La sainte Bible selon la Vulgate (J.-B. Glaire)/Première épitre de saint Paul aux Corinthiens (Introduction)

(introductions, notes complémentaires et appendices)
La sainte Bible selon la Vulgate
Traduction par Jean-Baptiste Glaire.
Texte établi par Roger et Chernoviz, Roger et Chernoviz (p. 2726-2727).


PREMIÈRE ÉPÎTRE DE SAINT PAUL

AUX CORINTHIENS

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INTRODUCTION


Corinthe, relevée par Jules César et déclarée colonie romaine, était la capitale de l’Achaïe, et la première ville de la Grèce. Elle pouvait avoir quatre cent mille habitants de toute nationalité, grecs, latins, Juifs, etc. Aussi riche que populeuse, elle brillait surtout par son activité et par son luxe. Sa position dans l’isthme qui unit le Péloponèse à la Grèce, entre la mer Egée à l’Orient et la mer Ionienne à l’Occident, à égale distance de l’Italie et de l’Asie, en faisait le centre d’un commerce considérable. Le commerce lui donnait l’opulence, et l’opulence procurait à ses habitants de quoi satisfaire leur goût pour les arts et pour le plaisir. A peu de distance de ses murs, on célébrait tous les cinq ans des jeux fameux auxquels l’Apôtre fait allusion ; et la ville elle-même était un théâtre d’amusements et de dissolution continuels. On n’y célébrait guère d’autre culte que celui de Vénus. Aussi la vie qu’on y menait était-elle passée au proverbe, et disait-on indifféremment, « vivre en Corinthien, » ou s’abandonner à la volupté. Malgré les obstacles que de telles habitudes devaient mettre à la foi chrétienne, et en dépit de l’opposition des Juifs, S. Paul, animé par une vision céleste, avait réussi à y fonder une église ; et après dix-huit mois de travaux, il l’avait laissée si ferme dans la foi et si fervente qu’elle faisait sa consolation et qu’elle servait de soutien et de modèle aux chrétientés voisines. La plupart des convertis étaient païens d’origine et d’une condition assez humble. Néanmoins, les détails où entre l’Apôtre sur la manière dont se faisait la cène et sur les secours à donner aux chrétiens de Jérusalem, supposent qu’il y avait aussi des chrétiens d’une classe plus élevée. Lui-même, dans son Épître aux Romains, distingue entre les autres Eraste, l’intendant de la cité, et Caïus, qu’il appelle son hôte.

L’authenticité des deux Épîtres de S. Paul aux Corinthiens est attestée par la tradition. Qu’il suffise de citer S. Clément, pape, qui, dans une Lettre adressée par lui aux Corinthiens, une trentaine d’années plus tard, de 92 à 97, leur rappelle la première de ces Épîtres comme une œuvre connue et respectée de tous. « Prenez en main, dit-il, l’Épître du bienheureux Paul. Il n’y a pas de doute que l’Esprit-Saint ne lui ait inspiré ce qu’il vous a écrit sur lui-même, sur Céphas et sur Apollo, dans un temps où vous étiez divisés comme aujourd’hui. » Cette Lettre de S. Clément est le plus ancien monument que nous ayons de la tradition, et l’un de ceux dont l’authenticité est le mieux établie. On la lisait publiquement dans l’Eglise de Corinthe et dans beaucoup d’autres.

La première Epître aux Corinthiens fut écrite d’Ephèse. On en a la preuve dans l’Epître même où S. Paul dit qu’il restera encore quelque temps chez Aquila et Priscille, établis en cette ville depuis son passage à Corinthe.

On voit, au même endroit, que la Pentecôte approchait et que l’Apôtre songeait à un départ prochain. C’était dans sa dernière mission, l’an 56 probablement. S. Paul était arrivé au milieu de sa carrière apostolique. Il y avait dix ans qu’il prêchait la foi, et quatre ou cinq ans qu’il avait fondé l’Eglise de Corinthe ; mais un grand nombre de disciples, de ceux même qui avaient vu le Sauveur après sa résurrection, étaient encore en vie.

Ce qui lui donna lieu d’écrire cette première Epître, ce fut : — 1o Un rapport épistolaire sur les divisions naissantes, rapport qui lui avait été adressé par la maison chrétienne de Chloé. — 2o Un récit oral que venaient de lui faire Stéphanas et ses coadjuteurs dans le gouvernement de cette église, au sujet d’un scandale et de quelque abus. — 3o Certaines questions de morale et de discipline, dont les Corinthiens lui avaient demandé la solution. — L’Apôtre fait allusion à ces renseignements, et même, ce semble, aux termes dont on s’était servi pour le consulter, en divers endroits de son Epître.

On distingue dans cette Epître deux parties, qui répondent au double dessein qu’avait S. Paul de réformer et d’instruire. — Dans la première, il s’efforce de réformer les abus qui se sont glissés parmi les fidèles de Corinthe. Ces abus sont des divisions, causées par un engoûment irréfléchi pour certains prédicateurs, i-iv, et divers scandales donnés à l’Eglise par des particuliers, v-vi. — Dans la seconde, vii-xv, il répond successivement à cinq questions qu’on lui avait posées : sur le mariage et le célibat, vii ; sur les mets consacrés aux idoles, viii-x ; sur l’ordre qui doit régner dans les assemblées religieuses, xi; sur l’usage des dons surnaturels, xii-xiv ; sur la résurrection, xv.

Comme on le voit, cette Epître diffère beaucoup par son objet et par sa forme de l’Epître aux Romains. Elle ne ressemble en rien à une dissertation ni à un traité dogmatique. C’est une suite d’avis, de réflexions, de solutions, inspirées par les circonstances et réparties en sept articles. Il n’est pas d’écrit qui fasse mieux connaître, soit l’esprit de l’Apôtre, soit la discipline et les mœurs de ces premiers temps. (L. Bacuez.)