La sainte Bible selon la Vulgate (J.-B. Glaire)/Tobie (Introduction)

(introductions, notes complémentaires et appendices)
La sainte Bible selon la Vulgate
Traduction par Jean-Baptiste Glaire.
Texte établi par Roger et Chernoviz, Roger et Chernoviz (p. 932-933).
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INTRODUCTION

AU LIVRE DE TOBIE


Le livre de Tobie a été composé en chaldéen, d’après S. Jérôme ; il l’a été en hébreu, d’après un certain nombre de critiques ; en grec, d’après quelques autres. Cette dernière opinion est fausse. Quant aux deux premières, on n’apporte aucun argument décisif en faveur de l’une ni de l’autre ; les savants modernes penchent cependant plus communément pour l’original hébreu.

Quoi qu’il en soit, le texte primitif est perdu. Un texte chaldéen, découvert en 1877, et publié en 1878, n’est certainement pas le texte original. Les anciennes versions de ce livre sont sensiblement différentes les unes des autres ; les noms propres ne se ressemblent pas toujours entre eux, et la critique ne peut réussir, en plus d’un cas, à découvrir quelle était la leçon authentique. La plupart des objections qu’on fait contre cette histoire n’ont pas d’autre fondement que les altérations provenant de la variété des leçons ou des négligences des copistes.

Le nom de Tobie est en hébreu Tobiyah. Il signifie : « Jéhovah est bon. »

La réalité de son histoire est attestée par les détails minutieux du récit, par la généalogie du principal personnage, qui est longuement donnée dans le texte grec le plus complet, par les renseignements précis sur la géographie, l’histoire, la chronologie, etc.

Plusieurs critiques modernes retardent jusqu’au temps d’Adrien, qui régna de 117 à 138 de notre ère, la composition du livre de Tobie. Ils s’appuient sur des raisons futiles, tirées de la tendance qu’ils attribuent à l’auteur, celle, par exemple, de montrer que l’ensevelissement des morts est une œuvre agréable à Dieu, comme si l’on avait eu besoin d’attendre l’époque de l’empereur Adrien pour soupçonner que c’était là un acte de charité !

La tradition a toujours attribué à Tobie père et fils la rédaction de leur histoire : 1o parce que, dans toutes les versions (celle de S. Jérôme, et en partie, le nouveau texte chaldéen exceptés), Tobie parle à la première personne, depuis le chapitre ier jusqu’au commencement de l’histoire de Sara. Le texte grec, xii, 20, porte que l’ange Raphaël commanda à Tobie d’écrire son histoire, et l’on ne peut douter qu’il n’ait obéi à cet ordre, comme l’insinue le verset suivant, xiii, 1, dans les éditions grecques. Le livre de Tobie a donc été écrit très probablement dans les premiers temps qui suivirent la déportation des Israélites du nord en Assyrie, puisque c’est à cette époque que vivait le héros de cette histoire, et qu’il en est vraisemblablement l’auteur. Les deux derniers versets, xiv, 16-17, sont d’une main étrangère. — Le concile de Trente a déclaré contre les protestants le livre de Tobie canonique.

Ce livre forme un tout parfaitement coordonné et disposé avec un art admirable. Il est partagé en six sections formant autant de tableaux : Vertus et épreuves de Tobie ; vertus et épreuves de Sara ; voyage du jeune Tobie en Médie ; son mariage avec Sara ; son retour à Ninive ; conclusion : manifestation de l’ange Raphaël, dernières annés de Tobie.

L’histoire de Tobie nous offre un parfait modèle de la vie domestique et renferme les exemples les plus instructifs et les plus touchants de toutes sortes de vertus.

Son but direct est d’apprendre aux Juifs à honorer Dieu, au milieu même des païens, pour leur faire connaître la vérité, comme le chante Tobie dans son cantique d’actions de grâce, qui peut être considéré comme l’épilogue de son livre, xiii, 3-4.

Mais en même temps que l’auteur poursuit ce but élevé, il en atteint un autre, presque sans y penser, celui d’édifier ses lecteurs, non pas seulement ceux qui vivaient, comme lui et avec lui, captifs au milieu des Assyriens, mais ceux de tous les temps et de tous les lieux, par sa patience, et par des exemples de toutes les vertus. — « [Le livre de Tobie] nous offre un tableau intime des vertus, des souffrances et des joies de l’exil de Tobie. Ce n’est pas le froid récit d’événements fortuitement rapprochés, mais le tableau plein de simplicité et de grandeur des épreuves d’un homme juste et miséricordieux. Tobie est un second Job, dont les malheurs et le salut sont liés à des événements qui font en même temps de son histoire le manuel des [époux]. L’exemple du jeune Tobie montre comment doivent se contracter et se célébrer les unions agréables à Dieu. L’humanité, l’amour paternel, la piété filiale, la douceur et la probité des deux Tobie sont le développement de la pensée fondamentale du livre ; la confiance en Dieu ne peut tourner à la confusion du juste. Ainsi ce livre devient le livre élémentaire des parents qui veulent fonder une famille agréable à Dieu et marcher courageusement au devant des épreuves de la vie. » (Haneberg.) — Mais il n’est pas seulement le guide des pères et des mères, il renferme aussi des exemples et des enseignements pour tous ; l’aumône y est recommandée avec insistance, i, 16-17 ; ii, 1-2 ; iv, 7-12, 17 ; xii, 8-9 ; le grand précepte de la charité y est donné sous forme négative, iv, 16 ; la prière revient constamment pour attirer les bénédictions de Dieu sur toutes les affaires importantes, iv, 20 ; iii, 1-6, 11, 13-23 ; vi, 18 ; viii, 6-10, etc.; la fuite de tout péché est recommandée comme celle du seul mal véritable, iv, 23, etc. — L’intervention d’un ange, envoyé de Dieu, est un des traits principaux du livre de Tobie, qui nous révèle ainsi, d’une manière manifeste, la doctrine des anges gardiens. — Cette histoire est, comme celle de Job, une justification de la Providence.

« L’histoire de Tobie est un des plus beaux monuments de la littérature juive. Les caractères sont très simples, mais dessinés avec une grande habileté. Le pieux et infortuné Tobie, sa femme également pieuse, mais impatiente et un peu acariâtre, sont des personnes réelles. Fort simple, le récit est très heureusement disposé. » (Nœldene.)