Le Procès des Thugs (Pont-Jest)/II/7

Lecomte (p. 275-284).


VII

LE CACHOT DE LA CITADELLE DE GOLCONDE.



Après avoir traversé le préau où veillait une sentinelle qui porta les armes, ils se trouvèrent en face de la porte du corps de logis.

Les cachots étaient dans le sous-sol, creusés dans le roc.

Malgré son courage et son énergie, miss Ada sentit son cœur se serrer au bruit des énormes verrous que le guichetier tira pour ouvrir cette première porte.

Ce fut pis encore lorsque, suivant ceux qui la précédaient, elle mit le pied sur les premières marches de pierre de l’escalier humide qu’il lui fallait descendre la tête baissée, tant la voûte était basse.

L’air était épais et tiède ; elle était obligée de s’appuyer à la muraille visqueuse pour ne pas glisser.

Il lui semblait qu’elle allait défaillir.

Les pâles rayons du fanal, que Jack élevait au-dessus de sa tête pour éclairer le souterrain, jetaient sur les murs des éclairs brusques et des ombres bizarres que son imagination peuplait de fantômes.

Ce passage sinistre, où résonnait à peine le bruit des pas, lui paraissait le chemin du tombeau.

Au pied de l’escalier, Stilson, toujours soutenu par Roumee, tourna à droite.

Elle le rejoignit au moment où il venait d’ouvrir une lourde porte bardée de fer qui avait crié sur ses gonds rouillés.

C’était celle du cachot de Nadir.

Rappelant alors à elle tout son courage, elle saisit le fanal des mains de Jack, en lui disant :

— Laissez-nous, remontez à votre poste.

Le guichetier sembla consulter son supérieur du regard ; mais Stilson était de moins en moins en état de répondre.

Le passage du grand air à l’atmosphère lourde et viciée du souterrain l’avait complètement achevé.

Tout ce qu’il put faire fut de porter instinctivement la main à son front et de saluer pour protester de son dévouement et de son respect.

Jack s’était éloigné.

Roumee, pour se débarrasser de l’ivrogne, l’avait aidé à s’accroupir sur le pas de la porte.

Ada s’était résolûment présentée sur le seuil du cachot.

C’était une petite pièce basse, sordide, ne recevant un peu d’air et de jour que par un soupirail étroit et grillé, qui devait donner sur le chemin de ronde du fort.

Les barreaux enlevés, un enfant de cinq ans n’aurait pu se glisser par cette ouverture.

Tout son ameublement consistait en un lit de camp recouvert d’une natte de rotins, une petite table de bois de teck et un escabeau en bambous.

C’était cette affreuse prison que Nadir n’avait pas quittée depuis quinze jours ; c’était là qu’il devait peut-être attendre la mort, et le surlendemain de son arrestation il avait eu vingt-cinq ans.

De quelles angoisses, de quelles tortures ces murs noircis n’avaient-ils pas été témoins !

En projetant les rayons de son fanal vers le fond du caveau, Ada reconnut l’Hindou qui, réveillé brusquement par cette visite inattendue, fixait sur elle ses yeux étonnés.

Elle laissa tomber son manteau et fut obligée de chercher un appui contre la muraille.

Maintenant qu’elle était arrivée à son but et que les obstacles avaient paru s’aplanir si heureusement devant elle, elle tremblait comme un enfant, tout en se sentant envahie par une joie immense.

Elle était donc enfin seule, en présence de celui qu’elle aimait et qu’elle voulait sauver, même au prix de sa vie et de son honneur.

Nadir, qui pensait avoir en face de lui un des aides de camp du gouverneur, car le visage d’Ada était complètement dans l’ombre, Nadir attendait.

Mais la fille de sir Arthur, les regards arrêtés sur cette ombre adorée qui n’était qu’à quelques pas d’elle, se laissait aller à ses pensées d’espérance et d’amour. Elle se disait qu’elle rêvait peut-être, et n’osait élever la voix.

— Que me voulez-vous donc encore ? dit enfin le prisonnier, ne s’expliquant ni l’immobilité ni le mutisme de son visiteur nocturne.

Ada revint brusquement à la réalité.

— Voyons, que voulez-vous ? répéta l’Hindou.

— Vous sauver, Nadir !

Et, se détachant de la muraille, elle fit quelques pas qui la mirent en pleine lumière, car elle avait posé le fanal sur la table.

— Vous ! miss Ada. Vous ici ! s’écria l’Hindou, la reconnaissant et ne pouvant en croire ses yeux.

— Moi-même ! Cela vous étonne-t-il donc ?

— Comment avez-vous pu pénétrer dans cette prison ?

— Ce serait trop long à vous raconter. Voulez-vous fuir ? Les moments sont précieux !

— Fuir, dites-vous ? Et c’est vous qui venez m’offrir la liberté ; vous, la fille de mes ennemis, la fille de ces hommes qui m’ont emprisonné, enchaîné, qui me refusent des juges.

Sa voix avait subitement changé de ton ; l’éclair de ses yeux s’était chargé de haine.

Il tendait à la jeune fille ses mains étroitement liées.

— Raison de plus pour fuir, reprit-elle en cherchant à le dégager. Quoique je sois de la race de ces hommes, ami, je ne suis pas de leur caste. Comme vous, je les méprise et je les hais.

— Vous êtes folle, Ada !

Il la repoussait doucement, s’efforçant de retirer ses mains qu’elle cherchait à rendre libres.

— Comment, vous refusez ! dit la jeune fille, qui ne comprenait rien à cette résistance. C’est vous qui avez perdu la raison ! Ce n’est pas possible, je ne vous ai pas compris ! Ne savez-vous pas que je vous…

— Que vous m’aimez, miss. Oui, je le sais, et, je vous l’ai dit, le jour où je m’en suis aperçu, mon cœur a bondi de fierté et s’est élancé à la rencontre du vôtre.

Sa voix était redevenue douce et caressante comme aux beaux jours d’autrefois.

— Eh bien, alors ? interrogea l’Anglaise en se penchant vers lui.

— Mais l’homme que vous aimez n’est plus, Ada ; les vôtres l’ont tué en l’emprisonnant. Nadir est mort ! Si vous saviez à quelle lutte je suis réservé dans le cas où je reconquerrais ma liberté, vous ne songeriez plus à briser mes fers.

— Et que m’importe à moi, ce que vous êtes ou ce que vous paraissez être ! Pour moi, rien n’est changé ! Il me semble que vous jouez quelque comédie inexplicable, et il vous faut une raison bien terrible pour vous condamner ainsi, volontairement, à une prison qui peut être perpétuelle.

Nadir tressaillit à ces mots de la jeune fille ; on eût dit qu’une pensée soudaine venait de s’éveiller en lui.

— Tenez, continua-t-elle en s’exaltant de plus en plus, je crois que tout cela est un songe horrible. Vous refusez la liberté, la vie, mon amour ?

— Je ne refuse pas votre amour, miss Ada ; Brahma m’est témoin que mon cœur est plein pour vous de reconnaissance et d’affection, mais je ne puis accepter de vous la liberté, car je ne sortirais d’ici qu’après avoir fait le serment de me venger, et on saurait bientôt du cap Cormorin aux monts Himalaya comment l’Hindou tient sa promesse.

— Nadir ! supplia doucement la jeune fille.

— Pendant trop longtemps, reprit-il, je me suis laissé aller au charme de mes rêves ; j’ignorais que dût bientôt sonner pour moi une heure fatale, inexorable ; je ne savais pas que j’étais désigné par un peuple entier pour une tâche immense. Je l’aurais accomplie : Vischnou ne l’a pas voulu ! Il me faudra mourir lentement dans les ténèbres, moi, l’amant de l’air, de l’espace et de la liberté. L’Inde entière m’était promise, et voici mon domaine aujourd’hui. Il me faut fermer les yeux pour retrouver mes jungles et mes forêts aimées. Il ne reste à mes pas, accoutumés à la poussière des grands chemins, que ces dix pieds carrés de sol humide.

— Eh bien ! fuyez, Nadir, fuyez avec moi ; nous retrouverons tout cela ensemble !

— Jamais, miss Ada, jamais ! D’autres feront ce que le destin ne me permet pas de tenter.

La fille de sir Arthur baissa la tête. C’en était donc fait de ses rêves, de ses espérances, et c’est alors qu’elle avait affronté tous les dangers, renversé tous les obstacles, que la résistance venait de l’homme pour lequel elle avait tout osé.

Soudain elle releva les yeux. Une résolution subite venait de s’emparer d’elle. Elle ne voulait pas encore s’avouer vaincue.

— Non, dit-elle, en se rapprochant de Nadir qui s’était laissé retomber sur son grabat ; non, vous ne mourrez pas ici, et puisque mon amour n’a pu éveiller en vous le désir de la liberté, peut-être ferez-vous pour votre vengeance ce que vous ne voulez pas faire pour moi.

— Que voulez-vous dire, miss Ada ? Je ne vous comprends pas, demanda l’Hindou, avec un mouvement de tête qui exprimait que sa résolution était irrévocable et que rien ne pouvait l’ébranler.

— Que veux-je dire ? poursuivit la jeune fille en s’animant elle-même au son de sa voix. Je veux dire que vous n’avez pas le droit de mourir avant d’avoir vengé Romanshee et sa fille.

— Romanshee est comme moi prisonnier ; il n’est pas possible que sa vie soit menacée, car le jour où on lui donnera des juges, il sera mis en liberté. Quant à Sita, qu’a-t-elle à craindre ?

— Romanshee est mort, et sa fille est sans doute comme vous au fond de quelque cachot.

— Romanshee mort ! Sita prisonnière. Ah ! ce n’est pas possible, s’écria Nadir !

D’un bond de tigre il avait rejoint miss Maury. Ses yeux lançaient des éclairs ; ses membres faisaient des efforts surhumains pour briser les liens qui les retenaient.

— Ah ! je savais bien, dit-elle, épouvantée elle-même de l’effet que venaient de produite ses paroles, que vous n’étiez qu’endormi. Oui, Romanshee est mort ! Moins de dix jours après son arrestation, il a été jugé et condamné. De la terrasse de cette forteresse, vous pourriez voir son cadavre et ceux de ses complices suspendus encore au gibet à la porte de Golconde.

— Et Sita ?

— Sita était parvenue à s’enfuir de la pagode et elle s’était réfugiée chez vous. Lorsque les soldats ont brisé les portes de votre demeure pour vous y surprendre, il y ont trouvé votre fiancée, et peut-être a-t-elle péri dans les flammes, car, furieux que vous leur ayez échappé, ces hommes ont pillé votre maison et l’ont incendiée.

Nadir semblait rester insensible à la dernière partie de ce récit ; le nom de Sita lui avait arraché seulement un soupir de pitié, tandis qu’il ne cessait de répéter à voix basse : Romanshee mort ! Romanshee mort ! Que faire ?

— Qui a ordonné le pillage de ma maison ? demanda-t-il tout à coup, après un instant de silence et comme s’il eût pris une décision subite.

La fille de sir Arthur tressaillit à cette question et arrêta à temps sur ses lèvres le nom qu’elle allait prononcer : celui de son père.

Elle comprenait que, quelque haine qu’elle eût pour lui, ce n’était pas à elle de le dénoncer.

— Je l’ignore, répondit-elle, vous le saurez plus tard. Fuyons maintenant, Nadir, le temps presse, on pourrait nous surprendre.

Mais le prisonnier ne répondit pas. Il murmurait tout bas : Romanshee, Romanshee !… Sa colère semblait avoir fait place à la résignation.

— Eh bien ! venez, redit la jeune fille en s’efforçant de l’entraîner vers la porte du cachot.

— Il est trop tard, miss Ada, fit doucement le jeune homme en se dégageant de son étreinte et en retombant sur sa natte. Romanshee et Sita ne sont plus, ma vie est désormais sans but, je ne sortirai pas vivant d’ici. Je renonce même à la vengeance. Quand je tuerais ces hommes, mon vieux maître et ma fiancée renaîtront-ils ? Si j’étais libre, ma colère pourrait-elle ne frapper que les assassins et ne devrait-elle pas s’étendre aussi sur ces lâches de ma race et de ma religion qui ont laissé s’accomplir le pillage et le meurtre ? Excepté mes serviteurs, n’est-ce pas, miss, personne n’a lutté, et les Hindous du faubourg, ceux qui vivaient des bienfaits de Moura-Sing et des miens, toujours défendus et protégés par lui et moi, ces Hindous ont peut-être aidé les incendiaires et profité du pillage ? Race vaincue et abâtardie, il n’y a plus rien à faire pour toi ! Brahma t’a abandonnée ; tu es maudite !

— Voyons, Nadir, venez, je vous en conjure.

— Non, je vous l’ai dit ; non, je ne fuirai pas.

Le ton avec lequel il avait prononcé ces derniers mots, disait que tout était bien fini, et qu’aucune puissance humaine ne pourrait changer sa détermination.

Elle se rapprocha alors pour serrer les mains du prisonnier en signe d’adieu, car elle ne pouvait plus dire un mot. Les larmes l’étouffaient.

À son grand étonnement, Nadir lui fit prendre place auprès de lui.

Elle obéit en tremblant.

— Êtes-vous bien certaine, miss, lui demanda-t-il à voix basse, que personne ne peut nous entendre ?

— Personne, répondit-elle. Stilson est profondément endormi. Jack est remonté à son poste, et Roumee se tient dans l’escalier, prêt à nous avertir au moindre danger.

— Alors, écoutez-moi et, si vous m’aimez, retenez bien mes paroles. Ce n’est pas la vie, la liberté que je veux vous demander, c’est plus encore : le salut de mon âme.

S’était dirigé aussitôt vers la partie souterraine dont l’existence lui était connue.

— Le salut de votre âme !

— Oui, miss, et cela vous semble peut-être bien étrange de m’entendre parler ainsi, mais nous ne connaissons, nous autres Hindous, ni le scepticisme, ni le doute. Nous croyons, comme vous, à une autre vie, à un autre monde, dans lequel nous ne pouvons être heureux que si nous avons quitté celui-ci dans les conditions que notre Dieu nous impose. Je vais mourir, Ada !

— Mourir ! dit la jeune fille, en passant ses bras autour du cou du jeune homme.

— Oui, je vais mourir d’un mal qui ne pardonne pas, contre lequel toute la science, lors même que je voudrais l’appeler à mon secours, ne pourrait rien. Dans trois jours je ne serai plus. Eh bien ! je voudrais que vous me fissiez une promesse.

Les sanglots de miss Ada répondaient pour elle.

— Que fera-t-on de mon corps, lorsque la vie s’en sera retirée ? Peut-être le jettera-t-on dans une fosse commune ? C’est ce que je ne voudrais pas, et voici ce que je demande à votre amour de faire pour moi. Lorsque vous apprendrez ma mort, vous vous informerez du cimetière où aura été conduit mon cadavre et vous l’achèterez, à prix d’or s’il le faut, pour le faire ensevelir selon les rites et les coutumes hindous. Si j’avais succombé dans ma maison, au milieu des miens, ma fiancée aurait veillé pendant trois nuits, mes serviteurs auraient accompagné les chants des brahmines, mon corps aurait été purifié avant d’être livré aux flammes du bûcher, et Yama m’eût reçu sans colère. Voulez-vous remplacer les amis que je n’ai plus ?

— J’obéirai, put à peine répondre à voix basse Ada, en laissant tomber sa tête sur l’épaule de Nadir.

— Alors, soyez bénie, reprit-il, et retenez bien ce que je vais vous dire. Aussitôt ma mort, vous louerez une maison en dehors de la ville, dans un endroit isolé, et vous y ferez transporter secrètement mes dépouilles. Puis vous ferez prévenir, par quelqu’un de sûr, Nanda, le brahmine de la pagode de Wischnou ; vous lui remettrez cet anneau, et il se chargera de me rendre les derniers devoirs. Lorsqu’il sera près de mon cadavre, mon âme n’aura plus besoin de vos prières, car je veux que mes cendres soient jetées au vent pour porter jusqu’aux extrémités de cette terre maudite ma dernière pensée.

La fille de sir Arthur écoutait, mais ses yeux étaient hagards ; elle pensait faire un songe affreux.

— Maintenant, miss Ada, séparons-nous, termina Nadir en laissant tomber dans la main de la jeune fille un anneau d’or qu’il avait fait glisser de l’un de ses doigts avec ses lèvres, et en mettant sur son front un long baiser qui la fit rougir. Nous ne nous reverrons plus ici-bas ; on ne lutte pas contre la fatalité. Séparons-nous !

Les sanglots étouffaient Ada ; elle ne pouvait dire une parole.

Elle se laissa conduire comme un enfant jusqu’à la porte du cachot, sur le seuil duquel Stilson était toujours étendu.

Elle ne revint à elle que lorsqu’elle entendit cette porte se refermer avec bruit derrière Roumee, qui s’était chargé du fanal et de l’ivrogne.

Il lui sembla que c’était son cœur qui se brisait ; mais elle se contint. Stilson se tenait à peu près debout, à demi dégrisé et la regardait avec stupeur.

Elle s’effrayait à tort.

L’ex-brasseur avait tout simplement oublié ce qui s’était passé entre lui, Roumee et la bouteille de whisky, et il se demandait seulement ce qu’il faisait à pareille heure, dans cette partie de la prison, au lieu d’être dans son lit.

La mémoire lui revint en reconnaissant Roumee, qui le prenait par le bras et l’aidait à monter l’escalier.

— Eh bien ! que Dieu me pardonne ! lui dit-il tout bas, je viens de faire un rude somme. Fameux whisky tout de même ! Est-ce que le capitaine s’est aperçu ?…

— De rien, mais ne lui parlez pas, répondit le cipaye ; il semble de mauvaise humeur.

— Nadir n’aura pas voulu faire de révélations.

— C’est probable !

Ils étaient arrivés dans le préau.

Cinq minutes après, le soldat de faction à la porte de la citadelle présentait les armes à Ada, et elle rejoignait sans encombre avec Roumee la batterie abandonnée où ils avaient laissé leurs chevaux.

La fille de sir Arthur était tellement émue que le cipaye dut la soutenir sur sa selle pendant une partie du chemin.

Lorsqu’elle arriva à la porte de l’avenue des Gardens, Sabee, qui l’attendait, n’eut que le temps de la recevoir dans ses bras. Ses forces étaient épuisées ; elle ne pouvait faire un pas.

Ils durent la transporter jusque dans sa chambre.

Là, ils l’étendirent doucement sur son lit, où elle ne revint à elle que pour lutter contre une crise nerveuse qui dura jusqu’au jour.

Quant à Nadir, immédiatement après l’éloignement de celle qui avait voulu le sauver, il avait porté à ses lèvres ses mains enchaînées, arraché et broyé avec ses dents la pierre noire de l’une de ses bagues, et, les yeux fixés sur un rayon blafard qui pénétrait dans son cachot par l’étroit soupirail, il s’était étendu sur sa natte en murmurant :

— Wischnou, faites qu’elle se souvienne et pardonnez-moi, mais je voudrais vivre pour me venger !

On dansait toujours au palais du Gouvernement, et le gros Stilson rêvait qu’il pourrait, le lendemain, achever sa bouteille de whisky avec son ami Roumee, le cipaye, mais qui malheureusement ne savait pas boire.