Le parfait secrétaire des grands hommes/Lettre 60

Texte établi par Georges GirardLa cité des livres (p. 90-91).
II


[À Newton.]


À St -Germain, ce 16 janvier 1689.


Monsieur,

Il y a quelques jours, j’avois préparé pour vous une lettre, lorsqu’on vint m’apporter la vostre, ce qui m’obligea d’en escrire une nouvelle. Par l’une et l’autre de ces lettres, je vous entretenois des bruits qui circulent contre vous, non seulement parmy les sçavans français, mais aussi à la cour, au sujet du mépris que vous avez cherché à jetter sur Pascal, qui est un sçavant fort estimé en France. Je vous engageois d’atténuer, s’il vous estoit possible, ces bruits qui sonnent mal à mes oreilles et me font grand desplaisir, non seulement à cause de moy, mais aussy de l’intérêt que je vous ay toujours tesmoigné.

On est outré contre vous, et on ne peut s’expliquer pourquoy vous avez cherché à denier vos relations avec M. Pascal, qui estoient, dit-on, si amicables, ainsy qu’on en a retrouvé les preuves parmy les papiers de cet autheur mis en ordre par sa sœur, Madame Perrier, et qui sont aujourd’hui entre les mains de M. l’abbé Perrier. Icy je rectifie une erreur qui m’est échappée dans ma précédente lettre. Je vous disois que ces preuves estoient encore entre les mains de Madame Perrier. C’est entre les mains de M. l’abbé Perrier que j’ay voulu dire. Quoy qu’il en soit, je vous le repette, Monsieur, on est très irrité contre vous du mépris que vous avez voulu jeter sur cet autheur. Tachez donc d’atténuer cela, s’il se peut. Car, je vous le repette, les propos sonnent mal à mes oreilles. Je vous prie de me répondre le plutost possible.

Jacques R.