Le Voyage des princes fortunez de Beroalde/Entreprise III/Dessein V

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DESSEIN V.


Beau debat & diſpute de deux Bergers, entr’eux & auec l’Empereur. Sarmedoxe rend raiſon à l’Empereur de ce qu’on a mis la Lune la premiere. Le Palais des ſecrets : ce qu’il y a. L’Empereury va & rencontre bien.



LEs Princes auiſerent qu’il ne falloit pas ennuyer l’Empereur, parquoy ils luy conſeillerent de ſortir, & laiſſer acheuer le reſte à la Souueraine. Ils le conduirent donques hors le parq, où de fortune eſtoient deux Bergers qui diſputoient gentilement, & leur debat eſtoit agreable, & de conſequence honneſte. Ils furent appellez, & eux qui auoient accouſtumé de voir ſouuent le Roy & les gens d’honneur en auoient pris telle habitude, que la honte païſane eſtoit corrigee, ſi que leur aſſeurance acquiſe fit qu’ils comparurent honneſtement en ceſte aſſemblee de tāt de grāds. L’Empereur leur dict : Mes amis, dites nous voſtre belle diſpute. Ces deux Bergers Neor et & Synet auoiēt vn peu gouſté au plaiſir que la reputation donne à ceux ſpecialement qui ſe trouuent ſouuent en ceſt Hermitage, & s’eſtans eſpoinçonnez d’vn ſou hait plus releué qu’il n’eſt de couſtume à tellés gens qui ont quelquesfois l’ame baſſe, ils s’e— ſtoient efforcez de ſcauoir quelque choſe, & leur debat eſtoit ſur ce ſuiet, mais premiere | ment ils reſpondirent à l’Empereur & diſpute rent auecluy auant que luy dire la reſponſe qu’il attendoit. NEoRET. Sire, pourquoy nousap pellez-vous vos amis, veu que l’amitié n’eſt que · entre pareils, & n’eſt iugee du premier coup ? L’EMPEREvR. C’eſt pour ce queie veux vous aymer pour vous faire du bien. SYNET. Ce ſe ra donc vous qui ſerez noſtreamy, & partant ce nous ſera vn grand aduantage d’auoir tant con uis eſtans ſimples bergers, L’EMP. Et bien, ie § voſtreamy, dés ceſte heure & veux que me teniez pour tel, & en ceſte qualité contentez moy de ce que ie veux ſçauoir devous.NEoRET. · Il eſt raiſonnable, voſtre Maieſté nous pardon nera : Or, Sire, nous auons tant veu de belles gens qui ſont de bonne grace, que nous auös en uie de les imiter.SYNET. Et voudrions bien les paſſer, car nous ſommes hommes, & puis vous nous auez donné du cœur. L’EMP. Comment cognoiſſez-vous qu’ilya de belles gens, & que vous eſtes hommes ? NEoRET. Par la lumiere qui nous fait iuger ce qui plait aux yeux.SYNET. Et parla parole que nous auons à commande ment, pour chercher noſtre contentements L’E Mr E R E v R. Dites-nous voſtre diſpute. NEoRET. Compaignon diſons encor, SYNET. Ayens du ſuiet pour touſiours dire. NEoRET : I’ay tant mis de diligence, ce m’eſt-il aduis, que i’ay appris à cognoiſtre ce qui eſt és liures où ces gens d’eſprit apprennent ce qui les fait ſça uans, & pour te le faire iuger, ie te prie d’ouyr vne rime que i’ay faite, penſant à celle’que i’ay me, mais prens-y garde, tu y trouueras toutes les lettres de l’A, B, C, iel’ay dit à ma Bergere.

Aux kalendes de May, la belle Marguerite Ficha le zele au cœur qui meurt pour ſon merite.

Synet. Si ie ne t’aymois, ie ſerois depit cour roucé, & enuieux contre toy, à ton eſprit, & de ta gentilleſſe. Il faut bien que ce ſoit vn meſme bon ange qui nous guide, ie te diray que 1’enay fait vn de meſmes, ſi tu as mieux fait, tu auras gaigné, verifions tantoſt nos rimes, & eſcoute la mienne :

katherine guidoit par ſes yeux les Zephirs, Qui faiſoient bien & mal voletter nos deſirs.

L’EMPEREvR. Vous eſtes bons enfans, vous meritez, ie veux que vous ayez l’honneur d’a— uoir bien fait, & que vous en ſoyez recom penſez : Il paſla outre ayant fait donner vn beau preſent à ces deux compaignons. Eſtant de re tour, & Sarmedoxe entretenant ſa Maieſté, qui auoit touſiours l’œil ſur les Princes, dont le con ſeil conduiſoit tout, il demanda au bon hom me, Mon pere, veu ce qui ſemble deuoir eſtre meſmes par les ſymboles du Palais des ſecrets, ie penſe quei’ay occaſion de m’enquerir pour quoy vous m’auez fait entrer au Palais de la Lu ne, auant qu’aller aux autres, & auez donné à ce ſtuy-cyd eſtre le premier en ordre ? Sarmedoxe. Sire, les ſecrets ſont pour ceux qui les meritent, lors que les curieux auront cogneu le bon principe † lequel on a paſſé pluſieurs fois, & poſſible en voſtre preſence. On iugera que le quatrieſme & le premier peuuent eſtre confon dus. Trois eſt le premier nombre, car il a com mencement, milieu & fin : quatre eſt vn en recö mencantainſi on a commencé au quatrieſme, comme au premier, qui de fait eſt Saturne, mais pource qu’il faut conſiderer par deſſus toutes les planettes, & auoir ce qui n’eſt point en elles, il a eſté conuenable de les traiter ſelon le hazard des iours, &nous auôspenſé que voſtre Maieſtél’au raagreable.L’EMP.Me voilà ſatisfaict quant à ce oint, mais ie voudrois bien auoir l’entree de ce § Palais qui me ſemble eſtre auſſi grand que tous les autres, bien que la perſpectiue le retran che de grandeur, quand on le voit d’vn des pe tits. SARMEDoxE. Sire, c’eſt vn fait de grande conſequence, auſſi pour neant vous ne l’auez nö mé grand, car le grand ſecrety eſt, mais l’impor—. tance eſt de n’y eſtre point trompé ſi vous y al lez, à l’entree vous ſerez informé de la loy duPa lais, qui eſt égale à tout le möde, aux petits & aux grands, auſſi la Fee qui en eſt conciergea les yeux · tous ronds, elle void chacun d’vne meſme ſorte. Si en ſuyuant la loy ayant receu le marreau pour guide au lieu où vous deſirez&vous rencontrez, vous ſerez heureux, mais ſi vous faillez, il n’y a pas moyen d’eſtre rhabilité. L’EMPEREvR., Ie vous prie que i’en face l’eſſay, i’eſpere que ie ſuyuray ſi bien la regle, que i’en auray du contentement : que s’il m’aduient autrement, i’y ſuis deſia determiné, il ne me peut aduenir de diſgrace plus importune que celle où ie me trouue. Ie penſe ſçauoir pour l’auoir ouy di re aux Princes ce que ſeruent les lettres que l’on voit aux banderoles du Palais : Et puis que tout d’vn coup vous m’auez introduit en la quatrieſme ſtation, vous pourriez bien me, donner entree où la quatrieſme lettre ſert de gouuernail, & ie penſe que vous l’auez reſo lu, carie le coniecture par ceſte circonſtance, mais vous voulez que ie le requiere, & que i’en tente le hazard à ma requeſte. SARME DoxE. Sire, on fait ſouuent deſirer ce que l’on a en uie de liurer : parquoy, puis qu’il vous plaiſt, cependant que la Souueraine acheuera ceſte iournee d’audience, vous ſerez conduit au grand Palais, & i’en laiſſe l’auenture à voſtre prudence, prouuoyez y.

Le Palais des ſecrets, dit le grand Palais, eſt aſſis au milieu : le baſtiment en eſt fort ample, fait en eſchiquier, ayant autant de ſailettes quar rees, toutes diſtinguees l’vne de l’autre par al lees & galeries paueesàl’antique de petits cail loux longs, & ſes ſallettes ſont comme cellules, ayant en ſoyinfinies capſules pleines de ſecrets : mais en la principale eſt le principal ſecret, de chacune petite ſalle, ou pauillon. La couſtu me du lieu eſt eſcrite ſur l’entree du Palais, au pauillon du portal, auquel loge la Fee Garyo ſe concierge du lieu, laquelle l’interprete à ceux qui ont congé de parler à elle. Les ſe crets qui ſont en ces petits pauillons ſont du #eſte qui a eſté delaiſſé des fragmens de ce que º anciens Druydes enſeignoient, & qui iadis auoit eſté recueilly par les Dames de Sym—.’pſiquee, qui en ont honoré ceſt Hermitage. Les ſallettes ſontbaſties en cube, ayans ſur ſoy vne pyramide parfaite, & ſont enrichies à merueilles dedans & dehors, d’aucunes le corps eſt de briques, & la pyramide d’ardoi ſe, quelques vnes ſont de marbre, & la py ramide de tuiles de couleur, & ſont ces tui les faites de fin cyment pillé, ioint par la colle metallique ou plaſtre glutineux, qui les rend vermeilles & brillantes, telles tuilles ſont for mees en chaſſis, comme ceux auſquels on fait le papier, puis on les laiſſe ſecher au Soleil, au quel plus elles ſont & plus elles en belliſſent,’& y prennent vn beau & † Ces differences y ſont diſpoſees au gré de l’œil. Tout le grand carré de, dedans paré en ſes bel les allees, eſt diuiſé en quatre carrez, & au mi lieu de chacun de ces quatre ilya vn Obeliſque fait d’vne piece artificielle, on fait moudre l’ardoiſe auec le talk Alexandrin, & le gip gommeux, & de ceſte compoſition on faict ces pieces de telle grandeur & groſſeur qu’on veut, & auec tels enrichiſſemens qu’on deſire. Les quatre obeliſques ſont poſez orthogonellemēt, & ont à la pointe qui eſt plantee dans le bouton, vne lame d’or, en laquelle eſt la figure d’vne des quatres lettres des quatre principaux Alphabets, des quatre plus exquiſes langues, Ainſi il y a vn Dalet qui eſt d. Hebreu ר. il y a vn Delta pour le Grec, Δ. vn D. Latin, & vn ₯ Francois. Chacun des grands obeliſques vne de ces lettres pour banniere, & ſont ainſi plantees, l’Orient regarde iuſtement entre deux, ainſi que l’Occident auſſi entre deux autres, & les poincts de Midy & de contre Midy, lequel eſt au pole antarctique, cecy eſt la vraye diſpoſition du lieu, mais pour ce qu’elle peut tromper ceux qui n’ont pas l’in telligence de la Charte de delà, ie laiſſeray la diſ † à noſtre ſorte. Ceux qui paſſeront es Mers pour alier là, eſtans aduertis, ſcau—. ront bien diſcerner pour bien faire. Or donc ſelon noſtre conſtitution, comme ſi ce pays là eſtoit où ſont ces antipodes, il eſt, que le pre mier obeliſque regarde le Nort Oueſte, & por te T. L’Obeliſque dreſſé au Nort eſt à A. Le troiſieſme qui void le Sudeſt tient le D. & l’autre qui eſt vis à vis du Sudoueſt a le S. chaque lettre eſtan t en ſon propre caractere. En outre chacun de ces carrez eſt diuiſé en quatre autres carrez ſecöds, ayant au milieu des quatre vn petit Obeliſque vert portant ſa lettre, à la raiſon des premiers. Et ces ſeconds ſont enco res diuiſez en quatre, qui ſont les cellules, & chaque cellule a ſur le haut de ſa Pyramide vne lettre propre en meſme diſpoſition que tous les autres. En ces cellules il y a auſſi le regiſtre des ſecrets & myſteres, à ce que ceux qui auront eu beaucoup de peine ayent du ſalaire de leurs labeurs. Pour eſtre addreſſé, celuy qui ſe preſente reçoit de la concierge vn marreau où ilya trois lettres, le premier caractere repreſente le premier grand carré, auquelil faut aller laiſſant lesautres : le ſecond caractere demon ºreleſecond carré, où il ſeconuient tenir : & le troiſieſme eſt le ſignal de la cellule, qu’il eſt ne ceſſaire de choiſir. Si le curieux a bien rencon tré, la concierge le †, & comme Fee luy octroye vn don de plaiſir parfaict, qui peut te nir touſiours ſon eſprit en habitude de gayeté ſpecifique, & commodité de cœur infinie. Au contraire, s’il a failly, lagouuernante le renuoye par le chemin oppoſé, où il trouue ſon iuge ment, & ſelon qu’il eſt modeſte, il eſt traicté : car s’il eſt d’vn cœur glorieux & inſupportable,. faiſant l’inſolent, on le bannyt du lieu pour ia mais, & la Fee le touchant en † par le mo yen d’vn taliſman, qui eſt en vne chelidoine, luy appoſe vn caractere de † perpetuel le, que s’il eſt gracieux elle le conſole & le faict ſortir par le coſté, & il va és iardins ſecrets, ſans faire § d’auoir rien attenté. A l’entree de ce Palais au deſſus de la ſeconde porte, parla quelle on va en Feſchiquier des ſecrets, eſt vn marbre verd, où eſt eſcrit en lettres d’or la ſub ſtance du grand ſecret. On dict que ce marbre eſt fortantique, & qu’il fut faict par Heliodore, de la bibliothecque duquelle Roy des Abyſſins l’a tiré & enuoyé au Roy de Nabadonce ſon alié. Ce marbre eſt poſé contre vne parroy à coſté droict de la porte tout autour enrichy, deux Sauuages en portent la baſe : trois Daul · phins le ſupportent par le deſſous, & vn porphy re d’or ſouſtient tout : vne corneille emmantelee eſt au haut tendant le bec vers le tableau, que deux anciens tiennent par le haut. A chaque coſté de ce tableau il ya vne figure de perfonne nué : Ces deux figures ſont tellement & tant induſtrieuſement elabourees, que ſi deuxper ſonnes les voyentenſemble & d’vn regard en meſme temps, les regardans auront diuers iu § car ſil’vne eſt eſtimee repreſenter vne belle fille, elle ſemblera vn beau filsàl’autre, & ainſi reciproquement. Si on les veut eſplucher en tiers †, elles paroiſſent maigres & de mauuaiſe grace : ſi c’eſt en profile, elles ſeront eſtimees mediocres : mais de front, on les tient pour belles & en bon point : De l’autre coſté eſt vn grand tableau repreſentant Adam & Eue au Paradis, ce ſont deux nuds exa ctement bien acheuez, parfaicts en aſpect, & ſi delicieuſement bien faicts, qu’ils font d’ai ſe entrer les yeux en extaſe, & rauiſſent le cœur d’vne enuie modeſte à preſque admirer ceſt ou urage. Plus loing eſt figuree l’iſſuë du iar din d’Eden, où ſont deux demy-nuds deſcou uerts, deçà & delà, & ce qui ſe monſtre faict ſi bien qu’il ſemble verité, il eſt vray qu’on y void vne difference treſ-grande aux premiers car on void ces pourtraicts, bien quetreſ-beaux, auoir vn certain eſtat manque, comme ſi l’impreſſion de la douleur, apres la cheute auoit diffus par le corps vn ingrat obiet qui demon ſtroit qu’il eſtoit ſuruenu vn notable deffault, Aubeau marbre eſtoiteſcrit,

Uous tous qui me cherchez pour augmenter la vie de ceux qui ne ſont pas en parfaite habitude, ouurez vos yeux, preparez voſtre intelligence.

Il n’y a pas moyen que vous diſcouriez de moy que vous ne parliez de ceux qui me

ve,, ſtēt, ny d'eux que vous ne difiés de moy : Et
,, cependant vous me meſpriſez à cauſe du
,, meſpris que vous faites de mon abondance.
,, Au lieu de moy vous prenez mon veſtemët
,, fatal: Et me laiſſés honteuſement, comme
,, vile creature traiter par les mains indignes,
,, & les voſtres me dedaignét. Soyez plusaui ,
,, ſés ſi vous pouuez.Cognoiſſez ma grâdeur
,, plus ample que celle de ma mere : Ie ſuis
,, plus capable que ce qui me contient, ſoit
,, que l'on m'eſleue en haut, ou queie perſiſte
,, en bas,ie fais effet ſeló ma Nature, ſi de for-
,, tune le Roy des agiſſants ne m'eſpard, Que
,, ſi on lui preſente ma pure ſubſtance, & qu'il
,, couue doucement mon humeur viſqueuſe,
,, me nourriſſe & accompliſſe, ma forme de
,, uient viue & viuifiante, ſans que plus aucü
,, deſtructeur puiſſe ſur moy,

Outre cecy il n'y-a rien. :::::::

L'Empereur ayant veu ceſte magnifique en tree, & ſachant les ſtatuts du Palais demanda à la concierge vn marreau: elle le mena en latou relle du portail,où eſt le petit pauillon de diſcre tion,& de là lui fit voir tout l'eſchiquier lui di ſant,Sire, auiſez quelle cellule vous deſirez abu ter, car on n'en ouure qu'vne à la fois & celle ſeulement à laquelle vous ferés rencontre par l'inſtruction devoſtre gaige, parquoy diſcernez les bien, afin que vous ne tombiez en diſgrace. Sivoſtre memoire peut conuenir auec le billet quevous aurés,vous ſerés heureux,le billet eſt la bas, & l'aurez ſelon le hazard, vne autre fois ſi vous rencötrez bié, vous aures le billet que vous deſirerez : car il faut obeir auant que ſcauoir fai re election. Eſtant deſcendu, il luy fut preſenté par vne main dont le corps eſtoit caché, en vn cabinet ſitué au portail, & il le reçoit, & l’ou urant il y trouua des caracteres I. D. A. Les ayantilles confera exactement en ſa memoire, & puis entrantgalammét en cet abyſme de ſecrets, ſ’y guida prenant les allees ſelon la doctrine de la § du lieu : Il ſ’auançaiuſques à la croiſee : puis eſtudiant ſon marreau, il ſe tourna vers le premier grand carré, au milieu duquel il ſ’alla addreſſer pour auiſer au reſte, eſtant là, apres auoir viſité ſon marreau, il choiſit le troiſieſme carré, auquelilalla & de lâ, ſuyuant la loy de ſon gage, il ſeguida à la ſeconde cellule ; qu’il ouurit ayſément, ce quine fut pas auenu fil eut failli, à celail recognutle ſuccés de ſon induſtrie & bon ne fortune : Il y entra & là eſtant, il conſiderain finis objets notables : Apres † ſe fut vn petit repeu de ces exquis ſuiets, il rèceut le contrega ge que laNymfe de la cellule lui bailla, auec l’in telligence de l’Enigme, lequeleſtoit † CEl lettres d’or, & releuees de diamans en celeſte de la cellule, laquelle eſt la plus exquiſe, & où ſont les plus cheres raretez. L’Empereur reuint donc ayant en main ceſte bonne piece :

Ie ſuis ce que i’eſtois de fait & d’apparence,
Et ſi ie ne ſuis pas ainſi comme i’eſtois,
Et ie ſuis tous les deux de fait & de ſubſtance,
Ainſi i’exiſteray, i’exiſte & i’exiſtois,

Quiconque en voudra ſçauoir l’interpretation, qu’il chemine par où l’Empereur a paſſé, & il trouuera lameſme Nimfe, quine fera point de difficulté de le contenter.La Fee concierge, vo yant que l’Empereur auoit bien rencontré, & faiten perſonnage d’exquis iugement, luy don nale brin de l’hiſoppe ſacré qui denotte ſa per fection, & le remit contant au placitre : dont il retourna au palais de la Lune, où il ſe raſſit en, ſon ſiege, & vn peuapres la Souueraine ayantre mis les cauſes au lendemain, donna congé aux amans, & ſ’adreſſant à l’Empereur, luy prononça le reſultat du conſeil, pris pour luy durant qu’il fut abſent, & depuis que le ſecödarreſt d’Amour auoit eſté prononcé : car à cet inſtant on fit arre ſter vne cauſe, & le conſeilafſemblé, il fut auiſé que l’Empereur reuenant auec fruict heureux, de ce qu’ilentreprenoit, la Souueraine lui feroit ceſte petite douceur.

Sire, voſtre merite & voſtre valeur vous ont acquis ce qui par honneurvous deuoit eſtre con · feré, ſilagrandeur eut eut ceans plus de priuilege que la vertu.Or puis que valeureuſement & dignement vous auez conquis ce qui vous appartient, vous pouuez acheuant ceſte bonne fortu ne, iouïr abſoluëment des priuileges de cét Her mitage, qui vous ſont entierement conferez.

La ſeäce de ceiour eſtant ainſi terminee, l’Em pereur repetant toute ſa bonne auanture, eut eſpoir § & cependant il ſuppoſe le reſte des detreſſés qu’il ſouffre, en corre étion d’auoirindignement traitté, la beauté, & laperfection, par l’iniure qu’ila commiſe contre la vertu en la perfonne d’Etherine,