Le Chariot d’or/Une douceur splendide et sombre

Le Chariot d’orMercure de FranceŒuvres de Albert Samain, t. 2 (p. 93-94).

Une douceur splendide et sombre
Flotte sous le ciel étoilé.
On dirait que là-haut, dans l’ombre,
Un paradis s’est écroulé.


Et c’est comme l’odeur ardente,
L’odeur fiévreuse dans l’air noir,
D’une chevelure d’amante
Dénouée à travers le soir.



Tout l’espace languit de fièvres.
Du fond des cœurs mystérieux
S’en viennent mourir sur les lèvres
Des mots qui font fermer les yeux.


Et de ma bouche où s’évapore
Le parfum des bonheurs derniers,
Et de mon cœur vibrant encore
S’élèvent de vagues pitiés


Pour tous ceux-là qui, sur la terre,
Par un tel soir tendant les bras,
N’ont point dans leur cœur solitaire
Un nom à sangloter tout bas.