Le Correcteur typographe (Brossard)/volume 2/02

Imprimerie de Chatelaudren (2p. 14-55).


CHAPITRE II

NOTIONS PRÉLIMINAIRES



I

LA LETTRE


On appelle lettre un parallélipipède, ou mieux un hexaèdre, de fonte, offrant à son extrémité supérieure la représentation en relief, renversée de la tête au pied, d’une figure de l’alphabet ou d’un signe nécessaires à la composition et destinés à être reproduits sur le papier.

Le mot « lettre » ne doit pas être confondu avec le terme caractère, sous lequel on comprend l’ensemble des lettres ou des signes employés en imprimerie.

D’une manière générale, on dit que le typographe manque de lettre, ou n’a pas de lettre, pour composer ; il demande de la lettre pour distribuer ; il lève la lettre, quand il compose.

Classée par catégories semblables, par mêmes espèces, la lettre prend le nom de sortes.

Si, lorsque le compositeur fait sa casse, quelques cassetins débordent, il est nécessaire de les survider avant de composer ; l’ouvrier enlève les sortes surabondantes ; si, au contraire, d’autres cassetins ne sont pas suffisamment remplis, le typographe demande les sortes manquantes.

Dans la lettre on remarque :

a) La hauteur en papier : la lettre étant placée dans le composteur dans sa position normale, la hauteur en papier s’entend du pied jusqu’à la surface de l’œil : la hauteur est forte, si elle excède, en mesures anciennes, 10 lignes 1/2 géométriques, soit en mesures métriques 23mm,6 où 62 points 3/4 ; à l’impression, le foulage produit une lettre noire, parfois encrassée, qui se détériore rapidement ; au contraire, la hauteur est faible, si elle est inférieure à 23mm,6 : alors la lettre manque de foulage, elle marque imparfaitement au tirage.

b) La force de corps, distance totale occupée par la tige de la lettre placée dans le sens vertical de l’œil : cette distance s’exprime en points typographiques et sert à classer chaque lettre par catégorie de corps. On dit :

Ce b est du 8 ;
Ce t est du 11 ;
C’est du 9.

La force de corps se définit aussi de la manière suivante : avec une composition interlignée, la lettre étant placée en position normale dans le composteur, sa force de corps est égale à la distance qui sépare l’interligne inférieure de l’interligne immédiatement supérieure.

Toutes les lettres d’un même corps doivent posséder une force de corps rigoureusement identique : composant dans un ordre régulier un certain nombre d’alphabets (lettres bas de casse, grandes capitales, petites capitales, chiffres, etc.) et les superposant, aucune lettre ne doit dépasser les autres, si leur force de corps est analogue ; à l’impression, l’alignement horizontal ne laisse rien à désirer, ainsi que le montre l’exemple ci-dessous :

c) L’épaisseur : c’est le rapport qui existe entre une ou plusieurs lettres considérées par rapport aux autres, dans un même corps, au point de vue de la place que respectivement elles occupent de gauche à droite, dans le sens horizontal.

L’épaisseur des lettres est très variable : minime pour l, i, t, elle est moyenne pour n, p, b, etc., et forte pour m.

Pour une même lettre considérée isolément dans des corps différents, l’épaisseur diffère suivant la force de corps, la grosseur d’œil, et selon que cette lettre est petite capitale, grande capitale, bas de casse de caractère romain, italique ou gras.

Toutefois, dans nombre de travaux, tableaux, opérations, alignements, tables, etc., pour obtenir un alignement vertical parfait, les chiffres, certains signes de ponctuation, quelques lettres abréviatives ou signes courants sont fondus, dans chaque corps, sur une épaisseur constante et régulière, le demi-cadratin.

d) Le pied, partie sur laquelle la lettre repose : c’est l’opposé de l’œil ; le pied est muni d’une « gouttière » produite mécaniquement lors de la fonte et provenant de la romprie du jet.

e) L’œil : c’est la partie en relief, le sommet — à l’opposé du pied — de la lettre ; cette partie porte le type, la figure proprement dite du signe alphabétique, et doit, seule, marquer à l’impression. Généralement, l’œil est proportionné à la force de corps ; il peut cependant se trouver ou plus faible ou plus fort, comparativement aux proportions ordinaires : le caractère est alors, suivant les cas, appelé petit œil, gros œil. On dit :

8 Virey n° 25 gros œil ;
8 Turlot n°  9 petit œil.

f) Le talus, partie coupée en biseau tout autour de l’œil qu’elle dégage (talus de tête, talus de pied, talus de côté), est dû à la nécessité d’abattre les angles de la lettre qui, sans cette précaution, marqueraient au tirage. Suivant la qualité de la fonte, la matière étant faible ou forte, le talus est plus ou moins prononcé, l’œil ayant plus ou moins besoin de soutien.

Lorsque les lettres n’ont aucun prolongement, ou queue, ni inférieur, ni supérieur (e, o, m, r), le talus existe de tous côtés ; là où il y a un prolongement (b, p, t, g), le talus est entièrement, ou en partie, supprimé de ce côté ; les lettres pleines (j) ne comportent presque pas de talus de tête et de pied.

g) Le cran est une entaille demi-circulaire faite mécaniquement, lors de la fonte, dans le tiers inférieur de la lettre. Le cran, placé en France et en Belgique du côté des accents, indique au compositeur le sens dans lequel la lettre doit être placée : lorsque, dans le composteur, la lettre est dans sa position normale, le cran ne peut être vu, il apparaît seulement à la distribution. En Angleterre, en Amérique et en Allemagne, le cran, à l’opposé des accents, est visible dans le composteur, mais il n’apparaît pas à la distribution.

Le cran sert encore à différencier, pour une même force de corps, les divers genres de caractères que peut posséder une imprimerie, et aussi, afin d’éviter un mélange regrettable, à distinguer une fonte neuve d’une fonte usagée. Dans ces cas, au cran initial de fonte le fondeur ajoute, mécaniquement ou à la main avec le rabot, un ou deux crans supplémentaires, ou même davantage, situés à côté du cran initial ou dans le tiers supérieur. On dit :

9 Didot n° 75, 1 cran bas, 1 cran haut ; 10 Turlot n" 9, 2 crans bas ; 8 Turlot n" 9, 2 crans bas, 1 cran haut ; 7 Turlot n" 9, 1 cran bas, 2 crans hauts.

Afin d’éviter entre certaines lettres, petites capitales et bas de casse, o, v, s, x, une confusion possible :

les petites capitales reçoivent, dans le tiers supérieur de la lettre et du côté opposé au cran initial, conséquemment aux accents, un cran secondaire.

Les parties verticales de la lettre, appelées jambages ou hastes, sont toujours plus fortes, plus grasses : ce sont les pleins. Les parties horizontales, circulaires ou contournées, plus maigres, sont les déliés ou terminaisons.

Les lettres b, d, h, i, k, m, n, p, r, l, u, portent à leur partie supérieure, et vers la gauche, un léger trait nommé obit ou empattement de tête :

les lettres f, h, i, k, l, m, n, p, q, r, ont, à droite et à gauche de leur prolongement ou partie verticale inférieure, un mince filet d’égale longueur, appelé empattement de pied :

l’obit est double, c’est-à-dire gravé à droite et à gauche, dans les lettres v, x, y :

dans la lettre u l’empattement de pied est placé vers la droite :

Les lettres sont classées en plusieurs catégories : les longues sont celles dont les jambages débordent au delà de la ligne, soit à la partie supérieure, soit à la partie inférieure :

b, d, f, g, h, i, k, l, p, q, t, y  et la plupart des grandes capitales ;

les courtes constituent la ligne proprement dite, occupant seulement la partie médiane de la ligne :

a, c, e, m, n, o, r, s, u, v, x, z  et les petites capitales ;

les pleines s’étendent de chaque côté au delà de la ligne, d’une quantité régulière pour les unes, d’une fraction inégale pour d’autres :

Les lettres de caractère italique ne suivent pas obligatoirement la classification des lettres romaines. Ainsi les lettres


sont pleines, et non pas longues ; différentes lettres italiques d’elzévir s’écartent, elles aussi, de la catégorie dans laquelle est classée leur correspondante romaine, telle la lettre


qui également est pleine. — Aucune règle ne peut être indiquée sur ce point, chaque genre de caractère possédant des signes particuliers dont le choix varie suivant le goût et les idées des maîtres fondeurs et des dessinateurs.


II

CARACTÈRE


Le mot caractère est un terme générique qui comprend les diverses espèces de lettres ou de signes en usage dans l’imprimerie.

On dit, en classant les caractères par identité de corps et d’œil : gros caractère, petit caractère, caractère compact, caractère poétique, caractère de fantaisie, etc.

Deux caractères différents de même corps ont rarement une épaisseur uniforme : cette dernière proportionnée à l’œil — gros, moyen, petit, allongé ou maigre — fait gagner ou perdre dans la composition.

Un caractère gagne ou perd sur un autre lorsque dans un nombre déterminé de lignes de même justification il entre plus ou moins de texte, et dès lors de lettres. Plus un type est petit et mince, plus il gagne sur un plus gros ; et, inversement, plus ce type est gros, plus il perd sur un plus petit.

Si, pour éviter de perdre ou pour gagner, le typographe doit composer avec des espaces moyennes, on lui recommande d’aller serré, ou d’aller au regagnage ; quand, au contraire, le compositeur est obligé d’espacer très largement, d’employer de grands blancs, on dit qu’il chasse.

La connaissance de quelques notions relatives aux différents genres de caractères est indispensable aux correcteurs, car il ne suffit pas d’apprendre les noms et les désignations des types usités couramment, non plus que de savoir que tel ou tel caractère est égyptien, et tel autre romain : il faut encore connaître, au moins succinctement, les relations qui existent entre leurs genres, afin d’éviter aussi bien dans la composition des textes courants que dans celle des travaux de ville ces heurts de goût qui produisent à l’œil des effets désastreux.

Entre les antiques et les romains, comme entre chacun des autres genres, il est nécessaire d’établir une gradation raisonnée ; une transition habilement ménagée plaira au lecteur et lui fera oublier les inégalités choquantes qui auraient pu lui déplaire en d’autres circonstances.

L’éducation de l’œil est dès lors un devoir que le correcteur ne saurait négliger, en raison de l’obligation qui lui incombe de signaler les erreurs de goût qu’un typographe négligent ou malhabile est exposé à commettre.


CARACTÈRES DE TEXTE


Il existe, pour la composition au texte courant des labeurs, un grand nombre de caractères de genres différents. On peut les ramener à quelques familles :

a) Le caractère romain proprement dit, dont, vers la fin du xve siècle, le fameux graveur champenois Nicolas Jenson fut le créateur et, au xviiie siècle, Didot le rénovateur. Transformé par les fondeurs du siècle suivant, il s’est subdivisé en caractère genre français, avec des déliés et des pleins admirablement proportionnés ; caractère genre anglais, plus maigre et avec des pleins moins gras ; enfin, caractère genre anglo-français, qui tient des deux précédents.

À ces caractères se rattachent une infinité de variantes dont, à l’œil, la lettre apparaît plus grasse, plus maigre, plus allongée ou plus étroite[1].

b) Le caractère elzévir[2] : ce type est tiré directement des caractères des inscriptions de l’ancienne Rome : son créateur fut le Français Nicolas Jenson qui l’employa pour la première fois à Venise vers 1468. La gravure de ce type, qui devait supplanter le gothique venu d’Allemagne, et même être le seul en usage dans les pays de langue romaine, du xvie au xviiie siècle, fut perfectionné peu à peu jusqu’au moment où la famille Elzevir, célèbres imprimeurs hollandais du xviie siècle, en fit un emploi exclusif pour l’impression de ses ouvrages. M. Beaudoire fut, en France, le rénovateur de ce caractère, et lui donna le nom sous lequel il est désormais connu. Ce type est encore d’un emploi fréquent et presque général dans les pays de langue anglaise et allemande ; en France, on le réserve plus spécialement pour la composition des éditions, brochures ou plaquettes de luxe :

c) À chacune de ces deux premières familles correspond, comme œil et comme alignement, un caractère italique[3], incliné comme l’écriture manuelle et reproduisant vaguement tantôt les formes de celle-ci, tantôt, au contraire, celles du romain ou de l’elzévir :

d) Les caractères gras, qui se subdivisent :

1o En égyptiennes, appelées, suivant les circonstances, larges, serrées, compactes ou allongées :

2o En normandes ou romains gras :

3o En doriques, avec la plupart du temps pour chacun d’eux leurs italiques correspondants.

e) Enfin, le caractère gothique, le premier qui ait servi à l’impression, encore en usage pour les impressions de texte courant dans les pays de langue allemande et Scandinave, d’où il tend toutefois à disparaître pour faire place aux caractères elzévir et genre anglais.

Les caractères courants de labeur se désignent ordinairement par le nom du fondeur et le numéro de son album, qui tous deux suivent l’indication du corps. On dit :

7 Turlot n° 9 ;
9 Didot n° 75 ;
10 Elzévir anglais Turlot n° 6.


CARACTÈRES DE TITRES


Dans le genre classique, les caractères de titres peuvent, eux aussi, malgré leur grande variété, se ramener à trois familles : romaine, égyptienne, antique :

a) Les romaines, et dans cette catégorie rentrent les types elzévirs, sont caractérisées par des gras plus ou moins pleins et des déliés maigres.

Les romaines se subdivisent en initiales classiques, bretonnes, serrées, ordinaires, larges, effilées, anglaises, modernes, etc.

Parfois, pour certains de ces caractères les fondeurs ne gravent point de lettres bas de casse ; les lettres ne comportent dès lors aucun talus ou latéral ou de pied et de tête, et elles sont utilisées surtout pour les titres et les annonces[4].

Pour permettre l’emploi simultané dans une ligne, et parfois dans un mot, d’initiales de même famille, mais de corps différents, les fondeurs donnent en pied à tous les corps une sorte d’alignement systématique.

b) Les égyptiennes se rapprochent beaucoup des romaines, mais leurs pleins sont généralement plus accentués pour un même corps, et leurs déliés beaucoup plus gros atteignent près des deux tiers de l’épaisseur des pleins.

Les subdivisions des égyptiennes sont encore plus nombreuses que celles des romaines ; elles comprennent dans leurs dérivés une grande partie des caractères de fantaisie.

c) Les antiques, ou lettres à bâtons, ont tous leurs traits presque de la même épaisseur ; elles ne portent à leurs extrémités aucune arête, c’est-à-dire ni obit ni empattement, comme les deux familles précédentes.


CARACTÈRES DE FANTAISIE


Aux différents genres qui viennent d’être énumérés rapidement il faut ajouter, bien qu’ils soient d’un emploi fort restreint dans les labeurs, les caractères de fantaisie et les caractères d’écriture :

a) Les caractères de fantaisie sont par trop nombreux, leurs différences sont par trop grandes, suivant les fondeurs, pour qu’il soit possible de les classer par catégories spéciales.

On se contente de les rattacher à l’un des types précédemment examinés et dont ils dérivent fréquemment : romaines, égyptiennes ou antiques.

b) Les caractères d’écriture sont :
xxxx1o La coulée et la bâtarde, qui se rapprochent des formes de l’italique et sont penchées ainsi que lui ;
xxxx2o La ronde, caractère vertical, rappelant l’écriture manuscrite de ce nom ;
xxxx3o L’anglaise, ou cursive, qui reproduit l’écriture courante, ses liaisons de lettres entre elles, ainsi que l’inclinaison.
xxxx4° Nombre d’auteurs rangent — avec raison, étant donnés les usages actuels — au nombre des caractères d’écriture la gothique, imitation de l’écriture du xve siècle, dont l’emploi a été rappelé plus haut parmi les caractères de texte.

Certaines lettres minuscules des caractères d’écriture reçoivent deux et même parfois trois formes différentes, que l’on utilise suivant que ces lettres doivent être placées au commencement, à l’intérieur ou à la fin du mot[5].


III

POLICE


La quantité de lettres et de signes nécessaire pour exécuter un travail déterminé, ou demandée à un fondeur lors de l’acquisition d’un caractère, est désignée sous le nom de police.

a) Une police de caractère contient, d’après les catalogues de fondeurs, 139 sortes diverses[6], non compris les 16 lettres supérieures le plus couramment usitées[7] :

Bas de casse :
Bas De a à z 
 25 sortes
Bas Lettres doubles et triples 
 09roes
Bas Lettres accentuées 
 12roes
Ponctuations et signes 
 16roes
Grandes capitales, chiffres et & 
 44roes
Petites capitales 
 33roes
Supérieures (a, c, d, e, f, g, h, i, k, l, m, n, o, r, s, t
 16roes

b) Fréquemment, les polices de caractère italique ne comprennent ni les signes particuliers, ni le &, ni les petites capitales, non plus que les lettres supérieures ; ces sortes, même si elles ont été gravées et fondues (c’est-à-dire lorsqu’elles existent dans le caractère), ne sont livrées que sur demande spéciale.

L’expérience a permis de déterminer la proportion dans laquelle il faut assortir chaque lettre ou signe du caractère lorsqu’il s’agit d’une composition de texte français ; les calculs ont été établis d’après le poids et aussi d’après la quantité de lettres. Dans une police de 100.000 lettres les proportions pour chaque sorte sont les suivantes :

POLICE TYPE POUR LABEURS
Bas de casse Supérieures Ponctuations Grandes Capitales Petites
Capitales
a 5.000 a 0.050    . 1.800 A 0.450 a 0.250
b 1.000 c 0.100    , 1.800 B 0.300 b 0.100
c 2.500 d 0.100    - 1000 C 0.350 c 0.150
d 3.000 e 0.100     0.800 D 0.400 d 0.200
e 9.000 f 0.100    : 0.300 E 0.750 e 0.350
f 1.000 g 0.050    ; 0.400 F 0.200 f 0.100
g 1.000 h 0.050    ! 0.150 G 0.200 g 0.100
h 1.000 i 0.150    ? 0.150 H 0.200 h 0.100
i 5.000 k 0.050    ) 0.200 I 0.450 i 0.200
j 0.600 l 0.100    » 0.200 J 0.200 j 0.100
k 0.200 m 0.150     0.200 K 0.100 k 0.050
l 4.500 n 0.050    § 0.100 L 0.450 l 0.200
m 2.500 o 0.150    * 0.100 M 0.400 m 0.150
n 4.500 r 0.150    ] 0.100 N 0.450 n 0.200
o 5.000 s 0.150    & 0.100 O 0.450 o 0.200
p 2.000 t 0.150 P 0.300 p 0.150
q 1.000

Q 0.200 q 0.100
r 5.000 Tot.   1.650 Tot.   7.400 R 0.450 r 0.200
s 5.500
S 0.500 s 0.250
t 5.000 Accents Chiffres T 0.450 t 0.200
u 4.500

U 0.400 u 0.200
v 1.200 é 1.600 1 0.350 V 0.250 v 0.100
x 0.500 à 0.500 2 0.250 X 0.150 x 0.075
y 0.400 è 0.600 3 0.250 Y 0.150 y 0.075
z 0.400 ù 0.075 4 0.250 Z 0.150 z 0.075

â 0.200 5 0.300 Æ 0.050 æ 0.025
Tot.  71.300 ê 0.300 6 0.250 Œ 0.050 œ 0.025
î 0.100 7 0.250 Ç 0.050 w 0.025
Doubles ô 0.150 8 0.250 W 0.050 ç 0.025

û 0.150 9 0.250 É 0.200 é 0.075
æ 0.100 ë 0.100 0 0.350 È 0.150 è 0.075
œ 0.150 ï 0.100 Ê 0.100 ê 0.050
w 0.100 ü 0.100
ç 0.150



0.400 Tot.   3.975 Tot.   2.750 Tot.   9.000 Tot.   4.175
0.300
0.200 Récapitulation

Bas de Casse 
 71.300
xxxReport 
 86.825
Tot.   1.400
Doubles 
 1.400
Grandes Capitales 
 9.000
Accents 
 3.975
Petites Capitales 
 4.175
Ponctuations 
 7.400

Chiffres 
 2.750
Total Général 
 100.000

À reporter 
 86.825
Supérieures 
 1.650

Que ces chiffres soient doublés, triplés ou, au contraire, diminués du quart, de la moitié ou de toute autre quantité, les proportions de chaque lettre ou signe restent constantes par rapport au chiffre total.

Mais, ainsi qu’on l’a dit plus haut, ces indications ne sont relativement exactes que pour un texte français courant. Dans un discours ou dans une étude traitant d’un sujet particulier, les proportions dans lesquelles lettres et signes sont employés s’écartent plus ou moins de la moyenne habituelle, en raison de ce que les mêmes mots, les mêmes expressions reviennent fréquemment sous la plume de l’écrivain.

La composition de textes en langues étrangères oblige à l’achat de polices dont la composition est assez différente de la police type française donnée plus haut. Dans un texte anglais, les t, les h, les w, les I se rencontrent nombreux ; dans le latin, les o, les a, les æ, les œ, les m, les u, les n, les s, les t, sont prépondérants ; la langue italienne utilise surtout les a, les i, les o, alors que l’espagnol préfère les a, les o, ainsi que quelques lettres accentuées ; et l’allemand, les e, les i, les n, les w et les grandes capitales.

L’imprimeur, en commandant une police, devra donc, si le caractère est destiné à un travail particulier, demander la modification de celle-ci suivant son emploi présumé ou selon les indications données par l’examen du manuscrit.

c) De même que pour l’italique, les polices de caractères gras (égyptiennes, normandes, antiques ou doriques) ne comportent pas, de manière générale, de signes particuliers ni de petites capitales ; les fondeurs paraissent d’ailleurs n’avoir que dans quelques rares circonstances procédé à la gravure des poinçons de ces dernières, dont les imprimeurs ne semblent pas réclamer la création.

d) Les caractères de fantaisie et les caractères d’écriture (ronde, bâtarde, gothique ou autres) n’ont habituellement ni petites capitales ni supérieures, ni signes particuliers ; le compositeur parangonne des corps inférieurs pour figurer, le cas échéant, les lettres supérieures, lorsque l’emploi de celles-ci s’impose.

e) Les polices de caractères pour affiches sont établies dans les mêmes conditions et avec les mêmes proportions que celles des caractères de fantaisie sur un minimum de lettres a bas de casse et A grande capitale. Assez fréquemment, pour les lettres grandes capitales de gros corps en bois ou en matière, les accents sont séparés de la lettre : celle-ci porte une entaille où, le cas échéant, vient se loger l’accent nécessaire.

Lorsqu’il s’agit — ce qui est le cas le plus fréquent — de tenir compte du poids, il est possible d’estimer qu’en moyenne une police de 100.000 lettres, en un caractère d’œil moyen, pèsera approximativement :

En corps 0
 044 kilogrammes
Enx-----
 054 kilogr----
Enx-----
 068 kilogr----
Enx-----
 088 kilogr----
Enx-----
 105 kilogr----
Enx----10 
 125 kilogr----
Enx----11 
 150 kilogr----
Enx----12 
 175 kilogr----
Enx----14 
 235 kilogr----
Enx----16 
 288 kilogr----

Le poids d’une police de caractère italique, assortie à la police de caractère romain, est, en moyenne, le dixième de celle-ci[8].

Les polices de caractères fantaisies ou de caractères initiales sont calculées sur un chiffre minimum d’a bas de casse et d’A grande capitale ; à défaut d’indication du poids, le fondeur établit sa livraison d’après ces sortes.

Voici un exemple de cette répartition dans une police type pour Initiales :

POLICE TYPE POUR INITIALES
Capitales Ponctuations Chiffres
A 025 Report 275 Report 520    . 12 1 013
B 015 N 025 Æ 005    , 12 2 010
C 020 O 025 Œ 005    - 10 3 010
D 025 P 020 Ç 005     10 4 010
E 040 Q 015 W 005    : 08 5 010
F 015 R 025 É 015    ; 08 6 010
G 015 S 030 È 010    ! 06 7 010
H 015 T 025 Ê 008    ? 06 8 010
I 010 U 025 Ë 005    ) 04 9 010
J 035 V 020 & 008    » 04 0 013
K 010 X 015


L 025 Y 010 Total000586 Total00080 Total000106
M 025 Z 010


Réca-pitu-lation
Capitales 
 586
Total
Général

772
À rep.00275 À rep.0000520
Ponctuations 
 80
Chiffres 
 106


Le tableau ci-dessous donne la répartition de chaque sorte ou lettre dans une police type pour Fantaisies, basée sur un minimum de 50 a bas de casse et 10 A grande capitale.

POLICE TYPE POUR FANTAISIES
AVEC BAS DE CASSE
Bas de casse Doubles Ponctuations Capitales
a 50 æ 03    . 20 A 10 Report 130
b 16 œ 04    , 20 B 06 T 10
c 25 w 04    - 10 C 08 U 10
d 30 ç 04     12 D 10 V 06
e 90 10    : 04 E 15 X 05
f 15 06    ; 06 F 05 Y 03
g 15 06    ! 02 G 05 Z 03
h 12 04    ? 04 H 05 Æ 02
i 55 04    ) 04 I 010 Œ 02
j 10
   » 04 J 04 Ç 02
k 06 Total   45     03 K 02 W 02
l 40
   * 03 L 10 É 04
m 26 Accents    § 06 M 08 È 02
n 50
   / 03 N 10 Ê 02
o 50 é 16    ] 02 O 10 Ë 02
p 24 à 06
P 07 & 06
q 15 è 06 Total.   103 Q 05
r 50 ù 04
R 10 Total  211
s 60 â 04 Chiffres S 10
t 50 ê 06

u 50 î 04 1 06 À rep.  130
v 15 ô 04 2 04
x 10 û 04 3 04 Récapitulation
y 04 ë 04 4 04
Bas de Casse 
 772
z 04 ï 04 5 05
Doubles 
 45

ü 04 6 04
Accents 
 66
Total  772
7 04
Ponctuations 
 103
  Total  66 8 04
Chiffres 
 45
  9 04
Capitales 
 211
  0 06
 
Total Général 
 1.242
  Total  45

La plupart des fonderies possèdent en magasin, toutes prêtes à être livrées, des polices pour lesquelles la proportion de sortes basée sur un nombre déterminé d’a bas de casse et d’A grande capitale donne un poids minimum au-dessous duquel les commandes ne sont pas acceptées ; ce poids, qui est variable avec la force de corps de chaque caractère, est aussi nécessairement fonction de la force de l’œil, ce dernier classant le caractère dans les séries étroites, moyennes ou larges.

Le tableau suivant, établi pour diverses catégories de polices, comprenant de 100 a bas de casse et 20 A grande capitale à 5 a bas de casse et 3 A grande capitale, indique pour les différents types de caractères — étroits, moyens et larges — le poids minimum d’une police dans certains corps[9] :

MINIMUM DE FANTAISIES AVEC BAS DE CASSE
COMPOSITION DES POLICES CORPS POIDS APPROXIMATIFS DES CARACTÈRES
ÉTROITS MOYENS LARGES
  kg. kg. kg.
100 a 20 A
(2.400 lettres environ).
005 00.800 01xx» 01.200
006 01.150 01.500 02xx»
007 01.500 01.800 02.400
008 01.900 02.500 03.200
75 a 15 A
(1.800 lettres environ).
009 01.600 02.100 02.800
010 01.800 02.500 03.300
011 02xx» 02.700 03.400
50 a 10 A
(1.200 lettres environ).
012 02xx» 02.700 03.400
014 02.200 03.500 05xx»
016 03xx» 03.900 05.800
30 a 6 A
(760 lettres environ).
018 02.600 0}3xx» 04xx»
020 02.800 03.900 05xx»
024 03.500 04.900 06.400
20 a 4 A
(520 lettres environ).
028 04.100 06xx» 08.300
032 04.800 07xx» 09xx»
036 05.600 07.600 09.800
10 a 3 A
(330 lettres environ).
040 05.500 07.800 10xx»
044 06.500 09.500 12xx»
048 06.500 10.500 15xx»
5 a 3 A
(245 lettres environ).
056 06.800 10xx» 13.500
060 08xx» 12.500 17xx»
064 08xx» 12.500
072 10xx» 13.500 17xx»
084 11xx» 13.500
096 14xx» 19xx» 25.000
120 25xx»
144 30xx»

Voici maintenant un tableau donnant les poids d’une police minimum pour Initiales d’après les types de caractères :

POLICE MINIMUM D’INITIALES
COMPOSITION DES POLICES CORPS POIDS APPROXIMATIFS DES CARACTÈRES
ÉTROITS MOYENS LARGES
  kg. kg. kg.
50 A
(1.525 lettres environ).
005 00.600 00.650 00.700
006 00.700 01xx» 01.200
40 A
(1.215 lettres environ).
007 00.800 01.100 01.300
008 00.960 01.500 02.400
30 A
(924 lettres environ).
009 00.900 01.500 01.900
010 01.200 01.900 02.700
011 01.200 01.900 02.700
25 A
(720 lettres environ).
012 01.200 02.100 03xx»
20 A
(608 lettres environ).
014 01.200 02.200 03xx»
15 A
(444 lettres environ).
016 01.500 02.400 03.200
018 01.900 03xx» 04.400
10 A
(345 lettres environ).
020 01.400 02.200 03xx»
022 01.600 02.500 03.500
6 A
(172 lettres environ).
024 01.300 02.600 03.900
028 01.400 02.700 04xx»
032 01.400 03.100 04.700
036 01.500 03.700 06xx»
5 A
(160 lettres environ).
040 04xx» 05xx» 06xx»
044 04.500 06xx» 07xx»
048 04.500 07xx» 11xx»
3 A
(105 lettres environ).
052 03xx» 04.500 06xx»
056 03xx» 06xx» 08xx»
060 03.500 06xx» 09xx»
064 04xx» 06.500 09.500
072 04xx» 07xx» 10xx»
084 07xx» 08.500 10xx»
096 08xx» 14xx» 23xx»

S’appuyant sur ces données qu’une expérience autorisée a permis de préciser autant qu’il est possible, certains auteurs ont poussé plus avant leurs calculs dont les résultats peuvent intéresser :

Un centimètre carré de composition pèserait 20 grammes.

Pour obtenir le poids du caractère nécessaire à une composition déterminée, il suffirait donc de multiplier la surface par 20 grammes ; le chiffre obtenu étant doublé, un quart est déduit du total en raison des blancs.

Exemple. — Une page de composition de 0m,25 × 0m,25 à 20 grammes par centimètre carré pèse 10 kilogrammes. Pour la composer, il faudra :

10 × 2 = 20 kilogrammes ;


à déduire, en raison des blancs, un quart, soit :

20 5 = 15 kilogrammes.

Voici, d’autre part, les poids approximatifs de caractères nécessaires pour la composition de certains travaux :

Pour une circulaire in-8o carré 
 06 kilogrammes
----------------in-4o---- 
 10-----------
---une page in-8o carré, pleine 
 08-----------
----------- in-4o-------- 
 12-----------


pour une feuille de 16 pages :

Format cloche 
 050 kilogrammes
-----tellière 
 060-----------
-----couronne 
 070-----------
-----écu 
 080-----------
-----carré 
 100-----------
-----raisin 
 120-----------
-----jésus 
 150-----------
-----colombier 
 200-----------

Dans certains travaux, pour des raisons faciles à comprendre, les proportions qui pourraient être déduites des chiffres ci-dessus doivent être modifiées dans une certaine mesure. Ainsi il semble convenable de prévoir :

Pour un journal quotidien :

Petit format 
 500 kilogrammes
Grand---- 
 800-----------

pour un journal hebdomadaire :

Petit format 
 200 kilogrammes
Grand---- 
 300-----------




IV

BLANCS


La séparation des lettres et des signes isolés, des mots, des lignes, des pages, est obtenue au moyen de blancs nommés espaces, cadrats et cadratins, interlignes, lingots et garnitures.

Les espaces, cadrats et cadratins sont constitués par un alliage plomb-antimoine, variable suivant les fondeurs :

Plomb 
 84 à 90 parties
Antimoine 
 16 à 10xxxxxx

Ils sont fondus mécaniquement, comme on l’a vu, et ont le même aspect extérieur que les lettres ; mais, nécessairement, leur « hauteur en papier » est beaucoup moindre (8 lignes ou 51 points seulement).

Pour les travaux dont les compositions doivent ultérieurement être prises en empreintes, soit au papier, soit à la cire ou à la gutta, soit encore au plomb, et dès lors être tirées sur clichés plomb ou galvanos, nombre d’imprimeurs utilisent des espaces, des cadrats et des cadratins ayant une hauteur en papier de 56 ou de 60 points, suivant demande. Ces blancs, appelés blancs hauts, sont rarement utilisés pour les tirages directs sur la composition, car ils risquent de marquer.


ESPACES ET CADRATS


a) Les espaces[10] se divisent en :
xxxxxEspaces fines, ayant 1 point d’épaisseur ;
xxxxxEspaces moyennes, de 1 point 1/2, 2 points, 2 points 1/2 ;
xxxxxEspaces fortes, de 3 points, 3 points 1/2, 4 points et 6 points pour les gros corps.

Cette gradation des espaces permet d’obtenir un blanc aussi régulier que possible entre chaque mot d’une même ligne : théoriquement, la séparation la plus convenable à établir entre les mots doit être au moins égale au 1/3 de la force de corps du caractère employé :

Pour un caractère corps 6 
 2 points xxxxxxxxxxxxxx
xxxxxxxxxxxxxxxxx corps 7 
 2 points 1/2 xxxxxxxxxx
xxxxxxxxxxxxxxxxx corps 8 
 2 points 1/2 a 3 points
xxxxxxxxxxxxxxxxx corps 9 
 3 pointsxxxxxxxxxxxxxxx

b) Les cadratins sont des blancs ayant sur chacune de leurs quatre faces l’épaisseur exacte, du corps auquel ils appartiennent : ce sont des carrés parfaits. Ainsi, on aura sur tous les côtés :

Pour le cadratin de corps 0
 7 points
xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx
 08 xxxx
xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx10 
 10 xxxx
xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx12 
 12 xxxx

Le cadratin se place, avant le texte, au début de chaque alinéa, dont il est le signe distinctif.

1° Ce blanc a un sous-multiple, appelé demi-cadratin, dont l’épaisseur est la moitié de celle du cadratin, ou de la force de corps du caractère auquel il appartient.

Le demi-cadratin de 7 a donc :

7 : 2 = 3 points 1/2 ;


le demi-cadratin de 8 :

8 : 2 = 4 points ;


le demi-cadratin de 10 :

10 : 2 = 5 points ;


le demi-cadratin de 12 :

12 : 2 = 6 points.

Le demi-cadratin est la plus forte des espaces dont on puisse se servir dans la composition et le plus petit des cadrats.

Ce blanc est employé dans : les alignements de chiffres (ceux-ci étant généralement fondus sur demi-cadratin) ; les tables des matières, pour séparer les points de conduite (petits points) ; après le guillemet, au début des lignes, dans un texte guillemeté ; après le tiret appelé aussi moins, indiquant dans une conversation le changement d’interlocuteur, etc.

2° Le cadratin a des multiples, d’épaisseurs variables de demi-cadratin en demi-cadratin, auxquels on donne le nom de cadrats ; on a des cadrats de 1 cadratin 1/2, 2 cadratins, 2 cadratins 1/2, 3 cadratins, 3 cadratins 1/2, 4 cadratins, et rarement au dessus.

Les cadrats terminent les lignes dont le texte ne remplit pas entièrement la justification ; ils isolent au milieu de la ligne, en vedette, les titres, les opérations, etc.

Suivant leur épaisseur, c’est-à-dire leur force de corps, les cadrats sont fondus pleins ou creux.

3° Tous les blancs, espaces, cadrats ou cadratins, comportent, dans leur tiers inférieur, comme chaque lettre de fonderie, un cran venu de fonte. Pour faciliter la distribution et la remise en casse des blancs, la Fonderie Peignot a imaginé de donner deux crans aux blancs de corps pairs, et un cran à ceux de corps impairs, du 5 au 12.

4° Les blancs nécessaires pour la composition sont, sauf stipulation expresse de la part de l’imprimeur, fournis dans la proportion du quart du poids du caractère livré : les espaces, les cadratins et les demi-cadratins forment la moitié du poids ; les cadrats, l’autre moitié.

Au surplus, une police de 10 kilogrammes de blancs peut être établie de la manière suivante :

BLANCS CORPS
5 7 7 à 9 10 à 12 14 à 20 24 à 32 36 à 40
Espaces : kg. kg. kg. kg. kg. kg. kg.
1 point 
0.700 0.700 0.500 0.300 0.300 0.200 0.200xxx
1 point 1/2 
1.250 1.250 0.800 0.500 0.500 0.300 0.300
2 points 
2.550 2.550 1.300 0.800
2 points 1/2 
3 points 
1.900 1.200 1.400 0.800 0.500
4, 6, 8, 10 points 
1.700 2.300 2.400 3.500
Cadrats :
1/2 cadratin 0.200 0.200 0.200 0.200 0.200 0.200 0.200
1/2 cadratin 0.300 0.300 0.300 0.300 0.300 0.300 0.300
1/2 cadratin 1/2 0.500 0.500 0.500 0.500 0.800 1.900 1.200
2/2 cadratins 0.800 0.800 0.800 0.800 1.600 3.100 3.100
2/2 cadratins 1/2 1xx» 1xx» 1xx» 1xx»
3/2 cadratins 1.200 1.200 1.200 1.200 2.600
4/2 cadratins 1.800 1.800 1.800 1.800

Dans la composition d’une police de blancs, pour une casse de 0m,65, les fondeurs donnent la proportion moyenne suivante de chaque catégorie, pour les corps 7, 8, 9, 10 et 11 :

Espaces :
Esp1 point 
 30 grammes
Esp1 point 1/2 
 50 grames
Esp2 points 
 100 grames
Esp2 points 1/2 
 150 grames
Esp3 points 
 250 grames
Demi-cadratins 
 100 grames
Cadratins 
 100 grames
Cadrats assortis 
 600 grames
 

xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxTotal 
 1.380 grammesx


INTERLIGNES


Lorsque, dans une composition, l’extrémité des lettres à queue inférieure d’une ligne (g, j, p, q) et l’extrémité des lettres à queue supérieure (b, d, h, k) de la ligne suivante se touchent l’une l’autre sans aucun intervalle, le texte est dit compact ou non interligné.

Si la composition doit comporter un intervalle de blanc entre chacune des lignes de son texte, on place, entre celles-ci, une interligne, lame de plomb de la longueur exacte de la justification et de l’épaisseur voulue pour obtenir l’écartement demandé.

L’interligne varie de 1 point (et même de 1/2 point, lorsqu’elle est en cuivre) à 6 points d’épaisseur :

1/2 point, 1 point, 1 point 1/2, 2 points,
2 points 1/2, 3 points, 4 points, 6 points.

Pour éviter toute espèce de confusion entre les interlignes de 1 point ou de 2 points et les interlignes de 1 point 1/2 ou celles de 2 points 1/2 les fondeurs crantent différemment ces deux catégories, tantôt sur un de leurs côtés, tantôt sur une de leurs tranches horizontales.

L’interligne de 6 points reçoit parfois le nom de lingot ; elle est la plus épaisse des interlignes et le plus petit des lingots ; elle peut servir à jeter des blancs.

La longueur des interlignes varie suivant les besoins du matériel et les nécessités des travaux de chaque maison : elle est généralement graduée de cicéro en cicéro[11], quelquefois par intervalles de 6 points, et très rarement de 3 points.

Quand on ne possède pas d’interligne ayant la longueur de justification exigée, on met au bout l’une de l’autre deux interlignes de la force de corps voulue, mais de longueur différente ; on alterne la position des deux longueurs à chaque ligne.

Les interlignes se fondent dans des moules à main et par longueurs de 1 mètre environ. Au sortir du moule, elles subissent, à l’aide de rabots convenablement disposés, l’opération de l’apprêt qui leur donne une épaisseur absolument régulière comme force de corps et approximativement la même hauteur que les espaces. Toutefois la Fonderie Peignot a réussi à résoudre le problème de la production entièrement mécanique de l’interligne, à l’aide d’une machine à ruban.

Les interlignes sont généralement livrées par les Fonderies en lames d’une longueur de 1 mètre. Parfois cependant certaines Maisons fournissent les lames de 1 point et 1 point 1/2 sur 0m,50 de longueur.

Un paquet d’interlignes sur longueur de 0m,50 pèse environ 7kg,500 et contient :

En 1 point 
 200 lames
En 1 point 1/2 
 130 xxxx
En 2 points 
 100 xxxx
En 3 xxxx 
 065 xxxx

Pour une longueur de 1 mètre le paquet a un poids de 15 kilogrammes et contient un nombre de lames analogue à celui indiqué ci-dessus.

Envisageant la quantité de 100 lames d’interlignes sur 0m,50 de longueur, on remarque que les poids sont les suivants :

 
Kg.xxxx
Pour 100 lames 1 point 
 03,750
Pour 1lamesx 1 point 1/2 
 05,600
Pour 1lamesx 2 points 
 07,500
Pour 1lamesx 3 xxxx 
 11,250

Pour 100 lames de 1 mètre de longueur, les poids ci-dessus sont doublés.

Enfin, avec 1.000 interlignes coupées sur des justifications données, on obtient les poids suivants :

POIDS DE MILLE INTERLIGNES COUPÉES
xxxxxLONGUEURSxxxxx 1 point 1 point ½ 2 point 3 point
  kg. kg. kg. kg.
10 douzes 03,350 05xx» 06,650 10xx»
11 xxxxx 03,650 05,500 07,300 11xx»
12 xxxxx 04xx» 06xx» 08xx» 12xx»
13 xxxxx 04,350 06,500 08,650 13xx»
14 xxxxx 04,650 07xx» 09,300 14xx»
15 xxxxx 05xx» 07,500 10xx» 15xx»
16 xxxxx 05,350 08xx» 10,650 16xx»
17 xxxxx 05.650 08,500 11,300 17xx»
18 xxxxx 06xx» 09xx» 12xx» 18xx»
19 xxxxx 06,350 09,500 12,650 19xx»
20 xxxxx 06,650 10xx» 13,300 20xx»
21 xxxxx 07xx» 10,500 14xx» 21xx»
22 xxxxx 07,350 11xx» 14,650 22xx»
23 xxxxx 07,650 11,500 15,300 23xx»
24 xxxxx 08xx» 12xx» 16xx» 24xx»
25 xxxxx 08,350 12,500 16,650 25xx»
26 xxxxx 08,650 13xx» 17,300 26xx»
27 xxxxx 09xx» 13,500 18xx» 27xx»
28 xxxxx 09,350 14xx» 18,650 28xx»
29 xxxxx 09,650 14,500 19,300 29xx»
30 xxxxx 10xx» 15xx» 20xx» 30xx»
31 xxxxx 10,350 15,500 20,650 31xx»
32 xxxxx 10,650 16xx» 21,300 32xx»
33 xxxxx 11xx» 16,500 22xx» 33xx»
34 xxxxx 11,350 17xx» 22,650 34xx»
35 xxxxx 11,650 17,500 23,300 35xx»


LINGOTS ET GARNITURES


a) Les lingots, morceaux de plomb dont les longueurs sont appropriées aux besoins des justifications les plus usuelles dans les imprimeries, varient, comme épaisseur, de 6 points à 1 cicéro ou 2 cicéros au plus.

b) Les garnitures sont des pièces de plomb, évidées dans leur partie médiane, pour en diminuer le poids.

Les garnitures sont utilisées pour remplir : le bas des pages dont le texte n’occupe qu’une partie ; les têtes de pages au début des parties, des chapitres, etc. ; les blancs de chaque côté des gravures isolées au milieu du texte, etc. Leur emploi le plus général est réservé aux impositions : elles sont placées dans les intervalles qui séparent chaque page de texte : elles représentent et donnent les marges du volume.

Dans bon nombre d’imprimeries, il est d’usage de placer, en pied de la page terminée, un lingot ou garniture de 12 points, appelé ligne de pied ; la page ainsi renforcée ne peut tourner, lors de la ligature ou du serrage en forme.

Certaines Maisons utilisent également des lingots et même des garnitures en bois, bouillis dans l’huile, de 12, 18, 24 et 36 points de force de corps sur des longueurs variables. L’humidité et l’usage obligent à un renouvellement assez fréquent de ce matériel, dont le prix de revient est, toutefois, modique.

L’usage du lingot et de la garniture en bois était autrefois général et exclusif en France. Le premier, Fournier se servit, d’abord pour l’imposition, de lingots de fonds en matière ; puis, vers le milieu du xixe siècle, P. Leclerc, ingénieur mécanicien, Renault et Robin imaginèrent la garniture en matière, qui ne tarda pas à remplacer le bois. En Angleterre, et surtout en Amérique, l’emploi de la garniture et du lingot de bois est encore presque général.

Il y a une quinzaine d’années, quelques industriels tentèrent la fabrication de la garniture en acier, puis en fer, et aussi en un alliage de métaux particulièrement légers. Ces garnitures ont l’avantage d’une plus grande résistance aux chocs et au serrage ; elles sont, en outre, d’un poids moindre que les garnitures en matière. Toutefois, peut-être en raison de leur prix et aussi de ce que leur précision laisse parfois à désirer, leur emploi ne paraît pas s’être très répandu.

De manière générale, les garnitures ou lingots de 1/2 et 1 douze d’épaisseur sont pleins ; les épaisseurs suivantes sont à gouttière ou à cavités, dans leur partie longitudinale médiane, jusqu’à 10 douzes de longueur ; à partir de cette dimension, les garnitures sont évidées avec colonnes, ou encore à gouttière et à trous.

Les garnitures sont établies, comme longueur et comme force de corps, d’après une mesure commune, le cicéro ou, plutôt, le douze ; elles sont graduées en augmentant dans les deux sens, longueur et force de corps, à partir de 1 douze, par multiples et sous-multiples de cette unité ; alors que les lingots ont une force de corps de 6, 12 et 24 points, comme on l’a vu, les garnitures proprement dites s’étendent en force de corps de 36 à 120 points ou de 3 douzes à 10 douzes. Pour chacune de ces forces de corps les longueurs sont de 4, 5, 6, 7, 8, 10, 12 et 15 douzes ; à partir de ce dernier chiffre celles-ci augmentent par échelons de 5 douzes jusqu’à 50 douzes.

Lorsqu’une longueur de garniture fait défaut, on obtient cette longueur en combinant, suivant les possibilités, l’une avec l’autre deux ou plusieurs garnitures.

L’épaisseur se modifie de même manière, ou encore par l’adjonction d’interlignes, de lingots.

Les garnitures et les lingots, sont, comme les interlignes, fondus dans des moules à main ; l’opération de l’apprêt leur est dès lors nécessaire avant qu’ils puissent être livrés à l’imprimeur.

Les fondeurs fournissent les lingots et les garnitures, à la demande des imprimeurs, en établissant leurs livraisons, suivant les cas, soit par polices, soit au poids.

Voici, à titre d’exemple, et simplement pour permettre une appréciation, la composition, par quantité de garnitures et lingots, d’une police d’un poids de 120 kilogrammes :

LONGUEURS
xxEN CICÉROSxx
ÉPAISSEUR EN CICÉROS
½ 1 2 3 4 6 8 10
0
30 22 18 16 12 10 08 08
0
30 22 18 16 12 10 08 08
0
30 22 18 16 12 10 08 08
0
30 22 18 16 12 10 08 08
0
30 22 18 16 12 10 08 08
10 
28 22 16 12 10 10 06 06
12 
28 20 16 12 10 08 06 06
15 
20 20 14 12 10 08 06 05
20 
20 20 14 10 08 08 05 05
25 
18 18 12 10 08 06 05 04
30 
14 14 12 10 06 06 04 04
35 
14 14 12 08 06 05 04 03
40 
10 10 10 08 06 05 03 03
45 
10 10 08 06 05 04 03 02
50 
10 10 08 06 05 04 03 02

c) À la catégorie des blancs on peut rattacher les blocs, ou supports systématiques, que nombre d’imprimeries utilisent pour l’imposition des labeurs ou des travaux tirés sur clichés plomb, galvano ou autres.

Ces blocs sont fondus à l’aide du moule à main, sur des forces de corps et des longueurs de cicéro ou même de 6 points ; ils sont soumis à l’action de lames raboteuses qui leur donnent une hauteur parfaitement régulière. Les combinaisons qu’ils permettent d’obtenir sont ainsi fort nombreuses, et leur emploi est réellement avantageux.


V

LE MATÉRIEL ET LES OUTILS DU COMPOSITEUR


Les premiers objets du matériel typographique mis entre les mains de l’apprenti compositeur, à son entrée dans la profession, sont : la casse et ce qu’elle contient (lettres, signes et blancs), le composteur, l’interligne, la galée et les pinces.


LA CASSE


Autrefois, la casse était divisée en deux parties, égales et indépendantes, auxquelles on avait, pour la partie supérieure, donné le nom de haut de casse, et pour la partie inférieure celui de bas de casse. Chacune de ces deux parties, prise isolément et considérée sans désignation de fonction, a reçu le nom générique de casseau.

Par son poids et par ses dimensions, la casse ancienne était peu maniable et cause d’encombrement. À une époque où les genres de caractères utilisés dans les labeurs étaient peu nombreux — grandes capitales, petites capitales, italique — elle eut cet avantage de mettre à portée du typographe presque tout ce qui lui était indispensable pour la composition, évitant ainsi toute perte de temps. Mais de nos jours, où l’on recherche dans la multiplicité des types le moyen de parler aux yeux en même temps qu’à l’esprit du lecteur, la casse primitive devint rapidement insuffisante. D’ailleurs, la classification des lettres et des signes qu’elle contenait variait fréquemment, pour ainsi dire d’une ville à une autre, parfois même d’une maison à la voisine, et cette divergence était cause de multiples ennuis.

Par la force même des choses, la casse en deux parties tomba peu à peu en désuétude, ses inconvénients ne compensant plus les quelques avantages qu’on pouvait en tirer ; l’usage en fut alors réduit aux seuls caractères d’affiches pour lesquels elle est encore utilisée.

Après maintes discussions, après de nombreux essais de casses de dispositions diverses, une Commission conseilla l’adoption d’une casse en une seule pièce, utilisée déjà par certaines Maisons, et comportant une classification identique des lettres et des signes[12].

La case actuelle — dite casse Parisienne, que le compositeur, dans son langage imagé, qualifie du nom de boîte — est une boîte rectangulaire, d’une seule pièce, plus longue que large, plate et découverte ; d’une hauteur moyenne de 0m,04, elle est divisée en deux parties principales comprenant des compartiments inégaux appelés cassetins, dont les divisions ont une hauteur inférieure de 3 à 4 millimètres à l’assemblage constituant le cadre ; le fond est généralement garni d’un papier très résistant[13].

CASSE PARISIENNE

a) La partie supérieure, que l’on désigne encore par le terme de « haut de casse », est plus spécialement réservée aux majuscules (grandes capitales), aux signes divers, aux lettres supérieures et aux lettres accentuées.

Le « bas de casse », isolé de la partie supérieure par une séparation plus accentuée que celle qui limite les cassetins entre eux, contient les lettres minuscules (bas de casse), les chiffres, les signes de ponctuation et les blancs utilisés dans la composition (espaces, cadratins et cadrats).

À la partie supérieure gauche du bas de casse, on a ménagé un cassetin dénommé cassetin au diable ou de fonte et destiné à recevoir provisoirement les lettres hors d’usage rencontrées au cours de la distribution. Le compositeur jaloux de la propreté et de l’ordre à conserver dans sa casse doit fréquemment survider ce cassetin ; en aucun cas, il ne saurait laisser déborder son contenu dans les cassetins environnants, comme on le voit trop fréquemment[14].

b) La place des lettres dans la casse française et la grandeur des cassetins (leur capacité ou contenance) sont déterminées d’après des conditions parfaitement raisonnées.

1° Par l’emplacement affecté à chaque lettre on a cherché à éviter au bras et à la main du compositeur une cause de fatigue : on a dès lors raccourci le plus possible le chemin à parcourir, par ceux-ci, pour prendre la lettre au cours de la composition : les grandes capitales, ou majuscules, reportées à l’angle gauche du haut de casse, se suivent régulièrement, sauf U et J ; les lettres minuscules accentuées et supérieures, peu utilisées, sont rejetées à l’extrémité droite du haut de casse ; les autres lettres bas de casse, ou minuscules, sont distribuées dans la partie inférieure suivant un ordre qui les rapproche du centre en raison de leur utilisation plus ou moins fréquente.

2° La capacité des cassetins a été établie en tenant compte de l’emploi plus ou moins fréquent des lettres ou des signes. Ainsi :

Les cassetins des chiffres 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 0, du point et virgule, du deux points, du ½ cadratin, du cadratin, de l’espace fine, de l’astérisque, de la division, de l’apostrophe, et des lettres w, k, fi, y, z, ç, œ, æ, sont simples, c’est-à-dire représentent l’unité ;

Les cassetins des lettres b, f, g, h, l, p, q, x, v, du point et de la virgule ainsi que du tiret sont doubles ;

Les cassetins des lettres c, d, m, n, i, o, s, u, t, a, r, sont quadruples, alors que le cassetin de la lettre e, la plus fréquemment employée dans la langue française, est sextuple, c’est-à-dire représente six fois la contenance d’un cassetin de chiffres.

La casse est la même, quant à la disposition et à la place respective des cassetins et des lettres, pour tous les caractères romains, italiques, égyptiennes et normandes ; elle diffère pour les caractères d’écriture, anglaise et ronde ou bâtarde, ainsi que pour les caractères étrangers, grec, gothique, allemand, etc.

c) Les fondeurs et les constructeurs de matériel typographique ont, en dehors de la casse courante, créé des modèles différents destinés à divers usages : casse pour caractères en bois et pour caractères d’écriture, à lattes mobiles ajustables dans des rainures verticales pratiquées de 12 points en 12 points de chaque côté ; — casse à garniture et à interligne ; — casse à filets et accolades ; — casse pour caractères de fantaisie comportant plusieurs œils, généralement deux ou quatre ; etc.

d) Toutes les casses n’ont pas les mêmes dimensions : il existe des grandes, des moyennes et des petites casses.

Les grandeurs dont on se sert le plus habituellement sont :

0m,44 × 0m,50 ;
0m,44 × 0m,65 ;
0m,50 × 0m,85.

On trouve également des casses ayant :

0m,38 × 0m,50 ;
0m,47 × 0m,70 ;
0m,47 × 0m,75 ;
0m,47 × 0m,80 ;
0m,50 x 1m,00.

Le chiffre le plus élevé, qui indique la longueur de la casse de la gauche vers la droite, sert parfois à désigner le type de casse. Ainsi on dit : une casse de 50, une casse de 65, une casse de 85. La casse de 85 paraît être celle qui est le plus fréquemment utilisée à l’heure actuelle.

e) Pour éviter des confusions regrettables et pour faciliter le bon entretien du matériel, en même temps qu’une rapide exécution du travail, toutes les casses sont étiquetées, c’est-à-dire munies sur leur face avant d’une ou plusieurs étiquettes de couleur, portant l’indication du corps, le numéro distinctif du caractère, le nom du fondeur, le nombre et la place du ou des crans dont les lettres sont munies, le nombre de casses et souvent aussi la date de mise en service du caractère. Fréquemment ces divers renseignements sont composés dans le caractère même faisant l’objet de la désignation :

  7 Elzévir n° 3 Berthier et Durey  
1 cran bas 1 cran haut 12 casses
  9 Romain Didot n° 75 Chaix et Cie
Août 1923 2 crans bas 25 cassesxxxxxxxxx

Ces étiquettes sont collées sur la casse elle-même, ou placées dans un porte-étiquette spécial servant à les protéger.

f) Pour le travail, les casses sont placées sur des rangs de longueur nécessaire pour tenir 2, 3, 4, 5, 6, etc., casses[15], suivant la demande, et d’une hauteur approximative moyenne de 1 mètre, du côté où se placera le compositeur.

La profondeur des rangs est déterminée par les dimensions des casses auxquelles ils sont destinés : 0m,50, 0m,65, 0m,75, 0m,85, 1m,00.

La partie supérieure du rang, sur laquelle repose la casse, est inclinée, afin de placer celle-ci dans la position la plus favorable pour les yeux et la main ; l’inclinaison ne saurait d’ailleurs être exagérée, car elle réduirait singulièrement la contenance des cassetins par le risque que présenteraient les lettres d’un cassetin supérieur à glisser dans le cassetin inférieur.

Les rangs, construits en bois ou en fonte, sont parfois munis, à l’intérieur, sur toute leur hauteur ou simplement sur une partie, de tasseaux destinés à recevoir en réserve, et à portée de l’ouvrier, les casses de caractères momentanément inutilisés, ou de tablettes, servant à déposer les paquets de composition au fur et à mesure de leur achèvement.

Les modèles de rangs sont nombreux ; les constructeurs se sont d’ailleurs ingéniés non seulement à réaliser, mais encore à perfectionner la confection de meubles donnant satisfaction à toutes les exigences.

L’ouvrier monte ou dresse une casse quand il sort celle-ci du rayon ou du meuble et la place sur le rang, dans la position qu’elle doit occuper pour le travail ; au contraire, il démonte la casse (il se démonte) quand il enlève celle-ci pour la mettre de côté ou la replacer dans le rayon ou le meuble.

Une casse est dite couverte, quand une deuxième casse est placée sur elle.

On appelle casse bardeaude celle dans laquelle certaines lettres, certaines sortes manquent, alors que d’autres sont surabondantes : cette casse ressemble à un bardeau.

g) Théoriquement, la casse devrait contenir l’assortiment complet des lettres et des signes servant à la composition typographique, ensemble auquel on a donné le nom de caractère :

1o Les lettres minuscules ou bas de casse :

a, b, c, d, e, f, g, h, i, j, k, l, m, n, o, p, q, r, s, etc. ;

2o Les lettres doubles ou triples bas de casse[16] :

ff, fi, fl, ffi, ffl, w, æ, œ, ç ;

3o Les lettres accentuées bas de casse :

é, è, ê, ë, à, â, î, ù, ü, ô ;

4o Les lettres majuscules ou grandes capitales :

A, B, C, D, E, F, G, H, I, J, K, L, M, N, O, P, Q, R, S, etc. ;

5o Les grandes capitales accentuées[17] :

É, È, Ê, etc. ;

6o Les grandes capitales doubles :

Æ, Œ, W ;

7o Les petites capitales :

a, b, c, d, e, f, g, h, i, j, etc ;

8o Les petites capitales accentuées :

é, é, ê, etc. ;

9o Les petites capitales doubles :

æ, œ, w ;

10o Les chiffres :

1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 0 ;

11o Les signes de ponctuation proprement dits :

, ; : . ? !


auxquels on peut ajouter :

», -, ), — ;

12o Certains signes couramment employés :

§, [, /, *, etc. ;

13o Les lettres supérieures au moins les plus fréquemment utilisées :

a, e, i, o, u, l, m, s, r, t ;

14o Les blancs :

Espaces fines, espaces moyennes, espaces fortes,
demi-cadratins, cadratins, cadrats.

En pratique, on serait obligé d’avoir recours, pour contenir tout cet ensemble, à des casses de dimensions considérables, occupant un trop grand emplacement et difficiles à manier, telles autrefois les casses en deux morceaux.

Le poids de ce matériel serait en effet considérable. Les fondeurs ont recherché, pour deux genres différents de casses, le chiffre approximatif que pèse chaque sorte contenue dans les cassetins :

DÉSIGNATION DES CASSETINS CASSE
de 0m,65
CASSE
de 0m,85
  kg. kg.
a, c, d, i, m, n, o, r, s, t, u 
00,435 00,890
00,785 01,600
b, f, g, h, l, p, q, v, x, é 
00,220 00,340
j, k, y, z, w, æ, œ, ç, fi, fl, ff, accents et ponctuations, capitales et chiffres 
00,100 00,170
Supérieures 
00,050 00,085
Blancs 
01,380 02,400
 

xxxxxxxxxxxxxxxPoids de la casse pleine 
2000» 3500»

Si à ces nombres on ajoute la tare de la casse elle-même, on peut supposer qu’une casse de 0m,65 atteindra le poids moyen de 23 kilogrammes, et une casse de 0m,85 celui de 40 kilogrammes.


LE CASSEAU



Pour remédier au défaut de place que présente la casse ordinaire, on a créé le casseau.

Au sens propre du mot, le casseau est une casse de grandes dimensions, divisée à peu près comme le bas de casse des casses ordinaires. Les casseaux sont destinés à contenir les sortes surabondantes des casses ordinaires, en même temps qu’ils servent de réserve — de concert avec le bardeau — pour recevoir, lors de leur arrivée de la fonderie, les sortes que l’on ne peut conserver en paquets.

Il existe des casseaux de grandes capitales, de petites capitales, d’italique, d’égyptienne, de normande, etc. ; il y a également des casseaux de chiffres, de lettres supérieures, de signes divers.

On a créé en effet des casseaux de toutes les dimensions, depuis le petit casseau de 0m,25 jusqu’à la grande casse de 1 mètre ; et le nom de casseau a été abusivement attribué à des « boîtes » n’ayant qu’une vague ressemblance avec le véritable casseau ou grande casse, tels les casseaux pour filets, accolades, vignettes, clichés, etc.

Les casseaux doivent être étiquetés, comme les casses.


LE BARDEAU


Le bardeau est destiné au même usage que le casseau, mais il est de dimensions plus considérables que celui-ci.

Le bardeau, composé de cassetins, à l’instar des casses et des casseaux, est divisé en plusieurs parties, généralement deux, quelquefois trois (une pour les grandes capitales, deux pour le bas de casse), plus rarement quatre ; les lettres et les signes y sont répartis de la même façon, en suivant le même ordre, que dans la casse.

Plus particulièrement, on désigne sous le nom générique de « bardeau » un ensemble de grands casseaux contenant les sortes en réserve des caractères. Tous les caractères, suivant l’importance de l’imprimerie, ont pour chaque corps leur bardeau particulier. Généralement, un meuble spécial enferme le bardeau de chaque caractère.


LE COMPOSTEUR


Le composteur est un instrument (de fer, de zinc, de nickel, même de cuivre ou de bois), dans lequel le typographe assemble les lettres pour en former les mots et les lignes.

D’après Bertrand Quinquet[18], « dans l’origine de l’imprimerie, à l’époque à laquelle on inventa les caractères isolés et même longtemps après, on ne se servait pas de composteur, mais de fils de fer ou de brochettes de la longueur précise que l’on voulait donner aux lignes ; les lettres et les espaces étaient percées dans le milieu du corps à la même hauteur ; on les enfilait tour à tour dans le fil de fer, et quand il était rempli, la ligne était complète ; il n’est pas nécessaire de dire à combien d’inconvénients cet usage était sujet, lors de la correction, combien on brisait de lignes, combien on laissait de fautes. »

Certains auteurs font remonter l’invention du composteur aux dernières années du xviiie siècle, vers 1796. Mais des documents incontestables en confirment l’existence bien avant cette date. En 1778, l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert donne une description très précise du composteur en usage à cette époque ; en 1771, l’inventaire de l’imprimerie François Le Tellier (de Chartres) mentionne « trois composteurs, dont un de cuivre » ; et, en 1638, soit un siècle plus tôt, un acte de vente de Pierre Cattereau énumère, parmi les objets du matériel typographique, « troys composteurs de cuivre, ung de fer et troys de boys ».

Le corps du composteur est constitué par deux lames de métal d’égale longueur, assemblées à angle droit ; à l’extrémité droite — le composteur étant tenu dans la position normale qu’il occupe au cours du travail — il est terminé par une partie fixe, le talon de justification ; un second talon, parallèle au premier, et plus proprement appelé languette ou glissière, est constitué, par une pièce mobile : la languette coulisse à volonté sur toute la longueur du composteur ; elle peut être maintenue en place par une vis de pression ou par un levier.

Il est indispensable que le talon et la languette soient rigoureusement parallèles : un composteur défectueux ou faussé occasionne des irrégularités de justification auxquelles il est nécessaire de remédier par un travail supplémentaire dont les résultats ne sont pas toujours satisfaisants et ne sauraient être comparés au travail obtenu de premier jet avec un outil irréprochable.

Les constructeurs fournissent des composteurs de longueurs et de dimensions diverses : la longueur varie de 23 centimètres et au dessous jusqu’à 0m,80 et même 1 mètre ; les dimensions vont de 1 douze jusqu’à 12 douzes. Les composteurs utilisés pour la composition courante des labeurs ont généralement 0m,25 de longueur environ et de 6 à 8 douzes comme dimension.

La longueur et la largeur d’un bon composteur ne doivent pas être exagérées : il ne faut pas oublier en effet que le poids est fonction de ces dimensions, et qu’il est une cause de fatigue pour la main et le bras de l’ouvrier, d’autant plus accentuée que la quantité de composition contenue par le composteur est plus considérable.

Le composteur à dimensions réduites a cet avantage de diminuer le poids de composition à soutenir par le typographe ; par contre, il offre le réel inconvénient d’obliger à vider plus fréquemment dans la galée les lignes de composition, ce qui conduit à une perte de temps parfois fort préjudiciable.

a) Il existe des composteurs à deux ou plusieurs divisions de justifications, c’est-à-dire à languettes mobiles multiples donnant pour chaque languette une longueur de justification variable au gré du compositeur. Ces composteurs sont surtout utiles pour la composition de tableaux ou de travaux comportant plusieurs colonnes.

b) On rencontre également des composteurs à graduations typométriques : sur la lame de métal formant la paroi verticale de l’outil, et à l’intérieur, on grave les divisions par 6 points et par 12 points ; d’autres fois la graduation figure sur la lame de métal formant le fond du composteur, et la paroi verticale comporte de 6 points en 6 points des crans formant arrêts de justification dans lesquels se cale, par un appendice approprié, le talon qui se trouve ainsi automatiquement justifié à la longueur indiquée. Malgré le surcroît de sécurité matérielle que peuvent lui apporter de tels composteurs, un typographe ne devra jamais, pour « se justifier », se priver du secours de la garniture ou des interlignes.

c) Pour la composition des affiches ou de certains travaux à gros caractères, sur longues justifications, on utilise des composteurs en bois : leur disposition est analogue à celle des composteurs ordinaires en métal ; leur longueur varie de 0m,50 à 1m,20 et même lm,30 ; leur dimension moyenne est de 12 douzes ; ils sont renforcés d’une garniture de cuivre.

d) À ces divers modèles il faut en ajouter un dernier, plus particulièrement désigné sous le nom de composteur en bois. Ce composteur est une pièce ou, plutôt, parfois un assemblage de deux pièces de buis ou bois blanc, évidées en angle rentrant sur une longueur de 25 à 30 centimètres environ ; sa surface inférieure est taillée en chanfrein ; il ne possède aucune partie de justification, chacune de ses deux extrémités comportant un talon fixe, soit naturel, soit rapporté.

Lorsque ce composteur est dans sa position normale, l’œil de la lettre doit se présenter directement à la vue du compositeur. Cet outil, dont la profondeur plus grande que celle du composteur en fer donne plus de fixité à la lettre, présente une pente légère du côté du pied ; il ne peut contenir que deux ou trois lignes des lettres ou des mots de caractères étrangers à la casse courante, destinés à être intercalés dans la composition, ou rencontrés au cours de la distribution. On se sert également de cet outil pour la correction sous presse, sur le marbre, etc.

e) On obtient la longueur de ligne demandée, ou justification, en éloignant ou en rapprochant du talon qui est fixe la languette ou partie mobile.

Justifier un composteur, prendre une justification, c’est donc établir entre la languette et le talon une distance correspondant à la longueur de justification, ou à la longueur de ligne du texte exigée. L’opération est fort simple : la vis du composteur étant desserrée, ou le levier levé, et la languette écartée, on place dans le composteur, appuyées au talon, une poignée d’interlignes convenablement triées, ou encore une garniture, de longueur voulue ; on rapproche la languette ou glissière, et les interlignes ayant été bien dressées, la garniture étant tenue rigoureusement d’aplomb, on serre la vis ou l’on abaisse le levier, après s’être assuré que les interlignes « conservent sous l’effort du pouce un jeu aisé de va et vient dans le sens de leur épaisseur, c’est-à-dire qu’elles ne sont ni trop serrées ni trop libres ». Il ne faut pas oublier, en effet, qu’à l’imposition, lors du serrage, la pression à l’aide des biseaux et des coins doit s’exercer sur les lignes et non sur les interlignes, sous peine des plus grands ennuis. On peut encore — et c’est un conseil fréquemment répété — justifier un composteur, avec plus de précision, en employant des m de corps 12, placés à plat dans le composteur :


la dernière lettre doit pouvoir, après le serrage de la vis, s’enlever ou se remettre à frottement doux.

La vis ou le levier du composteur seront solidement serrés, de manière à ce que celui-ci ne puisse se déjustifier insensiblement sous l’effort des légères poussées successivement répétées à chaque justification de ligne.


LES PINCES


Les pinces, utilisées pour la correction, sont fabriquées en fer ou en acier ; elles se composent de deux branches, réunies à l’une de leurs extrémités par un rivet de métal et soudées ; à l’autre extrémité, sous une pression modérée des doigts, les branches, suffisamment élastiques, peuvent se refermer pour saisir l’objet voulu : lettre, interligne ou autre.

Pour la correction, le paquet de composition placé sur la galée même est débarrassé entièrement de la ficelle qui le maintient en le bridant, aux quatre angles ; si la page est imposée, elle est desserrée : ni coins ni biseaux ne doivent exercer la moindre pression.

La ligne dans laquelle doivent être faites une ou plusieurs corrections est légèrement élevée au moyen des pinces fermées qui pressent l’une de ses extrémités, pendant que la main gauche dirige l’autre extrémité. Cette ligne se trouvant de la sorte plus haute que les autres lignes de la page, on a toute facilité pour ajouter, changer ou retrancher des lettres et justifier à nouveau.

Si la correction ne porte que sur un mot, on peut n’élever que ce mot : à cet effet, dans les blancs laissés par l’espace on appuie d’un côté du mot la pince fermée, et de l’autre le doigt ; le mot légèrement levé, la correction s’exécute avec aisance.

Dans un texte compact, on doit, après avoir écarté les lettres voisines, saisir la lettre à changer par les flancs, c’est-à-dire dans le sens de, l’épaisseur ; dans une composition interlignée, il est plus expéditif, si la lettre est de grosseur moyenne, de la saisir dans le sens de la force du corps.

Manœuvrées avec dextérité et précaution par un ouvrier soigneux, les pinces peuvent être complètement inoffensives pour le caractère. Malheureusement trop de compositeurs en font le complice ou, plutôt, l’exécuteur d’une œuvre néfaste. Malgré tous les conseils, ils conservent l’habitude déplorable, de « corriger sans délier ». Les lettres étroitement bloquées les unes contre les autres n’offrent qu’une prise minime aux pinces : celles-ci, dont les extrémités sont parfois faussées ou éraillées, enserrent mal la lettre ; malgré un effort de pression plus considérable des doigts, les pinces échappent la lettre : elles glissent, à vide, non sans avoir auparavant égratigné parfois gravement un œil jusque-là irréprochable, et qu’il faut se résoudre dès lors à mettre à la fonte.

Autrefois, au lieu de pinces, on utilisait exclusivement la pointe : après avoir levé légèrement la ligne ou le mot à rectifier, l’ouvrier piquait sur l’un des flancs les lettres fautives, dégagées de leurs voisines, et les soulevait à l’aide des doigts de la main gauche. La pointe maniée avec précaution ne paraît pas devoir être plus néfaste au caractère que les pinces, et nombre de vieux typographes l’utilisent encore de préférence à celles-ci.

Quelques fabricants ont, d’ailleurs, combiné, pour la correction, un modèle d’outil comportant à la fois les pinces et la pointe : parfois la pointe est placée à l’extrémité des pinces, c’est-à-dire à la tête, de manière fixe ; d’autres fois, la pointe, pivotant sur l’axe qui la fixe, peut, après le travail, venir se loger entre les deux branches des pinces.


LE VISORIUM


À ces différents outils, bien qu’il ne soit plus aujourd’hui qu’assez rarement utilisé, on peut ajouter le visorium : cet instrument sert, ou plutôt servait, « à tenir la copie sous les yeux du compositeur ».

Un modèle particulièrement bien compris de visorium se compose de deux baguettes plates, de 2 centimètres de large environ, assemblées en forme de croix, légèrement inclinée sur le pied auquel elle est fixée. À la partie supérieure un mordant, appelé aussi pince, retient étendue dans le sens de la largeur la copie appuyée vers son milieu sur le bras horizontal de la croix ; ce bras peut coulisser à frottement doux, sur le montant vertical, suivant la longueur de la copie, dont le bas est pris sur un talon. Le pied du visorium est constitué par un fer rond dans lequel sont entaillées à angle droit deux rainures, permettant de fixer le visorium au coin de n’importe quel cassetin.

Plus simplement, à l’aide de deux baguettes de bois croisées, d’une lamelle de fer souple comme mordant, et d’une pointe comme pied, un typographe a vite fait de se construire un visorium économique qui lui donnera satisfaction.

Le visorium a le grand avantage de conserver la copie dans toute sa propreté et de laisser à découvert tous les cassetins de la casse. À ce titre il mériterait d’être remis en honneur.


LA GALÉE


a) La galée ordinaire est une plaque de bois dur ou de métal (zinc ou cuivre), de forme rectangulaire, mais plus longue que large. À l’angle inférieur gauche[19] est placée une équerre en fer, de 1 centimètre de hauteur environ, régnant, à angle droit, sur toute la longueur des deux côtés.

Parfois, et particulièrement pour les galées de composition, au côté droit, et rivées dans le bois ou le métal, la galée porte, sous le fond, deux chevilles légèrement débordantes. Ces chevilles, butant sur deux cassetins, permettent d’assujettir la galée à la partie supérieure droite de la casse, en lui donnant une inclinaison convenable pour maintenir la composition.

Ce genre de galées est en effet surtout destiné à recevoir les lignes de composition au fur et à mesure que le typographe les enlève du composteur, pour en former un paquet, avant de les réunir ultérieurement en placards ou en pages.

Le bois employé à la confection des galées doit être bien sec, non susceptible de se fendre ou de se courber ; le compositeur s’abstiendra avec le plus grand soin, sauf en des cas tout à fait exceptionnels, de mouiller la composition placée sur ces galées, afin d’éviter au bois toute chance d’humidité qui pourrait le faire « travailler ».

Le fond, c’est-à-dire la partie portant la composition, doit être parfaitement poli ou laminé ; il ne doit, en outre, présenter aucune pointe, aucun rivet de métal d’une résistance à l’usure supérieure à celui qui constitue la galée elle-même, afin d’éviter au pied de la lettre le moindre choc toujours préjudiciable.

L’équerre doit être très régulière, et le fer qui la compose parfaitement dressé dans toute sa longueur.

Il est indispensable, en effet, que, lors de la correction en galée, l’ouvrier qui repasse la justification de ses lignes, puisse exécuter ce travail sans être exposé aux inconvénients qui résulteraient d’une équerre irrégulière ou faussée. Pour se prémunir contre ces désagréments, certains compositeurs ont l’habitude excellente de placer le long de l’équerre, sur la longueur voulue, c’est-à-dire débordant au delà de la composition, un douze soigneusement choisi qui leur assure une régularité de ligne irréprochable. D’ailleurs, certains constructeurs fournissent des galées avec équerres absolument rigides : à cet effet, un rebord en bois d’acajou double du côté extérieur l’équerre dont il augmente la solidité et qu’il met à l’abri des chocs et autres accidents ; d’autres fois, l’équerre en fer ordinaire fait place à une équerre en fonte, renforcée, avec base de soutien, et soigneusement dressée.

La galée de composition est généralement de dimensions restreintes : sa grandeur, à laquelle la longueur est toujours proportionnelle, ne va pas au delà de l’emplacement nécessaire au maniement d’une composition de format in-8o (15 × 25) ou, au plus, in-4o (20 × 30), suffisant de manière générale pour un compositeur aux pièces.

b) Pour les mises en pages, pour la composition des tableaux, poulies travaux de ville, on utilise des galées dont les dimensions atteignent le format[20] raisin (50 × 65), même parfois le format jésus (56 × 72), et dont la disposition est légèrement différente de celle précédemment décrite : ces galées possèdent une double équerre, avec un tasseau commun à l’une et à l’autre ; elles comportent un seul côté ouvert, celui opposé à la partie commune de la double équerre ; en outre, du côté libre, les tasseaux de chaque équerre débordent au-delà de la galée proprement dite. Il est aisé dès lors, en appuyant ces tasseaux ou oreilles sur le bord d’un ais, d’un marbre, de glisser sur cet ais ou sur ce marbre la page ou le tableau que les deux mains du compositeur ne pourraient soutenir.

Pour rendre encore plus appréciables les services que l’on peut retirer de ce genre de galée, dit galée à oreilles, on a imaginé de rendre détachable le côté commun de la double équerre ; lorsqu’il est en place, ce côté est encastré dans les mortaises à cliquet ménagées dans chacun des tasseaux des grands côtés de l’une et l’autre équerre : s’il est détaché, les extrémités de ces tasseaux débordent, elles aussi, au-delà du fond de la galée proprement dite : la page de composition peut, de la sorte, suivant les besoins, être poussée hors de la galée d’un côté ou de l’autre. Ces galées sont tout indiquées pour les mises en pages de labeurs et encore plus pour celles des journaux où elles peuvent rendre de grands services.

c) Bien qu’il soit d’un emploi plus restreint, il est nécessaire de mentionner encore un autre modèle de galée. Appelée galée à coulisse, cette dernière se compose d’un double fond : l’un, fixe, est constitué par une planche, bois ou métal, formant support ; l’autre, plus généralement de métal, glissant dans des rainures pratiquées sous les tasseaux, entre et sort au moyen d’une poignée placée sur le côté ouvert. Pour transporter le tableau ou la page, il est inutile de déplacer la galée elle-même : il suffit de tirer le fond mobile et, après l’avoir utilisé comme porte-pages pour déplacer la composition, de faire glisser celle-ci sur le marbre ou sur l’ais.

d) Plus rarement, la galée, au lieu d’être à coulisse, est à fond mobile. Dans ce cas, l’équerre, enfermant complètement le rectangle formé par la planche mobile, ne laisse aucun côté ouvert. La composition terminée, la galée est portée sur l’ais ou sur le marbre ; le fond mobile glissant, à l’aide d’une poignée, dans les rainures ménagées sur chacun des tasseaux des grands côtés des équerres, abandonne la composition maintenue par l’équerre placée à la sortie du fond.


e) La galée de distribution, plus ordinairement appelée violon, est destinée à recevoir les lignes ou paquets de composition courante que l’ouvrier distribuera pour faire sa casse. Presque toujours en bois, elle est de longueur plus considérable que la galée de composition ; on rencontre généralement les formats suivants : 18 × 38, 20 × 45, 22 × 60, etc. Sa construction est moins soignée que celle de la galée à composition ; d’ailleurs la nécessité de mouiller légèrement la lettre avant la distribution l’expose aux multiples inconvénients que présente le bois soumis aux alternatives de sécheresse et d’humidité ; et le service secondaire auquel ce genre de galée est destiné ne semble pas à nombre d’imprimeurs permettre d’engager la dépense considérable que nécessiterait l’achat de galée de distribution en métal.

f) Nombre de grands quotidiens utilisent, pour la composition et pour la distribution, une galée violon un peu spéciale : la largeur de cette galée à double équerre est conforme à la justification habituellement en usage dans les journaux (8 × 42, 14 × 42, 14 × 50) ; la longueur peut, au moyen d’agrafes munies de griffes, être divisée en plusieurs compartiments ; l’agrafe permet de serrer les lignes et d’en « faire épreuve » sans lier les paquets. Cette galée violon est utilisée pour la conservation des titres et des textes à insérer à plusieurs reprises. Elle se fabrique quelquefois en bois, mais surtout en zinc.

g) Pour la conservation de certaines parties de composition à utiliser ultérieurement — signatures, titres courants ou folios, lignes d’astérisques, titres passe-partout, blancs à mettre en réserve — beaucoup d’imprimeries possèdent une sorte de galée de distribution dite galée à pied. Un support en bois adapté sous le fond donne à cette galée, sur le marbre ou sur toute autre surface plane, l’inclinaison que la galée ordinaire a sur la casse.

Dans nombre de maisons on se sert également de la galée à pied pour la correction des épreuves en placards ou en pages, lorsque celle-ci doit être effectuée sur le marbre et non sur le rang.



  1. Dans son Nouveau Manuel complet de Typographie (nouvelle édition, 1857), Frey (ou, plutôt, E. Bouchez) divisait ces caractères en « deux types bien marqués par la nature même de leurs services : 1o le type ordinaire d’impression, que son adaptation variée sur les corps divise en régulier et irrégulier ; 2o le type auxiliaire ou de fantaisie, que la forme particulière de ses caractères partage en trois espèces : œil modifié du romain ordinaire, œil à extrémités généralement circulaires, et œil à extrémités en général angulaires ».
  2. Quelques typographes réunissent le caractère elzévir et le caractère Didot sous la même désignation de caractère romain. Ce nom lui vient de ce que ces deux familles dérivent en effet directement des lettres romaines en usage dans les inscriptions que Jenson prit pour modèle.
  3. Voir au paragraphe Italique l’origine de ce caractère, dû à l’Italien Aide Manuce.
  4. Anciennement ces lettres étaient appelées lettres de deux points, parce que, placées au début d’un texte, elles embrassaient deux lignes de ce texte. De nos jours le terme initiales est plus usité et répond mieux à la réalité : les initiales sont en effet fréquemment habillées non plus exclusivement sur les deux premières lignes du texte, mais sur trois, quatre et même parfois cinq lignes suivant leur importance, le format et la justification du volume.
  5. Le cadre de cet ouvrage ne permet pas de s’étendre sur cette question des différentes familles de caractères comme il conviendrait et comme certains lecteurs le désireraient sans doute. Les studieux que cette question intéresse pourront se reporter aux volumes de M. F. Thibaudeau, la Lettre d’imprimerie (Paris, Aux Bureaux de l’édition, 4, avenue Reille ; année 1921).
  6. Certains fondeurs disent 140.
  7. Les blancs ne sont point compris dans ces chiffres.
  8. Nombre de manuels typographiques et de catalogues de fondeurs donnent cette proportion, que l’on doit reconnaître un peu faible dans certaines circonstances.
  9. Les catalogues des fondeurs contiennent sur tous ces points des renseignements fort instructifs que le lecteur consultera avec fruit.

    Il est bon de remarquer que les chiffres donnés ici sont simplement indicatifs ; en pratique, ils varient quelque peu. — Dans le cas présent, le nombre des sortes est établi suivant la progression décroissante habituellement envisagée.

  10. Employé comme terme d’imprimerie, le mot espace est féminin.
  11. Dans cette étude, le terme cicéro est employé concurremment avec l’expression douze, et pour la même valeur : 12 points Didot.
  12. Si nos souvenirs sont exacts, cette Commission, composée de MM. Bonaventure, Claye et Serrière, fut constituée en 1857.
  13. En 1857, le Nouveau Manuel complet de Typographie reconnaissait déjà que « les casses modernes ne valent pas les anciennes sous le rapport de la solidité et de la justesse dans l’assemblage ». Il faut dire que le mal est allé s’aggravant. Les fabricants étrangers paraissent apporter plus de soins à la construction de ce matériel typographique que les constructeurs français.
  14. Le compositeur doit tenir sa casse dans le plus grand état de propreté, autant pour sa satisfaction personnelle que pour la plus grande facilité qu’il aura de travailler avec du matériel en bon ordre. Le temps passé à cet entretien sera largement regagné par l’ouvrier lorsque s’imposera une recherche dans un de ces cassetins rarement explorés, qui trop souvent font concurrence à la boîte à fonte. — Le cassetin de fonte n’existe pas sur tous les modèles de casse. Certains fabricants le suppriment.
  15. Dans la pratique la longueur courante utilisée pour les rangs est celle nécessaire pour deux ou trois casses. À moins de circonstances spéciales ou de raisons particulières, les rangs d’une seule pièce de quatre, cinq ou six casses paraissent peu pratiques, tout au moins lorsqu’ils sont réservés pour le service exclusif de la composition courante. Les fabricants construisent surtout les rangs pour les longueurs moyennes ; selon leurs besoins, les imprimeurs emploient deux rangs ou trois rangs côte à côte.
  16. Dans la plupart des caractères romains ordinaires, jusqu’au corps 11 ou 12, les lettres doubles ou triples, fl, fi, ff, ffl, ffi, sont fondues ensemble, d’un seul jet, parce que la bouclette supérieure en saillie de la lettre f rencontrant le point de la lettre i ou l’extrémité supérieure de la lettre l occasionnerait par pression latérale la rupture d’une de ces parties, peut-être des deux, et conséquemment la perte, la mise à la fonte de ces lettres mutilées.

    Sur un certain nombre de caractères, à partir du corps 11 ou 12, et même dans les caractères gras de corps inférieurs, où la largeur de l’œil et l’approche sont suffisantes pour parer en partie à cet inconvénient, on trouve moins fréquemment, chez les fondeurs, les triples lettres ffl, ffi. Le compositeur doit alors préférer l’emploi de la double lettre fi, fl, à celle , la pointe de l’f n’étant pas exposée à rencontrer la partie supérieure de l’autre f.

  17. On peut recommander ici au correcteur d’éviter l’emploi des grandes capitales accentuées É, Ê, Ê, etc., dans les compositions pleines ou compactes. Les accents qui sont fondus en saillie débordent, suivant les fondeurs et le genre de caractère auquel ils appartiennent, de 2 à 3 points environ ; ils portent ainsi presque toujours sur le talus des lettres de la ligne supérieure : ce fait occasionne très fréquemment la rupture de l’accent et entraîne la détérioration d’une partie de l’œil de la lettre elle-même. Bien plus, lorsque l’accent rencontre une lettre à queue inférieure, les deux lettres sont fréquemment mises hors d’usage.
  18. Traité de l’Imprimerie.
  19. Fournier écrit droit, ce qui est incontestablement une erreur.
  20. Le format du papier n’est pas en cause, mais seulement celui de l’outil décrit ici ; les dimensions sont données en centimètres, et non en cicéros.