Le Littré de la Grand’Côte/3e éd., 1903/Boutiffe, boutiffle

Chez l’imprimeur juré de l’académie (p. 58).

BOUTIFFE, BOUTIFFLE, adj. — Enflé, bouffi. À Lyon on a la mauvaise habitude de ne pas se gêner, parlant par respect, pour pancher de l’eau sur les cadettes en temps de gel. De là, de mauvaises tombures. Un jour d’hiver, devant Saint-Pierre, je fais rencontre de mon camarade Borlucosset, aujourd’hui l’architecte en grand renom. Il n’était pas de connaitre : le visage tout gonfle, le nez tout enfle, cabossé, qui était fait comme une poire cuisse-dame ; un œil au beurre noir, et la gaugue en pantoufle, comme quelqu’un qui vient de se faire tirer une dent chez Paillasson (ou chez Duchesne, le nom n’y fait rien). Que t’esse-t-i donc arrivé, mon pauvre Borlucosset ? que je lui fais. J’attends un moment sans rien voir venir. Borlucosset met la main à sa gaugne, comme pour retenir les briques d’un tupin cassé. Enfin, moitié sifflet, moitié glouglou, il amène ces mots : Oh, c’est rien. J’ai glissé sur de pipi par les escaliers des Capucins, et j’ai piqué une tête sur le coupant des marches. Je m’ai retenu avec la bouche. Heureusement les dents ont cédé. Sans quoi j’étais capable de m’abimer la ganache ! Seulement j’ai resté un peu boutiffe. — D’un radical boud, signifiant objet enflé.