La sainte Bible selon la Vulgate (J.-B. Glaire)/Daniel (Introduction)

(introductions, notes complémentaires et appendices)
La sainte Bible selon la Vulgate
Traduction par Jean-Baptiste Glaire.
Texte établi par Roger et Chernoviz, Roger et Chernoviz (p. 1986-1987).

DANIEL[1]

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INTRODUCTION


Daniel, « Dieu est mon juge ou mon défenseur, » le quatrième des grands prophètes, était de race royale, Dan., i, 3. Il fut emmené captif à Babylone, la troisième année du règne de Joakim (606). Là, avec trois de ses compagnons, il fut élevé a l’école du palais royal, observa fidèlement la loi mosaïque, gagna la confiance de celui qui était chargé de veiller sur lui, i, 8-16 ; fit de rapides progrès, et, au bout de trois ans, i, 5, 18, eut l’occasion de montrer sa pénétration d’esprit et sa perspicacité en expliquant le songe de Nabuchodonosor, ii, 14 sq.; et en montrant l’innocence de Susanne, xiii, 45 sq. Le roi le nomma gouverneur en chef, ii, 48. Il interpréta plus tard un second songe de Nabuchodonosor, iv, 7-27, et le mané, thécel, phares du festin de Balthasar, v, 10-28, quoiqu’il n’occupât plus alors son ancienne position officielle parmi les mages, v, 2, 7, 8, 12. Après la conquête de Babylone par les Mèdes et les Perses, il devint, sous Darius le Mède, le premier des trois ministres de l’empire, Dan., vi, 2 ; il excita ainsi l’envie, et ses ennemis le firent jeter deux fois dans une fosse aux lions, où il fut miraculeusement préservé, vi ; xiv, 29-42, ce qui l’affermit dans les bonnes grâces de Darius. Cyrus se montra également bien disposé envers lui, vi, 28 ; cf. i, 21. C’est la 3e année de ce roi, 534, qu’il eut, sur les rives du Tigre, sa dernière vision, x, 1, 4. La fin de sa vie nous est inconnue. On croit communément qu’il mourut à Suse ; on y montre son tombeau, où les pèlerins se rendent en foule. Ezéchiel, dans ses prophéties, cite Daniel, avec Noé et Job, comme un modèle de justice ; il vante aussi sa sagesse. — Le dernier des grands prophètes occupa, à la cour des rois de Chaldée et de Perse, une situation analogue à celle de Joseph à la cour des pharaons. Au commencement et à la fin de l’histoire du peuple juif, nous voyons ainsi un représentant de vrai Dieu auprès des monarques païens. Daniel n’exerça pas sur l’avenir de son peuple une influence de même nature que Joseph ; mais par sa position et plus encore par ses oracles, par ses prédictions sur la venue du Messie, il agit puissamment sur ses frères et prépara ainsi les voies à l’avènement du Christianisme. L’authenticité du livre de Daniel est universellement niée aujourd’hui par les rationalistes ; ils prétendent qu’il est apocryphe et que les prophéties qu’il contient ont été écrites après coup, du temps des Machabées. — La tradition a toujours admis au contraire Daniel comme un livre canonique et digne de foi. Toute la partie qui subsiste encore en hébreu et en araméen est acceptée sans contestation par les Juifs et les chrétiens ; quant à la partie qui n’existe plus qu’en grec, elle est rejetée par les Juifs et les protestants ; mais le concile de Trente en a consacré avec raison l’autorité. — Les principales preuves de l’authenticité de Daniel sont les suivantes : — 1o Le témoignage du Nouveau Testament, Matth., xxiv, 15 ; Héb., xi, 33 ; etc. — 2o Celui de Josèphe ; il raconte, qu’on montra les prophéties de Daniel à Alexandre le Grand, quand ce dernier visita Jérusalem. — 3o Le premier livre des Machabées, qui est presque contemporain des événements qu’il raconte, suppose l’existence du livre de Daniel, bien plus, la connaissance de la version grecque de ce livre, par conséquent celui-ci avait été écrit assez longtemps avant cette époque. — 4o On ne peut expliquer l’admission de Daniel dans le canon juif qu’en le regardant comme une œuvre authentique. Ce canon était clos avant l’époque des Machabées, et par conséquent tous les écrits qu’il contient sont d’une date antérieure. — 5o La connaissance minutieuse que possède l’auteur des mœurs, des coutumes, de l’histoire et de la religion chaldéennes est une preuve qu’il était contemporain des faits qu’il raconte ; après la ruine de l’empire de Nabuchodonosor par les Perses et les Mèdes, personne n’aurait pu être initié à tant de détails minutieux dont les découvertes modernes confirment l’entière exactitude. — 6o La langue est celle d’un homme vivant à l’époque de la captivité. Il avait l’habitude de s’exprimer dans les deux langues, hébraïque et araméenne ; du temps des Machabées, on ne parlait plus qu’araméen : l’emploi de certains mots, d’origine aryenne et non sémitique, ne s’explique non plus que par l’habitation de Daniel à la cour des rois perses : un Juif écrivant en Palestine n’aurait jamais usé de pareilles expressions.

Le livre de Daniel se divise en deux parties très distinctes : la première, i-vi, est historique ; la seconde, vii-xii, est prophétique. Dans la partie historique, Daniel parle à la troisième personne ; dans la partie prophétique, à la première, le verset d’introduction excepté, vii, 1 et x, 1. Malgré cette différence de langage, on admet généralement l’unité du livre. L’emploi successif des deux personnes s’explique par la nature du sujet : le prophète raconte sous forme de narration impersonnelle les faits et les événements symboliques, parce qu’ils peuvent être directement contrôlés, mais il parle en son propre nom, quand il rapporte des révélations et des visions personnelles, parce qu’elles tirent leur autorité du témoignage même du prophète à qui elles ont été communiquées. On remarque quelque chose d’analogue dans les autres prophètes, Is., vii, 3 ; xx, 2 ; xxxvi-xxxix. — Un appendice, contenant l’histoire de Susanne et celle de Bel et du dragon, xiii-xiv, termine le livre de Daniel dans la Bible latine.


  1. Ce livre ne présente pas toutes les prophéties dans l’ordre chronologique.