Le Cid/Édition Marty-Laveaux/Acte I

Le Cid/Édition Marty-Laveaux
LE CID, Texte établi par Ch. Marty-LaveauxHachetteÉdition Marty-Laveaux (p. 105-124).
Acte II  ►

LE CID,
TRAGÉDIE[1].

ACTE I.



Scène première[2].

CHIMÈNE, ELVIRE[3].
chimène.

Elvire, m’as-tu fait un rapport bien sincère ?
Ne déguises-tu rien de ce qu’a dit mon père ?

elvire.

Tous mes sens à moi-même en sont encor charmés :
Il estime Rodrigue autant que vous l’aimez,
5Et si je ne m’abuse à lire dans son âme,

Il vous commandera de répondre à sa flamme.

CHIMÈNE.

Dis-moi donc, je te prie, une seconde fois
Ce qui te fait juger qu’il approuve mon choix :
Apprends-moi de nouveau quel espoir j’en dois prendre ;
10Un si charmant discours ne se peut trop entendre ;
Tu ne peux trop promettre aux feux de notre amour
La douce liberté de se montrer au jour.
Que t’a-t-il répondu sur la secrète brigue
Que font auprès de toi don Sanche et don Rodrigue ?
15N’as-tu point trop fait voir quelle inégalité
Entre ces deux amants me penche d’un côté ?

ELVIRE.

Non ; j’ai peint votre cœur dans une indifférence
Qui n’enfle d’aucun d’eux ni détruit l’espérance[4],
Et sans les voir d’un œil trop sévère ou trop doux,
20Attend l’ordre d’un père à choisir un époux.
Ce respect l’a ravi, sa bouche et son visage
M’en ont donné sur l’heure un digne témoignage[5],
Et puisqu’il vous en faut encor faire un récit,
Voici d’eux et de vous ce qu’en hâte il m’a dit :
25« Elle est dans le devoir ; tous deux sont dignes d’elle,
Tous deux formés d’un sang noble, vaillant, fidèle,
Jeunes, mais qui font lire aisément dans leurs yeux

L’éclatante vertu de leurs braves aïeux.
Don Rodrigue surtout n’a trait en son visage[6]
30Qui d’un homme de cœur ne soit la haute image,
Et sort d’une maison si féconde en guerriers,
Qu’ils y prennent naissance au milieu des lauriers.
La valeur de son père, en son temps sans pareille,
Tant qu’a duré sa force, a passé pour merveille ;
35Ses rides sur son front ont gravé ses exploits[7],
Et nous disent encor ce qu’il fut autrefois.
Je me promets du fils ce que j’ai vu du père ;
Et ma fille, en un mot, peut l’aimer et me plaire[8]. »

Il alloit au conseil, dont l’heure qui pressoit[9]
40A tranché ce discours qu’à peine il commençoit ;
Mais à ce peu de mots je crois que sa pensée
Entre vos deux amants n’est pas fort balancée.
Le Roi doit à son fils élire un gouverneur,
Et c’est lui que regarde un tel degré d’honneur :
45Ce choix n’est pas douteux, et sa rare vaillance
Ne peut souffrir qu’on craigne aucune concurrence.
Comme ses hauts exploits le rendent sans égal,
Dans un espoir si juste il sera sans rival ;
Et puisque don Rodrigue a résolu son père
50Au sortir du conseil à proposer l’affaire,
Je vous laisse à juger s’il prendra bien son temps,
Et si tous vos désirs seront bientôt contents.

CHIMÈNE.

Il semble toutefois que mon âme troublée
Refuse cette joie, et s’en trouve accablée :
55Un moment donne au sort des visages divers,
Et dans ce grand bonheur je crains un grand revers.

ELVIRE.

Vous verrez cette crainte heureusement déçue[10].

CHIMÈNE.

Allons, quoi qu’il en soit, en attendre l’issue.


Scène II.

L’INFANTE, LÉONOR, Page[11].
L’INFANTE[12].

Page, allez avertir Chimène de ma part[13]
60Qu’aujourd’hui pour me voir elle attend un peu tard,
Et que mon amitié se plaint de sa paresse.

(Le page rentre[14].)
LÉONOR.

Madame, chaque jour même désir vous presse ;
Et dans son entretien je vous vois chaque jour[15]
Demander en quel point se trouve son amour.[16].

L’INFANTE.

65Ce n’est pas sans sujet : je l’ai presque forcée[17]
À recevoir les traits dont son âme est blessée.
Elle aime don Rodrigue, et le tient de ma main,
Et par moi don Rodrigue a vaincu son dédain :
Ainsi de ces amants ayant formé les chaînes,
70Je dois prendre intérêt à voir finir leurs peines.[18].

LÉONOR.

Madame, toutefois parmi leurs bons succès
Vous montrez un chagrin qui va jusqu’à l’excès.[19].

Cet amour, qui tous deux les comble d’allégresse,
Fait-il de ce grand cœur la profonde tristesse,
75Et ce grand intérêt que vous prenez pour eux
Vous rend-il malheureuse alors qu’ils sont heureux ?
Mais je vais trop avant, et deviens indiscrète.

L’INFANTE.

Ma tristesse redouble à la tenir secrète.
Écoute, écoute enfin comme j’ai combattu,
80Écoute quels assauts brave encor ma vertu.[20].
L’amour est un tyran qui n’épargne personne :
Ce jeune cavalier[21], cet amant que je donne[22],
Je l’aime[23].

LÉONOR.

Je l’aime[4].Vous l’aimez !

L’INFANTE.

Je l’aime[4].Vous l’aimez !Mets la main sur mon cœur,
Et vois comme il se trouble au nom de son vainqueur,
Comme il le reconnoît.

LÉONOR.

85Comme il le reconnoît.Pardonnez-moi, Madame,
Si je sors du respect pour blâmer cette flamme[24].
Une grande princesse à ce point s’oublier
Que d’admettre en son cœur un simple cavalier[25] !
Et que diroit le Roi ? que diroit la Castille[26] ?

90Vous souvient-il encor de qui vous êtes fille ?

L’INFANTE.

Il m’en souvient si bien que j’épandrai mon sang
Avant que je m’abaisse à démentir mon rang.
Je te répondrois bien que dans les belles âmes
Le seul mérite a droit de produire des flammes ;
95Et si ma passion cherchoit à s’excuser,
Mille exemples fameux pourroient l’autoriser ;
Mais je n’en veux point suivre où ma gloire s’engage ;
La surprise des sens n’abat point mon courage[27] ;
Et je me dis toujours qu’étant fille de roi[28],
100Tout autre qu’un monarque est indigne de moi.
Quand je vis que mon cœur ne se pouvoit défendre,
Moi-même je donnai ce que je n’osois prendre.
Je mis, au lieu de moi, Chimène en ses liens,
Et j’allumai leurs feux pour éteindre les miens.
105Ne t’étonne donc plus si mon âme gênée
Avec impatience attend leur hyménée :
Tu vois que mon repos en dépend aujourd’hui.
Si l’amour vit d’espoir, il périt avec lui[29] :
C’est un feu qui s’éteint, faute de nourriture ;
110Et malgré la rigueur de ma triste aventure,
Si Chimène a jamais Rodrigue pour mari,
Mon espérance est morte, et mon esprit guéri[30].
Je souffre cependant un tourment incroyable :
Jusques à cet hymen Rodrigue m’est aimable ;

115Je travaille à le perdre, et le perds à regret ;
Et de là prend son cours mon déplaisir secret.
Je vois avec chagrin que l’amour me contraigne[31]
À pousser des soupirs pour ce que je dédaigne ;
Je sens en deux partis mon esprit divisé :
120Si mon courage est haut, mon cœur est embrasé ;
Cet hymen m’est fatal, je le crains, et souhaite :
Je n’ose en espérer qu’une joie imparfaite[32].
Ma gloire et mon amour ont pour moi tant d’appas,
Que je meurs s’il s’achève ou ne s’achève pas.

LÉONOR.

125Madame, après cela je n’ai rien à vous dire,
Sinon que de vos maux avec vous je soupire :
Je vous blâmois tantôt, je vous plains à présent ;
Mais puisque dans un mal si doux et si cuisant
Votre vertu combat et son charme et sa force,
130En repousse l’assaut, en rejette l’amorce,
Elle rendra le calme à vos esprits flottants.
Espérez donc tout d’elle, et du secours du temps ;
Espérez tout du ciel ; il a trop de justice
Pour laisser la vertu dans un si long supplice[33].

L’INFANTE.

135Ma plus douce espérance est de perdre l’espoir.

LE PAGE.

Par vos commandements Chimène vous vient voir.

L’INFANTE, à Léonor[34].

Allez l’entretenir en cette galerie.

LÉONOR.

Voulez-vous demeurer dedans la rêverie ?

L’INFANTE.

Non, je veux seulement, malgré mon déplaisir,
140Remettre mon visage un peu plus à loisir.
Je vous suis.
Je vous suis.Juste ciel, d’où j’attends mon remède,
Mets enfin quelque borne au mal qui me possède :
Assure mon repos, assure mon honneur.
Dans le bonheur d’autrui je cherche mon bonheur :
145Cet hyménée à trois également importe ;
Rends son effet plus prompt, ou mon âme plus forte.
D’un lien conjugal joindre ces deux amants,
C’est briser tous mes fers et finir mes tourments.
Mais je tarde un peu trop : allons trouver Chimène,
150Et par son entretien soulager notre peine.


Scène III.

LE COMTE, DON DIÈGUE.
LE COMTE.

Enfin vous l’emportez, et la faveur du Roi
Vous élève en un rang qui n’étoit dû qu’à moi :
Il vous fait gouverneur du prince de Castille.

DON DIÈGUE.

Cette marque d’honneur qu’il met dans ma famille
155Montre à tous qu’il est juste, et fait connoître assez
Qu’il sait récompenser les services passés.

LE COMTE.

Pour grands que soient les rois, ils sont ce que nous sommes :
Ils peuvent se tromper comme les autres hommes ;
Et ce choix sert de preuve à tous les courtisans
160Qu’ils savent mal payer les services présents.

DON DIÈGUE.

Ne parlons plus d’un choix dont votre esprit s’irrite ;

La faveur l’a pu faire autant que[35] le mérite ;
Mais on doit ce respect au pouvoir absolu[36],
De n’examiner rien quand un roi l’a voulu.
165À l’honneur qu’il m’a fait ajoutez en un autre[37] ;
Joignons d’un sacré nœud ma maison à la vôtre :
Vous n’avez qu’une fille, et moi je n’ai qu’un fils[38] ;
Leur hymen nous peut rendre à jamais plus qu’amis :
Faites-nous cette grâce, et l’acceptez pour gendre.

LE COMTE.

170À des partis plus hauts ce beau fils doit prétendre ;
Et le nouvel éclat de votre dignité
Lui doit enfler le cœur d’une autre vanité[39].
Exercez-la, Monsieur, et gouvernez le Prince :
Montrez-lui comme il faut régir une province,
175Faire trembler partout les peuples sous sa loi[40],
Remplir les bons d’amour, et les méchants d’effroi.
Joignez à ces vertus celles d’un capitaine :
Montrez-lui comme il faut s’endurcir à la peine,
Dans le métier de Mars se rendre sans égal,
180Passer les jours entiers et les nuits à cheval,
Reposer tout armé, forcer une muraille,
Et ne devoir qu’à soi le gain d’une bataille.
Instruisez-le d’exemple, et rendez-le parfait[41],
Expliquant à ses yeux vos leçons par l’effet.

DON DIÈGUE.

185Pour s’instruire d’exemple, en dépit de l’envie,
Il lira seulement l’histoire de ma vie.
Là, dans un long tissu de belles actions[42],
Il verra comme il faut dompter des nations,
Attaquer une place, ordonner une armée[43],
190Et sur de grands exploits bâtir sa renommée.

LE COMTE.

Les exemples vivants sont d’un autre pouvoir[44] ;
Un prince dans un livre apprend mal son devoir.
Et qu’a fait après tout ce grand nombre d’années,
Que ne puisse égaler une de mes journées ?
195Si vous fûtes vaillant, je le suis aujourd’hui,
Et ce bras du royaume est le plus ferme appui.
Grenade et l’Aragon tremblent quand ce fer brille ;
Mon nom sert de rempart à toute la Castille :
Sans moi, vous passeriez bientôt sous d’autres lois,
200Et vous auriez bientôt vos ennemis pour rois[45].
Chaque jour, chaque instant, pour rehausser ma gloire,
Met lauriers sur lauriers, victoire sur victoire.
Le Prince à mes côtés feroit dans les combats
L’essai de son courage à l’ombre de mon bras ;
205Il apprendroit à vaincre en me regardant faire ;

Et pour répondre en hâte à son grand caractère,
Il verroit…

DON DIÈGUE.

Il verroit…Je le sais, vous servez bien le Roi :
Je vous ai vu combattre et commander sous moi.
Quand l’âge dans mes nerfs a fait couler sa glace,
210Votre rare valeur a bien rempli ma place ;
Enfin, pour épargner les discours superflus,
Vous êtes aujourd’hui ce qu’autrefois je fus.
Vous voyez toutefois qu’en cette concurrence
Un monarque entre nous met quelque différence[46].

LE COMTE.

215Ce que je méritois, vous l’avez emporté.

DON DIÈGUE.

Qui l’a gagné sur vous l’avoit mieux mérité.

LE COMTE.

Qui peut mieux l’exercer en est bien le plus digne.

DON DIÈGUE.

En être refusé n’en est pas un bon signe.

LE COMTE.

Vous l’avez eu par brigue, étant vieux courtisan.

DON DIÈGUE.

220L’éclat de mes hauts faits fut mon seul partisan.

LE COMTE.

Parlons-en mieux, le Roi fait honneur à votre âge[47].

DON DIÈGUE.

Le Roi, quand il en fait, le mesure au courage[48].

LE COMTE.

Et par là cet honneur n’étoit dû qu’à mon bras.

DON DIÈGUE.

Qui n’a pu l’obtenir ne le méritoit pas.

LE COMTE.

Ne le méritoit pas ! Moi ?

DON DIÈGUE.

Ne le méritoit pas ! Moi ?Vous.

LE COMTE.

225Ne le méritoit pas ! Moi ?Vous. Ton impudence,
Téméraire vieillard, aura sa récompense.

(Il lui donne un soufflet[49].)
DON DIÈGUE, mettant l’épée à la main[50].

Achève, et prends ma vie après un tel affront,
Le premier dont ma race ait vu rougir son front.

LE COMTE.

Et que penses-tu faire avec tant de foiblesse ?

DON DIÈGUE.

230Ô Dieu ! ma force usée en ce besoin me laisse[51] !

LE COMTE.

Ton épée est à moi ; mais tu serois trop vain,
Si ce honteux trophée avoit chargé ma main.
Adieu : fais lire au Prince, en dépit de l’envie,
Pour son instruction, l’histoire de ta vie :

235D’un insolent discours ce juste châtiment
Ne lui servira pas d’un petit ornement[52].


Scène IV.

DON DIÈGUE[53].

Ô rage ! ô désespoir ! ô vieillesse ennemie !
N’ai-je donc tant vécu que pour cette infamie ?
Et ne suis-je blanchi dans les travaux guerriers
240Que pour voir en un jour flétrir tant de lauriers ?
Mon bras, qu’avec respect toute l’Espagne admire,
Mon bras, qui tant de fois a sauvé cet empire,
Tant de fois affermi le trône de son roi,
Trahit donc ma querelle, et ne fait rien pour moi ?
245Ô cruel souvenir de ma gloire passée !
Œuvre de tant de jours en un jour effacée !
Nouvelle dignité, fatale à mon bonheur !
Précipice élevé d’où tombe mon honneur !
Faut-il de votre éclat voir triompher le Comte,
250Et mourir sans vengeance, ou vivre dans la honte ?
Comte, sois de mon prince à présent gouverneur :
Ce haut rang n’admet point un homme sans honneur ;
Et ton jaloux orgueil, par cet affront insigne,
Malgré le choix du roi, m’en a su rendre indigne.
255Et toi, de mes exploits glorieux instrument,
Mais d’un corps tout de glace inutile ornement,
Fer, jadis tant à craindre, et qui, dans cette offense,

M’as servi de parade, et non pas de défense,
Va, quitte désormais le dernier des humains,
260Passe, pour me venger, en de meilleures mains[54].


Scène V.

DON DIÈGUE, DON RODRIGUE.
DON DIÈGUE.

Rodrigue, as-tu du cœur ?

DON RODRIGUE.

Rodrigue, as-tu du cœur ? Tout autre que mon père
L’éprouveroit sur l’heure.

DON DIÈGUE.

L’éprouverait sur l’heure.Agréable colère !
Digne ressentiment à ma douleur bien doux !
Je reconnois mon sang à ce noble courroux ;
265Ma jeunesse revit en cette ardeur si prompte.
Viens, mon fils, viens, mon sang, viens réparer ma honte ;
Viens me venger.

DON RODRIGUE.

Viens me venger.De quoi ?

DON DIÈGUE.

Viens me venger.De quoi ?D’un affront si cruel,
Qu’à l’honneur de tous deux il porte un coup mortel :
D’un soufflet. L’insolent en eût perdu la vie ;
270Mais mon âge a trompé ma généreuse envie :
Et ce fer que mon bras ne peut plus soutenir,
Je le remets au tien pour venger et punir.

Va contre un arrogant éprouver ton courage :
Ce n’est que dans le sang qu’on lave un tel outrage ;
275Meurs ou tue. Au surplus, pour ne te point flatter,
Je te donne à combattre un homme à redouter :
Je l’ai vu, tout couvert de sang et de poussière[55],
Porter partout l’effroi dans une armée entière.
J’ai vu par sa valeur cent escadrons rompus ;
280Et pour t’en dire encor quelque chose de plus,
Plus que brave soldat, plus que grand capitaine,
C’est…

DON RODRIGUE.

C’est…De grâce, achevez.

DON DIÈGUE.

C’est…De grâce, achevez.Le père de Chimène.

DON RODRIGUE.

Le…

DON DIÈGUE.

Le…Ne réplique point, je connois ton amour ;
Mais qui peut vivre infâme est indigne du jour.
285Plus l’offenseur est cher, et plus grande est l’offense.
Enfin tu sais l’affront, et tu tiens la vengeance :
Je ne te dis plus rien. Venge-moi, venge-toi ;
Montre-toi digne fils d’un père tel que moi[56].
Accablé des malheurs où le destin me range,
290Je vais les déplorer : va, cours, vole, et nous venge[57].


Scène VI.[58]

DON RODRIGUE[59].

Percé jusques au fond du cœur[60]
D’une atteinte imprévue aussi bien que mortelle,
Misérable vengeur d’une juste querelle,
Et malheureux objet d’une injuste rigueur,
295Je demeure immobile, et mon âme abattue
Cède au coup qui me tue.
Si près de voir mon feu récompensé,
Ô Dieu, l’étrange peine !

ContrEn cet affront mon père est l’offensé,
300ContrEt l’offenseur le père de Chimène !

Contre Que je sens de rudes combats !
Contre mon propre honneur mon amour s’intéresse :
Il faut venger un père, et perdre une maîtresse :
L’un m’anime le cœur, l’autre retient mon bras[61].
305Réduit au triste choix ou de trahir ma flamme,
Réduit auOu de vivre en infâme,
RéduDes deux côtés mon mal est infini.
Réduit auÔ Dieu, l’étrange peine !
RéduFaut-il laisser un affront impuni ?
310RéduFaut-il punir le père de Chimène ?

Noble ePère, maîtresse, honneur, amour,
Noble et dure contrainte, aimable tyrannie[62],
Tous mes plaisirs sont morts, ou ma gloire ternie.
L’un me rend malheureux, l’autre indigne du jour.
315Cher et cruel espoir d’une âme généreuse,
Cher et crMais ensemble amoureuse,
CherDigne ennemi de mon plus grand bonheur[63],
Cher et crFer qui causes ma peine[64],
CherM’es-tu donné pour venger mon honneur ?
320CherM’es-tu donné pour perdre ma Chimène ?

Je dois Il vaut mieux courir au trépas.
Je dois à ma maîtresse aussi bien qu’à mon père :

J’attire en me vengeant sa haine et sa colère[65] ;
J’attire ses mépris en ne me vengeant pas.
325À mon plus doux espoir l’un me rend infidèle,
À mon plEt l’autre indigne d’elle.
À mMon mal augmente à le vouloir guérir ;
À mon plTout redouble ma peine.
À mAllons, mon âme ; et puisqu’il faut mourir,
330À mMourons du moins sans offenser Chimène.

RecherMourir sans tirer ma raison !
Rechercher un trépas si mortel à ma gloire !
Endurer que l’Espagne impute à ma mémoire
D’avoir mal soutenu l’honneur de ma maison !
335Respecter un amour dont mon âme égarée
RespecterVoit la perte assurée !
RespN’écoutons plus ce penser suborneur,
RespecterQui ne sert qu’à ma peine.
RespAllons, mon bras, sauvons du moins l’honneur[66],
340RespPuisqu’après tout il faut perdre Chimène.

Je dois Oui, mon esprit s’étoit déçu[67].
Je dois tout à mon père avant qu’à ma maîtresse[68] :
Que je meure au combat, ou meure de tristesse,

Je rendrai mon sang pur comme je l’ai reçu.
345Je m’accuse déjà de trop de négligence :
Je m’accuCourons à la vengeance ;
Je mEt tout honteux d’avoir tant balancé[69],
Je m’accuNe soyons plus en peine,
Puisqu’aujourd’hui mon père est l’offensé,
350Si l’offenseur est père de Chimène.

FIN DU PREMIER ACTE.
  1. Var. tragi-comédie. (1637-44)
  2. Voyez la Notice, p. 51.
  3. Var.

    Scène première.

    LE COMTE, ELVIRE (a).

    elv. Entre tous ces amants dont la jeune ferveur
    Adore votre fille et brigue ma faveur,
    Don Rodrigue et don Sanche à l’envi font paroître(b)
    Le beau feu qu’en leurs cœurs ses beautés ont fait naître.
    Ce n’est pas que Chimène écoute leurs soupirs,
    Ou d’un regard propice anime leurs désirs :
    Au contraire, pour tous dedans l’indifférence,
    Elle n’ôte à pas un ni donne d’espérance,
    Et sans les voir d’un œil trop sévère ou trop doux,
    C’est de votre seul choix qu’elle attend un époux.
    le comte. [Elle est dans le devoir ; tous deux sont dignes d’elle (a’).]

    (1637-56)


    (a) elvire, le comte. (1638 P.)
    (b) Dans l’édition originale, et dans plusieurs de celles qui l’ont suivie, il y a parestre, et à l’autre vers naistre. Nous avons signalé une rime semblable : cognestre et naistre, dans la Comédie des Tuileries (voyez tome II, p. 315, note I). Dans l’intérieur des vers, les éditions les plus anciennes donnent tantôt parestre (par exemple, à la variante du vers 1250), tantôt paroistre (à la variante du vers 1419).
    (a’) On voit que, dans ses premières éditions, Corneille faisait dire au Comte lui-même ce qu’à partir de 1660 Elvire rapporte comme un discours du Comte.

  4. Var. Qui n’enfle de pas un ni détruit l’espérance,
    Et sans rien voir d’un œil trop sévère ou trop doux. (1660)
  5. Var. M’en ont donné tous deux un soudain témoignage. (1660)
  6. Var. Don Rodrigue surtout n’a trait de son visage. (1637 in-12)
  7. « J’ai vu feu M. Corneille fort en colère contre M. Racine pour une bagatelle, tant les poètes sont jaloux de leurs ouvrages. M. Corneille… avoit dit en parlant de don Diègue :
    Ses rides sur son front ont gravé ses exploits ;

    M. Racine, par manière de parodie, s’en joua dans ses Plaideurs, où il dit d’un sergent, acte I, scène i :
    Ses rides sur son front gravoient tous ses exploits.

    « Quoi ! disoit M. Corneille, ne tient-il qu’à un jeune homme de venir tourner en ridicule les plus beaux vers des gens ? » (Menagiana, édition de 1715, tome III, p. 306 et 307.)
  8. Var. [Et ma fille, en un mot, peut l’aimer et me plaire.]
    Va l’en entretenir ; mais dans cet entretien
    Cache mon sentiment et découvre le sien.
    Je veux qu’à mon retour nous en parlions ensemble ;
    L’heure à présent m’appelle au conseil qui s’assemble :
    Le Roi doit à son fils choisir un gouverneur,
    Ou plutôt (a) m’élever à ce haut rang d’honneur ;
    Ce que pour lui mon bras chaque jour exécute,
    Me défend de penser qu’aucun me le dispute.

    Scène II. (b)


    CHIMÈNE, ELVIRE (c).


    elvire, seule (d). Quelle douce nouvelle à ces jeunes amants !
    Et que tout se dispose à leurs contentements !
    chim. Eh bien ! Elvire, enfin que faut-il que j’espère ?
    Que dois-je devenir, et que t’a dit mon père ?
    elv. Deux mots dont tous vos sens doivent être charmés :
    [Il estime Rodrigue autant que vous l’aimez.]
    chim. L’excès de ce bonheur me met en défiance :
    Puis-je à de tels discours donner quelque croyance ?
    elv. Il passe bien plus outre, il approuve ses feux,
    Et vous doit commander de répondre à ses vœux.
    Jugez après cela, puisque tantôt son père
    Au sortir du conseil doit proposer l’affaire,
    S’il pouvoit avoir lieu de mieux prendre son temps,
    [Et si tous vos désirs seront bientôt contents.] (1637-56)

    (a) L’édition de 1638 P porte : « Au plutôt, » ce qui est sans doute une faute.

    (b) Les scènes se trouvent ainsi reculées d’un rang, jusqu’à la fin de l’acte, dans les éditions de 1637-56. — L’édition de 1638 P. numérote partout les scènes en nombres ordinaux : scène deuxième, scène troisième, etc.

    (c) elvire, chimène. (1638 P.)

    (d) Le mot seule manque dans les éditions de 1638 P. et de 1644 in-12.

  9. Var. Il alloit au conseil, dont l’heure qu’il pressoit. (1660)
  10. Var. Vous verrez votre crainte heureusement déçue. (1637-56)
  11. Var. le page. (1638 P. et 44 in-12)
  12. Var. l’infante, au Page. (1637-60)
  13. Var. Va-t’en trouver Chimène, et lui dis de ma part. (1637-44)
    Var. Va-t’en trouver Chimène, et dis-lui de ma part. (1648-56)
  14. Ce jeu de scène manque dans les éditions de 1637 in-12 et de 1638 L. — Il se trouve trois vers plus loin dans l’édition de 1644 in-12.
  15. Var. Et je vous vois pensive et triste chaque jour. (1637-56)
  16. Var. L’informer (a) avec soin comme va son amour. (1637-44)
    Var. Demander avec soin comme va son amour. (1648-56)

    (a) Voyez tome I, p. 472, note 2, et tome II, p. 31, note 2.
  17. Var. J’en dois bien avoir soin : je l’ai presque forcée
    À recevoir les coups dont son âme est blessée (b). (1637-56)
    (b) À recevoir le coup dont son âme est blessée. (1644 in-12)
  18. Var. Je dois prendre intérêt à la fin de leurs peines. (1637-56)
  19. Var. On vous voit un chagrin qui va jusqu’à l’excès. (1637-56)
  20. Var. Et plaignant ma foiblesse, admire ma vertu. (1637 in-4o et 39-56)
    Var. Et plaignant ma tristesse, admire ma vertu. (1637 in-12 et 38)
  21. Voyez le Lexique, au mot Cavalier.
  22. Var. Ce jeune chevalier, cet amant que je donne. (1637 in-4o, 38 P. et 39-44)
  23. « L’Infante dans le Cid avoue à Léonor l’amour secret qu’elle a pour lui, et l’auroit pu faire un an ou six mois plus tôt. » (Corneille, Examen de Polyeucte.)
  24. Var. Si je sors du respect pour blâmer votre flamme. (1637 in-12 et 38 L.)
  25. Var. Choisir pour votre amant un simple chevalier !
    (1637 in-4o, 38 P. et 39-44)


    Var. Choisir pour votre amant un simple cavalier !

    (1637 in-12, 38 L. et 48-56)
  26. Var. Et que dira le Roi ? que dira la Castille ?
    Vous souvenez-vous point de qui vous êtes fille (a) ?
    l’inf. Oui, oui, je m’en souviens, et j’épandrai mon sang
    Plutôt que de rien faire indigne de mon rang. (1637-56)
    (a) Vous souvenez-vous bien de qui vous êtes fille ? (1638 L.)
  27. Var. Si j’ai beaucoup d’amour, j’ai bien plus de courage. (1637-56)
  28. Var. Un noble orgueil m’apprend qu’étant fille de roi.
    (1637, 38, 44 in-12 et 48-56)
    Var. Un noble orgueil m’apprend qu’étant fille du Roi. (1639 et 44 in-4o)
  29. Var. Si l’amour vit d’espoir, il meurt avecque lui. (1637-56)
  30. L’édition de 1637 in-12 porte guari, pour guéri.
  31. Var. Je suis au désespoir que l’amour me contraigne. (1637-60)
  32. Var. Je ne m’en promets rien qu’une joie imparfaite.
    Ma gloire et mon amour ont tous deux tant d’appas,
    Que je meurs s’il s’achève et ne s’achève pas. (1637-56
  33. Var. Pour souffrir la vertu si longtemps au supplice. (1637-56)
  34. Les mots à Léonor manquent dans les éditions de 1637-44.
  35. L’édition de 1637 in-12 porte avant que, pour autant que.
  36. Var. Vous choisissant peut-être on eût pu mieux choisir ;
    Mais le Roi m’a trouvé plus propre à son désir. (1637-56)
  37. Var. À l’honneur qu’on m’a fait ajoutez-en un autre. (1660 et 63)
  38. Var. Rodrigue aime Chimène, et ce digne sujet
    De ses affections est le plus cher objet :
    Consentez-y, Monsieur, et l’acceptez, pour gendre.
    le comte. À de plus hauts partis Rodrigue doit prétendre. (1637-56)
  39. Var. Lui doit bien mettre au cœur une autre vanité. (1637-56)
  40. L’édition de 1682 porte, par erreur, sous la loi, pour sous sa loi.
  41. Var. Instruisez-le d’exemple, et vous ressouvenez
    Qu’il faut faire à ses yeux ce que vous enseignez. (1637-56)
  42. Var. Là, dans un long tissu des belles actions. (1639 et 44 in-4o)
  43. Var. Attaquer une place et ranger une armée. (1660-64)
  44. Var. Les exemples vivants ont bien plus de pouvoir. (1637-56)
  45. Var. Et si vous ne m’aviez, vous n’auriez plus de rois.
    Chaque jour, chaque instant entasse pour ma gloire
    Laurier dessus laurier, victoire sur victoire (a).
    Le Prince, pour essai de générosité,
    Gagneroit des combats marchant à mon côté ;
    Loin des froides leçons qu’à mon bras on préfère,
    [Il apprendroit à vaincre en me regardant faire.]
    don dièg. Vous me parlez en vain de ce que je connoi (b) :
    [Je vous ai vu combattre et commander sous moi.] (1637-56)


    (a) Lauriers dessus lauriers, victoire sur victoire. (1648-56)

    (b) Voyez tome I, p. 421, note 3.
  46. Var. Un monarque entre nous met de la différence. (1637-56)
  47. Var. Parlons-en mieux, le Roi fait l’honneur à votre âge. (1644 in-4o)
  48. Var. Le Roi, quand il en fait, les mesure au courage. (1648-56)
  49. « On ne donnerait pas aujourd’hui un soufflet sur la joue d’un héros. Les acteurs mêmes sont très-embarrassés à donner ce soufflet, ils font le semblant. Cela n’est plus même souffert dans la comédie, et c’est le seul exemple qu’on en ait sur le théâtre tragique. Il est à croire que c’est une des raisons qui firent intituler le Cid tragi-comédie. Presque toutes les pièces de Scudéry et de Boisrobert avaient été des tragi-comédies. On avait cru longtemps en France qu’on ne pouvait supporter le tragique continu sans mélange d’aucune familiarité. Le mot de tragi-comédie est très-ancien : Plaute l’emploie (a) pour désigner son Amphitryon, parce que si l’aventure de Sosie est comique, Amphitryon est très-sérieusement affligé. » (Voltaire.)

    (a) Dans le Prologue d’Amphitryon (vers 59 et 63), Plaute désigne la pièce par le nom de tragicocomœdia, non pour la raison que donne ici Voltaire, mais parce qu’on voit figurer ensemble dans ce drame, d’une part des dieux et des rois, personnages de la tragédie, et de l’autre des esclaves, personnages de la comédie.

  50. Ce jeu de scène manque dans les éditions de 1637 in-12 et de 1638. Le autres impressions de 1637-48 ont à la place, soit en marge, soit au-dessous du nom de don diègue : Ils mettent l’épée à la main.
  51. Var. Ô Dieu ! ma force usée à ce besoin me laisse ! (1637-56)
  52. Var. [Ne lui servira pas d’un petit ornement.]
    don dièg. Epargnes-tu mon sang ? le comte. Mon âme est satisfaite,
    Et mes yeux à ma main reprochent ta défaite.
    don dièg. Tu dédaignes ma vie ! le comte. En arrêter le cours
    Ne seroit que hâter la Parque de trois jours (a). (1637-56)

    (a) Ce vers termine la scène dans les éditions indiquées.
  53. Var. don diègue, seul. (1637-60)
  54. Var. [Passe, pour me venger, en de meilleures mains.]
    Si Rodrigue est mon fils, il faut que l’amour cède,
    Et qu’une ardeur plus haute à ses flammes succède :
    Mon honneur est le sien, et le mortel affront
    Qui tombe sur mon chef rejaillit sur son front (a). (1637-56)


    (a) Ce vers termine la scène dans les éditions indiquées.
  55. Var. Je l’ai vu tout sanglant, au milieu des batailles,
    Se faire un beau rempart de mille funérailles.
    don rodr. Son nom ? c’est perdre temps en propos superflus.
    don dièg. Donc pour te dire encor quelque chose de plus. (1637-56)
  56. Var. Montre-toi digne fils d’un tel père que moi. (1637-56)
  57. Var. Je m’en vais les pleurer : va, cours, vole, et nous venge. (1637-56)
  58. « On mettait alors des stances dans la plupart des tragédies, et on en voit dans Médée. On les a bannies du théâtre. On a pensé que les personnages qui parlent en vers d’une mesure déterminée ne devaient jamais changer cette mesure, parce que s’ils s’expliquaient en prose, ils devraient toujours continuer à parler en prose. Or les vers de six pieds étant substitués à la prose, le personnage ne doit pas s’écarter de ce langage convenu. Les stances donnent trop l’idée que c’est le poëte qui parle. Cela n’empêche pas que ces stances du Cid ne soient fort belles et ne soient encore écoutées avec beaucoup de plaisir. » (Voltaire.) — D’Aubignac a fait dans sa Pratique du théâtre (p. 345 et 346) des réflexions analogues sur ces stances : « Pour rendre… vraisemblable qu’un homme récite des stances, c’est-à-dire qu’il fasse des vers sur le théâtre, il faut qu’il y ait une couleur ou raison pour autoriser ce changement de langage… Souvent nos poètes ont mis des stances en la bouche d’un acteur parmi les plus grandes agitations de son esprit, comme s’il étoit vraisemblable qu’un homme en cet état eût la liberté de faire des chansons. C’est ce que les plus entendus au métier ont très-justement condamné dans le plus fameux de nos poèmes, où nous avons vu un jeune seigneur, recevant un commandement qui le réduisoit au point de ne savoir que penser, que dire, ni que faire, et qui divisoit son esprit par une égale violence entre sa passion et sa générosité, faire des stances au lieu même où il étoit, c’est-à-dire composer à l’improviste une chanson au milieu d’une rue. Les stances en étoient fort belles, mais elles n’étoient pas bien placées ; il eût fallu donner quelque loisir pour composer cette agréable plainte. » D’Aubignac constate du reste le succès de ce morceau : « Les stances de Rodrigue, où son esprit délibère entre son amour et son devoir, ont ravi toute la cour, et tout Paris » (p. 402).
  59. Var. don rodrigue, seul. (1637-60)
  60. L’édition de 1682 porte par erreur ; « Percé jusqu’au fond du cœur. »
  61. Var. L’un échauffe mon cœur, l’autre retient mon bras. (1637-55)
  62. Var. Illustre tyrannie, adorable contrainte,
    Par qui de ma raison la lumière est éteinte,
    À mon aveuglement rendez un peu de jour (a). (1637 in-4o P. et 44 in-12)
    Var. Impitoyable loi, cruelle tyrannie. (1637 in-12, 38 et 44 in-4o)

    (a) Tel est le texte des deux éditions in-4o de 1637 qui appartiennent à la Bibliothèque impériale. L’édition de l’Institut et celle de la Bibliothèque de Versailles sont, pour ces trois vers, conformes à l’édition de 1682.
  63. Var. ImNoble ennemi de mon plus grand bonheur. (1637-48)
  64. Var. ImNoblQui fais toute ma peine. (1637-56)
  65. Var. Qui venge cet affront irrite sa colère,
    Et qui peut le souffrir ne la mérite pas (a).
    Prévenons la douleur d’avoir failli contre elle,
    Prévenons Qui nous seroit mortelle.
    PrévTout m’est fatal, rien ne me peut guérir,
    Prévenons Ni soulager ma peine. (1637-56)


    (a) Et qui peut la souffrir ne la mérite pas. (1637 in-12 et 38)
    — L’édition de 1644 in-12 porte : « ne le mérite pas, » au lieu de : « ne la mérite pas. »
  66. Var. Allons, mon bras, du moins sauvons l’honneur,
    Puisqu’aussi bien il faut perdre Chimène. (1637-56)
  67. L’édition de 1637 in-12 porte par erreur : « Oui, mon esprit est déçu. »
  68. Var. Dois-je pas à mon père avant qu’à ma maîtresse ? (1637-48)
    Var. Dois-je pas à mon père autant qu’à ma maîtresse ? (1652-56)
  69. Var. Et tous honteux d’avoir tant balancé. (1637, 38 L. et 39)