animal d’expérience, l’envenimation se manifeste par des symptômes locaux, c’est-à-dire qui débutent au lieu même de la morsure et irradient à partir de ce point, et par des symptômes généraux d’intoxication.

Nous étudions dans ce chapitre la symptomatologie de l’envenimation vipérique et nous superposons, dans la mesure du possible, les faits cliniques aux résultats que nous ont fournis la physiologie et l'anatomie pathologique. Nous considérons d’abord la lésion locale créée par le principe isolé par Phisalix et par lui désigné sous le nom d’échidnase, puis les phénomènes généraux relevant du principe qui agit particulièrement sur le système nerveux, autrement dit de l'échidnotoxine de Phisalix. Comme dans le chapitre précédent et pour les mêmes raisons, nous étudions à part les faits de congestions et d’hémorragies viscérales. Efin nous considérons la marche de la maladie, ce qui nous amène à dire quelques mots de l'envenimation chronique et du mécanisme de la mort dans les cas où la terminaison a été fatale.

§ 2. — Lésions locales (Échidnase).

Elles consistent tout d’abord en la lésion même créée par le fait de la morsure, celle-ci étant plus ou moins profonde, de siège variable, plus ou moins douloureuse et suivie d'un écoulement sanguin plus ou moins abondant. Ensuite survient une tuméfaction, créée par un œdème d’allure spéciale, qui s’accompagne d’une douleur produite par la distension des téguments, d’une sensation d’engourdissement et de refroidissement du membre blessé, de phénomènes hémorragiques et dans certains cas de phlyctènes.

Si nous considérons nos observations nous voyons que la morsure siège le plus souvent aux doigts (obs. I, II, V, VI, VII, X, XIV, XV, XIX, XX, XXVIII, XXXII, XXXV), ou dans les plis interdigitaux (obs. XII, XVII, XXVII, XXXVI), sur la main (obs. IV, XVI, XXIV, XXV). Plus rarement, elle siège au pied, au niveau des malléoles ou de la partie inférieure de la jambe (obs. III, VIII, IX, XVIII, XX, XXI, XXX, XXXI, XXXIV).

Exceptionnellement, et à la suite de circonstances toutes particulières, nous la voyons siéger à la poitrine, au-dessus du sein gauche [obs. XXIII), au front (obs. XXVI), au ventre (obs. XXIX), ou avoir deux sièges différents, le reptile mordant une première fois, puis réitérant sa morsure au moment où le blessé cherche à le saisir pour s’en débarrasser (obs. XI).

Il se peut qu’il n’y ait qu’un seul crochet qui pénètre (obs. I, XIV XXV) ; dans d’autres cas ils Pénètrent tous les deux, et parfois si profondément que la vipère ne peut lâcher prise et que le blessé est obligé de l’arracher (obs. I, XVII).

La douleur consécutive à la blessure est d’intensité variable, tantôt à peine perçue (obs. II, XIV), comparable à une piqûre d’épingle (obs. XV) ; d’autres fois elle est très douloureuse (obs. XII, XXIX), pouvant même provoquer l’évanouissement immédiat (obs. XXXV).

L’écoulement sanguin consécutif à la morsure est très minime, dans toutes les observations où il est signalé. Il peut même faire défaut (obs. II).

Le premier symptôme local, consécutif à la piqûre, consiste dans un gonflement qui débute autour de celle-ci par une auréole violacée pour s’étendre de proche en proche à une portion plus ou moins grande du membre blessé, pouvant même envahir le tronc. Dans ce cas il a tendance à ne pas dépasser la ligne médiane et à rester localisé au côté qui répond à la partie lésée. Cependant cette tendance n’est pas absolue et dans les cas très graves le gonflement peut être généralisé (obs. XXI, XXIII). Par contre il peut être très peu étendu (obs. II, XIV).

La marche de cette tuméfaction œdémateuse est très intéressante à considérer. Comme c’est un phénomène qui frappe, et qui effraie par son mode d’extension, il est généralement bien décrit dans les observations. L’analyse de quelques-unes donnera mieux qu’une description une idée de sa marche.

Observation I. — (Homme de 25 ans mordu au pouce de la main droite) ;

1er jour. — L’œdème envahit le doigt et la main.

2e jour. — L’œdème envahit le bras, l’épaule, l’aisselle, la mamelle et la région hépatique.

3e jour. — L’œdème semble vouloir gagner le côté gauche.

4e jour. — L’œdème tend à rétrocéder, disparaissant au foie, à la mamelle et à l’aisselle,

5e jour. — L’épaule est désenflée.

6e jour. — Les parties atteintes sont revenues à l’état normal.

Observation XIII. — (Homme, 30 ans, mordu à l’index de la main droite) :

1er jour. — 3 heures ½ après la morsure, l’avant-bras commence à se tuméfier.

4e jour. — L’œdème a envahi tout le bras, jusqu’à l’épaule.

5e jour. — Il s’étend au tronc.

7e jour. — Diminution.

9e jour. — La tuméfaction du membre est presque nulle.

Observation XV. — (Femme, 29 ans, mordue à l’index droit) :

1er jour. — La main est enflée.

2e jour. — Extension de l’œdème à l’avant-bras, au bras et à l’épaule.

3e jour. — Il atteint la partie droite de la poitrine et du dos.

4e jour. — S’étend au ventre et aux reins, mais reste limité à la partie droite.

5e jour. — État stationnaire ; l'œdème est un peu moins dur.

7e jour. — Diminution du gonflement au niveau du sein et de l’épaule.

9e jour. — Épaule et poitrine revenues à leur état normal ; œdème très mou au niveau de la main et de l’avant-bras.

14e jour. — L’avant-bras est complètement désenflé.

Observation XVI. — (Enfant, 13 ans, mordu à la main droite) :

1er jour. — Une heure après l’accident, œdème considérable de toute la main et de l’avant-bras, 6 heures ½ après, l’œdème, blanc verdâtre, a gagné l’épaule.

2e jour. — Pendant la nuit, il a envahi la région pectorale, jusqu'au-dessus du sein droit, et la région axillaire.

4e jour. — La coloration brune de l’œdème pâlit et il rétrocède à partir de l’épaule : la pression ne détermine plus de godet sur la région pectorale.

6e jour. — L’œdème continue à diminuer : mouvements du coude et du poignet plus faciles.

7e jour. — La main, seule, est enflée.

14e jour. — Tout œdème a disparu, mais la main est encore lourde.

Observation XVII. — (Homme, mordu à la main droite entre le pouce et l’index).

1er jour. — 4 heures ½ après l’accident, la main est considérablement tuméfiée, de couleur livide et le gonflement remonte jusqu’au ⅓ supérieur de l’avant-bras.

2e jour. — Extension de l'œdème aux ⅔ inférieurs du bras, atteignant le soir le moignon de l'épaule et débordant un peu sur le thorax (7 heures ½) ; à 8 heures ½, il a envahi le cou et la moitié droite du thorax.

4e jour. — L’œdème tend à s’affaisser un [peu, mais s’étend sur le côté gauche du thorax et vers la partie inférieure du tronc notamment sur les parties latérales.

5e jour. — Il descend sur les flancs jusqu’à la crête iliaque ; il a atteint son apogée et sa localisation est décrite avec beaucoup de détails dans l’observation,

6e jour. — Même état.

7e jour. — Il tend à rétrocéder.

10e jour. — Le bras est encore tuméfié.

19e jour, — Le bras a repris son aspect normal.

Observation XXI. — (Femme, 61 ans, mordue au bas de la jambe gauche) :

1er jour. — 5 heures après l’accident la cuisse est envahie par l'œdème.

2e jour. — L’œdème est généralisé : le membre gauche énorme.

3e jour. — L’œdème est tellement étendu que la malade ne peut soulever les paupières : Mort.

Observation XXII. — (Enfant, 6 ans) :

1erjour. — Dans l’après-dîner, l’œdème est généralisé : Mort.

Observation XXIII. — (Homme, 47 ans, mordu au-dessus du sein gauche :

1er jour. — Après 12 heures, mort avec engorgement œdémateux généralisé.

L'œdème ne reste pas toujours limité au tissu cellulaire sous-cutané. Il peut envahir les tissus sous-muqueux et s’étendre à la glotte. Nous le voyons envahir les lèvres (obs. I), la langue (obs. IV et V). L’accès de dyspnée intense, qui survient la nuit du second jour chez le malade de l’observation XIX, concordant avec l’envahissement du cou par l’œdème, pourrait bien être dû à l’œdème de la glotte.

Cet œdème est douloureux et gène les mouvements, par la distension qu’il provoque dans les tissus. La douleur est de caractère variable ; tantôt les malades n’accusent qu’une sensation d’engourdissement (obs. II, III, XII, XIV, XVI, XVII) ou de fourmillements (obs. XIII). Elle est exagérée par la pression et les mouvements imprimés au membre. Dans d’antres cas elle est très vive (obs. VIII), lancinante, ou encore le malade présente une hyperesthésie très douloureuse des téguments (obs. IX, XVI, XXI, XXVI). Des cautérisations de la plaie, au fer rougi à blanc, après large débridement, l’auraient fait disparaître presque Instantanément (obs. VIII et IX). Cette douleur accompagne l’œdème, apparaissant et rétrocédant avec lui.

Les taches ecchymotiques et les lividités accompagnent l’œdème, mais elles apparaissent un peu plus tardivement. Elles sont de couleur rouge, violacée par places, violette le soir, et siègent principalement dans les parties déclives (obs. II).

Quatre jours après la morsure, le membre inférieur présente un aspect ecchymotique couleur lie de vin, le membre supérieur, également mordu, présente des ecchymoses, surtout à sa partie interne (obs. XI) ; des taches violacées apparaissent au 2e jour particulièrement à la partie postéro-interne du bras [obs. XII) ; au 4e jour, tout le membre supérieur droit et une partie du thorax du même côté sont tuméfiés et violacés (obs. XIII). La teinte rouge livide (le l'œdème, s’effaçant peu à peu au 14e jour, est signalée (obs. XVII), ou encore la teinte jaune verdâtre de la peau de la jambe plus marquée à la cuisse où la lividité prend l’aspect de marbrures (obs. XXI). Signalées dans nombre d’autres observations (obs. XX, XXIV, XXXII, XXXV), les taches ecchymotiques apparaissent parfois très rapidement (obs. XXIII).

Les phlyctènes sont moins fréquentes ; nous les trouvons cependant signalées dans quelques observations. Elles apparaissent au 3e jour au nombre de deux ou trois sur la face antérieure du membre ; elles sont assez nombreuses au 4e jour sur le bras et l’avant-bras et il en existe quelques-uns sur le tronc (obs. XIII). Au 2e jour trois phlyctènes brunâtres de 2 centimètres de large, apparaissent sur la paume de la main et le poignet pour s’affaisser au 6e jour (obs. XVI) ; quelques petites phlyctènes sur la main apparaissent le jour même de l’accident (obs. XVII), sur l’index, autour de la plaie, au 2e jour, séchant au 8e jour pour disparaître au 13{{e|e} (obs. XV). Au 2e jour le membre mordu est couvert de phlyctènes (obs. XXI). La main, l’avant-bras et toute la partie antérieure de la poitrine, qui sont tuméfiés, sont également couverts de phlyctènes (obs. XXIV).

L'eschare, consécutive à la piqûre, n’est signalée que dans une observation, et dans ce cas elle ne se détache qu’un mois ; après l’accident, à la dernière phalange du doigt et à la partie mordue (obs. XXXII). Il est probable qu’elle n’est pas signalée plus souvent parce que les médecins n’ont pas observé sa chute qui est trop tardive, ou parce que dans certains cas, les parties mordues ont été modifiées par les topiques et les traitements locaux.

L'hypothermie du membre blessé est signalée (obs. XII et XVI). Dans l’observation XIV, il survient au 5e jour dans le doigt piqué et dans la région métacarpienne correspondante de la démangeaison qui persiste au 6e, au 7e et au 8e jour encore à la phalange piquée. De même le blessé de l’observation XVII présente sur les parties qui ont été le siège de l’œdème un prurit marqué, apparaissant au 14e jour et persistant encore au 19e époque à laquelle on constate une desquamation fine de la peau.

L’angioleucite et rengorgement ganglionnaire sont signalés dans quelques observations. Les ganglions lymphatiques de l’aisselle droite sont indurés et douloureux à la pression (obs. VII). Le soir de l’accident, on constate de la rougeur et de la douleur au niveau du ganglion épitrochléen et, à partir de ce ganglion, une traînée lymphatique jusqu’à l’aisselle (obs. XV) alors qu’à ce moment la main seule est enflée. Dans la même observation, au 14e jour, alors que l’avant-bras est désenflé, il reste encore un peu de dureté à la partie interne du bras. Il semble, dans ce cas du moins, qu’il s’agit d’une inflammation indépendante de l’action du venin et en effet, la dent de la vipère ne crée pas toujours une plaie aseptique. C’est ainsi que Viaud-Grand-Marais signale le développement d’abcès autour des crochets, relevant certainement d’une infection indépendante de l’action du venin.

Le phénomène le plus considérable dans la lésion locale, consiste dans l'apparition et l’extension de l'œdème. Cet œdème présente des caractères spéciaux. Romiti a trouvé dans l’autopsie qu’il a pratiquée, alors même que l'œdème avait eu très peu de temps pour évoluer, le tissu cellulaire infiltré d’une sérosité sanguinolente très fluide ; cette sérosité avait envahi également les muscles sous-jacents.

Le docteur Roché (obs. XIII) attire l’attention sur le liquide qui s’échappe des incisions pratiquées sur son malade et écrit : « Mais ce que je tiens à signaler, ce que je n’ai lu nulle part dans les nombreuses observations que j’ai compulsées, c’est cet écoulement jaune safrané qui a eu lieu sans ictère dans aucun point du corps par les scarifications que j’avais pratiquées. » 

De même, des mouchetures pratiquées dans le cou, il sort de la sérosité rougeâtre (obs. XXVI) ; il se produit un écoulement séreux jaunâtre très abondant par l’incision pratiquée la veille (obs. XXVII).

L’œdème, par la consistance de son liquide, est donc très particulier. Sa coloration peut être expliquée par la présence des principes colorants du sang modifiés par l’action de l’échidnase, mais ce n’est là qu’une hypothèse.

§ 3. — Phénomènes généraux résultant de l’action du venin sur le système nerveux, et sur le rein (échidnotoxine).

A. — Troubles de la sensibilité et de la motilité.

L’action exercée par le venin sur la sensibilité en général et signalée par Kaufmann chez les animaux en expérience, consistant en une tendance à la torpeur et à l’ assoupissement, ne se rencontre guère dans nos observations. La tendance à la somnolence est cependant signalée dans l'observation XIV et le malade de l’observation XI, après avoir perdu connaissance et être revenu à lui, est comme paralysé et ne peut que se traîner par terre en rampant. Dans la plupart des cas, les malades gardent leur intelligence. Toutefois l'agitation et le délire sont mentionnés dans quelques observations (obs. IV, VIII, XII, XVI, XXV, XXVI, XXVII).

Par contre tandis que chez les animaux en expérience, les nausées étaient à peine esquissées, elles prennent chez l'homme une importance considérable. Les symptômes gastro-intestinaux consistant en nausées, vomissements, coliques, douleur épigastrique et selles, parfois involontaires, sont signalés dans la plupart des observations. Les nausées surviennent parfois très peu de temps après la morsure : moins d’un demi-quart d’heure (obs. I) ; dans les 20 minutes qui suivent l’accident (obs. XIII), trois quarts d’heure après (obs. XXIII), de une heure à une heure et demie après (obs. XII et XV). Les vomissements cessent assez rapidement et parfois ne durent que quelques heures (obs. II, XIII, XV, XXIII), mais ils peuvent, dans les cas graves, persister plusieurs jours (obs. XXVI, XXYII). La diarrhée apparaît à peu près en même temps (obs. VIII, IX, XI, XVII) et est, elle aussi, parfois persistante (obs. XXVI).

Viaud-Grand-Marais (ind. bibl. 6) attribue ces phénomènes gastro-intestinaux à l'élimination du principe toxique, par les voies digestives.

L’action du venin sur le système moteur se traduit dans certains cas par des mouvements convulsifs. Le malade présente des mouvements convulsifs et des roidissements de tout le corps, surtout du cou et des muscles de la tête (obs. I); il est pris de mouvements convulsifs inconscients dans l’une des jambes (obs. II). Quelques convulsions surviennent au 3e jour, spécialement aux muscles du visage (obs. XII) ; un accès de rire convulsif durant une heure et demie s’observe chez l'enfant de l’observation XVI.

B. — Perturbation dans la pression sanguine et troubles circulatoires.

La dépression de la tension artérielle existe chez l'homme envenimé comme chez l’animal. Les lipothymies, les défaillances, les syncopes sont très fréquentes. Elles surviennent presque immédiatement après l'accident, quelques minutes après (obs. I, X, XI, XVI), durant quelques minutes (obs. XVI), une heure au moins (obs. XI). La dépression sanguine est donc aussi rapide que dans l'envenimation expérimentale. L'état syncopal lui-même peut durer plusieurs jours ; nous voyons la tendance aux lipothymies persistante au 3e jour (obs. XII) ; les syncopes peuvent devenir très rapprochées et déterminer la mort (obs. XIX).

Le pouls est petit, misérable, accéléré (obs. I, VIII, IX, X, XI, XIII, XVII, XXI). Dans une seule de nos observations il est très ralenti, tombant à 24 pulsations par minute (obs. IV).

C. — Ralentissement des Combustions interstitielles.

Il ne se manifeste pathologiquement que par l’hypothermie qui résulte aussi pour une part des vaso-dilatations. Les sueurs froides et les frissons sont constatés souvent (obs. I, IX, X, XIII, XVII, XXI, XXIII, XXVI, XXVII). La malade de l’observation XX présente pendant cinq jours consécutifs une température = 36°2 matin et soir. Il est probable que si on recherchait la température à l’aide du thermomètre, on la constaterait plus souvent.

Chez l’homme, l’intoxication des centres nerveux bulbomédullaires, se traduit aussi par la dyspnée, indépendante de celle que peuvent créer l’œdème de la glotte ou les phénomènes congestifs du côté des poumons. Elle apparaît de bonne heure, dans les six heures qui suivent l’accident, se calmant au second jour (obs. XVI) ; on la rencontre cinq[ heures après la morsure, persistant encore le lendemain dans l’observation XXI où la mort survient au troisième jour.

D. — Lésions produites par l’échidnotoxine en dehors des centres nerveux.

Ces lésions si marquées, que l’anatomie pathologique nous montre dans les cellules du foie et du rein, se traduisent pathologiquement, chez l’homme du moins, en ce qui concerne le rein. C’est ainsi que l’anurie ou l’oligurie au cours de l’intoxication sont signalées (obs. XIII, XV, XVI), de l’analyse décèle 20 centigrammes d’albumine pour 1000 d’urine dans le cas de l’observation XVII et des traces d’alumine persistant encore au huitième jour.

En ce qui concerne le foie, nos observations sont muettes. Toutefois nous devons dire que Viaud-Grand-Marais a observé l’ictère survenant au cours de l’envenimation vipérique (ind. bibl. G).

§ 4. — Congestions et hémorragies viscérales.

Ces phénomènes ont également leur traduction pathologique. C’est ainsi qu’on observe peu de temps après la morsure l’hématémèse et le mélœna (obs. X), des vomissements d’abord alimentaires, puis glaireux et striés de sang au quatrième jour (obs. XII) des urines rouges au quatrième jour (obs. XIII) ; l’urine contient de nombreux globules sanguins au troisième jour, au quatrième le malade a une selle noirâtre peu abondante et liquide ; il a de l’épistaxis le matin et dans la nuit du cinquième jour (obs. XVII) dans d’autres cas, nous voyons une hémorragie assez abondante du côté de l’intestin et de la vessie précéder la mort (obs. XXI) ou encore des urines sanguinolentes (obs. XXVI)

Les pbénomènes de congestion du côté du poumon sont aussi révélés i>ar la symptomatologie,

La malade de l’observation XII est prise au deuxième jour d’une toux opiniâtre, sans expectoration qui ne cesse qu’au quatrième jour. Le malade de l’observation XA’II commence à tousser et à craclicr un ])eu le sixième jour de l’intoxication. Au liuitièmc jour ses crachats sont constitués par un mélange de mucosités et de sang noir, cette expectoration rétrocédant après le neuvième jour.

L’enfant de l’observation XX présente, au septième jour, de la congestion pulmonaire à droite et en bas persistant encore au neuvième jour. Dans les observations XVII et XX la fièvre accompagne d’ailleurs l’évolution des symptômes pulmonaires. Il faut, pour l’expliquer, faire intervenir une légère infection favorisée par la congestion.

§ 5. — Marche de la maladie.

Dans la grande majorité des cas, la terminaison de l’envenimation vipérique est favorable. Aux symptômes d’intoxication générale succèdent les phénomènes de réaction. Le poids redevient plus fort, la froideur est remplacée par la chaleur naturelle, cela 4 heures après la morsure (obs. I) ; le pouls remonte le lendemain matin (obs. IV) : neuf heures après l’accident la peau s’est réchauffée et le pouls est moins faible et moins accéléré (obs. XIII). Le pouls peut d’ailleurs remonter alors que d’autres symptômes d’intoxication persistent. Il peut aussi retomber après s’être remonté (obs. XVII). Dans certains cas la terminaison se fait par crises. Les sueurs profuses apparaissent (obs. III). La réaction se produit au bout d’un temps très variable et parfois elle est assez lente à se produire. C’est ainsi que la sudation copieuse accompagnée de moiteur (après absorption de jaborandi) n’apparaît qu’au quatrième jour (obs. XII). Les symptômes d’adynamie ne disparaissent que lentement et au quinzième jour le blessé se tient à peine assis ; trois mois et demi après l’accident il est encore dans un état de faiblesse considérable (obs. XI).

Les auteurs signalent l’apparition de la fièvre à la fin de l’intoxication et traduisant la réaction favorable de l’organisme. Le malade ne présente aucun symptôme d’intoxication générale, mais le soir de l’accident il présente de la fièvre qui persiste encore le lendemain (obs. VII). Le malade de l’observation XXXII présente de la fièvre pendant plusieurs jours alors même que les accidents toxiques ont disparu dans les 24 heures. Nous voyons la fièvre apparaître le soir du quatrième jour (obs. XVII) T = 37°7, le soir du sixième jour T = 37°6, le soir du huitième jour T = 38°3, mais ici elle concorde avec l’apparition de symptômes pulmonaires. Il en est de même dans l’observation XX.

Dans l’observation XV à une température de 36°2 se maintenant pendant les cinq premiers jours succède le soir du sixième jour une température = 37°7, atteignant 38° le soir du septième jour redevenant normale au huitième jour. Mais dans cette observation il y a des phénomènes d’angioleucite et de gonflement ganglionnaire dus à une infection surajoutée.

La réaction de l’organisme peut aussi ne pas se produire on n’être pas assez intense. Dans ces cas les malades succombent à l’intoxication. Viaud-Grand-Marais distingue les cas d’envenimation suraigüe, cas dans lesquels la vie ne persiste que quelques heures et les cas d'envenimation aiguë dans lesquels la mort survient dans un délai variant de 12 heures quelques jours. Nous rapportons quatre cas d’envenimation suraiguë : garçon de six ans, mort dans le coma, le jour même de l’accident (obs. XXII] ; homme de 47, ans, mort 12 heures après la morsure, après refroidissement des extrémités et hémorragies par l’intestin et la vessie (obs. XXIII) ; garçon de 9 ans, mordu au ventre, mort 3 heures après la morsure (obs. XXIV) ; fille de onze ans, morte 2 heures après l’accident (os. XXX).

Sur sept cas d’envenimation aiguë par nous rapportés, nous voyons la mort survenir trois fois au troisième jour, chez une femme de 61 ans (obs. XXII), un garçon de 9 ans (obs. XXVII) et un autre de 10 ans (obs. XXXI) ; une fois au quatrième jour chez un garçon de 12 ans (obs. XXVI), une fois au cinquième jour, chez un homme de 60 ans (obs. XXVIII) ; une fois au septième jour, chez un garçon de 7 ans (obs. XXV) ; une fois au huitième, chez une fille de 11 ans (obs. XXIV).

§ 6. — Mécanisms de la mort.

La mort survient après que la malade a présenté de la dyspnée toxique, des lipothymies et des syncopes de plus en plus fréquentes (obs. XXI) ; la malade meurt au huitième jour faisant les plus grands efforts pour respirer sans y parvenir : elle est asphyxiée (obs. XXIV). Notons que dans ces cas il existe de l’œdème considérable de la partie antérieure de la poitrine.

Un enfant meurt au septième jour, par asphyxie, après avoir présenté cependant une amélioration notable de l’état général, mais non de l’œdème qui avait dépassé la ligne médiane du corps et envahi toute la partie gauche de la poitrine (obs. XXV). Au contraire, un autre enfant meurt le matin du quatrième jour présentant de l’absence du pouls et une grande prostration. L’œdème considérable de la ligure et du cou avait déjà notablement rétrocédé au moment de la mort (obs. XXVI). L’enfant de l’observation XXVII meurt au troisième jour, avec des sueurs visqueuses, un pouls petit, serré, filiforme, souvent imperceptible, environ 160 ; la respiration est à 30. Le gonflement fait tout le tour du thorax. Le malade de l’observation XVIII, homme de 60 ans, meurt le lendemain matin dans un coma profond. Un jeune garçon (obs. XXXI), meurt le surlendemain de sa morsure, par asphyxie.

Nous voyons donc la mort survenir par syncope, par asphyxie ou dans le coma. Si la syncope et le coma indiquent bien l'action d’une substance toxique sur le système nerveux il n’en est pas toujours de même de l’asphyxie. Celle-ci peut, en effet, relever d’une dyspnée toxique mais elle peut aussi, surtout dans les cas où elle est tardive, relever des causes mécaniques telles que l’œdème de la de la glotte ou les phénomènes de congestion du côté du poumon.

Si nous considérons dans les observations XXIV et XXV, d’une part, l’intensité des phénomènes locaux, d’autre part, la date relativement tardive de la mort ; nous sommes embarrassés pour expliquer sa cause, surtout si nous remarquons que dans l’observation XXV celle-ci survient après plusieurs jours d’amendement dans les symptômes généraux.

Nous savons que Kaufmann pense que, dans la majorité des cas, la mort est la conséquence des altérations locales produites par le venin. M. de Boismarmin commentant son observation (obs. XXVI) émet une hypothèse à peu près analogue : « De l’observation de ces faits, écrit-il, je crois devoir conclure qu’après le départ du venin dans la piqûre, une partie du venin entre dans la pour produire les effets généraux qu'on observe, qu’une autre partie se diffuse de proche eu proche et détermine l’œdème voisin de la piqûre. La sérosité venimeuse de l’œdème est reprise par la circulation plus tard et peut déterminer la mort chez des individus qui ont résisté aux accidents primitifs. Dans nos pays tempérés où la mort ne survient qu'au bout de plusieurs heures, de huit jours même parfois, c’est de cette façon qu’elle arrive. »  Autrement dit, meurt-on par l’action de l’échidnotoxine ou par celle de l’échidnase ou plutôt quelle est la part relative que prennent ces deux principes dans la production de la mort, telle est la question que nous pouvons poser sans pouvoir la résoudre d’une manière satisfaisante. Il est certain que l’échidnotoxine suffit à amener la mort. L’expérimentation l’a montré, la pathologie confirme ces résultats en montrant que la mort peut être précoce et due à des syncopes ou à une dyspnée toxique précoce, Mais la pathologie ne montre pas si l’échidnase, si la lésion locale est capable de produire la mort par action toxique indépendante de l’action mécanique. L’expérimentation pourrait peut-être donner la solution du problème.

§ 7. — Envenimation chronique.

L’envenimation vipérique peut se terminer autrement que par la guérison ou par la mort survenant dans un délai assez rapproché. Viaud-Grand-Marais décrit en effet l’echidnisme chronique, qui peut durer plusieurs mois et est toujours consécutif à une envenimation aiguë. (Ind. bibl. 5 et 6.) « La guérison est incomplète, écrit cet auteur, et l’on voit apparaître des symptômes tertiaires : les uns de moindre importance sont dits périodiques ou à répétition et consistent dans le retour, pendant plusieurs années, à l’époque de la morsure, du gonflement et de la douleur du membre et des phénomènes gastriques ; les autres appelés cachectiques constituent l’échidnisme chronique et correspondent à une altération persistante et profonde du sang. Ils apparaissent parfois dès la convalescence. Le blessé reste alors valétudinaire et continue à décliner. D’autres fois il y a une rémission : il s’est cru guéri et a repris ses habitudes, quand, sans cause apparente, il voit toutes ses fonctions s’affaiblir. Sa température s’abaisse, il est engourdi et somnolent : ses digestions sont lentes, ses gencives fongueuses ; sa peau est subictérique. Les hommes faits vieillissent prématurément, les enfants sont arrêtés dans leur développement. Le sang de ces cachectiques recueilli à la suite d’hémorragies ressemble à celui des veines sus-hépatiques et ne se coagule qu’imparfaitement.

« D’autres envenimés, après une guérison apparente de 18 mois à deux ans, meurent subitement, frappés d’accidents cérébraux, sans qu’aucune autopsie ait encore dévoilé la lésion à laquelle ils succombent. » 

Nous rapportons quelques observations d’accidents à répétition consécutifs à l’envenimation vipérique (obs. XXXII, XXXIII), d’accidents chroniques (obs. XXXVI) et d’accidents mortels à longue échéance (obs. XXXIV, XXXV). Nous pouvons y ajouter d’autres faits enregistrés par Viaud-Grand-Marais( Ind. bibl. 8.).

« Une jeune fille, soignée à l’hospice général de Nantes par le docteur Deluen, alors interne, présentait tous les ans, à l’époque de sa morsure, une éruption de taches livides sur le membre blessé.

« Jean Coulommier, de Boussay, âgé de 18 ans, fut mordu par une vipère en 1831. Il se met entre les mains d’un conjureur aux remèdes duquel il attribua sa guérison, et depuis lors il jouit d’une bonne santé ; mais chaque année au jour anniversaire de sa blessure, il ressent un malaise général ; sa jambe enfle et il s’y forme parfois des plaies. »  

La plus belle de ces observations est celle du docteur Demeurat de Tournan (ind. bibl. I) où la malade, piquée le 28 mai 1824, éprouve chaque année à la même époque de l’anxiété, des nausées, de la céphalalgie, puis voit apparaître au bout de 6 à 8 jours des bulles de pemphigus au lieu de sa blessure. Avant sa rencontre avec le serpent elle n’avait rien ressenti de semblable.

Nous n’insistons pas sur ces faits, mais nous remarquons que la régularité dans le retour des accidents, leur périodicité réglée pour ainsi dire mathématiquement permettent de soupçonner qu’il s’agit là de phénomènes d’autosuggestion ou d’hystéro-traumatisme. Notre observation XXXVI, dans laquelle est relatée une (paralysie du membre et du côté correspondant à la morsure, peut être expliquée de la même façon. Toutefois, nous savons aussi que le venin peut créer des névrites et des lésions des centres nerveux soit en attaquant le neurone lui-même, soit en provoquant des hémorragies surtout chez un sujet prédisposé. Quant à notre observation XXXV, relative à un homme mort GO jours après avoir été mordu, nous avouons qu’elle est très peu probante.

Nous n’entendons pas, par ces remarques, nier existance de l'échidnisme chronique et nous pensons qu’un poison aussi actif que le venin peut dans certains cas imprimer des modifications assez notables dans la nutrition générale de l’organisme, mais nous pensons aussi que les faits de ce genre déjà relativement rares doivent être encore diminués d’importance si l’on en retranche tous ceux qui peuvent relever d’une autre cause.

§ 8. — Pronostic.

La mortalité consécutive à la morsure par vipère est de 1 pour 100 d’après Fontana.

Viaud-Grand-Marais donne le chiffre de 4 pour 100 concernant la vipère aspis de Vendée, la mortalité due à la péliade étant inférieure. Fredet, en Auvergne, a relaté 6 fois la mort sur 140 observations. Les conditions qui peuvent faire varier le pronostic sont déterminées par Viaud-Grand-Marais. Elles dépendent : 1o du serpent, 2o du blessé.

1o Conditions dépendant du reptile. Ce sont :

a) L’espèce. La vipère aspis est plus dangereuse que la vipère peliade parce qu’elle dispose d’une plus grande quantité de venin ;

b) L’âge, la grosseur, la force et l’état d’excitation du reptile ;

c) La dépense plus ou moins récente de venin faite par le serpent. Ce dernier est d’autant plus à craindre qu’il y a plus de temps qu’il a mordu ; cela non seulement parce qu’il dispose de plus de venin, mais aussi parce que le jeûne augmente la toxicité du venin (obs. XIV) ; d) Les conditions dépendant de la localité. Nous savons que la composition du venin peut varier selon les régions et aussi selon l’époque de l’année ;

e) La profondeur et la durée de la morsure. Les éraillures qui ne font qu'effleurer le derme sont sans gravité.

f} Le nombre des piqûres.

2° Conditions dépendant du blessé. Ce sont ;

a) Le poids ; le venin ressemble en cela à tous les poisons ;

b] L'âge ; les enfants résistent moins bien que les adultes et les vieillards même, si l’on tient bien compte de la différence du poids ; l'absorption est, d’une manière générale, plus active chez l'enfant, ralentie chez le vieillard.

Considérées au point de vue des relations entre l’âge et la mortalité, dans les cas d’échidnisme aigu, nos observations donnent les résultats suivants :

Âge Nb. de cas Cas mortels Mortalité %
6 à 11 ans 8 8 100 %
12 ans 2 1 50 %
13 à 55 ans 18 1 5 %
Plus de 60 ans 2 2 100 %
Texte 1 0 0 %

Ces chiffres auxquels nous n’accordons pas une grande valeur statistique, étant donné le nombre relativement restreint de nos observations, étant donné aussi que la littérature médicale ne consigne que les cas ayant présenté quelque gravité, sont cependant assez suggestifs au point de vue de la mortalité chez les enfants et les vieillards.

Les observations concernant les enfants se décomposent comme il suit :

Enfant de 6 ans, mort (obs. XXII) ; enfant de 7 ans, mort (obs. XXV) ; enfants de 9 ans, 2 cas mortels (obs. XXVII et XXVIV) ; enfant de 10 ans, mort (obs. XXXI) ; enfants de 11 ans, 2 cas mortels (obs. XXIV et XXX); enfants de 12 ans, 2 cas dont 1 mortel (obs. XXVI) et 1 guérison (obs. XX), ce dernier traité par le sérum anti Yenimeux.

Les observations relatives à des personnes âgées sont les suivantes :

Homme de 60 ans, mordu per Vipera aspis, mort (obs. XXVII) ; femme de 61 ans (Vipera aspis), mort (obs. XXI) ; homme, 78 ans (Pelias), guérison (obs. II).

c) Les crises physiologiques ; l’époque des règles et la grossesse constituent des conditions fâcheuses, mais n’impliquent pas nécessairement un dénouement fatal ; cette dernière n’est pas une cause absolue d’avortement (obs. III).

d) L'état de résistance du sujet ; pour résister à l’envenimation comme à toute infection, il importe d’avoir des organes aen bon état, principalement ceux qui sont plus particulièrement frappés par l’intoxication où qui servent soit à l'élimination, soit à la transformation du poison.

e) L'état de l'estomac et de ses fonctions : Viaud-Grand- Marais a remarqué que les animaux qui vomissent ont plus de chances de résister ; pour lui, une partie du venin s’élimine par les voies digestives.

f) L'impressionnabilité : la peur peut déterminer une syncope mortelle ; l’affaissement moral diminue les moyens de résistance de l'organisme.

g) Les parties atteintes : Viaud-Grand-Marais prétend que les piqûres des membres sont plus graves. Kaufmann nous à appris également que la gravité de l'intoxication chez les animaux d'expérience varie selon la région mordue.

Considérées au point de vue de l'influence de la localisation de la morsure, nos observations donnent les résultats suivants :

Lieu mordu Nb. de cas Cas mortels Mortalité %
Doigts 11 1 9 %
Ples interdigitaux 3 1 33 %
Main 4 2 50 %
Pied, malléole, jambe 8 3 36 %
Sein, front, ventre 3 3 100 %

Les morsures des doigts sont peut-être les plus bénignes parce qu'il est plus facile d'en exprimer le venin par pression ou par succion.

h) La protection de la région lésée : les vêtements empêchent la pénétration des dents du reptile et essuient en outre une partie du venin.

i) L’envenimation antérieure : Viaud-Grand-Marais prétend qu’elle ne préserve pas d’une nouvelle envenimation. Ce point est discutable et rentre dans la question de l'immunité acquise. Or nous savons que beaucoup de régions possèdent leurs chasseurs de vipères et que quelques-uns d’entre eux jouissent d’une immunité qu’ils entretiennent en se faisant mordre de temps en temps par ces animaux. Toutefois, comme il s’agit là d’un cas particulier et que la durée de cette immunité acquise peut être très courte, l'opinion de Viaud-Grand-Marais reste la vraie en fait.

Enfin nous devons ajouter que le traitement peut singulièrement modifier le pronostic et nous pouvons affirmer qu'une intoxication consécutive à la morsure de nos vipères françaises doit toujours se terminer par la guérison si l’on intervient à temps et dans de bonnes conditions. Les statistiques de Fontana, de Viaud-Grand-Marais et de Fredet au point de vue de la mortalité n’ont plus aujourd'hui qu'un intérêt historique. Nous sommes en effet en possession d’agents chimiques destructeurs de venin et nous pouvons augmenter la résistance de l'organisme à l'intoxication. C’est ce que nous allons montrer dans les chapitres suivants.

INDEX BIBLIOGRAPHIQUE


1. Demeurat (L.). – Observation d’accidents développés à la suite d’une morsure de vipère et se reproduisant depuis 39 ans d’une manière parfaitement périodique. (Gazette hebdomadaire de médecine. Paris, 1863, p. 736.)

2. Viaud-Grand-Marais. – De la létalité dans la morsure des vipères. (Gazette des hôpitaux. Paris, 1868 ; no 62, p. 245 ; no 65, p. 258.)

3. Viaud-Grand-Marais. – Description de la maladie produite par l’inoculation du venin de la vipère. (Gazette des hôpitaux. Paris, 1869 ; no 48, p. 186 ; no 54, p. 210.)

4. Fredet. – Considérations sur la morsure de vipère en Auvergne. (Association française pour l’avancement des sciences. Paris, 1877 ; p. 817-827. — Union médicale. Paris, 1878 ; no 25, p. 74-85.)

5. Viaud-Grand-Marais. – L’envenimation ophidienne, étudiée dans les différents groupes de serpents.(Gazette des hôpitaux. Paris, 1880 ; no 118, p. 942, et 129, p. 1029.)

6. Viaud-Grand-Marais. – Serpents venimeux. (Dictionnaire encyclopédique des sciences médicales. Paris, 1881 ; 3 s. t. 19, p. 387-417.)

7. Achalme (P.). – L’envenimation par les morsures de serpents. (Abstr). (Gazette hebdomadaire de médecine. Paris, 1896 ; t. 43, p. 469-475.)