Le Cahier Rouge de Benjamin Constant (RDDM)/01
Lorsqu’il y a quelques mois, Ferdinand Brunetière encourageait Mme la baronne Constant de Rebecque à faire connaître ce fragment inédit de l’autobiographie de Benjamin Constant, et, pour triompher de ses hésitations, vaincre ses derniers scrupules à ce sujet, lui proposait de le présenter lui-même au public, il lui écrivait : « Je vous ferai dix lignes d’introduction. Cela suffira. Benjamin Constant se passe de réclame. » La publication ayant dû être retardée, la promesse n’a pu, hélas ! être tenue. Mais après avoir reçu communication de la lettre qu’il adressait, le 30 juin, à Mme la baronne Constant de Rebecque, nous avons pensé que cette lettre était préférable à toute autre préface pour présenter à nos lecteurs le Cahier rouge. Cette confession de Benjamin Constant relative à ses premières années de jeunesse pourrait sans doute à elle seule suffire pour expliquer la vie et faire comprendre le caractère de l’auteur d’Adolphe.
Voici cette lettre qui restera en quelque sorte un suprême hommage à celui, à qui doit revenir l’honneur de cette publication.
Paris, 30 juin 1906.
Madame,
Est-il vraiment impossible de publier dans un prochain numéro de la Revue des Deux Mondes le Cahier rouge de Benjamin Constant ? L’occasion serait en effet plus favorable en ce moment qu’elle ne l’a été en aucun temps. L’Académie française vient de couronner le livre de M. Ph. Godet sur Madame de Charrière, et il en sera rendu compte dans un prochain numéro de la Revue. Je crois vous avoir dit que j’étais en possession de la Correspondance de B. Constant avec P. de Barante, et que je n’attendais pour la donner que d’avoir pu au préalable publier le Cahier rouge. Vous avez sans doute connaissance du volume de M. V. Glachant intitulé, assez bizarrement d’ailleurs : Benjamin Constant sous l’œil du Guet. Vous n’ignorez pas qu’on imprime pour les faire paraître assez prochainement deux gros volumes d’un M. Rudler sur Benjamin Constant. Toutes ces publications ne peuvent manquer d’éveiller l’attention de la critique, et Benjamin Constant va redevenir un sujet d’études politiques et littéraires, et sans doute quelqu’un voudra lui consacrer le livre qu’on n’a pas encore écrit sur lui.
Mais en de telles conditions, et pour ne point parler du « service rendu, » ai-je besoin d’insister pour vous dire quel heureux effet produirait la publication du Cahier rouge ? Je vous disais que le moment n’a jamais été plus favorable, je crois pouvoir dire qu’il ne le sera jamais. Et si je ne vous en dis pas davantage, c’est que vous le savez comme moi.
Ces conditions suffiront-elles, Madame, pour vaincre une résistance que je ne veux pas croire qui soit une opposition absolue ? Il me semble en tout cas qu’elles pourront peut-être l’ébranler. Si je plaide ma cause d’éditeur, mes argumens n’en sont pas moins dans l’intérêt et de Benjamin lui-même, et du nom de Constant. Si, comme je l’espère, c’est aussi votre conviction, vous réussirez à la faire partager, et j’ai quelque idée qu’en voyant le succès de la publication et la nature de ce succès, l’on ne se repentira pas finalement d’avoir cédé, si j’ose le dire, à nos instances.
F. Brunetière.
Je suis né le 25 octobre 1767, à Lausanne, en Suisse, d’Henriette de Chandieu[2], d’une ancienne famille française[3], réfugiée dans le pays de Vaud pour cause de religion, et de Juste Constant de Rebecque[4], colonel dans un régiment suisse au service de Hollande. Ma mère mourut en couches, huit jours après ma naissance. Le premier gouverneur dont j’ai conservé un souvenir un peu distinct fut un Allemand nommé Stroelin, qui me rouait de coups, puis m’étouffait de caresses pour que je ne me plaignisse pas à mon père. Je lui tins toujours fidèlement parole, mais la chose s’étant découverte malgré moi, on le renvoya de la maison. Il avait eu, du reste, une idée assez ingénieuse, c’était de me faire inventer le grec pour me l’apprendre, c’est-à-dire qu’il me proposa de nous faire à nous deux une langue qui ne serait connue que de nous : je me passionnai pour cette idée. Nous formâmes d’abord un alphabet, où il introduisit les lettres grecques. Puis nous commençâmes un Dictionnaire dans lequel chaque mot français était traduit par un mot grec. Tout cela se gravait merveilleusement dans ma tête, parce que je m’en croyais l’inventeur. Je savais déjà une foule de mots grecs, et je m’occupais de donner à ces mots de ma création des lois générales, c’est-à-dire que j’apprenais la grammaire grecque, quand mon précepteur fut chassé. J’étais alors âgé de cinq ans. J’en avais sept quand mon père m’emmena à Bruxelles, où il voulut diriger lui-même mon éducation. Il y renonça bientôt, et me donna pour précepteur un Français, M. de la Grange, qui était entré comme chirurgien-major dans son régiment. Ce M. de la Grange faisait profession d’être athée. C’était du reste, autant qu’il m’en souvient, un homme assez médiocre, fort ignorant, et d’une vanité excessive. Il voulut séduire la fille d’un maître de musique chez qui je prenais des leçons. Il eut plusieurs aventures assez scandaleuses. Enfin il se logea avec moi dans une maison suspecte, pour être moins gêné dans ses plaisirs. Mon père arriva furieux de son régiment, et M. de Lagrange fut chassé. En attendant que j’eusse un autre mentor, mon père me plaça chez mon maître de musique. J’y demeurai quelques mois. Cette famille que le talent du père avait sortie de la classe la plus commune me nourrissait et me soignait fort bien, mais ne pouvait rien pour mon éducation ; j’avais quelques maîtres dont j’esquivais les leçons, et l’on avait mis à ma disposition un cabinet littéraire du voisinage dans lequel il y avait tous les romans du monde, et tous les ouvrages irréligieux alors à la mode. Je lisais huit à dix heures par jour tout ce qui me tombait sous la main, depuis les ouvrages de La Mettrie jusqu’aux romans de Crébillon. Ma tête et mes yeux s’en sont ressentis pour toute ma vie. Mon père qui, de temps en temps, venait me voir, rencontra un ex-jésuite qui lui proposa de se charger de moi. Cela n’eut pas lieu, je ne sais pourquoi. Mais dans le même temps un ex-avocat français, qui avait quitté son pays pour d’assez fâcheuses affaires et qui étant à Bruxelles, avec une fille qu’il faisait passer pour sa gouvernante, voulait former un établissement d’éducation, s’offrit et parla si bien que mon père crut avoir trouvé un homme admirable. M. Gobert consentit pour un prix très haut à me prendre chez lui. Il ne me donna que des leçons de latin qu’il savait mal, et d’histoire, qu’il ne m’enseignait que pour avoir une occasion de me faire copier un ouvrage qu’il avait composé sur cette matière et dont il voulait avoir plusieurs copies. Mais mon écriture était si mauvaise et mon inattention si grande, que chaque copie était à recommencer, et pendant plus d’un an que j’y ai travaillé, je n’ai jamais été plus loin que l’avant-propos. M. Gobert cependant et sa maîtresse, étant devenus l’objet des propos publics, mon père en fut averti. Il s’ensuivit des scènes dont je fus témoin et je sortis de chez ce troisième précepteur, convaincu pour la troisième fois que ceux qui étaient chargés de m’instruire et de me corriger étaient eux-mêmes des hommes très ignorans et très immoraux. Mon père me ramena en Suisse, où je passai quelque temps, sous sa seule inspection, à sa campagne. Un de ses amis lui ayant parlé d’un Français d’un certain âge qui vivait retiré à la Chaux-de-Fonds près de Neuchâtel, et qui passait pour avoir de l’esprit et des connaissances, il prit des informations, dont le résultat fut que M. Duplessis, — c’était le nom de ce Français, — était un moine défroqué qui s’était échappé de son couvent, avait changé de religion et se tenait caché, pour n’être pas poursuivi, même en Suisse, par la France. Quoique ces renseignemens ne fussent pas très favorables, mon père fit venir M. Duplessis qui se trouva valoir mieux que sa réputation. Il devint donc mon quatrième précepteur. C’était un homme d’un caractère très faible, mais bon et spirituel. Mon père le prit tout de suite en très grand dédain, et ne s’en cacha point avec moi, ce qui était une mauvaise préparation pour la relation d’instituteur et d’élève. M. Duplessis remplit ses devoirs du mieux qu’il put et me fit faire assez de progrès. Je passai un peu plus d’un an avec lui, tant en Suisse qu’à Bruxelles et en Hollande. Au bout de ce temps, mon père s’en dégoûta, et forma le projet de me placer dans une université d’Angleterre. M. Duplessis nous quitta pour être gouverneur d’un jeune comte d’Aumale. Malheureusement, ce jeune homme avait une sœur assez belle et très légère dans sa conduite, elle s’amusa à faire tourner la tête au pauvre moine, qui en devint passionnément amoureux. Il cachait son amour parce que son état, ses cinquante ans et sa figure lui donnaient peu d’espérance, lorsqu’il découvrit qu’un perruquier moins vieux et moins laid était plus heureux que lui. Il fit mille folies qu’on traita avec une sévérité impitoyable. Sa tête se perdit et il finit par se brûler la cervelle. Cependant mon père partit avec moi pour l’Angleterre, et, après un séjour très court à Londres, il me conduisit à Oxford. Il s’aperçut bientôt que cette université, où les Anglais ne vont finir leurs études qu’à vingt ans, ne pouvait convenir à un enfant de treize. Il se borna donc à me faire apprendre l’anglais, à faire quelques courses dans les environs pour son amusement, et nous repartîmes au bout de deux mois, avec un jeune Anglais qu’on avait recommandé à mon père comme propre à me donner des leçons, sans avoir le titre et les prétentions d’un gouverneur, choses que mon père avait prises en horreur, par quatre expériences successives. Mais il en fut de cette cinquième tentative comme des précédentes. A peine M. May fut-il en route avec nous, que mon père le trouva ridicule et insupportable. Il me mit dans la confidence de ses impressions, et de la sorte mon nouveau camarade ne fut plus pour moi qu’un objet de moquerie et de dérision perpétuelle.
M. May passa un an et demi à nous accompagner en. Suisse et en Hollande. Nous séjournâmes assez longtemps dans la petite ville de Gertruydenberg. Là, je devins, pour la première fois, amoureux. Ce fut de la fille du commandant, vieux officier, ami de mon père. Je lui écrivais toute la journée de longues lettres que je ne lui remettais pas : et je partis sans lui avoir déclaré ma passion, qui survécut bien de deux mois à mon départ. Je l’ai revue depuis : et l’idée que je l’avais aimée lui avait laissé un intérêt ou peut-être simplement une curiosité assez vive sur ce qui me regardait. Elle eut une fois le mouvement de me questionner sur mes sentimens pour elle ; mais on nous interrompit. Quelque temps après elle se maria et mourut en couches. Mon père qui n’aspirait qu’à se débarrasser de M. May, saisit la première occasion de le renvoyer en Angleterre. Nous retournâmes en Suisse où il eut recours, pour me faire prendre quelques leçons, à un M. Bridel, homme assez instruit, mais très pédant et très lourd. Mon père fut bientôt choqué de l’importance, de la familiarité, du mauvais ton du nouveau Mentor qu’il m’avait choisi ; et dégoûté, par tant d’essais inutiles, de toute éducation domestique, il se décida à me placer, à quatorze ans, dans une Université d’Allemagne. Le Margrave d’Anspach, qui était alors en Suisse, dirigea son choix sur Erlang. Mon père m’y conduisit et me présenta lui-même à la petite Cour de la margrave de Bareith, qui y résidait. Elle nous reçut avec tout l’empressement qu’ont les princes qui s’ennuient pour les étrangers qui les amusent, elle me prit en grande amitié. En effet, comme je disais tout ce qui me passait par la tête, que je me moquais de tout le monde, et que je soutenais avec assez d’esprit les opinions les plus biscornues, je devais être, pour une Cour allemande, un assez divertissant personnage. Le Margrave d’Anspach me traita de son côté avec la même faveur. Il me donna i ! !i titre à sa Cour, où j’allai jouer au pharaon et faire des dettes de jeu que mon père eut le tort et la bonté de payer.
Pendant la première année de mon séjour à cette Université, j’étudiai beaucoup, mais je fis en même temps mille extravagances. La vieille Margrave me les pardonnait toutes et ne m’en aimait que mieux : et dans cette petite ville, ma faveur à la Cour faisait taire tous ceux qui me jugeaient plus sévèrement. Mais je voulus me donner la gloire d’avoir une maîtresse. Je choisis une fille d’une assez mauvaise réputation et dont la mère avait, dans je ne sais quelle occasion, fait à la Margrave je ne sais quelles impertinences. Le bizarre de la chose c’est que, d’un côté, je n’aimais point cette fille, et que, de l’autre, elle ne se donna point à moi. Je suis le seul homme vraisemblablement auquel elle ait résisté. Mais le plaisir de faire et d’entendre dire que j’entretenais une maîtresse me consolait, et de passer ma vie avec une personne que je n’aimais point et de ne pas posséder la personne que j’entretenais. La Margrave fut très offensée de ma liaison à laquelle ses représentations ne firent que m’attacher davantage. Ces représentations remplissaient mon but qui était qu’on parlât de moi. En même temps, la mère de ma prétendue maîtresse toujours pleine de haine contre la Margrave, et flattée de l’espèce de rivalité qui s’était établie entre une princesse et sa fille, ne cessait de me pousser à toutes sortes de procédés offensans contre la Cour. Enfin la Margrave perdit patience et me fit défendre de paraître chez elle. Je fus d’abord très affligé de ma disgrâce, et je tentai de reconquérir la faveur que j’avais pris à tâche de perdre. Je ne réussis pas. Tous ceux que cette faveur avait empêchés de dire du mal de moi s’en dédommagèrent. Je fus l’objet d’un soulèvement et d’un blâme général. La colère et l’embarras me firent encore faire quelques sottises. Enfin, mon père, instruit de tout ce qui se passait par la Margrave, m’ordonna de le rejoindre à Bruxelles, et nous partîmes ensemble pour Edimbourg. Nous arrivâmes dans cette ville le 8 juillet 1783. Mon père y avait d’anciennes connaissances, qui nous reçurent avec tout l’empressement de l’amitié et toute l’hospitalité qui caractérise la nation écossaise. Je fus placé chez un professeur de médecine qui tenait des pensionnaires.
Mon père ne séjourna que trois semaines en Écosse. Après son départ, je me mis à l’étude avec une grande ferveur, et alors commença l’année la plus agréable de ma vie. Le travail était à la mode parmi les jeunes gens d’Edimbourg. Ils formaient plusieurs réunions littéraires et philosophiques : je fus de quelques-unes, et je m’y distinguai comme écrivain et comme orateur, quoique dans une langue étrangère. Je contractai plusieurs liaisons très étroites avec des hommes qui, pour la plupart, se sont fait connaître en avançant en âge ; de ce nombre sont Mackintosh, actuellement grand-juge à Bombay, Laïng, un des meilleurs continuateurs de Robertson, etc. Parmi tous ces jeunes gens, celui qui semblait promettre le plus était le fils d’un marchand de tabac, nommé John Wilde. Il avait sur tous ses amis une autorité presque absolue, bien que la plupart lui fussent très supérieurs par la naissance et par la fortune : ses connaissances étaient immenses, son ardeur d’étude infatigable, sa conversation brillante, son caractère excellent. Après être parvenu par son mérite à la place de professeur et avoir publié un livre qui avait commencé sa réputation d’une manière très avantageuse, il est devenu fou furieux et actuellement, s’il n’est pas mort, il est enchaîné dans un cachot sur la paille. Misérable espèce humaine, qu’est-ce que de nous et de nos espérances ! Je vécus environ dix-huit mois à Edimbourg, m’amusant beaucoup, m’occupant assez et ne faisant dire que du bien de moi. Le malheur voulut qu’un petit Italien qui me donnait des leçons de musique, me fît connaître une banque de pharaon que tenait son frère. Je jouai, je perdis, je fis des dettes à droite et à gauche, et tout mon séjour fut gâté. Le temps que mon père avait fixé pour mon départ étant arrivé, je partis en promettant à mes créanciers de les payer, mais en les laissant fort mécontens et ayant donné contre moi des impressions très défavorables ; je passai par Londres où je m’arrêtai fort inutilement trois semaines, et j’arrivais à Paris dans le mois de mars 1785. Mon père avait fait pour moi un arrangement qui m’aurait valu des agrémens de tout genre si j’avais su et voulu en profiter. Je devais loger chez M. Suard, qui réunissait chez lui beaucoup de gens de lettres, et qui avait promis de m’introduire dans la meilleure société de Paris. Mais mon appartement n’étant pas prêt, je débarquai dans un hôtel garni ; j’y fis connaissance avec un Anglais fort riche et fort libertin ; je voulus l’imiter dans ses folies, et je n’avais pas été un mois à Paris que j’avais des dettes par-dessus la tête. Il y avait bien un peu de la faute de mon père qui m’envoyait à dix-huit ans, sur ma bonne foi, dans un lieu où je ne pouvais manquer de faire fautes sur fautes. J’allai cependant à la fin loger chez M. Suard et ma conduite devint moins extravagante.
Mais les embarras dans lesquels je m’étais jeté en débutant eurent des suites qui influèrent sur tout mon séjour. Pour comble de malheur, mon père crut devoir me placer sous une surveillance quelconque, et s’adressa pour cet effet à un ministre protestant, chapelain de l’ambassadeur de Hollande. Celui-ci crut faire merveille en lui recommandant un nommé Baumier, qui s’était présenté à lui comme un protestant, persécuté pour cause de religion par sa famille. Ce Baumier était un homme perdu de mœurs, sans fortune, sans asile, un véritable chevalier d’industrie de la plus mauvaise espèce. Il tâcha de s’emparer de moi, en se mettant de moitié dans toutes les sottises que je voulais faire, et il ne tint pas à lui que je n’adoptasse le genre de vie le plus dissolu et le plus abject. Comme, indépendamment de tous ses vices, il était sans esprit, fort ennuyeux et très insolent, je me lassai bientôt d’un homme qui ne faisait que m’accompagner chez des filles et m’emprunter de l’argent, et nous nous brouillâmes. Il écrivit, je crois, à mon père, et il exagéra, je suppose, le mal qu’il y avait à dire de moi, quoique la vérité fût déjà très suffisante. Mon père arriva lui-même à Paris et m’emmena à Bruxelles, où il me laissa pour retourner à son régiment. Je restai à Bruxelles depuis le mois d’août jusqu’à la fin de novembre, partageant mon temps entre les maisons d’Anet et d’Aremberg, anciennes connaissances de mon père, et qui, en cette qualité, me firent un très bon accueil, et une coterie de Genevois, plus obscure, mais qui me devint bien plus agréable. Il y avait dans cette coterie une femme d’environ vingt-six à vingt-huit ans, d’une figure fort séduisante et d’un esprit fort distingué. Je me sentais entraîné vers elle, sans me l’avouer bien clairement, lorsque, par quelques mots qui me surprirent d’abord encore plus qu’ils ne me charmèrent, elle me laissa découvrir qu’elle m’aimait. Il y a, dans le moment où j’écris, vingt-cinq ans d’écoulés depuis le moment où je fis cette découverte, et j’éprouve encore un sentiment de reconnaissance en me retraçant le plaisir que j’en ressentis.
Mme Johannot, c’était son nom, s’est placée dans mon souvenir, différemment de toutes les femmes que j’ai connues : ma liaison avec elle a été bien courte et s’est réduite à bien peu de chose. Mais elle ne m’a fait acheter les sensations douces qu’elle m’a données par aucun mélange d’agitation ou de peine : et à quarante-quatre ans je lui sais encore gré du bonheur que je lui ai dû lorsque j’en avais dix-huit. La pauvre femme a fini bien tristement. Mariée à un homme très méprisable de caractère et de mœurs très corrompues, elle fut d’abord traînée par lui à Paris où il se mit au service du parti qui dominait, devint, quoique étranger, membre de la Convention, condamna le Roi à mort et continua jusqu’à la fin de cette trop célèbre assemblée à y jouer un rôle lâche et équivoque. Elle fut ensuite reléguée dans un village d’Alsace pour faire place à une maîtresse que son mari entretenait dans sa maison, elle fut enfin rappelée à Paris pour y vivre avec cette maîtresse que son mari voulait l’obliger à servir, et les mauvais traitemens dont il l’accabla la poussèrent à s’empoisonner. J’étais alors à Paris moi-même et je demeurais dans son voisinage : mais j’ignorais qu’elle y fût, et elle est morte à quelques pas d’un homme qu’elle avait aimé et qui n’a jamais pu entendre prononcer son nom sans être ému jusqu’au fond de l’âme ; elle est morte, dis-je, se croyant oubliée et abandonnée de toute la terre. Il y avait à peine an mois que je jouissais de son amour, quand mon père vint me prendre pour me ramener en Suisse. Mme Johannot et moi nous nous écrivîmes de tristes et tendres lettres, au moment de mon départ. Elle me donna une adresse sous laquelle elle consentit à ce que je continuasse à lui écrire : mais elle ne me répondit pas. Je me consolai sans l’oublier, et l’on verra que bientôt d’autres objets prirent sa place. Je la revis deux ans après une seule fois à Paris, quelques années avant ses malheurs. Je me repris de goût pour elle, je lui fis une seconde visite ; elle était partie : lorsqu’on me le dit, j’éprouvai une émotion d’une nature tout à fait extraordinaire par sa tristesse et sa violence. C’était une sorte de pressentiment funeste que sa fin déplorable n’a que trop justifié. De retour en Suisse, je passai de nouveau quelque temps à la campagne, étudiant à bâtons rompus et m’occupant d’un ouvrage dont la première idée m’était venue à Bruxelles, et qui, depuis, n’a jamais cessé d’avoir un grand attrait pour moi : c’était une histoire du polythéisme. Je n’avais alors aucune des connaissances nécessaires pour écrire quatre lignes raisonnables sur un tel sujet. Nourri des principes de la philosophie du XVIIIe siècle et surtout des ouvrages d’Helvétius, je n’avais d’autre pensée que de contribuer pour ma part à la destruction de ce que j’appelais les préjugés. Je m’étais emparé d’une assertion de l’auteur de l’Esprit, qui prétend que la religion païenne était de beaucoup préférable au christianisme ; et je voulais appuyer cette assertion, que je n’avais ni approfondie, ni examinée, de quelques faits pris au hasard et de beaucoup d’épigrammes et de déclamations que je croyais neuves. Si j’avais été moins paresseux, et que je me fusse moins abandonné à toutes les impressions qui m’agitaient, j’aurais peut-être achevé en deux ans un très mauvais livre, qui m’aurait fait une petite réputation éphémère dont j’eusse été bien satisfait. Une fois engagé par amour-propre, je n’aurais pu changer d’opinion : et le premier paradoxe ainsi adopté m’aurait enchaîné pour toute ma vie. Si la paresse a des inconvéniens, elle a bien aussi des avantages. Je ne me bornai pas longtemps à une vie paisible et studieuse, de nouvelles amours vinrent me distraire, et comme j’avais trois ans de plus qu’à Erlang, je fis aussi trois fois plus de folies. L’objet de ma passion était une Anglaise, d’environ trente à trente-cinq ans, femme de l’ambassadeur d’Angleterre à Turin. Elle avait été très belle et avait encore un très joli regard, des dents superbes, et un charmant sourire. Sa maison était fort agréable, on y jouait beaucoup, de sorte que je trouvais à y contenter un goût plus vif encore que celui que la dame elle-même m’inspirait. Mme Trevor était extrêmement coquette et avait le petit esprit fin et maniéré que la coquetterie donne aux femmes qui n’en ont pas d’autre. Elle vivait assez mal avec son mari dont elle était presque toujours séparée : et il y avait toujours à sa suite cinq ou six jeunes Anglais. Je commençai par me jeter dans sa société parce qu’elle était plus brillante et plus animée que toute autre à Lausanne. Ensuite, voyant que la plupart des jeunes gens qui l’entouraient lui faisaient la cour, je me mis en tête de lui plaire. Je lui écrivis une belle lettre pour lui déclarer que j’étais amoureux d’elle. Je lui remis cette lettre un soir, et retournai le lendemain pour recevoir sa réponse. L’agitation que me causait l’incertitude sur le résultat de ma démarche m’avait donné une sorte de fièvre qui ressemblait assez à la passion que d’abord je n’avais voulu que feindre. Mme Trevor me répondit par écrit, comme cela était indiqué dans la circonstance. Elle me parlait de ses liens et m’offrait la plus tendre amitié. J’aurais dû ne pas m’arrêter à ce mot et voir jusqu’où cette amitié nous aurait conduits. Au lieu de cela, je crus adroit de montrer le plus violent désespoir de ce qu’elle ne m’offrait que de l’amitié en échange de mon amour : et me voilà à me rouler par terre et à me frapper la tête contre la muraille sur ce malheureux mot d’amitié. La pauvre femme, qui probablement avait eu affaire à des gens plus avisés, ne savait comment se conduire dans cette scène, d’autant plus embarrassante pour elle que je ne faisais aucun mouvement qui la mît à même de la terminer d’une manière agréable pour tous deux.
Je me tenais toujours à dix pas et quand elle s’approchait de moi pour me calmer ou me consoler, je m’éloignais en lui répétant que, puisqu’elle n’avait pour moi que de l’amitié, il ne me restait plus qu’à mourir. Elle ne put tirer de moi autre chose pendant quatre heures, et je m’en allai, la laissant, je crois, très ennuyée d’un amant qui disputait sur un synonyme. Je passai de la sorte trois ou quatre mois, devenant chaque jour plus amoureux, parce que je me butais, chaque jour, plus contre une difficulté que j’avais créée moi-même, et ramené d’ailleurs chez Mme Trevor, au moins autant par mon goût pour le jeu que par mon ridicule amour ; Mme Trevor se prêtait à la bizarrerie de mon manège avec une patience admirable. Elle répondait à toutes mes lettres, me recevait chez elle tête à tête et me gardait jusqu’à trois heures du matin. Mais elle n’y gagna rien ni moi non plus. J’étais d’une timidité excessive, et d’un emportement frénétique ; je ne savais pas encore qu’il fallait prendre au lieu de demander ; je demandais toujours et je ne prenais jamais. Mme Trevor dut me trouver un amant d’une singulière espèce. Mais comme les femmes aiment toujours tout ce qui prouve qu’elles sont propres à inspirer une grande passion, elle s’accommoda de mes manières et ne m’en reçut pas plus mal. Je devins jaloux d’un Anglais qui ne se souciait pas le moins du monde de Mme Trevor, je voulus le forcer à se battre avec moi. Il crut m’apaiser en me déclarant que, loin d’aller sur mes brisées, il ne trouvait pas même Mme Trevor agréable. Je voulus alors me battre avec lui parce qu’il ne rendait pas justice à la femme que j’aimais. Nos pistolets étaient déjà chargés lorsque mon Anglais, qui n’avait aucune envie d’un duel aussi ridicule, s’en tira fort adroitement. Il voulut des seconds et m’annonça qu’il leur dirait pourquoi je lui avais cherché querelle. J’eus beau lui représenter qu’il devait me garder un pareil secret, il se moqua de moi, et je dus renoncer à ma brillante entreprise pour ne pas compromettre la dame de mes pensées. L’hiver étant venu, mon père me dit de me préparer à le suivre à Paris. Mon désespoir fut sans bornes, Mme Trevor y parut très sensible. Je la pris souvent dans mes bras, j’arrosai ses mains de mes larmes, j’allai passer des nuits à pleurer sur un banc où je l’avais vue assise ; elle pleurait avec moi ; et si j’avais voulu ne plus disputer sur lus mots, j’aurais peut-être eu des succès plus complets. Mais tout se borna à un chaste baiser sur des lèvres tant soit peu fanées. Je partis enfin dans un état de douleur inexprimable, Mme Trevor me promit de m’écrire, et on m’emmena. Ma souffrance était tellement visible qu’encore deux jours après, an de mes cousins, qui voyageait avec nous, voulut proposer à mon père de me renvoyer en Suisse[5] persuadé qu’il était, que je ne soutiendrais pas le voyage. Enfin, je le soutins et nous arrivâmes. Je trouvai une lettre de Mme Trevor. La lettre était froide, mais je lui sus gré de m’avoir tenu sa promesse, je répondis dans le langage de l’amour le plus passionné, j’obtins une seconde lettre un peu plus insignifiante que la première ; de mon côté, je me refroidis pendant que nos lettres couraient la poste ; je n’écrivis plus, et notre liaison finit. Je revis pourtant Mme Trevor, à Paris trois mois après : je n’éprouvai aucune émotion, et je crois que la sienne ne fut causée que par la surprise de voir en moi un détachement aussi complet. La pauvre femme continua encore quelques années son métier de coquette, et se donna beaucoup de ridicules, puis elle retourna en Angleterre où elle devint, m’a-t-on dit, à peu près folle d’attaques de nerfs.
Ces premiers mois de mon séjour à Paris furent très agréables ; Je fus parfaitement reçu par la société de M. Suard, chez qui j’allai demeurer de nouveau[6]. Mon esprit qui manquait alors tout à fait de solidité et de justesse, mais qui avait une tournure épigrammatique très amusante, mes connaissances qui, bien que fort décousues, étaient supérieures à celles de la plupart des gens de lettres de la génération qui s’élevait, l’originalité de mon caractère, tout cela parut piquant. Je fus fêté par toutes les femmes de la coterie de Mme Suard, et les hommes pardonnèrent à mon âge une impertinence qui, n’étant pas dans les manières, mais dans les jugemens, était moins aperçue et moins offensante. Cependant quand je me souviens de ce que je disais alors et du dédain raisonné que je témoignais à tout le monde, je suis encore à concevoir comment on a pu le tolérer. Je me rappelle qu’un jour, rencontrant un des hommes de notre société qui avait trente ans de plus que moi, je me mis à causer avec lui, et La conversation roula comme à l’ordinaire sur les ridicules de tous ceux que nous voyions tous les jours. Après m’être bien moqué de chacun l’un après l’autre, je pris tout à coup celui avec lequel j’avais causé par la main, et je lui dis : « Je vous ai bien fait rire aux dépens de tous nos amis, mais n’allez pas croire que, parce que je me suis moqué d’eux avec vous, je sois tenu à ne pas me moquer de vous avec eux ; je vous avertis que nous n’avons point fait ce traité. » Le jeu qui m’avait déjà causé tant de peines, et qui m’en a tant causées depuis, vint troubler ma vie et gâter tout ce que la bonté de mon père avait fait pour moi. J’avais connu en Suisse chez Mme Trevor une vieille Française, Mme de Bourbonne, joueuse à l’excès, d’ailleurs bonne femme et assez originale : elle jouait en voiture, elle jouait au lit, elle jouait au bain, le matin, la nuit, le soir, toujours et partout, quand elle le pouvait. J’allai la voir à Paris, elle y avait tous les jours un quinze, et je m’empressai d’en être. J’y perdais régulièrement tout ce que j’apportais, et j’y apportais tout ce qu’on me payait par ordre de mon père et tout ce que je pouvais emprunter, ce qui heureusement n’était pas très considérable, quoique je ne négligeasse aucun moyen de faire des dettes. Il m’arriva à ce sujet une aventure assez plaisante, avec une des plus vieilles femmes de la société de Mme Suard. C’était Mme Saurin, femme de Saurin le philosophe et l’auteur de Spartacus, elle avait été fort belle et s’en souvenait toute seule, car elle avait soixante-cinq ans. Elle m’avait témoigné beaucoup d’amitié, et bien que j’eusse le tort de me moquer un peu d’elle, j’avais en elle plus de confiance qu’en toute autre personne à Paris. Un jour je venais de perdre chez Mme de Bourbonne tout l’argent que j’avais, et tout ce que j’avais pu jouer sur parole ; embarrassé de payer, je m’avisai de recourir à Mme Saurin pour qu’elle me prêtât ce qui me manquait. Mais désapprouvant moi-même la démarche que je faisais, je lui écrivis au lieu de lui en parler, et je lui fis dire que je viendrais prendre sa réponse dans l’après-dînée. J’y fus en effet, je la trouvai seule. Ma timidité naturelle, augmentée par la circonstance, fit que j’attendis longtemps qu’elle me parlât de mon billet ; enfin, comme elle ne m’en disait pas un mot, je me déterminai à rompre le silence, et je commençai en rougissant, en baissant les yeux, et d’une voix fort émue : « Vous serez peut-être étonnée, lui dis-je, de la démarche que je fais, je serais bien fâché de vous avoir donné contre moi des impressions défavorables par une chose que je ne vous aurais pas confiée, si votre affection si douce pour moi ne m’y avait encouragée ; l’aveu que je vous ai fait et dont votre silence me fait craindre que vous ne soyez blessée, m’a été arraché par un mouvement irrésistible de confiance en vous. » Je disais tout cela en m’arrêtant à chaque mot, et sans regarder Mme Saurin. Comme pourtant elle ne répondait point, je levai les yeux, et je vis par son air de surprise qu’elle ne concevait rien à ma harangue.
Je lui demandai si elle n’avait pas reçu ma lettre. Il se trouva que non. Me voilà bien plus interdit, et j’aurais volontiers repris toutes mes paroles, sauf à trouver d’autres moyens de sortir de l’embarras où je me trouvais. Mais il n’y avait plus de ressources. Il fallait achever. Je repris donc : « Vous avez été si bonne pour, moi, vous m’avez témoigné tant d’intérêt. Peut-être en ai-je trop présumé. Mais il y a des momens où la tête d’un homme se perd. Je ne me consolerais jamais si j’avais porté atteinte à votre amitié. Permettez-moi de ne plus vous parler de cette malheureuse lettre. Laissez-moi vous cacher ce qui ne m’était échappé que dans un moment de trouble. — Non, me dit-elle, pourquoi doutez-vous de mon cœur ? Je veux tout savoir, achevez, achevez. » Et elle couvrit de ses mains son visage, et elle tremblait de tout son corps. Je vis clairement qu’elle avait pris tout ce que je venais de lui dire pour une déclaration d’amour. Ce quiproquo, son émotion, et un grand lit de damas rouge qui était à deux pas de nous, me jetèrent dans une inexprimable terreur. Mais je devins furieux comme un poltron révolté et je me hâtai de dissiper l’équivoque. « Au fond, lui dis-je, je ne sais pourquoi je vous ennuie si longtemps d’une chose fort peu importante. J’ai eu la sottise de jouer, j’ai perdu un peu plus que je n’ai en ce moment, et je vous ai écrit pour savoir si vous pourriez me rendre le service de me prêter ce qui me manque pour m’acquitter. » Mme Saurin resta immobile. Ses mains descendirent de son visage qu’il n’était plus nécessaire de couvrir. Elle se leva sans mot dire et me compta l’argent que je lui avais demandé. Nous étions si confondus, elle et moi, que tout se passa en silence. Je n’ouvris même pas la bouche pour la remercier.
- ↑ Le Cahier rouge de Benjamin Constant provient de la succession de son cousin germain, M. Auguste Constant de Rebecque d’Hermenches, et appartient actuellement à l’arrière-petit-fils de ce dernier, Marc-Rodolphe Constant de Rebecque.
Seul M. Philippe Godet a eu connaissance du manuscrit avec l’autorisation de la famille de Constant et en a fait quelques extraits pour son ouvrage : Mme de Charrière et ses amis, paru en 1906, et couronné par l’Académie française. - ↑ La famille de Chandieu était du Dauphiné. Antoine de la Roche-Chandieu,
pasteur zélé, était aumônier de Henri IV à la bataille de Coutras. Ils émigrèrent
en Suisse pour cause de religion.
Voyez, pour plus de détails : Lettres de Benjamin Constant à sa famille, précédées d’une Introduction par Jean H. Menos, Albert Savine. Paris, 1888. - ↑ Les Constant de Rebecque sont originaires d’Aire-en-Artois. L’un d’eux passa du service de Charles-Quint à celui de Henri IV dont il sauva la vie à la bataille de Coutras. Ayant embrassé la Religion réformée, ils se réfugièrent en Suisse lors des persécutions. Plusieurs d’entre eux suivirent la carrière des armes au service des Pays-Bas. Le père de Benjamin fut du nombre.
- ↑ M. Juste de Constant avait une figure imposante, beaucoup d’esprit et de singularité dans le caractère. Il était défiant, aimait à cacher ses actions, changeait facilement de principes et de façons de penser. Il eut des amis et des ennemis violons. »
Mlle de Chandieu était belle et d’un caractère angélique. Elle mourut après deux ans, de mariage, et ce malheur a influé sur tout le reste de la vie de son mari. » Journal de Rosalie de Constant : Rosalie de Constant, sa famille et ses amis, par Lucie Achard. Eggimann, Genève, 1902. - ↑ « Mon oncle Juste menait à Paris son fils Benjamin pour achever son éducation et entrer dans le monde. Nous fîmes la route ensemble. Mon oncle était un homme de beaucoup d’esprit, mais d’un caractère difficile, caustique et impérieux. Il avait une ambition sans bornes pour son fils et sacrifia beaucoup pour lui donner une brillante éducation. » Journal de Charles de Constant, M. C. C. Bibliothèque de Genève.
- ↑ « Benjamin et moi sommes liés étroitement, il est revenu de ses idées sinistres. J’ai soupe vendredi chez Mme de Staël ; en confidence, je vous dirai que je m’y ennuyai à la mort, que je déteste le ton pédant et haut de cette personne. N’en disons point de mal car elle me fait des honnêtetés. La société de Mme Suard est celle qui me plaît davantage. »
(Benjamin ne fit la connaissance de Mme de Staël qu’en septembre 1794.)
Lucie Achard, Rosalie de Constant, sa famille et ses amis, lettre de son frère Charles. Eggimann, Genève.