Le Jardin des dieux/Le Chapelet de jasmin/Orient

Le Jardin des dieuxEugène Fasquelle (p. 55-56).



ORIENT



Les jardins ténébreux embaument la soirée…


Un éclair brûle au fond de la nuit déchirée
Et plonge dans la mer de livides métaux
Et, tout à coup, du port, jailli comme un couteau,
Frappant l’immensité lumineuse fendue
Et faisant retentir toute cette étendue
D’un grand cri d’aventure expiré dans les fleurs,
— Ô supplices divins, merveilleuses douleurs ! —
Ricoche, rebondit, ondule, plonge, traîne
L’appel mourant, puis renaissant, d’une sirène.

Et le silence a ruisselé de diamants
Comme si retombaient sur la mer embrasée
Les étincelles d’or d’une immense fusée…
Alors, de ces jardins où rêvent les amants
Il semble à cet appel tragique, brusquement,
Que la nuit fabuleuse où le golfe s’embrase
Cède au bord de l’abîme en un long cri d’extase !