Brume (1912)
Le Miroir des joursMontréal (p. 95-96).


BRUME


 
Ennui, crainte, détresse… On ne sait quoi dans l’air
De ce jour ténébreux s’appesantit sur l’âme…
Ô le bonheur léger du soleil large et clair,
Lumière qui, pareille à l’amour, se proclame !

Angoisse puérile et peine sans raison…
Toute ma force fuit et s’épand dans la brume ;
Parce que je regarde un trop proche horizon,
Je sens mon faible cœur enserré d’amertume !


J’aspire à la clarté, je souffre d’infini !
Malgré ma petitesse, en moi s’ouvrent des ailes
Qui battent vainement au bord de quelque nid,
Avec le grand désir des voûtes éternelles !

Je ne vois rien de bleu, rien de vaste là-haut ;
Au mur gris du brouillard se heurte ma pensée
Qui s’élance, retombe, ainsi qu’un doux oiseau,
Et vaincue, à la fin, gît pleurante et blessée…