La sainte Bible selon la Vulgate (J.-B. Glaire)/Baruch (observations générales)

(introductions, notes complémentaires et appendices)
La sainte Bible selon la Vulgate
Traduction par Jean-Baptiste Glaire.
Texte établi par Roger et Chernoviz, Roger et Chernoviz (p. 1842-1843).

BARUCH

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OBSERVATIONS GÉNÉRALES


1. Dans notre Introduction historique et critique, etc., nous avons prouvé l’authenticité et la canonicité du livre de Baruch contre les Juifs et les protestants en général, mais particulièrement contre les critiques et les exégètes d’Allemagne ; nous nous bornerons ici à quelques observations sur le texte original et les principales versions de ce livre, que plusieurs anciens Pères de l’Eglise ont cité sous le nom de Jérémie, soit parce qu’autrefois les écrits de ces deux prophètes ne formaient qu’un même volume, soit parce que Baruch a inséré dans son livre, non seulement les oracles que Dieu lui a inspirés, mais encore ceux qu’il avait entendus de la bouche de Jérémie, son maître, et qu’il n’avait pas mis par écrit de son vivant.

2. On ne saurait douter que le livre de Baruch n’ait été originairement écrit en hébreu ; car, outre qu’il est plein d’hébraïsmes, on n’y découvre point cette enflure et cette affectation des Juifs hellénistes, qu’on remarque si facilement dans le livre de la Sagesse, par exemple, et dans le second des Machabées. Tout, au contraire, y est simple et parfaitement d’accord avec la construction de la langue hébraïque. Mais le texte primitif a été perdu depuis longtemps ; car dans la préface de la version de Jérémie, saint Jérôme dit : « Quant au petit livre de Baruch qui se trouve dans l’édition des Septante, nous n’en parlerons pas ; les Juifs ne le lisent pas ; ils ne le possèdent même plus. » Cependant il existait encore dans le second siècle, puisque Théodotion le traduisit en grec, comme nous l’avons prouvé dans notre Introduction historique et critique, etc., en répondant aux difficultés proposées par certains critiques allemands de ces derniers temps.

3. La version la plus ancienne du livre de Baruch est la version grecque, qui tient lieu maintenant de l’original. Une preuve évidente de sa haute antiquité, c’est qu’elle se trouve dans la Bible des Septante. La traduction latine qui fait partie de notre Vulgate a été composée sur la version grecque ; elle n’est pas de saint Jérôme, elle remonte beaucoup plus haut que l’époque à laquelle vivait ce saint docteur. Comme l’Eglise latine a toujours reconnu la canonicité du livre de Baruch, cette traduction doit être au moins du second siècle de l’ère chrétienne. Il y a eu d’autres versions du livre de Baruch, par exemple, la syriaque et l’arabe ; mais ce n’est pas ici le lieu d’en parler. (J.-B. Glaire.)

4. * Baruch, fils de Nérias, était le fidèle disciple et le secrétaire de Jérémie, Jér., xxxii, 12 ; xxxxi, 4, 10, 32. Il appartenait à une bonne famille de la tribu de Juda, Jér., li, 59 ; son frère Saraïas faisait partie de la cour de Sédécias. Ses ennemis raccusérent d’être partisan des Chaldéens, et d’influencer Jérémie en faveur de ces derniers, Jér., xliii, 3. La quatrième année de Joakim, il alla lire au roi les prophéties de son maître, qu’il avait écrites sous sa dictée, et il les écrivit une seconde fois de la même manière, quand le roi eut jeté au feu la première édition, xxxvi. Les persécutions qu’il eut à subir lui causèrent un moment de découragement, mais il ne dura pas, xlv. Plus tard, sous le règne de Sédécias, il fut mis en prison avec Jérémie, et il y resta jusqu’à la prise de Jérusalem (588) ; il se retira alors à Masphath, et fut ensuite forcé, comme Jérémie, de suivre les Juifs fugitifs en Egypte, Jér., xliii, 6. Il alla enfin à Babylone et il y mourut. Quelques-uns croient qu’il avait déjà visité cette ville la quatrième année de Sédécias (594), avec une ambassade royale dont son frère faisait partie et qui s’y était rendue, sur la demande de Jérémie, pour consoler les captifs. Cf. Jér., li, 61.

Le style de Baruch, sans avoir la magnificence d’Isaïe, est remarquable, et l’on sait l’admiration qu’il avait inspirée à La Fontaine ; après l’avoir lu, il demandait à tous ceux qu’il rencontrait : « Avez-vous lu Baruch ? C’était un grand génie. »

Les cinq premiers chapitres de la prophétie sont de Baruch ; le sixième contient une lettre de Jérémie. La plupart des protestants et les rationalistes nient l’authenticité du tout. — I. Les cinq premiers chapitres sont réellement l’œuvre de Baruch, comme l’affirme le titre, i, 1. — 1o On conteste, il est vrai, l’autorité de ce titre, mais c’est sans fondement. Il porte, i, 2, que Baruch écrivit sa prophétie la cinquième année après la ruine de Jérusalem, 583. C’est inadmissible, dit-on, parce que Baruch avait accompagné Jérémie en Egypte, Jér., xliii, 6. Mais il est facile de répondre qu’il ne suit nullement, de ce que Baruch était allé en Egypte en 588 ou 587, qu’il n’était pas en Chaldée en 583. — 2o On prétend trouver dans le cours du livre des passages qui indiquent qu’il a été écrit après la fin de la captivité et après la reconstruction du temple, i, 10, 14 ; ii, 26. — L’auteur parle incontestablement, dans ces passages, de l’autel du Seigneur et de la maison de Dieu, mais c’est de la maison de Dieu ruinée et de l’autel sur lequel on continuait à offrir des sacrifices, comme dans les passages analogues de Jérémie. — II. Quant à l’authenticité de la lettre de Jérémie, ch. vi, le titre l’attribue à ce prophète, et il est confirmé parce que dit le second livre des Machabées, ii, i-2.

Le livre de Baruch se partage en deux parties principales, i-iii, 8, et iii, 9-v. La lettre de Jérémie, placée à la fin, en forme comme un appendice. — I. La première partie renferme : — 1o une introduction, i, 1-14, et 2o une prière qui se subdivise en deux sections : la première section est une sorte de confession dans laquelle le peuple captif reconnaît ses péchés, i, 15-ii ; dans la seconde section, les coupables repentants demandent à Dieu de mettre un terme au châtiment qu’ils reconnaissent avoir mérité, iii, 1-8. — II. La seconde partie contient un discours de Baruch. — 1o Il exhorte le peuple à chercher la vraie sagesse et à se convertir, iii, 9-iv, 8. Les versets 36-38 du ch. iii renferment une prophétie messianique remarquable, dans laquelle la plupart des Pères ont vu la même pensée que celle exprimée dans l’Evangile de S. Jean : Le Verbe s’est fait chair, et il a habité parmi nous.2o Il console les captifs, leur recommande d’être fermes et courageux, et leur promet qu’ils seront vengés, iv, 9-29. — 3o Il s’adresse à Jérusalem elle-même, et lui annonce que ses fils, emmenés avec ignominie sur la terre étrangère, reviendront à elle avec gloire, iv, 30-v.