Le Parnasse contemporain/1876/L’Image

Le Parnasse contemporainAlphonse Lemerre [Slatkine Reprints]III. 1876 (p. 306-307).


L’IMAGE


J’aime à vous évoquer dans une chaste pose,
Debout et les doigts joints et les yeux souriants,
Comme au temps où, rêveur injustement morose,
Je profitais si mal de mes beaux jours fuyants.

Ah ! je vous ai du moins présente en ma mémoire !
Tout, depuis le nœud bleu sous le petit col blanc
Ou la simple croix d’or, avec la robe noire
Qui garde dans ses plis mon pauvre cœur tremblant,


Jusqu’au ruban léger qui, du col à la taille,
Par derrière flottait à tous vos mouvements,
Tout est là dans mon cœur et revit et m’assaille
En me faisant souffrir de durs et chers tourments.

Puisqu’il est une grâce intime et naturelle,
Selon que le costume est bien ou mal porté,
Vivez, ô mon Amie ! et demeurez fidèle
À ce culte élégant de la simplicité.

Vous avez dédaigné les bizarres coiffures
Qui semblent au vieux goût faire un dernier affront,
Et, pour la gloire encor des belles chevelures,
Deux simples bandeaux noirs couronnent votre front.