Le Pays des diamants

LE PAYS DES DIAMANTS

L’Académie des sciences, dans sa séance du 27 octobre, s’est occupé de ces diamants du Cap dont l’arrivée sur les marchés européens n’a pas été sans influer d’une manière sensible sur les cours habituels. Avant de parler de la constitution et de la nature de ces diamants, il nous semble utile de donner quelques détails géographiques sur le pays où on les récolte.

Sur la côte occidentale d’Afrique, au-dessus du Cap de Bonne-Espérance, s’étend la colonie de Natal qui est devenue en peu d’années l’entrepôt de toutes les marchandises de l’intérieur et principalement des deux républiques d’Orange et du Transvaal, privées de communications directes avec la mer.

Ces deux États ont été fondés par des boërs, colons descendants des Hollandais, anciens possesseurs du pays. La république du Transvaal, qui nous occupe particulièrement, située en plein pays des nègres Betjouanas, est bornée au nord par le Limpôpo, au sud par le Vaal, affluent du Gariep, ou Orange. Avant la découverte des diamants, la population ne s’élevait guère au-dessus de 50 000 individus dont la moitié appartenait à la race blanche. Les richesses minérales sont nombreuses, ce sont le fer, l’étain, le plomb, la terre à porcelaine, l’ocre, l’alun, le salpêtre, le charbon de terre, etc. Cependant, aucune de ces richesses n’aurait été exploitée, si la découverte de l’or n’avait appelé l’attention universelle sur un pays dont le nom était à peine connu en Europe. Un voyageur allemand, Carl Mauch, fut le premier qui rapporta de ses courses aventureuses quelques échantillons de quartz aurifère. En 1867, il adressait au gouvernement de Natal un rapport favorable sur des mines d’or qu’il avait découvertes. Le bruit n’en fut pas plus tôt répandu qu’une foule d’émigrants et de mineurs venus d’Angleterre, d’Australie et d’Amérique fondirent sur le Transvaal. Les routes s’ouvrirent, les villes se bâtirent et il ne fut bientôt plus possible de reconnaître ces vastes prairies aux fleure éclatantes, où paissaient naguère des gazelles, des éléphants, des girafes et tous les animaux de l’Afrique australe. Mais les résultats n’avaient pas répondu aux espérances qu’on avait conçues, déjà bon nombre de mineurs avaient quitté le pays lorsqu’on rencontra des pierres précieuses dans les deux districts de Bloomfontein et de Potchefstroom. Les endroits les plus fertiles en diamants, c’étaient les rives des deux Vet-Fluss, affluents du Vaal et les champs de Pniel. Généralement on les trouvait soit isolés, soit enfermés dans des gangues, mais toujours au milieu de galets fluviatiles et de blocs de quartz, gros comme une noix, et de morceaux de fer noir. — L’année dernière, dans les camps de Du Toits-pan 40 000 hommes retournaient le sol avec une activité fiévreuse, creusant des puits, lavant et triant des diamants. On ne peut imaginer l’aspect de ces villes étranges où l’on rencontre à côté de tentes, de voitures, de maisons en bois ou en fer, de huttes de terre ou de paille, des hôtels, des boutiques, des magasins aussi bien assortis qu’à Londres. Quelques mineurs ont fait leur fortune d’un seul coup, tandis que d’autres fouillent vainement le sol. Grâce à cette fièvre qui dure depuis déjà plus de quatre ans, on s’obstine à chercher une fortune rapide mais bien aléatoire, lorsqu’on a sous la main tous les éléments de la richesse : un sol étonnamment fertile et d’immenses prairies favorables à l’élève du mouton.
G. M.