Le Littré de la Grand’Côte/3e éd., 1903/Navette

Chez l’imprimeur juré de l’académie (p. 239-240).
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NAVETTE, s. f. — De mon temps, on n’employait que la navette antique, la poétique navette qui servait à Pallas pour tisser les péplos divins. Cette navette, tout le monde la connait, avec son élégante courbure, sa châsse où les canettes se déroulent sur une pointizelle, son agnolet de verre, à travers quoi l’on siffle le bout de trame.

Aujourd’hui, avec le battant à bouton, on se sert de deux autres espèces de navettes fort compliquées, qui ont entre elles cela de commun qu’elles sont droites, au lieu d’être sinueuses, et qu’elles sont par-dessous munies de galets, dénommés roulettes. On ne les décrira pas, car si vous ne les connaissez point, la description ne vous servira de guère, et si vous les connaissez, elle est inutile. Leur différence fondamentale consiste en ceci : 1° La navette à dérouler a une canette se déroulant sur une pointizelle, comme dans l’ancienne navette ; 2° La navette à défiler a une canette qui, fixée à une fourche, ne se déroule pas, mais abandonne son fil par la pointe. Dans la navette à dérouler, la trame étant plus tirante, grâce à la pointizelle, donne une étoffe plus carteuse ; on l’emploie pour le taffetas en gros comptes. La navette à défiler s’emploie pour des étoffes qui, comme les façonnés, doivent être plus molles, et, comme on dit, « faire plus la patte ».