Le Dernier des flibustiers/Épilogue historique

ÉPILOGUE HISTORIQUE


La grande île de Madagascar paraît avoir été connue des anciens. D’après certains auteurs, ce serait l’Ophir du roi Salomon[1] ; Ptolémée la désigne sous le nom de Mémuthias, Pline sous celui de Cerné. Les Perses et les Arabes l’appelaient Sarandib ; elle était fréquentée par les navigateurs mahométans des Indes et de l’Arabie depuis un temps immémorial, lors de la première apparition des Portugais au delà du Cap de Bonne-Espérance ; enfin, Marco Polo, dans ses relations de voyage, lui donne le nom de Madagascar, dès le commencement du XIVe siècle, c’est-à-dire deux cents ans avant les explorations des Portugais.

La plupart des savants s’accordent à admettre qu’à une époque fort reculée, les peuples de la Malaisie envahirent l’Afrique orientale, et ils font descendre de ces conquérants les races comparativement blanches qu’on rencontre dans diverses régions africaines sous les noms de Foulahs, Fouls, Pouls, Peuls, qui signifient blancs. Les Malais occupèrent Madagascar et se fondirent avec la race noire primitive, mais non sans établir dans l’île conquise le régime asiatique des castes, qui durent être primitivement suffisamment tranchées par la couleur des chefs, des maîtres, des hommes libres, des serviteurs et des esclaves.

Les Malais ou Dayas ne furent toutefois que la souche des olivâtres, car des Israélites et des Arabes ayant passé aussi dans l’île, y ont été nécessairement les pères de la race blanche. Il s’ensuit que la population malgache, composée de tant d’éléments, ne peut être comparée à aucune autre des populations africaines.

Découverte fortuitement, en 1506, par le portugais Laurent Alméida, qui lui imposa le nom de Saint-Laurent son patron, la terre que les naturels appelaient Malakassa (île de la Lune), pourrait fort bien avoir été trouvée par des Français trois ans auparavant.

Dès 1503, en effet, c’est-à-dire six ans à peine après Vasco de Gama, Paulmier de Gonneville, qui montait un bâtiment armé par des négociants de Honfleur, doublait le cap de Bonne-Espérance, et, poussé par la tempête, atterrissait à des côtes inconnues, que l’on a cru être celles de Madagascar. Ce point historique risque fort de demeurer éternellement obscur. Il est au moins certain qu’au seizième et au dix-septième siècle, les Français sillonnèrent les mers des Indes, et qu’ils prirent une haute opinion de Madagascar, dédaigné, comme sans importance, par les Portugais, les Hollandais et les Anglais.

Les Portugais, en 1548, firent bien une apparition sur la côte et y construisirent même un petit établissement dans l’Anse aux Galions ; mais ils y furent presque tous massacrés. Les derniers qui survécurent s’échappèrent à bord d’un navire de leur nation. Depuis, leurs compatriotes ne vinrent plus qu’accidentellement trafiquer à Madagascar.

Les Hollandais ont fréquenté la baie d’Antongil, située sur la côte orientale, vers le 15e degré de latitude sud ; ils y négociaient avec les habitants du pays, ils faisaient la traite du riz et celle des esclaves, et quelques-uns d’entr’eux y ayant fondé une habitation, prirent part aux expéditions belliqueuses du chef qui leur avait concédé leur territoire ; mais ils provoquèrent plus tard sa juste fureur par leur mauvaise foi, leur insolence et leur ivrognerie. Ils périrent massacrés par les ordres de leur protecteur.

Vers 1644, les Anglais au nombre d’environ 400 hommes, abordèrent sur la côte opposée, près de l’embouchure de la rivière de Saint-Augustin. Ils y périrent misérablement pour avoir essayé de rester neutres dans les querelles des indigènes qui les traitèrent de lâches et leur refusaient des vivres, On suppose qu’ils finirent aussi par être égorgés.

Quant aux Français qui avaient suivi de près les Portugais au delà du cap de Bonne-Espérance, ils naviguaient dans les mers indiennes et abordaient à Sumatra dès 1529. – Les frères Jean et Raoul Parmentier, du port de Dieppe, firent un mémorable voyage avec deux bâtiments, le Sacre et la Pensée, et relâchèrent à Madagascar, où leur séjour fut malheureux, car les indigènes leur tuèrent quelques matelots.

En 1602, deux navires malouins, le Croissant et le Corbin, équipés par une compagnie de marchands bretons, abordèrent dans la baie de Saint-Augustin sous les ordres de Michel Frotet et de François Groult du Clos-Neuf ; ils visitèrent l’archipel des Comores, et séparés par la tempête, eurent des fortunes bien diverses. Le Corbin fit naufrage aux Maldives ; le Croissant, durant cinq ans de navigation, n’eut que mauvaises fortunes. Leur insuccès néanmoins ne découragea pas les Bretons. Aussi continuèrent-ils à prendre la route des Indes-Orientales, et les vit-on à fréquentes reprises sur les côtes de Madagascar. Les Normands, de leur côté, marchaient sur les traces de Gonneville et des frères Parmentier.

Leur expédition la plus remarquable fut celle d’Augustin de Beaulieu, qui partit de Honfleur avec trois navires, le 2 octobre 1619. – Le général, – tel était le titre qu’il prenait, – commandait en personne le Montmorency, monté par cent vingt-six hommes et armé de quarante-quatre bouches à feu de divers calibres. Il avait sous ses ordres l’Espérance, capitaine Gravé, portant cent dix-sept hommes, vingt-six canons et vingt pierriers, et la patache l’Hermitage, capitaine Redel, portant trente hommes et seize pièces d’artillerie. Après plusieurs relâches, le 26 avril 1620, une tempête mit le Montmorency en tel état que le général, laissant prendre les devants à l’Espérance, alla, de conserve avec la patache, se réparer à Madagascar, dans la baie de Saint-Augustin. Augustin de Beaulieu, judicieux explorateur, ne négligeait aucune occasion de s’enquérir des mœurs, usages et richesses des pays qu’il rencontrait.

« L’île de Madagascar fut l’objet de son attention pendant tout le temps qu’il y séjourna, et quand il la quitta, le 3 juin 1620, ce fut pour aller prendre connaissance des Comores. La Grande-Comore, qui est, dit-il, la plus proche de la terre ferme de Mozambique, lui parut attirer, en raison de sa hauteur, beaucoup de nuages qui la rendent froide et humide. Le roi de Grande-Comore envoya un de ses gens à Beaulieu, pour lui témoigner le plaisir que lui faisait éprouver l’arrivée des Français dans ses terres. Beaulieu remarqua d’une manière particulière l’île Mayotte (aujourd’hui française) ; il la trouva d’un excellent mouillage, moins haute, plus habitable que les autres Comores, et abondamment pourvue de tout ce qui est nécessaire à la vie.[2] »

Les hardies et savantes navigations d’Augustin de Beaulieu stimulèrent l’audace de nos marins, qui ne cessèrent d’explorer les Indes-Orientales durant la première moitié du dix-septième siècle.

Le capitaine Reginon, de Dieppe, notamment, fit, en 1633, une campagne digne d’être mentionnée ; et cinq ans après, François Cauche, connu par ses relations de Madagascar, visitait l’île Rodrigues sous les ordres du capitaine Salomon Goubert. L’on ne saurait dire combien d’autres expéditions non moins curieuses sont demeurées inconnues faute de chroniqueurs.

Les nombreux voyages des Français dans la grande île africaine avaient donné de sa richesse les idées les plus avantageuses. Une compagnie qui porta le titre de Compagnie française de l’Orient, se proposa pour fonder des établissements à Madagascar et dans les îles adjacentes afin de s’assurer une large part dans le commerce des Indes. Le grand cardinal de Richelieu en protégea les commencements et lui donna des lettres-patentes le 24 juin 1642, peu de mois avant sa mort.

En 1643, le Saint-Louis dépose le sieur Pronis et une douzaine de Français sur la côte sud-est dans la baie de Sainte-Luce. L’année suivante, d’importants renforts arrivent à ces premiers colons, et le Fort-Dauphin s’élève dans la presqu’île de Tolangare à trois lieues environ de la rivière de Fanshère sur le territoire d’Anossi.

La colonie naissante se soutint, tandis que les Anglais, à la même époque, échouaient dans leur tentative de la rivière Saint-Augustin. Il est digne de remarque que les gens de Pronis trouvèrent déjà dans le pays un certain nombre de matelots dieppois établis parmi les naturels et qui trafiquaient avec eux. Pronis sut se faire un parti chez les indigènes, et selon toute apparence, l’entreprise eût parfaitement réussi dès l’origine, si ses malversations et ses exactions n’avaient provoqué des révoltes continuelles.

Il n’avait pu empêcher de construire une chapelle où un aumônier catholique célébrait les offices ; mais il était huguenot, avait amené avec lui sept ou huit de ses co-religionnaires, et prenait à tâche de contrarier les colons et les soldats fidèles. « Tout en laissant dire la messe, il faisait faire le prêche en sa maison.[3] » – Les indigènes étaient étonnés de voir deux sortes de religion parmi les Français, et il s’ensuivit que les efforts des prédicateurs français ne furent pas moins infructueux que ceux des missionnaires portugais venus de Goa en 1615 et 1616.

La compagnie ou Société de l’Orient pourvut enfin au remplacement de Pronis, et, en 1648, lui donna pour successeur un homme habile et très énergique, Etienne de Flacourt, à qui est due la précieuse Histoire de la grande isle de Madagascar. Il y entre dans les détails les plus curieux et les plus circonstanciés sur les mœurs, les usages, les croyances des indigènes, sur la nature, sur les productions et les divisions territoriales de l’île entière.

L’administration de Flacourt est remarquable par l’esprit de ressource dont il fit preuve en maintenant son autorité, quoique la compagnie le laissât sans secours. En 1649, il envoya prendre possession de l’île Mascarenhas (Mascareigne), à laquelle Pronis, qui l’y avait précédé, donna le nom d’île Bourbon. Quelques aventuriers déportés comme rebelles et des négresses malgaches, leurs compagnes, en formèrent la première population ; il leur expédia des bœufs de Madagascar. – Telle fut l’origine misérable d’une colonie demeurée française et qui est aujourd’hui si florissante. Mais à son vif regret, il ne put faire planter le pavillon du roi sur l’île Maurice, depuis Ile-de-France, alors au pouvoir des Hollandais, qui ne l’évacuèrent qu’en 1712.

Flacourt résida pendant sept années à Madagascar, avec titre et qualité de directeur-général de la Compagnie française de l’Orient et commandant pour le roi de la grande île et des îles adjacentes. – Il explora par terre ou par eau une vaste partie du territoire et presque toutes les côtes, il se mêla incessamment aux querelles des indigènes avec l’espoir, trop souvent déçu, de trouver des alliés puissants et fidèles. Le Fort-Dauphin soutint plusieurs sièges mémorables, et les aventuriers de la garnison firent dans l’intérieur plusieurs campagnes héroïques, entre lesquelles il faut citer l’admirable retraite de douze soldats français, qui, sous les ordres du sergent La Roche, résistèrent à une armée de six mille Madécasses armés de dards et de sagaies.

Déjà les indigènes s’approchaient pour les massacrer, après les avoir surpris en rase campagne, lorsque le sergent se mit en devoir d’opposer une résistance désespérée.

La Roche et ses compagnons, se jetant à genoux, chantèrent l’hymne Veni creator spiritus. Dix ou douze nègres et une négresse, qui étaient avec eux, se mirent aussi à genoux en se recommandant à Dieu. Ensuite, les Français s’embrassèrent en se demandant pardon les uns aux autres, et commencèrent, par une vive fusillade, à faire reculer leurs ennemis.

« Pendant leur prière, dit Flacourt, les autres les considéraient, jetaient devers eux des bâtons blancs, des œufs couvés, et faisaient mille conjurations et imprécations, ayant cette superstition de croire que, par ce moyen, le courage de ces Français serait diminué, et que même ils demeureraient immobiles et sans défense. Ce qui arriva autrement, car ils se battirent en retraite depuis deux heures après-midi jusques à sept heures du soir et tuèrent plus de cinquante nègres des plus hardis qui s’avançaient les premiers, sans ceux qui furent blessés en grand nombre. Ils se servirent si à propos de leurs armes qu’ils ne tiraient aucun coup de fusil sans effet, et quand trois ou quatre avaient tiré, les autres tiraient, pendant que ceux-ci chargeaient leurs armes. Leurs nègres jetaient hardiment des pierres et relançaient les dards qu’on leur avait jetés, et même la négresse amassait des pierres plein sa pagne pour leur en fournir et en jetait aussi.

« La poudre commençait à leur manquer ; ils se saisirent d’une petite colline toute ronde sur laquelle ils montèrent environ sur les sept heures du soir, bien las et recrus en résolution de jouer de leur reste, et y campèrent tout le reste de la nuit ; l’armée se tint aux environs, hors de portée de fusil. »

Un des douze braves soldats, nommé Nicolas de Bonnes, fut tué d’un coup de mousquet par les indigènes qui possédaient cinq armes à feu. Un autre Français, nommé Noiret, fut blessé au genou d’une balle, mais ne discontinua pas de combattre.

Le rohandrian Dian Tséronh, qui commandait les agresseurs, renonçant à employer la force contre des hommes si intrépides, leur envoya demander à parlementer et leur fit offrir des vivres qu’ils acceptèrent ; mais, mis en garde par leurs noirs fidèles contre la perfidie des ennemis, ils ne s’assirent pas et firent répondre au chef insulaire qu’ils étaient résolus à recommencer le combat.

Touché, cette fois, de tant de courage, Dian Tséronh ne chercha plus à leur tendre de piéges et congédia la plus grande partie de son armée.

François de Grandchamps, celui des soldats qui savait le mieux la langue du pays, s’avançait alors pour lui demander la cause des hostilités. Le prince rejeta tout le mal sur les calomnies des sorciers, qui l’avaient poussé à entreprendre une guerre injuste contre les chrétiens. Il voyait bien maintenant qu’ils avaient pour eux la protection de Dieu, qui leur avait donné la force de se défendre contre une si grande multitude. Il admirait d’autant plus leur hardiesse qu’ils étaient tous jeunes gens et qu’à peine deux d’entre eux avaient de la barbe au menton !

« Nous avons ouï parler des Portugais, poursuivit-il, nous avons connu les Hollandais et les Anglais ; mais ce ne sont point des hommes comme vous autres ; car vous ne vous souciez point de votre vie, vous la méprisez et en faites peu de cas, et quoique vous voyiez la mort devant vos yeux, vous ne vous épouvantez pas ; vous êtes autres que ces étrangers. Vous n’êtes pas des hommes, mais des lions, et quelque chose de plus. »

Après cette allocution, qui donne une idée de la haute opinion des indigènes pour la valeur française, Dian Tséronh laissa La Roche et ses compagnons reprendre librement leur chemin.

Ce ne fut pourtant pas sans avoir couru d’autres dangers que l’héroïque escouade, inquiétée encore dans sa marche par quatre cents indigènes, et forcée de revenir en arrière par la rencontre d’une rivière trop large et trop profonde, finit par arriver au Fort-Dauphin, où Flacourt désespérait de la revoir.

Les sept années du gouvernement de Flacourt sont sept années de luttes et de travaux incessants, pendant lesquelles il entra en rapports avec toutes les tribus du sud et de la côte orientale, depuis la baie Saint-Augustin, tombeau des Anglais, jusqu’à celle d’Antongil et à l’île Sainte-Marie, dont il s’était déclaré protecteur, et où il laissa une petite garnison.

Des déserteurs ou des aventuriers français s’établissaient sans cesse parmi les indigènes ; quelques-uns malheureusement furent traîtres envers leurs compatriotes ; mais la plupart se bornèrent à se naturaliser et à prendre rang parmi les Rohandrians, grâce à leur couleur et à leur intrépidité.

Au bout de cinq ans d’abandon de la part de la Société de l’Orient, Flacourt, réduit aux dernières extrémités, reçut enfin des secours inespérés, grâce au maréchal de la Meilleraye qui lui expédia deux navires avec une lettre où il se disait dans l’intention, clairement démontrée par ses actes, de se substituer seul aux droits de la compagnie, déjà plus qu’à demi ruinée et dont les priviléges expiraient.

Le capitaine La Forêt des Royers, commandant le Saint-Georges, se mit aux ordres de Flacourt, qui disposa tout d’abord de son autre navire, l’Ours, monté précisément par ce même Pronis qui avait fondé le Fort-Dauphin. Pronis alla visiter de nouveau l’île de Bourbon ; le Saint-Georges explora la côte jusqu’à Sainte-Marie. L’on pourvut au ravitaillement de la colonie ; après quoi, Flacourt, trouvant nécessaire de se rendre en France pour conférer avec le duc, ne jugea pas Pronis indigne de lui succéder.

Ce choix désastreux, fut suivi de catastrophes de tous genres, incendies, massacres, exactions, lamentables péripéties.

Le maréchal de la Meilleraye, toujours préoccupé de l’avenir des possessions françaises de la mer des Indes, et du reste l’un des plus audacieux armateurs de son temps, équipa, en 1656, deux grands navires commandés par La Roche Saint-André, montés par huit cents hommes et destinés, à la fois, à faire la course et à secourir les Français de Madagascar. Sur les entrefaites, le duc étant entré en arrangements avec la compagnie de l’Orient, les expéditions données à son chef d’escadre étaient parfaitement régulières. La campagne maritime fut mal dirigée ; nous savons seulement qu’un sieur Du Rivau prit, au nom du duc, le commandement du fort où il s’établit avec cent hommes.

Cependant Flacourt s’était présenté au maréchal qui, rempli de confiance dans ses lumières, le fit investir de lettres-patentes du gouvernement. Flacourt repartit enfin, plein d’espérances, avec des projets qui semblaient très habilement conçus, lorsque le 10 juin 1660, il fut attaqué par trois corsaires barbaresques et perdit la vie en combattant.

Sa mort, a-t-on dit avec raison, fut un coup fatal pour la colonie où lui seul, peut-être, était capable de faire renaître un peu d’ordre. Son ouvrage, imprimé en 1661, se ressent de la négligence et de l’ignorance de ceux qui en firent la publication après sa mort.

On manque de documents authentiques sur les événements qui se passèrent au Fort-Dauphin depuis le moment où Du Rivau en prit le commandement, c’est-à-dire, vers 1657, jusqu’à l’expédition de 1663. Le bruit courut toutefois que le fort avait été livré par trahison et que tous les Français avaient péri victimes de la vengeance des indigènes. Ce désastre, qui aurait eu lieu vers 1658, n’est point historiquement prouvé ; mais il est constant que le duc de la Meilleraye ne cessa d’expédier des navires corsaires dans la mer des Indes et surtout aux environs de la mer Rouge, où leurs armes terrifiaient les Portugais, les Hollandais et les Anglais, déclarés tous de bonne prise passé la ligne équinoxiale.

Le sieur de Champmargou, officier au service de la compagnie française des Indes-Orientales, qui commanda le Fort-Dauphin à partir de 1663, n’était point un homme sans mérite. – Le commencement de son administration fut assez heureux, car il se laissait guider alors par les conseils d’un aventurier français, bien intentionné, qui s’était depuis plusieurs années naturalisé Malgache. – Ce dernier s’appelait Levacher, mais n’est guère connu que sous son surnom de La Caze.

Parti de France en simple volontaire, il arriva dans l’île en 1656, à bord d’un des navires du duc de la Meilleraye. La compagnie était en désarroi et les Français se trouvaient en butte aux insultes de tous les chefs indigènes. La Caze s’offre pour commander un détachement qui fera dans l’île une expédition comparable à celle des flibustiers à Saint-Domingue ; ses deux coups d’essai sont deux victoires qui répandent sa renommée du sud au nord de l’île. Il tue dans une bataille générale l’un des princes les plus puissants ; il en abat un second en combat particulier, gagne ensuite trois autres batailles et rend ainsi au nom français tout son ancien prestige.

Malheureusement, le grand retentissement de ces succès ayant éveillé la jalousie du gouverneur Champmargou, il cessa de se laisser diriger par ses avis.

Au Fort-Dauphin, les désastres succédaient aux revers, tandis que La Caze, couvert de gloire, devenait le héros de Madagascar. Le prince de la vallée d’Amboule lui offre de partager avec lui la puissance suprême ; il lui donne la main de sa fille Dianonne, et La Caze règne en paix, quand au contraire, Champmargou risque à tous moments d’être accablé par ses ennemis.

Le gouverneur, réduit aux dernières extrémités, dut souvent faire taire son orgueil, et rappeler à son aide l’aventurier qu’il dédaignait, mais qui, toujours zélé pour le service de la France, ne lui refusa jamais son appui dans les moments critiques.

En 1664, l’illustre Colbert, qui se préoccupa toujours et avec tant de fruits de la grandeur extérieure de la France, de son commerce, de sa puissance maritime et coloniale et de l’avenir de ses possessions d’outre-mer, songea très sérieusement à la grande île de Madagascar. Ne se laissant pas décourager par les résultats infructueux, d’un siècle et demi d’efforts, il reconstitua sur de plus larges bases la Compagnie des Indes-Orientales. Et Madagascar à qui l’on imposa le nom bientôt oublié d’Île-Dauphine, fut acheté des héritiers du duc de la Meilleraye.

L’édit de 1665 désignait la grande île sous le beau nom de France Orientale. (Gallia Orientalis, lisait-on sur le grand sceau.)

Une expédition importante est résolue. Le marquis de Mondevergue, investi du commandement général des établissements français au delà de la Ligne, arrive au Fort-Dauphin, en 1667, avec dix navires dont un de trente-six canons, se fait reconnaître comme amiral-gouverneur, accepte avec empressement les services de La Caze, et fait régner dans l’île entière une prospérité inespérée.

Pendant trois années, une paix profonde succède aux interminables guerres d’autrefois.

Une période de bonnes relations, d’alliances et de fondations d’un grand avenir commence enfin ; elle fut, hélas, trop courte.

Au marquis de Mondevergue succède, en 1670, l’amiral de La Haye, avec le titre de vice-roi ; il désigne pour commander en second, ce même lieutenant général de Champmargou qui a déjà compromis, si peu de temps auparavant, le sort de la colonie ; La Caze, nommé major général, n’occupe que le troisième rang, quand il a tant de titres à tenir le premier.

D’imprudentes mesures rallument la guerre ; la sécurité ne tarde pas à être de nouveau compromise.

De La Haye découragé abandonne son poste ; son départ est suivi de la mort de Champmargou, sur qui s’exerça la vengeance des naturels.

Pour comble de malheurs, mourut La Caze qui, jusqu’alors avait soutenu l’établissement par son courage et ses talents.

En 1671, de La Bretesche, son gendre, lui succéda en qualité de major général. C’était un gentilhomme breton, entré au service dans les premières années du règne de Louis XIV, excellent militaire, mais incapable de réparer les fautes trop nombreuses du présomptueux de La Haye. Malgré son alliance avec la fille de Dianonne et de La Caze, il ne put se soutenir et fut massacré avec la plupart des Français, le jour de Pâques 1672.

D’après M. Victor Charlier, toutefois, le dénoûment aurait été un peu moins tragique : « La Bretesche, dit-il, prit enfin le parti de fuir avec sa famille et quelques missionnaires, sur un navire qui était venu relâcher à Madagascar. Il eut à peine le temps de recueillir quelques malheureux Français échappés au massacre général.[4] »

La charité chrétienne et l’apostolat catholique avaient eu leurs martyrs. Ainsi périrent par le poison l’ardent missionnaire Étienne, le frère Patte et un indigène leur serviteur qui, conduit en France par Flacourt, avait été élevé à Saint-Lazare sous les yeux de Saint-Vincent de Paul.

Les deux derniers prêtres survivants, messieurs Roguet et Montmusson, durent se résigner à quitter Madagascar, le 4 septembre 1674.

Et telle y fut la fin de « la première mission catholique qui, en l’espace de vingt-cinq ans, coûta à la congrégation fondée par Saint-Vincent de Paul, outre des sommes considérables, vingt-cinq sujets dont dix-sept prêtres et dix frères, sans compter quatre prêtres séculiers[5]. »


Madagascar délaissé ne devait point tarder à voir affluer sur ses rivages des aventuriers de toutes les nations, et entre autres les successeurs directs des flibustiers et boucaniers.

Après avoir rendu d’immenses services à la France et à l’Angleterre, leurs patries, contre les Espagnols du Nouveau-Monde, les derniers Frères de la Côte, voyant que les nouveaux traités internationaux abolissaient l’ancien droit de courses et déprédations au delà de l’Île-de-Fer, ne se résignèrent point tous à la vie paisible de colons.

La piraterie se recruta dans les rangs de ces formidables corsaires, qui, après avoir écumé les eaux des Antilles, se repliaient vers l’Afrique, visitaient les Açores, les îles du Cap-Vert, la Guinée ou même les Indes Orientales, et enfin se retiraient, le plus souvent, à Madagascar pour y jouir impunément du fruit de leurs rapines.

Les compagnons d’un certain capitaine Tew, entr’autres, après avoir écumé les mers de l’Afrique et des Indes, descendirent sur la Grande-Île, où ils devinrent bientôt très puissants, quoique leur chef fût retourné aux Bermudes, où il obtint sa grâce.

Les documents historiques relatifs à la domination des flibustiers à Madagascar sont très obscurs, Un historien digne de foi a écrit cependant qu’ils y fondèrent une colonie, qui aurait pu devenir très utile à l’humanité si elle avait commencé sous d’autres auspices ; mais ils étaient ennemis de leurs compatriotes, ils devinrent les tyrans des insulaires, se renfermèrent dans leurs citadelles et y périrent sans laisser aucune trace intéressante de leur résidence sur ces bords.

En s’établissant à Madagascar, ils ne songèrent qu’à satisfaire leurs appétits souvent féroces ; ils achetèrent un grand nombre d’esclaves, ils en enlevèrent de vive force aux princes leurs voisins ; la guerre s’ensuivit. L’avantage des armes à feu suppléant au nombre, les pirates l’emportèrent d’abord ; mais la crainte d’être surpris en rase campagne les contraignit à convertir leurs habitations en autant de forteresses. Ils y vécurent avec une magnificence asiatique, exerçant une autorité souveraine et se faisant rendre par les naturels des honneurs presque divins. – De là, comme de plusieurs autres traits analogues, les légendes semblables à celle de Nathan-la-Flibuste, le Dieu d’ébène.

Presque tous ces potentats avaient été matelots dans leur jeunesse. L’un d’eux, simple batelier de la Tamise, dut sa fortune à un meurtre qu’il avait commis et après lequel il s’expatria ; les autres provenaient de l’équipage du capitaine Tew ou de la troupe d’un certain Avery dont le nom fit grand bruit en Europe au commencement du xviiie siècle.

Avery montait, en qualité de contre-maître, un navire anglais loué par l’Espagne pour aller dans les possessions d’Amérique combattre les contrebandiers français. L’équipage, composé d’aventuriers, se laisse débaucher aisément ; Avery se débarrasse du capitaine, s’empare du navire, fait à Madagascar alliance avec les pirates, et part de conserve pour croiser à l’entrée de la mer Rouge. La flottille captura un bâtiment du Grand-Mogol, dont la fille allait en pèlerinage à la Mecque. La cargaison, chargée d’offrandes d’une immense valeur, fut pillée et partagée ; mais Avery abusa de la confiance de ses compagnons, leur vola leurs parts de prises, et, après bien des traverses, vint se faire voler à son tour en Angleterre, où il mourut de misère, tandis qu’il passait pour avoir épousé la fille du Grand-Mogol et fondé aux Indes une nouvelle monarchie.

Les forbans qu’il avait trompés revinrent à Madagascar, où ils rentrèrent dans leurs fortins, et se battirent les uns contre les autres ; mais leur extermination générale ayant été résolue par les indigènes, ils en furent avertis à temps, se réunirent, et ligués contre le danger commun, se transformèrent en marchands d’esclaves, essayèrent de s’emparer par ruse de plusieurs navires négriers, mais ne réussirent pas, tant ils excitaient de défiance.

England, l’un des chefs pirates qui sortirent de la Providence avant la capitulation de 1717, arriva en 1720 à Madagascar, après avoir écumé l’océan Atlantique, les côtes du Brésil et le golfe de Guinée. Les gens de sa troupe espéraient trouver dans la Grande-Île quelques anciens camarades qui reprendraient la mer avec eux ; ils n’atterrirent point dans la même partie du littoral, bâtirent quelques cases sur la côte et y vécurent comme à la Providence. Ils faisaient la course dans les mers des Indes, relâchaient aux îles Mascareignes et revenaient souvent à Madagascar où plusieurs d’entre eux se fixèrent définitivement. England perdit son commandement et fut relégué par ses gens à l’île Maurice, peu de temps avant l’époque où les Français s’y établirent.

Quelques pirates se réfugièrent à l’Île-Bourbon ; quelques autres, comme England, à Maurice. Il existe, enfin, une tradition d’après laquelle les pirates auraient eu l’une de leurs meilleures aiguades dans une île qui nous paraît être Rodrigues, primitivement nommée par les Portugais San Joâo de Lisboa.

Madagascar ne cessa d’être fréquenté par des forbans de tous pays.

Des aventuriers qui peuvent être confondus avec les précédents, se retirèrent dans toute la partie qui s’étend de Sainte-Marie et de la baie d’Antongil au nord de la Grande-Île. Les Séchelles, situées à près de deux cents lieues dans le nord-est de Madagascar, furent également envahies par les pirates.

Selon toute vraisemblance, ces forbans et ceux de Madagascar furent les mêmes. On les voit menacer de destruction toutes les colonies voisines, intercepter les communications, empêcher les approvisionnements, et commettre des forfaits sans nombre ; il n’est guère admissible que les Français n’aient jamais usé de représailles. Un poste fortifié à Madagascar devait alors être excessivement utile ; sous la protection de ses canons, la traite des bœufs et des vivres pouvait se faire avec beaucoup moins de dangers que dans une baie ouverte et sans défense. Les colons des îles de France et Bourbon eurent donc un trop grand intérêt à reprendre possession du Fort-Dauphin, pour le laisser à la disposition du premier pirate qui voudrait s’y établir.

« Du reste, un document fort curieux, qu’on trouve dans la Description de l’Univers, par Allain Manesson-Mallet, vient confirmer notre opinion, car ce géographe parle du Fort-Dauphin comme étant encore au pouvoir des Français en 1683.

« La figure du fort, – dit-il, – est un carré long de vingt-cinq toises sur vingt de largeur. Des quatre angles, il n’y en a que trois qui soient couverts chacun d’un bastion. Le quatrième se rencontre sur le roc, qui est escarpé ; de sorte que cet angle est suffisamment défendu par une tour qu’on y a élevée. Le côté qui regarde la mer est aussi en précipice, et soutenu par une plate-forme, où il y a toujours des pièces en batterie. Cette enceinte renferme le logement du gouverneur, flanqué de deux grosses tours bâties de pierre de taille : l’une destinée à servir de prison, l’autre de salle d’armes. »

Cette description serait d’une précision bien étrange si elle n’avait été faite, comme le suppose l’auteur de l’Histoire maritime de France, que pour complaire aux idées de puissance et de domination générale du monarque. On doit supposer, au contraire, que le Fort-Dauphin fut restauré par les Français entre 1672 et 1683 ; car, d’un autre côté, Louis XIV n’avait cessé de considérer Madagascar comme dépendant de sa couronne.

Dans une déclaration du mois de février 1685, portant règlement pour la forme de la compagnie des Indes, il est dit qu’au cas où la compagnie voudrait jouir de la possession de Madagascar, elle serait tenue d’en faire foi et hommage avec redevance. Et l’année suivante, la compagnie ayant fait abandon de cette île, un édit du 4 juin l’annexait en toute propriété et seigneurie au domaine du roi.

Alors la population de Bourbon avait déjà reçu un accroissement notable, par l’arrivée des Français échappés au désastre du Fort-Dauphin et par celle de renforts envoyés de la Métropole. Ses habitants ne pouvaient se passer de communications avec la Grande-Terre, qui fournit le bétail et les vivres, et où l’on faisait nécessairement la traite des esclaves. Il est, par conséquent, vraisemblable que si le Fort-Dauphin cessa d’être un centre militaire et colonial, il fut au moins un comptoir où s’établirent de leur autorité privée et se retranchèrent à leur guise des traitants, trafiquants, et chercheurs d’aventures qui, se rattachant au passé, travaillèrent obscurément pour l’avenir.

De tous les points de la côte méridionale et orientale de Madagascar, le Fort-Dauphin a été jugé le plus sain. L’élévation moyenne de la température permettrait de cultiver dans ses alentours les végétaux d’Europe et ceux des colonies. En outre, sa rade est d’un accès facile[6] et les moussons rendent promptes les communications avec l’île de Bourbon (la Réunion.)

Aventuriers ni colons, caboteurs, approvisionneurs, marchands ni soudards ne durent négliger un poste pareil. Et l’histoire se répétant sans cesse, surgirent dès lors assurément des occupants déterminés du genre de notre cher Vincent du Sanglier chevalier du Capricorne, dont la romanesque physionomie est, sans contredit, à sa place dans le roman le Dernier des Flibustiers.


« Au commencement du xviiie siècle, l’attention de la France fut de nouveau attirée par l’importance politique et maritime de Madagascar. L’ingénieur de Cossigny y fut envoyé, en 1733, pour explorer la baie d’Antongil. »

Maurice, d’où les Hollandais avaient été expulsés par les pirates, était devenue l’Île-de-France. En 1721, les colons de Bourbon y avaient fondé un premier établissement, qui se développa sous l’influence du génie de Mahé de La Bourdonnais en 1734. Justice, police, industrie, commerce, tout était à créer : La Bourdonnais créa et organisa tout.

On lit dans son Mémoire qu’en 1745 il envoya ses navires se ravitailler à Madagascar, où il se rendit lui-même en 1740. De son temps, la baie d’Antongil et Foule-Pointe étaient très fréquentés par les Français de Bourbon et de l’Île-de-France. D’entreprenants aventuriers continuaient d’ailleurs à faire fortune à Madagascar, en y épousant, comme le brave La Caze, des princesses de sang royal. Qui ne connaît le joli conte de Cazotte intitulé Le Roi de Foule-Pointe ?

En 1759, un sieur Laval, chef de traite à Foule-Pointe, y approvisionnait les onze vaisseaux de l’escadre du comte d’Aché ; puis, le 30 juillet 1750, l’île de Sainte-Marie (Nossi-Hibrahim) fut cédée à la France par la princesse Béti, fille et héritière de feu Tamsimalo, dernier souverain de Foule-Pointe et de toute la côte jusqu’à la baie d’Antongil.

Onze ans plus tard, les Français avaient des postes commerciaux sur tous les points principaux de cette même côte depuis Antongil jusqu’au Fort-Dauphin dont, en 1768, sous le ministère du duc de Praslin, un officier distingué, M. de Maudave, alla, au nom du roi, prendre le commandement.

« Des instructions plus sages et plus prévoyantes que celles qui avaient été données à ses prédécesseurs, – a écrit M. Victor Charlier, – lui prescrivaient de renouer et d’entretenir des relations amicales avec les indigènes, de n’attendre que des moyens de douceur le retour de l’influence perdue, de paraître, en un mot, maintenir un fort sur leur territoire, avec leur assentiment tacite, et plutôt pour satisfaire à la dignité de la France que pour se préparer à l’accomplissement d’un projet hostile. Ce plan était raisonnable ; mais il devait échouer par l’insuffisance des ressources allouées pour son exécution. »

Le comte de Maudave avait obtenu des chefs du pays la cession de neuf ou dix lieues de terrain sur les rives de la Fanshère, mais, – toujours mêmes causes et toujours mêmes effets, – la jalousie permanente des administrateurs de l’Ile-de-France suscitant des embarras, et les subsides indispensables faisant défaut, – le comte de Maudave abandonna le Fort-Dauphin en août 1769.

Ce fort était possession française et reconnu comme tel depuis sa fondation remontant à cent vingt-cinq ans. On l’avait perdu et recouvré ; on l’avait laissé tomber en ruines et restauré ensuite plus ou moins. Qui l’occupait avant le comte de Maudave ? qui le garda, qui s’y campa lorsqu’il l’eut pacifiquement évacué sans que la France eût renoncé à ses droits ?

Fût-ce quelque pauvre diable de bonne volonté qui, trouvant le logis spacieux et commode, en fit son domicile à la faveur du pavillon français ? D’après une tradition au moins bizarre, il en aurait été de même trente ou quarante ans plus tard.

Toujours est-il qu’après une lacune de moins de quatre années, vient se placer ici, chronologiquement, la mémorable tentative du comte de Béniowski, de tous points conforme aux vues de Kerguelen. – Celui-ci, en effet, dans un mémoire sur Madagascar fait ressortir les immenses avantages de la Grande-Île, et particulièrement de la baie d’Antongil et de l’île Marosse[7].

L’on a vu, d’ailleurs, comment, en février 1774, la division Kerguelen relâcha dans ces parages lorsque s’y établissait le héros de l’ouvrage dont le présent épilogue historique est le complément.

Une faute à jamais déplorable fut commise en septembre 1776, lorsqu’on retira au comte de Béniowski le mandat qui lui avait été confié. Persécuté, calomnié, trahi, au lieu d’être secondé comme il aurait dû l’être, il avait en moins de trois ans, en dépit de mille obstacles, jeté les bases d’une organisation durables. Il avait parfaitement suivi la marche tracée à M. de Maudave et ne s’était laissé décourager par les dénis de promesses ni par les défauts de secours. Ses vues étaient saines. Il s’engagea constamment dans la meilleure voie et ses propositions ont toujours été celles d’un esprit clairvoyant. Il ne guerroya que contraint et forcé, car il était par système conciliateur et pacificateur, ne châtiant qu’à regret. Nul ne posséda à un plus haut degré l’art de se faire des alliés et des partisans. – Son élection d’ampancasabe ou roi des rois en est la preuve irrécusable. Ce qu’il accomplit durant le court espace de trente mois dans les pires conditions en fait de fondations, d’établissements, d’explorations, et de combinaisons du plus grand avenir ne permet point de douter que, si le reste de sa vie eût été consacré à son œuvre, et avec le concours des prédications catholiques sur lesquelles il avait compté, la grande île de Madagascar ne fût véritablement devenue la France Orientale.

Après Béniowski, comme après Maudave, Madagascar fut abandonné presqu’entièrement aux tentatives individuelles de traitants ou d’aventuriers. En 1781, le Bailli de Suffren y ravitailla son escadre, mais il n’y trouva point le grand port de guerre et de réparations qui lui eût été si utile lors de sa belle campagne de l’Inde.

On n’avait fait ni laissé faire ; et les Français, cruel dénouement, furent les auteurs de la mort de Béniowski lorsqu’il revint. « Le roi du Nord et une foule d’autres chefs l’accueillirent avec le plus vif enthousiasme, ce qui démontrait qu’une absence de près de dix ans n’avait rien changé à leurs sentiments pour lui[8]. » Est-il rien de plus douloureux que l’inique traitement fait, le 23 mai 1786, à un homme, longtemps très mal jugé, mais que l’histoire apprécie désormais en ces termes : « Le comte Béniowski était très brave, actif, rude travailleur, entreprenant à l’extrême. Aussi juste que ferme, aussi généreux qu’énergique, il savait punir et récompenser à propos. Son caractère était plein de douceur. Affable et bon, disent ses contemporains, il aimait à causer, mais il parlait peu de lui-même et avait l’art d’écouter avec complaisance. Il s’exprimait avec une étonnante facilité en neuf langues différentes. Cet aventurier cosmopolite avait, en un mot, des facultés élevées qu’il devait plus encore à la nature qu’à la brillante éducation qu’il avait reçue[9]. »

Le sage roi Louis XVI, induit en erreur sur le compte de Béniowski, avait trop à cœur les intérêts maritimes et coloniaux de la France pour oublier Madagascar. Aux derniers jours de son règne, alors que les troubles révolutionnaires de la mère-patrie le rendaient impuissant à en faire le bonheur, au commencement de 1792, il envoya dans la grande île africaine, en qualité de commissaire civil, Daniel Lescallier, mandataire excellemment choisi, qui revint en 1796, sans avoir rien pu fonder, entravé qu’il fut par le mouvement révolutionnaire.

Et par la même cause, à la même époque, échouèrent aussi les derniers efforts de la propagande catholique pour la conversion des indigènes.

Ainsi finit le xviiie siècle.


Le xix[[e}} commença moins défavorablement. Conformément aux rapports de Bory de Saint-Vincent au premier consul Bonaparte, on reconnut que « Madagascar seul pouvait donner à la France une position forte dans la mer des Indes ». En conséquence, Tamatave devint le chef-lieu de nos établissements, et en 1804, d’importants travaux d’occupation y furent entrepris, sous l’impulsion du général Decaen, gouverneur de l’Île-de-France, par l’agent général Sylvain Roux. Mais ce que l’on aurait si aisément pu faire en trente ans d’efforts continus, c’est-à-dire depuis la fatale révocation de Béniowski en 1776, était à peine ébauché en 1810, lorsque les Îles-de-France et de Bourbon tombèrent au pouvoir des Anglais. Sylvain Roux dut capituler. Tamatave et Foule-Pointe, hors d’état de résister, arborèrent les couleurs britanniques.

Désastre plus grand s’il est possible, les Anglais s’immiscèrent dans les querelles des indigènes sur lesquels, par l’effet d’une fatale coïncidence, commençait à peser la domination d’une peuplade, à peine connue jusqu’alors et qui allait devenir prépondérante. Les Hovas que Béniowski ne nomme point, bien qu’il paraisse avoir pénétré, en 1785, jusqu’aux plateaux où ils s’étaient fixés, et même y avoir fondé cette Palmyre dont il comptait faire sa capitale, les Hovas que le vieux Flacourt désigne sous le nom de Vohitz-Anghombes (peuples habitants les montagnes de l’Aurore), sont issus des Malais et s’en font gloire. Méprisés par les autres Malgaches, sortes de parias, impurs et abjects dont le contact était une souillure, mais très belliqueux, remuants, actifs, rusés et plus réfléchis que la plupart des autres insulaires, ils venaient d’avoir pour chef Dian Ampouine, homme de caractère, qui les avait soumis à des lois draconniennes dont la conséquence fut d’élever leur niveau intellectuel. Ainsi, sous peine de mort, il défendait l’usage des liqueurs fortes. Après un règne fort long, il était mort à l’âge de soixante-cinq ans, laissant un royaume très étendu à son fils Radama, jeune prince doué de facultés et d’aptitudes d’ordre supérieur. Les Anglais entrèrent immédiatement en rapports avec lui. Ambitieux et brave, il tenait à être en relations avec des Européens pour accroître ses connaissances ; ils lui en offrirent tous les moyens et acquirent de la sorte une influence, infiniment nuisible aux Français qui, agissant sans esprit de suite, avaient eu le grand tort d’abandonner successivement leurs meilleurs pionniers sur la grande île de Madagascar.

La France y a occupé tour à tour Sainte-Luce, Fort-Dauphin, Matatane, Mananjary, Tamatave, Foule-Pointe, Fénérive, Tintingue dont la baie est l’une des belles du monde, l’île Sainte-Marie, la superbe baie d’Antongil avec le port Choiseul et un certain nombre de points secondaires. La perte de l’île Maurice diminuait sa puissance, et les Anglais achevaient d’anéantir son prestige. Parmi les indigènes, il lui restait pourtant des partisans fidèles, les uns à Sainte-Marie et dans les parages avoisinants, les autres dans le pays d’Anossi, où notre premier établissement avait été fondé.

Faut-il croire que Fort-Dauphin fut, durant de longues années, à travers tant de mécomptes, le séjour d’un Allemand qui le lui gardait en se qualifiant d’agent de la France ?[10] C’est de tradition et donne une assez faible idée de l’appui qu’elle donnait à ses nationaux.

Elle revendiqua hautement toutefois ses anciens droits sur Madagascar qui lui étaient encore contestés malgré le traité de Paris du 30 mai 1814 et finit en octobre 1816 par obtenir gain de cause.

Radama, au lendemain de la paix de 1815, se proclamait roi de Madagascar et ne s’en tenant pas à un vain titre s’apprêtait à expulser les Français de tous les points où ils s’étaient fixés de nouveau.

Quoi qu’il en soit de la singulière tradition du résident allemand, le Fort-Dauphin tant de fois ruiné, relevé, incendié, reconstruit, pris et repris, était presque abandonné depuis dix ans quand M. Fortuné Albrand, jeune Marseillais, élève de l’école normale, en suite des plus habiles négociations, fut nommé agent commercial principal de la France en l’île de Madagascar.

Le 1er août 1819, il fit de nouveau flotter son pavillon sur le vieux fort et son arrivée, a dit un historien, mit fin aux vexations auxquelles étaient livrés sans défense ceux de nos compatriotes que les nécessités de leur commerce retenaient en ces parages.

L’étoile du nouveau roi des rois Radama commençait à briller ; peu s’en fallut qu’Albrand ne fît prédominer par lui l’influence française ; de mesquines économies administratives l’empêchèrent de remplir sa mission diplomatique, et les Anglais un moment troublés eurent tout lieu de s’en applaudir.

En 1823, Radama marcha résolument à la conquête de la côte Orientale ; le nouveau commandant de l’île Sainte-Marie, M. Blévec, protesta contre ses déprédations avec la plus grande vigueur, mais ne put que se maintenir au poste qu’il défendait.

Presque tous les points commerciaux occupés par des Français furent confisqués, et enfin, en février 1825, les Hovas expulsèrent du Fort-Dauphin un faible poste commandé par le comte de Grasse simple lieutenant d’infanterie. Ce malheureux officier eut la douleur de se retirer devant une armée entière, et réduit au désespoir dut être transporté mourant à l’hôpital militaire de Saint-Denis, (île Bourbon).

De son côté mourut prématurément, en décembre 1826, Fortuné Albrand, qui avait merveilleusement servi et contribué plus que personne à faire prospérer Sainte-Marie, où il s’était rendu depuis 1822.

Radama continuant à être hostile, prit des mesures perfides pour nous contraindre à évacuer ce dernier territoire. En même temps, toutefois, comme s’il eût été tenté de changer de politique, ce fut d’un Français, le sergent Robin, qu’il fit son généralissime en créant pour lui le grade de maréchal, et peut-être alors aurait-on été en mesure de traiter avec lui d’une manière utile à l’influence française, s’il n’était mort le 27 juillet 1828, à l’âge de trente-sept ans.

Il avait désigné l’un de ses neveux pour lui succéder ; mais les idolâtres, partisans des vieilles coutumes et profondément ennemis des tentatives civilisatrices du roi défunt, firent proclamer reine sa femme Ranavalo dont le long règne, qui débute par des crimes, n’est qu’une série d’atrocités.

La modération des Français avait été mise à l’épreuve par trop d’avanies, une expédition fut dirigée sur Madagascar sous le ministère de Hyde de Neuville. Le 19 mai 1829, l’île Sainte-Marie devint le centre d’un mouvement maritime et militaire très bien entendu, mais insuffisant. Faute des moyens nécessaires, des occasions extrêmement favorables durent être négligées. Le commandant Gourbeyre qui commandait nos forces navales obtint néanmoins à Tamatave des succès tels que, d’après une relation anglaise, s’il en eût profité, il se serait emparé de l’île entière. Ceci est évidemment exagéré. On prit néanmoins possession de la presqu’île de Tintingue. Une foule d’ennemis des Hovas s’étaient joints aux Français, et sans la révolution de juillet 1830, des mesures efficaces n’eussent pas tardé à nous assurer la jouissance complète des ports principaux de la Grande-Île. Tel était le projet du prince de Polignac ; l’on venait de prendre Alger, et il est vraisemblable que, la résistance de la reine Ranavalo eût motivé la conquête de la Grande-Île, La France eût recouvré de la sorte dans les mers de l’Inde le glorieux prestige qu’elle n’aurait jamais dû perdre.

Mais, conformément aux idées qui prévalaient sous le règne de Louis-Philippe, l’évacuation de Tintingue eut lieu en juin 1831. Nous démolîmes nos fortifications, nous mîmes le feu à nos édifices. Lamentable dénouement, malgré lequel la France maintenait tous ses droits sur ses anciennes possessions à Madagascar ; sur quoi, le chapitre des contradictions étant interminable, il fut question, dès 1832, de s’établir dans la baie Diego-Suarez, située au nord de Tintingue. Ce projet avorta.

Au bout de quelques années, en vertu d’actes de cession parfaitement réguliers, les îles de Nossi-Bé et Nossi-Cumba, en 1840, celles de Nossi-Mitsiou, de Nossi-Fali, et de Mayotte, l’une des Comores, en 1841, devinrent possessions françaises. Tous les droits de souveraineté des princes de la côte occidentale depuis la baie de Passandava jusqu’au cap Saint-Vincent nous furent de même acquis.

En 1845, à Tamatave, force fut d’user de représailles envers les Hovas et de réprimer par le canon leurs actes de violence. Les Anglais n’ayant pas moins à se plaindre que nous des exactions de la Reine Ranavalo, les deux corvettes le Berceau et la Zélée rangées sous les ordres du capitaine de vaisseau Romain-Desfossés, et la frégate anglaise le Conway, capitaine Kelly, agirent de concert. Les obus de la petite division navale incendièrent les retranchements des Hovas, dont l’artillerie fut réduite au silence ; un débarquement fut opéré ; trois cents hommes, dont quatre-vingts Anglais, s’élancèrent bravement sur l’ennemi, abattirent ses drapeaux et se rendirent maîtres de la position ; mais ce court succès eut un résultat désastreux. Les troupes de débarquement n’étaient pas en nombre, elles manquèrent de munitions, durent battre en retraite et perdirent en se retirant une vingtaine d’hommes. Les cadavres de ces malheureux restèrent sur le terrain, et leurs têtes plantées sur des sagaies y demeurèrent, dix années durant, comme un monument de la défaite des Français et des Anglais coalisés par les invincibles guerriers de la reine Ranavalo.

On ne saurait assez déplorer une faute qui s’est trop souvent renouvelée. Avec une présomptueuse témérité, on lance une poignée de braves serviteurs contre des ennemis cent fois plus nombreux, sauvages, barbares, peu redoutables en apparence, mais parmi lesquels se trouvent toujours de misérables transfuges comme ceux qui dirigèrent le retour offensif des Hovas, déjà passablement disciplinés et armés à l’Européenne sous le règne de Radama.

La France fut indignée à la nouvelle des outrages faits à nos concitoyens et de notre échec de Tamatave. Le maintien de nos droits sur Madagascar fut hautement proclamé, mais on tergiversa, l’on faiblit, on temporisa, et survint la révolution de 1848 dont les conséquences furent les mêmes que celles de la révolution de 1830.

Nous abandonnâmes encore à l’oppression des Hovas les indigènes nos alliés, nos protégés et nos auxiliaires, les Bétanimènes, les Betimsaras, les Sakalaves devenus nôtres depuis trente ans, et nombre d’autres peuplades qui comptaient sur notre protection. Les Anglais avaient pactisé avec le gouvernement de Tananarive, et malgré la généreuse initiative, la prudente habileté, la persévérance et le courage de plusieurs de nos concitoyens, MM. Laborde, Lambert, Marius Arnauld, Goudot, les révérends pères Finaz et Webber, tout était encore une fois perdu, lorsque, le 18 août 1861, la reine Ranavalo vint à mourir à l’âge de quatre-vingt et un ans.

Le prince Rakout, son fils, très favorable aux Français qu’il avait maintes fois préservés des sévices de sa mère, fut proclamé roi sous le nom de Radama II.

Sous la réserve des droits deux fois séculaires de la France, Napoléon III le reconnut, non-seulement comme roi des Hovas, mais encore comme roi de Madagascar. Et le capitaine de vaisseau Dupré, commandant la station navale des côtes orientales d’Afrique, reçut mission de représenter le gouvernement français lors de son couronnement qui eut lieu le 23 septembre 1862.

Par une lettre en date du 7 novembre 1861, Radama II avait fait part à Sa Sainteté Pie IX de son avènement au trône et de son désir de faire instruire ses sujets dans la religion chrétienne. Il avait appelé les missionnaires, il les autorisait à prêcher et à enseigner. Des écoles et des établissements de charité furent dirigés par des pères Jésuites et par les sœurs qu’ils avaient amenées de l’île de Bourbon.

Cette période durant laquelle le catholicisme concourut aux progrès de l’influence française fut malheureusement très courte. Une conspiration hideuse éclata. Le jeune Radama II périt assassiné le 12 mai 1863.

À la grande satisfaction des idolâtres et des Anglais, sa veuve fut appelée à lui succéder sous le nom de Ra-Soa-Hérina qui signifie Belle et forte. Personnellement elle était bien disposée envers les diverses missions françaises, elle se montra très tolérante, et quoique le parti hostile à la France eût repris le dessus, quoique des manœuvres eussent fait avorter les opérations de notre Compagnie de Madagascar, ce qui occasionna de fâcheux démêlés, on aurait encore pu concevoir quelques espérances, lorsqu’elle aussi mourut le 1er avril 1868, peu d’heures après s’être fait baptiser par le R. P. Jouen, supérieur de la mission catholique.

Sa cousine, la princesse Ramoma, fut proclamée reine sous le nom de Ranavalo II et, le 19 février 1869, prit pour époux son premier ministre Ra-Inilaïa-Rivoni. Ils furent baptisés et mariés par des pasteurs hovas protestants.

Sous leur règne, le protestantisme devint religion d’État. La tolérance religieuse cessa dès lors. Les héritages de plusieurs Français furent confisqués, tous nos intérêts furent lésés systématiquement, nos droits les mieux fondés furent violés au mépris de toute justice ; les peuples qui comptaient sur notre protectorat furent molestés, nos possessions acquises en vertu de traités d’une régularité parfaite furent envahies, les Hovas y arborèrent leur pavillon, ils échelonnèrent des postes sur notre territoire. Nos missionnaires eurent fort à souffrir. Depuis le 8 août 1855 où le R. P. Finaz célébra la messe à Tananarive, en présence du prince Rakout qui devint Radama II, depuis que les pères Jésuites appelés à Madagascar pour y reprendre l’œuvre de la propagation de la foi, avaient pu, en dépit des obstacles renaissants chaque jour, évangéliser, convertir, fonder des églises, baptiser et grouper des néophytes fervents, ils avaient jusqu’à la fin de 1882 miraculeusement progressé[11]. Mais le 25 mai 1883, à la nouvelle des hostilités, inévitables conséquences des procédés des Hovas, ils furent cruellement expulsés ; deux nouveaux martyrs le P. Gaston de Batz et le F. coadjuteur Martin Brutail expirèrent sur la plage de Mananjary les 27 et 28 juillet.

Le 13 du même mois, la reine Ranavalo II était morte et une jeune princesse, veuve depuis peu, qui lui a succédé sous le nom de Ranavalo III, s’est, en montant sur le trône, formellement prononcée pour la guerre :

« Ni moi non plus, a-t-elle dit, je ne permettrai jamais aux Français d’acquérir, de la terre que j’habite, la valeur d’un grain de riz[12]. »

La France, poussée à bout, s’était donc décidée à recourir aux moyens extrêmes. Le 16 du mois de mai, l’amiral Pierre s’était emparé de Mazangaye sur la côte Nord-Ouest, et le 10 juin, après avoir bombardé Tamatave, il en a définitivement repris possession le 11.

Ici commence une phase nouvelle.

La France fera-t-elle les sacrifices et déploiera-t-elle les forces nécessaires pour établir son protectorat sur tout ou partie de la Grande Île de Madagascar ? Aura-t-elle bien la sagesse et l’énergie, la volonté ferme et la persévérance sans lesquelles aucun établissement ne saurait être durable ni prospère ? Réparera-t-elle enfin les fautes innombrables du passé ?

Dieu nous garde de fléchir encore, d’être de nouveau tristement ingrats, et d’abandonner honteusement, comme nous avons tant à nous en repentir, les intéressantes et nombreuses populations indigènes qui, françaises de cœur, mettent tout leurs espoirs dans notre France occidentale dont la France Orientale devrait être la sœur bien aimée.


FIN.

  1. Voir, relativement à Ophir, Légendes de la mer, p. 77 et chap. vii, p. 79.
  2. Léon Guérin, Histoire maritime de la France.
  3. Lettre du P. lazariste Naquart à saint Vincent de Paul, – Histoire de Madagascar, par le P. de la Vaissière, t. I, p. 8.
  4. L’univers. – Îles de l’Afrique. Îles Madagascar, Bourbon et Maurice, p. 18.
  5. Le P. de la Vaissière. Hist. de Madagascar, – ses habitants et ses missionnaires, T. I. p. 19.
  6. D’après le rapport d’explorateurs officiels, au moyen d’une jetée dont la construction serait peu dispendieuse, l’on y serait à l’abri de tous les vents. – V. H. D’Escamps. Hist. et Géog. de Madagascar, p. 69.
  7. Voir Hist. maritime de la France, par Léon Guérin, édit. in-18, t. II, ch. IX, p. 359.
  8. Henry D’Escamps. Hist. et Géog. de Madagascar, ch. I, p. 53.
  9. Idem, p. 54.
  10. Michaud. Biogr. Universelle, art, Bretêche (de la).
  11. Voir H. D’Escamps, Hist. de Madagascar, p. 302.
  12. Le P. De La Vaissière, Hist. de Madagascar, T. II, p. 433.