Le Livre pour toi/Tu m’as dis

Le Livre pour toiE. Sansot et Cie. (p. 47-48).



XXII


Tu m’as dit : J’aurais voulu me mettre à genoux, baiser le bas de ta robe.

Tu m’as dit : Je ne sais plus…

Et ta voix m’aurait fait pleurer des larmes divines.

C’était au temps où pour toi je n’étais rien encore, Sylvius, ou je lisais seulement ton amour dans tes yeux implorants ; au temps où ta vie était une prière muette que j’entendais.

Viens maintenant : voici ma robe, voici mes mains.

Reste agenouillé, je caresserai lentement ta nuque inclinée. Ton âme montera vers moi comme un encens, je l’aspirerai tout entière, je t’aime infiniment ; et tes paroles, dans leur insigne pureté, je les garde comme on garde des diamants.

Sache-le bien, moi aussi je me serais courbée.

À genoux devant toi, je t’aurais dit : Donne-moi tes mains indécises qui n’osent pas m’effleurer, j’y dépose mon cœur, acceptes-en l’offrande.

Il est à toi dans la joie et dans la souffrance, dans la vie et dans la mort.

Mais alors, Sylvius, l’heure n’avait pas sonné.