Traduction par Hurtaud.
Lethielleux (p. 172-173).


CHAPITRE XX

(50)

Comment cette âme éprouve une grande amertume devant l’aveuglement de ceux qui se noient dans le fleuve.

Alors cette âme, dans le tourment de son désir, considérait son imperfection et celle des autres. Elle éprouvait une grande douleur à voir un tel aveuglement dans les créatures. Ne savait-elle pas que si grande est la Bonté de Dieu qu’il n’a rien mis en cette vie qui soit, en quelque état que l’on se trouve, un obstacle au salut. Tout, au contraire, est enseignement et provocation à la vertu. Néanmoins, combien de pécheurs, l’amour-propre et l’attachement désordonné n’entraînaient-ils pas en bas, par le fleuve ? Ils ne se convertissaient pas et elle les voyait arriver à l’éternelle damnation, pendant que nombre de ceux qui étaient remontés du fleuve, après avoir bien commencé, retournaient en arrière, pour la raison qu’elle avait apprise de la Bonté divine qui avait daigné se manifester elle-même à elle. Cette vue la plongeait dans la douleur. Fixant alors le regard de son intelligence sur le Père éternel, elle lui disait." O amour inestimable, qu’elle n’est pas l’erreur de vos créatures ! Je souhaiterais qu’il plût à votre Bonté de m’expliquer avec plus de précision, — quels sont les trois degrés figurés par le corps de votre Fils unique, — comment l’on doit faire pour sortir entièrement de ces flots et marcher dans la voie de votre vérité, et — quels sont ceux qui montent les degrés de l’échelle.