Le Tour de la France par deux enfants/078


LXXVIII. — Une gloire de Marseille : le plus grand des sculpteurs français, Pierre Puget. — Un grand orateur et un législateur nés en Provence. — Le code français.

«Nul bien sans peine.» (PIERRE PUGET.)

Pendant que le patron de la Ville d’Aix s’éloignait pour donner des ordres, Julien atteignit son fidèle compagnon de voyage, son livre sur les grands hommes de la France.

— Voyons donc, se dit-il, pendant que tout le monde est occupé, moi je m’en vais faire connaissance avec quelques-uns des noms célèbres de la Provence.

Et il se mit à lire avec attention.

I.   A Marseille, naquit un grand homme qui fut à la fois sculpteur, peintre et architecte, PIERRE PUGET. La sculpture est l’art de tailler dans la pierre, le marbre ou le bois, des hommes, des animaux ou d’autres objets ; par exemple, les statues qui ornent les places publiques sont l’œuvre des sculpteurs.

Le jeune Puget travailla d’abord chez un constructeur de navires et, à l’âge de seize ans, il se fit remarquer pour un superbe navire qu’il avait orné de dessins et de sculptures en bois. A cette époque, on avait coutume d’orner le devant des navires de statues, d’anges aux ailes déployées, de guirlandes dorées qui étincelaient au soleil, et on s’adressait pour tous ces ornements à des sculpteurs habiles.

PIERRE PUGET SCULPTANT UNE STATUE. — Pour sculpter, l’artiste applique sur le bloc de marbre un ciseau et frappe dessus avec un marteau. Ainsi il pratique avec adresse des creux et des saillies dans le marbre, qui prend sous le ciseau la forme des êtres vivants. — Un des chefs-d’œuvre de Pierre Puget est son martyre de saint Sébastien qui périt percé de flèches.


Mais, à ce moment de sa vie, le rêve du jeune Puget n’était pas de sculpter : c’était d’apprendre la peinture et, pour l’étudier, d’aller en Italie, où étaient alors les plus grands maîtres de cet art. Dans ce but, il travailla avec courage comme ouvrier pendant un an, afin de gagner la somme nécessaire à son voyage. Puis, à dix-sept ans, il partit à pied, s’arrêtant en route quand l’argent lui manquait, et recommençant à travailler jusqu’à ce qu’il eût gagné de quoi aller plus loin. Comme on pense, il eut bien des peines à endurer pour arriver au terme de sa route, et il se trouva souvent dans la misère.

Une fois arrivé en Italie, il étudia la peinture auprès de différents maîtres. Il montrait déjà dans cet art un véritable génie, lorsqu’il tomba gravement malade. Le médecin lui dit qu’il ne se guérirait pas s’il continuait à peindre, à cause de l’odeur malsaine des peintures, et qu’il lui fallait changer d’occupation pour sauver sa santé. Le jeune peintre se trouva ainsi obligé de recommencer des études nouvelles : il ne se découragea pas, et il reprit son premier métier de sculpteur. Sa gloire ne perdit rien au change, car c’est dans la sculpture qu’il a acquis, non sans des peines et des travaux incessants, une impérissable renommée.

Pierre Puget avait gravé dans sa maison ces paroles qui semblent résumer sa vie :

« Nul bien sans peine. »

— Voilà une devise dont je veux me souvenir toujours, dit Julien ; cela me donnera du courage.

Il reprit ensuite son livre et continua :


II.   La Provence a produit plusieurs orateurs et hommes de loi célèbres. Près d’Aix est né Mirabeau, le plus grand de nos orateurs pendant la Révolution de 1789.

L’ÉCOLE DE DROIT A PARIS. — La principale école de droit se trouve à Paris, en face du Panthéon. On compte en France 13 facultés de droit.


C’est aussi en Provence que naquit un rival de Mirabeau, Portalis, qui prit une grande part dans la suite à la formation du Code civil. Vous savez, enfants, qu’on appelle Code le livre où sont réunies toutes les lois du pays : le Code est le Livre des lois. Eh bien, depuis la fin du siècle dernier et le commencement du dix-neuvième siècle, un code nouveau a été établi en France ; Portalis est un de ceux qui ont le plus contribué à faire ce code, à chercher les lois les plus sages et les plus justes pour notre pays.

Le code français est une des gloires de notre nation, et les autres peuples de l’Europe nous ont emprunté les plus importantes des lois qu’il renferme. Ceux qui veulent devenir magistrats ou avocats font de ces lois une étude approfondie, et on appelle Écoles de droit les établissements de l’État où on enseigne le code.