Le chroniqueur Proché, documents inédits/Requête de N. J. Proche

Requête de N. J. Proche


« A Monseigneur Dupré de Saint-Maur, chevalier, conseiller du roi en tous ses conseils, maître des requettes et intendant en Guienne. »

Monseigneur,

Supplie humblement Noël-Joseph Proché maitre ez-arts et regent humaniste de la ville de Gontaud subdélégation de Marmande disant qu’etant depuis cinq ans regent de laditte ville, aux gages de deux cens livres par an, la modicité de cette somme ne pouvant le faire subsister, il se retira dans la ville d’Agen, lieu de son origine ; les maire et consuls de Gontaud, voyant qu’ils ne pourroient pas se procurer un regent pour une modique somme de deux cens livres, satisfaits de l’exactitude, conduite et bonnes mœurs du suppliant, le solliciterent de revenir à Gontaud, et par une convention expresse lui promirent une augmentation de gages de quarante livres ; cette convention est consignée dans une délibération générale de la communauté, du quatorze février de l’annee derniere ; c’est a cette condition que le suppliant revint a Gontaud reprendre les fonctions de regent. Cette convention, Monseigneur, est une loi entre les parties à laquelle il ne peut être dérogé en aucune maniere. Les maire et consuls actuels en ont senti l’obligation, aussi ont-ils fait payer au suppliant un quartier des gages echus ; mais bientot après, ces mêmes officiers municipaux, cedant a quelque inspiration maligne qui leur fit fouler aux pieds les conventions passées entre le corps de ville et le suppliant, s’assemblerent la vingt du présent mois et prirent une delibération qu’ils firent souscrire a huit paysans ou gens de métier, sans que les principaux habitants qui composent le corps de ville en ayent eu connoissance, et réduisirent les gages du suppliant a deux cens livres. Les motifs de cette délibération présentent l’injustice et la véxation les plus marquées les maire et consuls actuels, Monseigneur, n’ont point d’enfants à envoyer a l’ecole; peu animés de l’interet public, cédant au contraire a des haines particulieres, qui croyent avoir interet a blamer ou détruire ce qui a été établi par l’ancien corps de ville, composé des personnes les plus respectables du lieu, ont cherché a dégouter le suppliant, affin qu’il se retirat une seconde fois chez lui et que la ville fut sans regent.

Quelsque soient les prétextes sous lesquels les maire et consuls voudroient couvrir leur injustice, il en résulte, Monseigneur, que la convention passée entre la communauté de Gontaud et le suppliant doit avoir son effet ; ayant été exécutée par le payement des quartiers echus, l’un desquels a été aquitté au nom des officiers municipaux actuels, les gages promis ne peuvent plus être amoindris ; les maire et consuls l’ont si bien senti, qu’ils ont refusé de donner au suppliant une expédition de l’acte qui lui établit les deux cens quarante livres, affin qu’il ne pût pas se pourvoir vers Votre Grandeur, pour en obtenir la justice qu’il reclame. Cette délibération est commune entre le suppliant et la communauté, le dépôt doit etre entre les mains du secretaire greffier, mais les maire et consuls se sont emparés des registres, et, malgré la sommation que le suppliant leur a fait faire, ils ont refusé de lui donner copie des deux délibérations, ce qui fait, Monseigneur, que le suppliant ne peut les mettre sous les yeux de Votre Grandeur ; mais l’acte de sommation qu’il a fait faire aux maire et consuls met leur injustice dans la plus grande évidence.

Ce considéré, Monseigneur, le suppliant, régent de la ville de Gontaud, choisi par la communauté, approuvé par Votre Grandeur, et par M. l’eveque d’Agen, a l’honneur de vous supplier d’ordonner que la délibération du quatorze fevrier qui fixe ses gages a deux cens quarante livres sera executée, en consequence enjoindre aux maire et consuls de lui faire payer laditte somme quartier par quartier, ainsi qu’ils l’ont fait précédemment, leur ordonner en outre de faire expedier au suppliant une copie des deux délibérations : le suppliant, dont les vœux sont unis à ceux de toute la province ravie de la sagesse et de l’équité de votre administration, les redoublera pour la santé et la prosperité de Votre Grandeur.

N. Proché, suppliant.

Soit la presente requette communiquée aux officiers municipaux de Gontaud pour y repondre dans huitaine par devant nous, pour par M. l’Intendant y être estatüé ce qu’il appartiendra.

Fait à Marmande, le 8 février 1781.

En l’absence de M. Lavau de Fayon
Foucaud, chargé des affaires de la subon.

(Arch. deples de la Gironde, C. 603).


Réponse de la Communauté de Gontaud

Envoyée à M. Lavau de Fayon, le 22 Février 1781.

Les maire et consuls de Gontaud réfutent point par point la requête de Proché. Trouvant que 200 l. n’étaient pas des gages suffisants, « le sr Proché se retira à la véritté dans la ville d’Agen, sa patrie, pour y passer les vacquances, et