Le Littré de la Grand’Côte/3e éd., 1903/À n’un

Chez l’imprimeur juré de l’académie (p. 14-15).
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À N’UN. — Manière de détruire l’hiatus, toujours choquant pour le populaire. Christine, la bonne de ma grand’, achetait-elle les pastonades à n’un sou le paquet, ne se doutant mie qu’elle copiait Villon : « Dites-moy où, n’en quel pays, — Est Flora, la belle Romaine ? » — Ainsi ont fait les grammairiens eux-mêmes lorsqu’ils disent : A-t-on vendu pour a on vendu ? Donc Christine avait raison.

Nous trouvons cette n si douce à l’oreille que nous la mettons parfois où elle n’est pas absolument nécessaire. À Saint-Vincent, une bonne femme priait à la chapelle de saint Roch. Dans sa ferveur, elle s’était mise tout contre le saint. En se relevant, le coin du piédestal accrocha sa robe. Un peu suffoquée, elle s’écria d’un ton de reproche : « Oh ! grand saint, à votre n’âge, vos badinariò ! » Remarquez que cette bonne femme arraisonnait d’une façon fort logique : Puisqu’on dit : mo n’âge, to n’âge, so n’âge, se pensait-elle, on doit dire notre n’âge, votre n’âge, leur n’âge.