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Description de la ville de Cambalu.


La ville de Cambalu est située sur le bord d’une rivière dans la province de Cathay ; elle est fort ancienne, et depuis longtemps le siège des rois ; le mot de Cambalu signifie « ville du Seigneur », en langue du pays. Le Grand Khan la changea de place et la transféra à un autre endroit de la rivière, ayant appris par les astrologues qu’elle devait être rebelle à l’empire[1]. La ville est faite en carré et peut avoir vingt-quatre milles de superficie, chaque côté ayant six milles de long. Ses murailles sont blanchies ; elles sont de vingt pas de haut, dix de large, elles sont bâties en talus. Chaque long côté de la muraille a trois portes principales, qui font douze en tout ; auprès de chaque porte il y a de magnifiques palais ; il y a aussi de beaux bâtiments aux angles des murs, qui servent à garder les armes de la ville ; il y a dans cette ville des rues et des places tirées au cordeau, en sorte que l’on peut voir d’une porte à l’autre tout le travers de la ville. Ces rues sont ornées de belles maisons de chaque côté ; au milieu de la ville il y a une maison où il y a une très grosse cloche, dont on donne le signal tous les soirs par trois coups, pour avertir que personne n’ait à sortir de sa maison jusqu’au lendemain, à moins que ce ne soit pour secourir les malades. Car ceux qui sont obligés par nécessité de sortir la nuit doivent porter de la lumière avec eux. Chaque porte de la ville est gardée par mille soldats, non pas autant par crainte des ennemis que des voleurs et des brigands, car le roi prend beaucoup de soin à ce que cette maudite race soit exterminée.

  1. Cambalu, dans la province du Cathay, ne serait autre, selon M. Pauthier, que Pékin, ancienne capitale effective de l’empire chinois. « Koubilaï, délaissant l’ancienne ville, dit-il, en fit édifier tout auprès une nouvelle, séparée de la première par une rivière qui est un affluent du Peï-ho. C’est dans cette nouvelle ville que se trouvent encore aujourd’hui les palais impériaux et les grands établissements publics, dont plusieurs datent de l’époque mongole. » — Toutefois certains commentateurs nouveaux émettent des doutes au sujet de cette assimilation.