Le premier livre des Sonnets pour Hélène/L’arbre qui met à croistre
XXX
L’arbre qui met à croistre a la plante asseuree :
Celuy qui croist bien tost, ne dure pas long temps,
Il n’endure des vents les souflets inconstans :
Ainsi l’amour tardive est de longue durée.
Ma foy du premier jour ne vous fut pas donnée :
L’Amour et la Raison, comme deux combatans,
Se sont escarmouchez l’espace de quatre ans :
A la fin j’ay perdu, veincu par destinée.
Il estoit destiné par sentence des Cieux,
Que je devois servir, mais adorer vos yeux :
J’ay, comme les Geans, au Ciel fait résistance.
Aussi je suis comme eux maintenant foudroyé,
Pour résister au bien qu’ils m’avoient ottroyé :
Je meurs, et si ma mort m’est trop de recompense.