Traduction par Jean Brignon.
(p. 302-304).


CHAPITRE LXIII.
Des quatre sortes de tentations qui arrivent au tems de la Mort, & premierement de la tentation contre la Foi, & de la maniere d’y résister.

LEs ennemis de notre salut ont coûtume de nous inquietter à la mort par quatre sortes de tentations dangéreuses. 1. Par les doutes sur les choses de la Foi. 2. Par des pensées de désespoir. 3. Par des sentimens de vaine gloire. 4. Par diverses sortes d’illusions, dont ces esprits de ténébres, transformés en Anges de lumiéres, se servent pour nous tromper.

Pour ce qui regarde la premiére tentation, si l’ennemi vous propose quelque raisonnement faux & captieux, gardez-vous bien de raisonner avec lui, contentez-vous de lui dire avec une sainte indignation ; Retire-toi, d’ici Satan, pere du mensonge, car je ne veux pas même t’écouter, & il me suffit de croire tout ce que croît la sainte Eglise Romaine.

Prenez garde aussi de ne pas vous arrêter à de certaines pensées, qui vous viendront dans l’esprit, & qui vous sembleront propres pour vous affermir dans la Foi : rejettez les comme des suggestions du démon qui prétend par-là vous embarrasser, en vous engageant insensiblement à la dispute. Que si vous n’êtes plus en état de vous défaire de ces pensées, si vous en avez déja l’esprit occupé, demeurez ferme, & n’écoutez ni les raisons, ni même les autorités de l’Ecriture que l’ennemi vous alleguera. Car quelques claires & quelques certaines qu’elles yous paroissent, elles sont ou tronquées, ou mal citées, ou détournées de leur véritable sens.

Si donc le malin Esprit vous demande ce que croit l’Eglise Romaine, ne lui faites là-dessus aucune réponse : mais sçachant que tout son dessein est de vous surprendre & de vous chicaner sur quelque mot ambigu, formez seulement en général un Acte de Foi, ou si vous voulez lui faire plus de dépit, répondez-lui que l’Eglise croit la Vérité ; s’il vous presse de dire cette Vérité, ne lui repliquez autre chose, sinon, que c’est ce que l’Eglise croit. Ayez loin sur-tout que votre cœur demeure attaché à la Croix, & dites au Fils de Dieu : mon Créateur & mon Sauveur, sécourez-moi au plûtôt, & ne vous éloignez point de moi, de peur que je ne m’écarte de la Vérité que vous m’avez enseigné ; & puisque vous m’avez fait la grace de naître dans votre Eglise, faites-moi aussi celle d’y mourir, à votre plus grande gloire.