Le Correcteur typographe (Brossard)/volume 2/06/03

Imprimerie de Chatelaudren (2p. 109-117).


III

CORRECTION SUR LE MARBRE


De nos jours la correction sur le marbre est plus rarement, pratiquée qu’elle ne l’était autrefois. Il est en effet devenu de règle presque générale — sauf de rares exceptions — d’imposer, de mettre en forme seulement quelques heures avant le tirage, alors que les corrections du bon à tirer ont été entièrement exécutées et revisées. Les épreuves en placards, en pages et pour le bon, expédiées autrefois aux auteurs après imposition, sont fréquemment tirées imposées, sans serrage ni garniture, dans une frisquette.

Néanmoins, la correction, sur le marbre, de feuilles déjà imposées se présente parfois, et il n’est pas inutile d’en indiquer sommairement la technique.

a) La forme à corriger, — que le lecteur comprendra être le côté de première d’une feuille in-8 — prise au garde-formes ou à l’emplacement indiqué, est approchée du marbre, soit à l’aide d’un chariot, soit en la poussant sur le sol, les pages 8 et 5 en bas. La forme, inclinée diagonalement, est alors boutée sur l’angle, de la page 8, le pied de la lettre du côté du compositeur. L’ouvrier qui monte seul une forme sur le marbre embrasse de la main gauche le châssis entre les pages 1 et 8, et place la main droite près de l’angle inférieur de la page 5. Levée, la forme est posée doucement sur le bord du marbre jusqu’au milieu de la page 8, puis avancée sur celui-ci jusqu’à la main droite près de la page 5. La main droite remonte alors le long du châssis entre les pages 4 et 5, pendant que la main gauche fait exécuter à la forme un quart de tour vers la gauche qui met le pied de la lettre face au compositeur placé devant le marbre. En même temps, la forme est poussée en avant. Les deux mains, ramenées jusqu’aux angles supérieurs du châssis, sans jamais abandonner la forme, l’abattent vivement, sans aucune secousse et surtout sans choc brutal, sur le marbre. Toutes les pages doivent, alors que la forme est abattue, porter entièrement sur le marbre : après le mouvement qui a ramené la forme face au compositeur, celle-ci doit donc être suffisamment engagée pour que cette dernière condition soit remplie ; faute de cette précaution, en poussant le châssis abattu, on briserait inévitablement les lettres qui, pour une raison ou pour une autre, se sont échappées par le bas et parfois obligent à relever la forme. Seuls le châssis et une partie du serrage peuvent déborder, afin de permettre aux mains d’échapper sans lâcher brusquement la forme.

Le côté de première en place, on lève sur le marbre le côté de seconde, que le compositeur place à droite du côté de première.

Si le montage de la forme sur le marbre a lieu par deux ouvriers, l’un de ceux-ci, se plaçant dans une position presque médiane par rapport au petit côté du châssis, saisit celui-ci de la main droite à l’angle de la page 5, et de la main gauche entre les pages 4 et 13 ; l’autre se place l’œil de la lettre face à lui, et met la main droite entre les pages 8 et 9, alors que la main gauche se trouve vers le milieu de la page 1. D’un même effort, tous deux élèvent la forme à hauteur du marbre, sur le bord duquel ils posent doucement le châssis par le coin de la page 8. L’un des compositeurs abandonnant la forme, celle-ci est, comme il est dit précédemment, poussée jusqu’à l’angle de la page 5 et abattue en la glissant vivement.

b) Le desserrage de la forme s’opère de la manière suivante : à l’aide d’un marteau et d’un décognoir, on desserre, dans l’ordre, et progressivement, c’est-à-dire à plusieurs reprises, les coins ou les serrages placés à la partie extrême de la page 16, ensuite les plus éloignés du grand biseau vers le pied de la page 8, ceux placés vers la têtière, sur les pages 8 et 1, puis ceux près du petit fond vers la page 16 et la page 1, enfin les derniers ceux de la page 1. On en fait autant, et dans le même ordre, pour l’autre partie du châssis. Pour donner à la composition le jeu nécessaire, les coins sont retirés de la forme, parfois aussi les biseaux et une fraction de la garniture, et placés en dehors, le long du châssis, si la correction comporte des remaniements importants ; plus souvent, les coins sont seulement poussés plus ou moins vers la partie plus mince des biseaux, pour conserver un léger serrage et donner cependant quelque jeu à la page.

c) Le corrigeur lève soigneusement en ordre, dans un composteur spécial dit composteur de bois, les corrections marquées en marge de l’épreuve ; les lettres sont placées, comme dans un composteur ordinaire, cran dessous. L’ouvrier se munit, en outre, d’espaces assorties, de quelques cadrats et cadratins qu’il place vers sa droite à portée de la main, sur une macule, un papier fort, ou mieux dans une « boîte à corrections », contenant également des divisions. On donne un peu de jeu à la page à corriger, en poussant légèrement, avec le bout des doigts, les lignes vers les coins du bas.

L’exécution des corrections simples, c’est-à-dire n’obligeant à aucun remaniement, se fait de la même manière que si la correction avait lieu en galée. Les lettres de remplacement sont prises successivement, sur le composteur de bois, dans leur ordre d’emploi ; les lettres retirées de la forme sont placées, lorsqu’il est possible, sur le même composteur, mais à l’extrémité opposée à celle occupée par les lettres de correction, et le cran en dessus, afin d’éviter toute erreur : les lettres bonnes seront ultérieurement distribuées ; les lettres abîmées sont déposées sur une macule afin d’être mises à la boîte à fonte.

La justification des lignes corrigées sera vérifiée avec le plus grand soin : sur le marbre et en forme, cette opération est, en effet, plus difficile à exécuter que dans la galée : dans celle-ci où la composition se présente complètement à découvert d’un côté, le doigt s’appuyant sur toute la hauteur de la lettre permet d’apprécier, si, par rapport à ses voisines et à l’interligne, la ligne est forte, faible, ou de justification convenable ; dans la forme, alors que la ligne est enserrée de tous côtés par des lingots ou des garnitures, le toucher ne peut s’exercer aisément que sur une fraction, le tiers supérieur environ, de la hauteur de la lettre.

d) Les corrections obligeant à un remaniement de deux ou trois lignes au plus peuvent être faites sur le marbre, sans retirer de la forme le texte à corriger, bien que ces rectifications soient toujours difficultueuses à exécuter, et que l’espacement comme la justification laissent toujours à désirer si on n’y apporte pas des soins exceptionnels. Mais les modifications importantes — bourdons, doublons, ajoutés ou suppressions, nécessitant la reprise de la composition sur une certaine longueur — ne sauraient être effectuées de la même manière : aussi bien par raison d’économie de temps, que pour une plus grande facilité et une meilleure exécution du travail, il est nécessaire de repasser la composition au composteur.

Le passage à reprendre est légèrement mouillé sur les bords, afin d’éviter la chute des lettres des extrémités de lignes ; s’il est utile, les garnitures de tête et de pied accompagnant la page sont retirées, afin de laisser autour de cette dernière le plus de jeu possible. À l’aide du pouce et de l’index de chaque main, insérés au delà des interlignes accompagnant le début et la fin du passage à reprendre, le texte est entièrement dégagé des lignes voisines ; puis il est retiré de la forme de la manière employée pour l’enlèvement d’un texte à remanier placé dans une galée ; transporté sur une galée, cran dessus, il est alors repris et repassé au composteur de la même façon qu’un texte ordinaire. Corrigée et vérifiée sur le plomb, afin d’éviter de nouvelles erreurs exigeant une nouvelle correction, la composition est replacée dans la forme, et on procède à la remise en place des garnitures, biseaux et coins.

e) Le report d’une ou de plusieurs lignes d’une page à la page suivante ou à la précédente est une opération minutieuse, qui exige de la part du compositeur une attention scrupuleuse et une connaissance approfondie de l’ordre de succession des pages dans la forme ; il est, en outre, indispensable d’avoir en même temps, sur le marbre, les deux formes — côté de première et côté de seconde — composant la feuille.

Le compositeur ménage, tout d’abord, dans la page à laquelle s’arrêtera le report, l’emplacement nécessaire pour insérer la ou les lignes reportées : cet emplacement est obtenu soit par la suppression, en bas ou dans le corps de la page, d’un blanc facultatif ou devenu inutile, soit par l’exécution d’une correction indiquée à cet effet par l’auteur, soit encore, à défaut d’autre moyen, par la disparition, s’il est possible, de lignes à cadrats dont le texte est gagné en remaniant quelques lignes. Au lieu d’être rencontré dans une seule page, l’emplacement exigé doit parfois être cherché, par les moyens indiqués ci-dessus, dans les pages qui sont successivement intéressées par le report à effectuer. Grâce à ses connaissances techniques, le corrigeur doit pouvoir apprécier, à coup sûr, la méthode la plus avantageuse et la plus expéditrice.

La méthode est semblable, et la manière d’agir ne diffère dans aucun cas, que le report ait lieu en chassant le texte sur les pages suivantes, ou en le gagnant sur les pages précédentes.

Les lignes gagnées, et l’emplacement ménagé — soit sur une seule page, soit sur plusieurs, comme on l’a indiqué — le texte de la dernière page intéressée par le report est serré en le poussant jusqu’au bas si le report a lieu en chassant, c’est-à-dire sur les pages suivantes : sous le folio, est ainsi obtenu un blanc, dans lequel on place, pour le remplir, le nombre de lignes voulu prises en pied de la page précédente ; le texte de cette deuxième page est, à son tour, serré et descendu, pour faire place sous le folio à un nombre de lignes de la page antérieure équivalent à la grandeur du nouveau blanc obtenu ; à son tour, la composition de la troisième page est serrée et descendue, donnant encore sous le folio un blanc comblé comme antérieurement. Pour toutes les pages intéressées, l’opération se répète, la même — et de plus ou moins grande importance, suivant que le blanc ménagé sous le folio est plus ou moins fort — jusqu’à la page où la correction qui a nécessité le remaniement se trouve remplir entièrement le blanc obtenu.

Le corrigeur ne doit pas oublier — et c’est là toute la différence d’avec la méthode qui vient d’être expliquée, mais différence d’importance capitale — que, si le report a lieu en gagnant, c’est-à-dire en remontant sur les pages précédentes, « la composition doit être serrée sur le folio » : le blanc obtenu, et destiné à être rempli par les lignes du report à prendre en tête de la page suivante, se trouve en bas de page : l’opération du remaniement s’exécute dès lors en sens inverse de la précédente.

f) La transposition de plusieurs pages imposées s’opère d’une manière fort simple : remplacement de l’une ou, s’il est nécessaire, de plusieurs des pages à transposer est, tout d’abord, préparé, par l’enlèvement de la forme et la mise en galée d’une ou de deux des pages dont l’emplacement est erroné ; puis la transposition s’exécute en plaçant à l’endroit qu’elles doivent occuper chacune des pages dont l’imposition était à rectifier.

Si le texte seul est à transposer, le corrigeur n’oubliera pas, afin d’éviter une nouvelle erreur, de conserver aux folios la place qu’ils occupaient.

g) Lors de la correction sur le marbre, le corrigeur peut avoir à modifier l’espacement d’une ligne ou forte ou faible.

Il ne faut pas oublier que la ligne forte peut provenir d’une ou de plusieurs interlignes fortes également, sur lesquelles le compositeur a inconsidérément justifié sa composition ; d’autre part, une ligne paraîtra faible, parce que les interlignes qui l’accompagnent sont elles-mêmes fortes et butent sur la garniture ou le lingot voisin. Dans ces divers cas, pour remédier utilement au mal, il faut, préalablement à toute correction, remplacer les interlignes défectueuses par d’autres de longueur convenable.

h) Une garniture faussée ou mutilée, un lingot en mauvais état, utilisés dans les blancs d’un texte, peuvent, à un coup d’œil superficiel, laisser supposer une justification défectueuse et aussi l’emploi d’une espace ou d’une lettre d’un corps supérieur à celui du texte ; un examen attentif conduira simplement au remplacement de la garniture mauvaise, et un lingot irréprochable rétablira l’aplomb du texte ou donnera aux lignes le serrage qui leur fait défaut.

i) Dans une composition interlignée, une interligne déformée ou mâchée produit une rupture d’alignement horizontal qu’il importe de faire disparaître.

Un fait analogue se produit par le chevauchement l’une sur l’autre des extrémités d’interlignes employées en deux ou plusieurs morceaux ; dans ce dernier cas, l’emploi de longueurs d’interlignes de forces différentes conduit à un défaut semblable ; un alignement défectueux se remarque parfois également lorsque l’interlignage est composé de plusieurs interlignes dont les unes comprennent deux ou plusieurs morceaux, et les autres des interlignes de longueur de justification complète : une transposition peut en effet se produire lors de l’interlignage, et les interlignes complètes se trouvent coincées entre une fraction d’interligne placée avant elles, et une autre fraction placée après elles.

j) L’interlignage de la composition avec deux ou plusieurs fractions d’interlignes d’égale longueur produit une ligne verticale de moindre résistance qui, sous l’influence d’un choc même léger, donne naissance, avec un serrage défectueux ou pour tout autre motif, à un point de rupture fréquent, dont les imposeurs ne se méfient pas suffisamment, mais dont le corrigeur se gardera ; un inconvénient analogue se rencontre si les fractions d’interlignes, bien que d’inégale longueur, ne sont pas interverties, car la ligne de moindre résistance et le point de rupture existent également.

k) Une garniture, une interligne, des lettres ou des espaces auxquelles adhèrent des matières étrangères produisent toujours un chevauchement de la composition d’aspect disgracieux. Il ne suffit pas de chercher, inutilement d’ailleurs, à redresser avec les pinces les lettres ou les signes ; pour obtenir un résultat, il est nécessaire de retirer les lettres, les espaces, les interlignes ou les garnitures, et de les débarrasser soigneusement de toute scorie, avant leur remise en place.

l) Les interlignes courtes produisent un chevauchement des lettres ou des signes d’épaisseur minime placés à l’extrémité, fin ou début, des lignes. Il est difficile de remédier à ce défaut, sinon par le remplacement des interlignes défectueuses ; quel que soit en effet le soin apporté par un corrigeur à la correction de ce défaut, il est certain qu’il se répétera chaque fois que la forme sera desserrée.

m) Dans les pages imposées, une ou plusieurs lettres ou espaces d’un corps supérieur ou inférieur donnent lieu à des défauts qu’il est important de signaler :

1° Si la composition est interlignée, l’introduction ou la présence d’une lettre d’une force de corps supérieure à celle employée produit inévitablement une courbure : les lettres immédiatement voisines, maintenues seulement sur leurs parties latérales, et encore de manière parfois insuffisante, risquent de s’échapper, lorsque les formes seront relevées ; une lettre de corps inférieur s’échappera de même.

Une pratique fort simple permet de remédier à ces inconvénients : après un serrage préliminaire le corrigeur sonde la forme, c’est-à-dire la soulève légèrement en saisissant des deux mains le côté du châssis placé devant lui et s’assure que l’ensemble est d’aplomb et tient parfaitement.

Toute sonnette, quelle qu’elle soit, lettre ou espace, s’échappant de la forme lorsque celle-ci est sondée, oblige à un examen immédiat et attentif de la partie de la composition où elle est trouvée, si l’on veut, avec certitude, éviter un accident ultérieur plus grave.

2° Dans une composition compacte, c’est-à-dire non interlignée, les lettres d’une force de corps différente, ou inférieure ou supérieure, peuvent, soit au moment du serrage, soit au cours du tirage, occasionner un soleil : les lignes s’enchevêtrent les unes dans les autres, simulant une mise en pâte, par suite d’un bouleversement complet du texte.

n) Un léger chevauchement se produit encore, impossible à éviter, par la répétition verticale successive, au même endroit, dans un texte compact, de la même lettre : ce défaut tient, semble-t-il — particulièrement lorsque la fonte est neuve — à une très minime différence de force de corps, et s’accentue en raison de la répétition plus fréquente de la même lettre. Il est rare que l’on parvienne à remédier à ce désagrément, et le serrage convenable de la forme est alors particulièrement difficile.

o) Un biseau en mauvais état, un coin mal placé, un serrage exagéré produisent dans le bas de la page un creux ou un ventre désagréables à l’œil. Certaines pages, toutes de guingois, donnent à craindre qu’elles ne se rompent au moindre effort, et il est nombre de celles-ci aux défauts desquelles aucun remède ne peut être apporté : garnitures et interlignes ont subi une telle pression qu’elles sont irrémédiablement faussées ; la nécessité de leur remplacement s’impose, si le compositeur veut rendre aux pages la quadrature impeccable qui leur est indispensable pour plaire à l’œil.

p) Les tableaux, les alignements, les opérations mathématiques ou algébriques, les parangonnages et, surtout, les habillages parfois si compliqués des gravures doivent être l’objet des soins les plus attentifs du corrigeur, lorsqu’il doit y effectuer quelque correction.

Plutôt que de reprendre un habillage défectueux, de retailler un bois mal équerré, trop de typographes insouciants se bornent à bourrer de papier humide une composition à l’équilibre plutôt instable. Les espaces de Limoges remédient toujours insuffisamment, au chevauchement constaté ; en glissant, lors d’un desserrage ultérieur, ces morceaux de papier mouillé peuvent occasionner un désagrément plus important que celui auquel, grâce à eux, on avait pensé obvier.

Quelque précieux que soit le temps, une heure passée à une correction rationnelle est souvent plus avantageuse que dix minutes consacrées à une réparation de fortune.

q) Enfin, le corrigeur ne doit pas oublier qu’un châssis, lui aussi, présente parfois des défauts qui ont leur répercussion sur l’ensemble des pages imposées : si le châssis est trop faible, au moindre serrage, ses côtés s’écartent, et la composition fait le creux ; si le châssis est de construction normale, un serrage exagéré produit le défaut opposé à celui qui vient d’être signalé : les côtés se soulèvent légèrement, et la composition fait le ventre. Un châssis faussé, mal équerré, donne une imposition dans laquelle les pages n’ont plus ni aplomb, ni quadrature.

Le remède est simple, et il n’en est pas d’autre dans ces divers cas : changer le châssis.

r) La correction terminée, les garnitures remises en place, ainsi que les biseaux et les coins, le compositeur enlève son composteur, sa « boîte à correction », et, le cas échéant, la macule sur laquelle il a déposé les lettres à jeter au cassetin au diable ; puis, il serre légèrement. D’un coup d’œil rapide, l’ensemble de la forme, et particulièrement les bords des pages sont examinés. Toute irrégularité, tout chevauchement sont aussitôt l’objet d’une dernière correction. La forme est taquée doucement et lentement, afin de faire descendre les lettres qui lèvent, sans briser celles que le taquoir rencontre ; puis elle est sondée : pour cette opération, les deux mains sont placées, les pouces en dessus, sous la barre du châssis amené jusqu’au bord du marbre, et la forme est à petits coups et à plusieurs reprises soulevée légèrement au-dessus de celui-ci ; si aucun défaut ne se révèle, si aucune sonnette ne frappe le marbre, la composition est serrée définitivement.

L’ouvrier tire alors la forme vers lui, de manière à dégager du marbre en partie les coins et les biseaux, le texte restant appuyé en entier. Les deux mains saisissent le châssis aux angles, la paume en dessous, les doigts repliés sur les barres verticales, et le pouce au delà de l’angle sur la barre horizontale. D’un même mouvement le compositeur relève vivement la forme et la tire davantage vers lui ; il s’assure qu’aucune sentinelle, ou lettre s’échappant d’une page, ne reste debout sur le marbre ; puis, la forme dressée, la main gauche descend sur la barre verticale près des pages 3 et 6, pendant que la droite se place entre les pages 2 et 7. À l’aide de cette dernière main la forme, à laquelle on a fait exécuter un quart de tour vers la droite de manière à la placer non plus en face, mais sur le côté du compositeur, est alors amenée au delà du marbre, jusqu’à ce que la main droite, se glissant sous le châssis, puisse saisir celui-ci par l’angle de la page 7. L’extrémité de la forme reposant sur le marbre est alors légèrement relevée, de manière que l’angle soutenu par la main droite bascule en avant, le dos du châssis glissant doucement sur le bord du marbre. Le marbre abandonné, la forme est posée à terre, sans secousse, sur l’angle de la page 6, et mise en réserve ou envoyée aux machines : ou encore le compositeur, maintenant le châssis appuyé légèrement contre lui, sur les bras droit et gauche fortement tendus, porte ce côté de seconde à la presse à épreuve.