Le Parnasse contemporain/1866/À celle qui est trop loin
À CELLE QUI EST TROP LOIN
Veux-tu, sur les grands monts aux vertes chevelures,
Où l’haleine des soirs balsamiques t’attend,
Voir aux molles lueurs de Vesper hésitant,
Des chevriers tardifs les étranges allures ;
Et sur ces flancs ouvrés en mille dentelures
Me dire ces vieux airs où le cœur se plaît tant,
D’une bouche enfantine et le sein palpitant
Comme un doux gonflement de divines voilures ?
Viens ! des cieux rajeunis s’épanche une vertu
Fluide, et qu’on dirait par un Dieu distillée ;
Octobre est glorieux et de soleil vêtu ;
L’automne au front changeant simule une aprilée.
C’est la saison d’aimer qui refleurit… Viens-tu ?
Mais tu ne viendras pas, triste, ô triste exilée !