Le Parnasse contemporain/1866/Les Violettes

Le Parnasse contemporainAlphonse Lemerre [Slatkine Reprints]I. 1866 (p. 284).




LES VIOLETTES




Une habitude longue et douce lui faisait
Aimer pendant l’hiver les violettes blanches ;
A l’agrafe du châle un peu court sur les hanches
Son doigt fin, sentant bon comme elles, les posait.

Un jour que le soleil piquant et clair grisait
Les moineaux francs criant par terre et dans les branches,
Elle me proposa d’aller tous les dimanches
Cueillir avec l’amour la fleur qui lui plaisait.

A présent, ce bouquet est tout ce que j’ai d’elle ;
Mais j’y trouve toujours, pénétrant et fidèle,
Un vivace parfum émané de mon cœur.

Tel le verre vidé qu’un souvenir colore :
Le regret du buveur pensif l’embaume encore
Et la lèvre y croit boire un reste de liqueur.


ALBERT MÉRAT



FIN