Le premier livre des Sonnets pour Hélène/Vous me distes, Maistresse
XXXVI
Vous me distes, Maistresse, estant à la fenestre,
Regardant vers Mont-martre et les champs
La solitaire vie, et le derert séjour d’alentour :
Valent mieux que la Cour, je voudrois bien y estre.
A l’heure mon esprit de mes Sens seroit maistre,
En jeusne et oraison je passerois le jour,
Je desfi’rois les traicts et les flames d’Amour :
Ce cruel de mon sang ne pourroit se repaistre.
Quand je vous respondy, Vous trompez de penser
Qu’un feu ne soit pas feu pour se couvrir de cendre :
Sur les cloistres sacrez la flame on voit passer :
Amour dans les déserts comme aux villes s’engendre.
Contre un Dieu si puissant, qui les Dieux peut forcer,
Jeusnes ny oraisons ne se peuvent défendre.