Imprimerie A. Coté Et Cie, Québec, Québec (p. 9-34).


ORIGINES DE LA RÉBELLION


Il faut remonter jusqu’à l’époque de la cession du Canada à l’Angleterre pour trouver les causes premières de la rébellion de 1837. Dans certains endroits de mon récit, je reproduirai textuellement les commentaires et appréciations des auteurs contemporains.

La race canadienne-française, l’élite d’un grand peuple, après maints combats héroïques et désespérés, abandonnée par la France, mère ingrate et oublieuse, tombait épuisée et sanglante dans la bataille de géants que se livrèrent Montcalm et Wolfe sur les plaines d’Abraham. L’histoire nous dit que Louis XV, roi faible et viveur, céda honteusement le Canada par le traité de Paris, en 1763.

La colonie ne comptait lors de la capitulation, en 1760, que 65,000 âmes, mais elle conserva néanmoins par le traité de paix le libre exercice de sa religion.

Abandonné à lui-même, ce noble débris d’une phalange de héros, qui avait juré d’implanter au Canada les bienfaits du christianisme et de la civilisation, et qui voulait faire de ce continent une nouvelle France, se vit tout-à-coup privé du fruit de tous ses sacrifices. Oublié, tout meurtri, après avoir versé le sang généreux de ses preux sans peur comme sans reproche, et après avoir fécondé le sol canadien de son sang comme de ses labeurs, il lui fallut contre son gré passer sous la domination Britannique. Quand on a été un peuple libre, quand on a vécu sous la douce égide de ses propres lois, de sa langue, de sa religion, et que tout-à-coup le sort des armes vous fait passer sous une domination étrangère, la transition est terrible. Oui, quand après avoir été une nation libre, il faut se soumettre aux exigences, aux lois et aux caprices d’un conquérant altier dont les traditions, la langue et la religion nous sont hostiles, l’on doit s’attendre à bien des maux, à bien des humiliations ! Oui, voilà la pénible destinée qui échoit aux vaincus !

Si le Canada eût alors fait partie de l’Europe, s’il n’en eût pas été séparé par l’Océan, et s’il se fût trouvé à proximité de l’Angleterre, son nouveau souverain l’aurait sans doute traité avec des égards et aurait eu la grandeur d’âme de ne pas laisser blesser l’honneur national des Canadiens-Français, en tentant de les réduire à l’état de servage. Mais les Canadiens avaient combattu comme des lions pour ne pas tomber sous la domination anglaise, et ceux qui furent envoyés et choisis dans la colonie pour commander et exercer l’autorité souveraine, abusant du pouvoir, leur tinrent rancune de leur attachement à la France et ils essayèrent de le leur faire sentir en les traitant avec arrogance et quelquefois avec la plus grande injustice.

Ces gens étaient des parvenus ou des fanatiques qui, pour la plupart, abusèrent de la prérogative royale et se liguèrent avec les francophobes fraîchement arrivés dans ce pays, pour humilier et essayer à effacer tout ce qui était intimement lié aux traditions françaises sur ce continent. Ces hommes n’étaient point les interprètes des sentiments vrais de la famille royale et de la chevalerie anglaise ; car ils étaient mus par des sentiments tellement désordonnés qu’on aurait pu les prendre pour des félons, et non pour des membres de la noblesse bretonne, puisque dans bien des cas ils firent plus que les valets du diable !…

Voilà le malheur qui échoit à des sujets, quand ils ne sont pas gouvernés par leur roi, et qu’ils sont soumis à la gouverne d’hommes gagés pour faire le bien, mais que leur basse arrogance, leur haine comme leurs instincts, portent à commettre des actes dignes de réprobation. Conséquemment, l’on serait injuste si l’on tenait la Grande Bretagne responsable de tous les abus de confiance ou des pratiques condamnables dont ses représentants se rendirent coupables ; excès et abus que je vais signaler.

Quoique restés français de cœur, les Canadiens prêtèrent le serment d’allégeance à la couronne d’Angleterre et lui furent dans la suite d’une loyauté à toute épreuve ; ce qui n’empêcha point qu’ils furent gouvernés parfois par des despotes, qui voulaient les priver de leurs coutumes, de leurs lois et, qui plus est, de leur croyance religieuse en voulant les forcer à prêter le serment du test. Nous n’avons qu’à consulter l’histoire de l’administration anglaise entre 1764 et 1773, pour trouver la preuve que les Canadiens-français étaient fort mal vus par leurs conquérants.

Heureusement pour eux, la Grande Bretagne voyant le Canada menacé par l’envahissement des troupes américaines, voulut, soit par générosité soit par une savante politique, essayer à s’attacher les Canadiens et s’en faire des défenseurs ; aussi, le despotisme et l’arbitraire disparurent momentanément et l’Angleterre se décida à octroyer, en 1774, le bienfait d’une charte par laquelle les Canadiens conserveraient le libre exercice de leur religion, de leurs lois civiles et de leur droit légitime de citoyens dans les affaires administratives.

En retour de cette sage mesure, les Canadiens oublièrent leurs griefs.

Ils refusèrent toutes les promesses séduisantes qui leur étaient faites par les Américains, afin de les entraîner à marcher avec eux ; car ils connaissaient le peu de valeur, le peu d’importance qu’ils devaient attacher aux promesses trompeuses et intéressées des Américains, qui venaient justement de blâmer l’Angleterre d’avoir accordé à ses colons français le libre exercice de leur religion et des prérogatives attachées à la sanction royale.

Les Canadiens oubliant avec générosité le passé et les persécutions auxquelles ils avaient été en butte, volèrent au secours des armées anglaises et contribuèrent puissamment à repousser et chasser du sol canadien les troupes américaines qui, en 1775, avaient décidé de s’emparer du Canada. Et si l’Angleterre a pu conserver en 1775 ses possessions du Canada, elle le doit certainement au dévouement de ses nombreux colons français qui, conseillés et guidés par leur noble clergé, ne craignirent point de verser leur sang en combattant les armées américaines.

Mais en retour de l’assistance que les Canadiens prêtèrent si généreusement aux Anglais pour conserver le Canada à leur métropole, ils étaient en droit d’attendre qu’ils seraient à l’avenir respectés et bien vus par leurs alliés ; malheureusement l’histoire nous dit le contraire. Les colons anglais qui en 1775 avaient dissimulé leur ancienne animosité pour capter les secours des Canadiens, eurent l’ingratitude de la faire renaître avec plus de passion et d’intensité. Animés comme auparavant des mêmes sentiments de haine, de jalousie et de dépit, ils voulurent éliminer tout l’élément français de l’administration des affaires ; aussi, les Canadiens eurent-ils à endurer des abus vexatoires, humiliants qui excitèrent le mécontentement général.

Ces dissensions élevées par des sentiments d’intérêts contraires, de rivalité perpétuelle de races, au milieu de la colonie, firent réfléchir l’Angleterre qui crut prudent de lui accorder un gouvernement constitutionnel.

Par l’obtention de cette nouvelle constitution et la division du Canada en deux provinces, dont chacune devait avoir son gouvernement respectif, les Canadiens crurent inaugurer une ère nouvelle remplie de promesses favorables ; car, par la charte de 1791, on promettait encore une fois aux colons français la conservation de leurs lois françaises et le libre exercice de leur religion.

Les bienfaits qu’attendaient les Canadiens de cette Sanction Royale de 1791, ne furent qu’éphémères ou de courte durée, parce que les Anglais qui se trouvaient en minorité dans la Province du Bas-Canada, eux qui avaient toujours dominé et qui craignaient que la prééminence du sang et de la position qu’ils avaient toujours fait valoir, ne leur fût enlevée par la majorité canadienne-française, accueillirent avec un très mauvais vouloir cette nouvelle constitution. Pourtant, la majorité Haut-Canadienne qui était anglaise dans son gouvernement avait la même prérogative du nombre sur les colons français. Conséquemment les Anglais ne pouvaient prétexter deux poids et deux mesures, car cet acte du parlement d’Angleterre avait pour but de faire disparaître les rivalités, les animosités qui existaient entre les deux races, et de leur donner simultanément une majorité marquante dans leur province respective ou dans leur gouvernement particulier.

Néanmoins cette forme de gouvernement était antipathique à la population anglaise et afin d’en paralyser les effets, elle forma une ligue offensive et défensive pour exercer, si faire se pouvait, une domination absolue sur les Canadiens ; mais les Canadiens qui étaient en majorité dans la Chambre d’Assemblée de la Province du Bas-Canada, conservèrent leur supériorité représentative et provoquèrent involontairement des dissensions bien vives entre les deux races.

Si, d’un côté, les Canadiens commandaient dans la Chambre Législative, d’un autre côté, les Anglais dominaient au Conseil Législatif, qui était resté omnipotent et tout dévoué à l’élément anglais ; aussi, il s’ensuivit une lutte à mort entre ces deux branches de la législature. Le Conseil Législatif et le gouverneur, qui n’étaient pas responsables vis-à-vis du peuple, voulaient garder le pouvoir administratif et gouverner, tandis que la Chambre d’Assemblée, qui représentait la nation, s’y opposait énergiquement. Des combats oratoires acharnés s’engagèrent dans les Parlements, spécialement à la première session où les Anglais voulaient nommer un des leurs à la présidence et, qui plus est, voulaient exclure la langue française dans le Parlement. Les Canadiens étaient alors isolés, on voulait même les angliciser, parce qu’on disait qu’ils voulaient secouer le joug de l’Angleterre, et on ne leur permettait pas même de faire venir des livres de France. M. de Larochefoucault-Liancourt étant venu, en 1795, au Canada, on refusa à ce savant voyageur l’entrée du Bas-Canada et il ne put visiter que le Haut-Canada, le gouvernement donnant pour raison que des espions, des séditieux voulaient soustraire les Canadiens à la domination anglaise. Ce projet d’anglicisation étant enraciné chez les Anglais, les Canadiens étaient mal vus et avaient toutes les difficultés du monde à obtenir des concessions du bureau des terres, qui était au pouvoir du Conseil Exécutif, tandis que les Américains en obtenaient à volonté. Jusqu’en 1806, la liberté de la presse fut inconnue au Canada. Ce ne fut qu’à cette époque de 1806 que le journal Le Canadien fut fondé dans les intérêts de la population canadienne-française.

L’oligarchie semblait donc dominer alors en reine souveraine, Le Conseil Exécutif, la majorité du Conseil Législatif, les juges et les employés de la Couronne, qui siégeaient dans la Chambre d’Assemblée et au Conseil, composaient le pouvoir.

En 1808, la Chambre d’Assemblée essaya à faire passer une résolution dans laquelle il était dit « que les juges ne pourraient siéger ni voter dans la Chambre. » Mais cette mesure ne fut pas adoptée par la Chambre à cette date. Cependant un écrivain de cette époque dit que la Chambre d’Assemblée se rendait alors coupable de mesures violentes et de discours passionnés, qui occasionnèrent une grande perte de temps et indisposèrent fortement le chef de l’administration, Aussi, il n’y a qu’à lire les fragments suivants empruntés au discours que le gouverneur Craig prononça en terminant le cinquième parlement, pour se convaincre de son irritation et de la position du moment : « Vous avez manifesté, dans tous vos procédés, une violence si peu mesurée, et montré un défaut d’attention si prolongé et si peu respectueux envers les autres branches de la législature, que quelque modération et quelque indulgence qu’on leur suppose, je ne pense compter sur une bonne intelligence générale sans avoir recours à une nouvelle Assemblée. »

En 1810, le gouverneur Craig dit à la Chambre que d’après les instructions qu’il avait reçues d’Angleterre, il donnerait l’assentiment royal à un bill pour rendre les juges inhabiles à siéger dans l’assemblée. Ce bill fut sanctionné par la Chambre d’Assemblée ; mais le Conseil législatif y introduisit une clause par laquelle ce bill ne pourrait devenir en force qu’au prochain parlement. Les représentants ne voulurent point patienter et décidèrent, sans consulter les autres branches de la législature et sur une simple résolution, d’expulser les juges de la Chambre. Les historiens taxent ce procédé comme arbitraire et violent ; car il mettait les affaires dans un état critique et le gouverneur dans un étrange et humiliant embarras, en recourant à la dissolution du Parlement. Cet acte de la Chambre fut la cause de grands troubles. MM. Bédard, Taschereau, Blanchet, propriétaires et correspondants du Canadien, furent incarcérés pour avoir écrit et publié des écrits séditieux. Le journal fut suspendu et l’imprimerie confisquée. Mais ce qu’il y a de fort étrange dans tout cela, c’est qu’à cette même date où la Chambre d’Assemblée condamnait et censurait le gouverneur Craig ainsi que le Conseil, elle présentait une adresse au roi pour lui exprimer emphatiquement son contentement, sa reconnaissance, et voici cette adresse :

« Qu’il nous soit permis d’exprimer à votre Majesté la vive reconnaissance que nous inspire le souvenir de vos bienfaits et la vue de l’état de prospérité auquel s’est élevée cette province, sous le gouvernement paternel de votre Majesté et sous la constitution heureuse que nous tenons de votre libéralité et de celle de votre parlement. Cet état de prospérité est devenu tel, qu’il nous a rendu capables de nous charger, dans cette session de notre législature, des dépenses civiles de notre gouvernement, jusqu’ici soutenu, en grande partie, par votre Majesté, et cet effet de notre prospérité nous cause une satisfaction d’autant plus grande, que votre peuple de la Grande Bretagne est chargé, depuis tant d’années, des frais d’une guerre dispendieuse pour la protection de toutes les parties de votre vaste empire. Dans ces circonstances, votre peuple du Bas-Canada s’estime heureux d’avoir pu s’acquitter d’une obligation que lui imposaient le devoir et la reconnaissance. »

Il y a dans cette adresse une triste anomalie bien difficile à comprendre ; car les sentiments que la Chambre d’Assemblée y exprime sont en désaccord, en opposition flagrante avec ses actes, d’autant plus qu’on s’attendait alors à une rébellion ; mais le clergé, comme toujours, prêcha la soumission et le respect aux autorités constituées. Le gouverneur publiait alors une proclamation dans laquelle il disait : « Canadiens, rapportez-vous en à ceux que vous consultiez autrefois avec attention et respect, aux chefs de votre église, qui ont occasion de me connaître : ce sont là des hommes d’honneur et de connaissances. »

Enfin, il accusait ouvertement certains membres de s’être rendus coupables de trahison ou de sédition. Il priait les curés de faire « les plus grands efforts pour empêcher les mauvais effets des actes incendiaires et traîtres ; et il enjoignait strictement à tous les magistrats, capitaines de milice, officiers de paix et autres bons sujets de sa Majesté de chercher diligemment à découvrir, tant les auteurs que les éditeurs et dissiminateurs d’écrits méchants, séditieux et traîtres, et de nouvelles fausses, tendant à enflammer les esprits et troubler la paix et la tranquillité publique. »

Voilà dans quelle position singulière et difficile se trouvait la province de Québec. C’est alors qu’éclata la guerre de 1812.

Tout le monde connaît les traits de bravoure et d’héroïsme de cette guerre et surtout la victoire éclatante et incroyable que 300 Canadiens commandés par le colonel de Salaberry, remportèrent à Chateauguay où ils culbutèrent plusieurs milliers d’Américains placés sous le commandement du général Hampton.

Nouveaux Spartiates aux Thermopyles et gloire de la nation, quand est-ce que vos enfants ingrats et sans mémoire vous élèveront un mausolée ? Ces mêmes fils, qu’ils soient nés dans une chaumière ou dans un palais, se font gloire et honneur de publier et de redire au coin du feu ce combat glorieux à leurs arrière-petits-enfants. Puisqu’il en est ainsi et à l’exemple de Sparte, élevons donc enfin un monument à la mémoire du Léonidas canadien, le brave colonel de Salaberry et à celle de ses 300 Spartiates.

L’auteur de cet ouvrage historique étant lui-même le fils de l’un des Voltigeurs, ces braves de 1812, a cru ne tirer aucune vanité personnelle, en reproduisant ici la nécrologie qui va suivre, écrite en 1866 par La Minerve, fait qui prouve que lorsque l’occasion se présente, le journalisme, guidé par un sentiment noble et élevé, s’empresse toujours de signaler ceux qui ont pris part à la glorieuse bataille de Chateauguay :

“Nous regrettons d’apprendre la mort du lieutenant-colonel Maximilien Globensky, arrivée à St-Eustache le 16 juin courant, à l’âge de 74 ans et deux mois.

« Né le 15 avril 1792, il avait par conséquent 20 ans lorsqu’il entra au service comme lieutenant dans le bataillon des « Voltigeurs Canadiens » en 1812, sous le commandement du colonel de Salaberry. Il assista à plusieurs batailles, entre autres à celles d’Ormstown, Lacolle et Chateauguay où il se distingua toujours par sa bravoure.

« Le lendemain de la bataille de Chateauguay, il fut envoyé en députation auprès du général Hampton, commandant de l’armée américaine, à qui il apprit, au grand étonnement de celui-ci, la nationalité et le petit nombre de ceux qui, la veille, avaient mis les Américains en déroute. Il était décoré de deux médailles et il reçut la demi-paie jusqu’à sa mort. Il conserva l’ardeur militaire jusqu’à sa mort et offrit ses services au gouverneur-général pour lever un bataillon, d’abord lors de l’affaire du Trent, et tout dernièrement encore, lorsqu’au mois de mars dernier, on s’attendait à une invasion fénienne.

« Ses funérailles ont eu lieu le 19 courant, au milieu d’un grand concours de personnes qui s’y étaient rendues, malgré le mauvais temps, en si grand nombre que l’église était litéralement remplie.

« Le colonel Globenski est mort après une maladie de quelques semaines seulement, soufferte avec les sentiments de résignation la plus chrétienne.

« Nous avons perdu en lui le dernier survivant des braves Voltigeurs de 1812. »
 
 
Artotypie, Brevetée. G. E. Desbarats & Cie.
LIEUT. COLONEL MAXIMILIEN GLOBENSKY
Âgé De 72 Ans.

Cette nécrologie n’eût jamais été reproduite, si la mémoire de mon père n’eût pas été plus tard injustement attaquée.

Mon père fut en 1812, comme plus tard, dévoué et attaché au colonel de Salaberry, car pour lui le vainqueur de Chateauguay était un second Napoléon, une espèce de dieu. Il fut toujours aussi, dans la suite, l’ami intime de sa famille. Combien de fois n’a-t-il pas manifesté son vif mécontentement contre l’ingratitude des Canadiens et des autorités gouvernementales, parce qu’ils n’élevaient point un monument au colonel de Salaberry. Dans un moment où il parlait de la bataille de Chateauguay devant plusieurs personnes, il ajouta : « Si ceux qui n’étaient pas nés lorsque nous nous battions à Chateauguay, et qui sont aujourd’hui au timon des affaires, avaient assez de grandeur d’âme et de patriotisme pour apprécier le dévouement de 300 soldats, qui étaient décidés de se faire tuer jusqu’au dernier plutôt que de livrer le chemin à l’armée américaine, ils auraient honte de leur apathie, et ils élèveraient un monument au héros de Chateauguay et une pierre commémorative à ses compagnons d’armes. »[1]

Après cette courte digression, je reviendrai à l’enchaînement de mon récit.

En 1814, un bill pour rendre les juges en chef et les juges du Banc du Roi inhabile à siéger au Conseil Législatif, fut pour la première fois introduit dans l’Assemblée et adopté. Le Conseil refusa de le prendre en considération « parce qu’il était imparlementaire, sans exemple, une usurpation de la prérogative de la Couronne et une infraction des droits et privilèges de la Chambre-Haute. »

En 1815, M. Louis-Joseph Papineau fut élu Orateur.

En 1819, La Chambre prétendait qu’elle avait sur le gouvernement le droit indubitable de déterminer l’appropriation et la distribution des deniers nécessaires au maintien des officiers publics. Quelques membres auraient voulu que les subsides fussent votés par chapitre, laissant au gouvernement la latitude de distribuer l’argent aux officiers ; mais les partisans du vote par item l’emportèrent.

Il y avait donc encore en 1819 des dissensions continuelles entre la Chambre-Haute et la Chambre-Basse du Parlement ? Preuve, c’est que la Chambre-Haute adopta la résolution suivante : « Que le Conseil Législatif a incontestablement le droit constitutionnel d’avoir une voix dans tout Bill d’aides ou de subsides, etc. — « Que le dit droit s’étend à l’adoption ou au sujet de tout Bill de subsides, et qu’aucune appropriation ne peut être faite légalement sans le concours du Conseil Législatif. — « Que le Conseil Législatif ne procédera sur aucun Bill faisant des appropriations d’argent qui n’auront pas été recommandées par le Représentant du Roi. — « Que le Conseil Législatif ne procédera sur aucun Bill d’appropriation de la liste civile, contenant des spécifications par chapitres, ou par item, ni à moins qu’elle ne soit accordée pour le temps de la vie du roi. »

En 1822, l’Angleterre crut que le seul remède à apporter au mal dont se plaignaient tous les partis opposés, tant du Bas-Canada que du Haut-Canada, était l’Union des deux Provinces en un seul gouvernement. Les Anglais de Montréal prévoyant à l’aide de ce moyen (l’Union) l’anglicisation des Canadiens, accueillirent favorablement ce projet ; mais les Canadiens, craignant que leurs institutions, leurs lois et leur langue fussent menacées, s’y opposèrent énergiquement. MM. L. J. Papineau et John Neilson furent chargés d’aller porter en Angleterre la pétition des seigneurs, magistrats membres du clergé, officiers de milice, etc., etc., contre l’Union. M. J. Stuart porta celle des fauteurs de ce projet. Le parlement provincial fut réuni en 1823 sous la présidence de M. Vallières de Saint-Réal, qui remplaça M. Papineau partant pour l’Angleterre.

Cette Union projetée fut rejetée presqu’unanimement par l’Assemblée, et par le Conseil Législatif avec une majorité de 4 voix seulement. Ce projet d’acte d’Union, après avoir été discuté en Angleterre, fut rejeté même avant la présentation des Requêtes, et MM. Papineau et Neilson revinrent immédiatement au Canada. Dans ce même Parlement de 1823, la Chambre guidée et entraînée par M. Papineau, fut sur le point de refuser de voter le Bill des subsides. L’historien Bibaud dit que M. Papineau fit le discours le plus virulent peut-être qui eût été prononcé dans l’enceinte de l’Assemblée depuis qu’elle était en existence. L’Orateur, M. Vallières de Saint-Réal, s’éleva énergiquement, éloquemment et avec succès contre une proposition si imprudente. Et ce Bill des subsides fut adopté à la majorité d’une seule voix, voix prépondérante de l’Orateur.

En 1824, les élections furent favorables au parti de M. Papineau, qui était opposé au gouvernement impérial et à l’administration coloniale.

En 1825, M. Papineau fut réélu Orateur contre M. Vallières. En cette année de 1825, le Bill des subsides fut voté, et chacun croyait que les dissensions qui existaient entre la Chambre d’Assemblée et le gouvernement allaient disparaître, mais elles reparurent avec beaucoup plus d’intensité en 1826.

N’ayant pas la prétention de faire ici un cours d’histoire, je ne parlerai point de toutes les difficultés et animosités que firent surgir le Bill des subsides et celui de la milice, dissensions qui provoquèrent une charge à fond par lord Dalhousie contre la Chambre d’Assemblée, parce qu’elle refusa en 1826 de voter de nouveaux subsides. Cette sortie violente du gouverneur contre l’Assemblée indisposa on ne peut plus la majeure partie de ses membres, et irrita davantage tous ces hommes déjà trop prévenus et mécontents. Le pays était très agité et on s’attendait à un soulèvement, à une rébellion, Bibaud, dans son histoire du Canada, dit que la presse française se porta à des excès, à des violences injustifiables ; entre autres remarques, il fait celle-ci : « Si l’on y transcrivait des propositions évidemment vraies, c’était pour et au moyen de commentaires amphigouriques, les faire regarder comme fausses ou inapplicables au Canada ; si quelques écrits lumineux, ou pour mieux dire raisonnables paraissaient quelque part, comme à la dérobée, on s’efforçait aussitôt d’en accabler les auteurs sous le poids de grands mots vides de sens, de phrases inintelligibles, ou exclamations ridicules, des épithètes injurieuses. » Plus loin il ajoute : « À force de répétitions non contredites, on devait réussir à faire regarder comme vrais des principes faux, vus comme tels, au premier coup d’œil. On put par ces moyens parvenir à faire regarder l’agitation bruyante et tumultueuse de l’été de 1827 comme nécessaire, et cela pour soutenir les prétentions insoutenables de la majorité de la Chambre d’Assemblée, c’est-à-dire de faire intervenir le peuple pour décider des questions dont il ne pouvait ni individuellement, ni collectivement être le juge compétent. Il n’appartient nullement à la masse du peuple de décider sommairement, et sans examen préalable, des questions abstraites de droits légaux, de principes constitutionnels, de priviléges et de prérogatives, dont souvent la décision demande l’étude, la réflexion et la lumière des plus habiles gens de loi. Si un corps constitué par le peuple s’est mis dans le tort, c’est vainement, selon nous, qu’il appelle le peuple à son aide, pour le mettre dans le droit. Quoi qu’il en soit, l’agitation de 1827 fut telle, ou plutôt, les gazettes canadiennes la firent paraître telle, qu’on put lire dans les journaux des États-Unis des articles intitulés : « Troubles en Canada, » et qu’on y crut les Canadiens prêts à se rebeller. » Le même historien ajoute : « Des jeunes gens bien intentionnés sans doute, épris de l’amour de leur patrie et de leurs compatriotes ; mais encore sans expérience, s’étaient jetés à corps perdu dans la carrière politique. Dans leur enthousiasme patriotique, ils devaient, en passant les bornes de la modération et de la prudence, se fourvoyer et égarer ou mener trop loin, ceux qui les voulurent suivre. »

Une pétition rédigée par la Chambre d’Assemblée et signée par les mécontents, dans laquelle on accusait Lord Dalhousie et son gouvernement, fut déposée au pied du trône. Des pétitions opposées furent aussi signées et expédiées en Angleterre. Ces pétitions diverses partirent à la fin de janvier 1828, mais l’agitation entretenue par la presse ne cessa de continuer, dit Bibaud :

« Des orateurs, ou des journalistes comme ceux qui alors étonnèrent nos oreilles, ou éblouirent nos regards, auraient pu mettre en feu toute la Grèce. Pour réprimer, régler l’enthousiasme des jeunes gens, diminuer la violence des partis, les hommes modérés n’avaient point d’organe public ; presque partout l’exaltation politique avait gagné les devants et comme dit un auteur modéré : « Lorsque la presse est livrée à la folie des partis, il y a despotisme sur la pensée : alors la médiocrité haineuse et violente usurpe la place du talent, et le génie qui n’est plus compris, abandonne le sceptre de l’éloquence aux déclamations populaires et aux lieux communs des sectaires. » M. Bibaud ajoute : « Le gouverneur avait reçu et continuait à recevoir, de différents endroits, des adresses approbatrices de sa conduite, et désapprobatrices de celle de la majorité de la Chambre d’Assemblée. Il était dit dans celle de Berthier : « que si les avantages nombreux que la province aurait dû retirer de la sagesse de l’administration de Son Excellence, ne s’étaient pas réalisés, il fallait l’attribuer aux prétentions insoutenables de la Chambre d’Assemblée, et à sa persévérance dans une marche opposée à la prérogative de la Couronne, ainsi qu’au caractère et à la dignité de son propre corps. »

Dans le Bas-Canada, dit le même historien, la licence de la presse, aidée de celle de la parole, avait donné lieu à quelques voies de fait, particulièrement dans le comté des Deux-Montagnes.

La réponse aux pétitions adressées en Angleterre fut que Sa Majesté ordonnait de prendre sans délai les mesures propres à s’enquérir sur le sujet auquel il était fait allusion dans les pétitions.

Le Secrétaire d’État pour les colonies introduisit dans la Chambre des Communes la question des pétitions, et je citerai quelques fragments du discours du ministre des colonies, prononcé à ce sujet : « Il n’est pas nécessaire d’exposer de quelle manière et sous quelles circonstances il s’est élevé des différends entre la législature locale et le gouvernement de la colonie. La Chambre d’Assemblée du Bas-Canada réclame le droit d’approprier le revenu permanent item par item, c’est-à-dire le droit de décider quelles branches du service public ou des établissements judiciaires seront rémunérées et quelles portions de ce fonds les fonctionnaires recevront.

« De l’autre côté, on maintient et, selon moi, d’une manière incontestable en loi, que la couronne possède sur ce revenu le pouvoir discrétionnaire d’en faire les distributions, pourvu que ce soit pour les fins prévues par le Statut. Les prétentions de la Chambre d’Assemblée sont déraisonnables ; car c’est ainsi qu’il les faut appeler en autant qu’elles sont contraires à la loi, et subversives de tous les principes d’un gouvernement constitutionnel, et elle a manqué en refusant d’approprier une partie quelconque du revenu considérable dont elle a le contrôle, à moins que l’appropriation du revenu permanent de la Couronne ne lui fût aussi concédée. Tel est l’état du différend, entre le gouvernement et la Chambre d’Assemblée. Une de ses conséquences malheureuses, a été la nécessité où s’est trouvé le représentant du Roi d’approprier des fonds pour les services nécessaires de la Colonie, sans la sanction de la législature coloniale, et il n’est pas étonnant que, pressé par la nécessité, un gouverneur prenne tous les moyens qui dépendent de lui pour maintenir la tranquillité du pays commis à ses soins. Il n’a été approprié, de cette manière irrégulière, que ce qui était absolument nécessaire pour le maintien au gouvernement. Toutes les améliorations ont été arrêtées… et si le pays n’est pas tombé dans un état d’anarchie, c’est que le représentant du Roi a su soutenir convenablement son gouvernement. Le temps est venu d’appeler l’intervention du parlement pour faire cesser ces dissensions. Tout le monde doit être persuadé qu’il ne convient nullement que le représentant du Roi et l’établissement judiciaire pour l’administration de la justice criminelle, dépendent, quant à leurs salaires, des jugements variables d’une assemblée populaire. Le système que voudrait établir la Chambre d’Assemblée canadienne est incompatible avec l’indépendance et la dignité du représentant du Roi et des juges criminels. La liste civile établie, le reste serait laissé à la disposition libre de la législature locale. »

Un comité spécial fut nommé pour s’enquérir de l’état du gouvernement civil du Bas-Canada et faire rapport à la Chambre,

Le comité spécial dans son rapport aux communes, avec la majorité d’une seule voix, exprima l’opinion : « Que les Canadiens d’extraction française ne doivent être aucunement troublés dans la jouissance de leur religion, de leurs lois et de leurs privilèges. Que puisque le droit d’approprier le revenu provenant de l’acte de 1774, appartenait à la Couronne, le comité était préparé à dire que les vrais intérêts des provinces seraient mieux consultés, si la recette et la dépense de tout le revenu public étaient placées sous le contrôle de la Chambre d’Assemblée. Que la majorité des membres du Conseil Législatif ne soit pas composée de personnes en place sous le bon plaisir du gouvernement ; quant aux juges, à l’exception du juge en chef seul, il aurait mieux valu pour eux de ne pas s’être immiscés dans les affaires de la Chambre. »

Ce rapport ne fut ni rejeté, ni adopté par la Chambre des Communes, mais on promit aux pétitionnaires que les suggestions seraient prises en considération et mises à effet aussitôt que possible.

MM. Neilson, Viger et Cuvillier écrivirent alors au Canada pour laisser savoir aux pétitionnaires que le rapport était favorable aux intérêts des Canadiens-Français, mais de ne pas se réjouir et de ne pas heurter les sentiments de personne.

Cependant les accusations portées contre Lord Dalhousie n’avaient pas été approuvées par le roi, et ses ministres firent savoir que les prétentions de la Chambre d’Assemblée étaient insoutenables.

Dans les commentaires de Bibaud, il est dit : « S’il y avait des Canadiens qui pouvaient se réjouir, c’étaient ceux qui auraient peut-être signé la pétition de Québec par rapport aux abus réels, dont elle demandait la réforme, mais qui avaient refusé de signer celle de Montréal : ceux-là (les Canadiens de Québec) n’avaient jamais été persuadés que c’était avec des assertions vagues, des résolutions tranchantes, encore moins au moyen d’une agitation populaire, qu’il fallait lutter contre les ministres britanniques et leurs jurisconsultes, qui raisonnaient, qui invoquaient, citaient et expliquaient la loi, de la lettre de laquelle il n’est pas permis de s’écarter, sous le système anglais de jurisprudence ; ils n’avaient pas demandé que Lord Dalhousie fût disgracié par son souverain, pour avoir exécuté ses ordres et obéi à ses instructions ; ils ne s’étaient pas attendus que le gouvernement de la métropole concèderait à notre Chambre d’Assemblée le contrôle absolu de tout le revenu provincial, avec la faculté d’en empêcher l’appropriation sans se réserver une liste civile, permanente ou quelque chose d’équivalent, pour assurer à ses employés dans la colonie une rénumération régulière ; ils croyaient que le rapport du comité spécial des communes n’a été ce qu’il était qu’à la majorité d’une voix. Dans ces sortes de contestations, ce n’est pas le nombre de voix ou des signatures qui doit l’emporter, mais la solidité des raisons. »

À cette même époque, il s’était élevé de vives altercations entre Lord Dalhousie et la Chambre d’Assemblée, à propos des lois de milice, qui provoquaient d’un côté des désobéissances et de l’autre des censures.

Lord Dalhousie ayant été plus tard nommé au commandement en chef dans les Indes, il fut remplacé par Sir James Kempt.

Des adresses signées par le clergé, par les citoyens de Montréal, Sorel, Trois-Rivières et Québec furent présentées à l’occasion du départ du gouverneur, félicitant son Excellence et exposant les torts de la Chambre d’Assemblée.

Sir James Kempt arriva au Canada en septembre 1828, époque où les mécontentements commençaient à se calmer. M. Perrault disait alors : « qu’on s’était démené, qu’on avait harangué, résolu, pétitionné plus violemment que les circonstances ne l’exigeaient. » Les journaux prêchaient alors la modération et prirent un ton plus convenable, quoiqu’il restât un germe d’animosité entre les deux partis.

À l’ouverture du parlement en novembre 1828, le secrétaire de son Excellence disait entre autres choses dans son message, « que les statuts passés dans les 14e et 31e année du règne de Sa Majesté ont imposé aux lords commissaires de la trésorerie de Sa Majesté, le devoir d’approprier les produits du revenu accordé à Sa Majesté par le premier de ses statuts ; et que tant que la loi n’aura pas été changée par la même autorité par laquelle elle a été passée, Sa Majesté n’est pas autorisée à mettre le revenu sous le contrôle de la législature. »

La Chambre en réponse à cette partie du message, adopta la résolution suivante : « Que cette Chambre a remarqué avec peine, qu’il est possible d’inférer de la partie de ce message qui a rapport à l’appropriation du revenu, que l’on semblerait persister dans les prétentions annoncées au commencement de la dernière administration, quant à la disposition d’une grande partie du revenu de cette province, etc., etc…  »

Dans une note de M. Bibaud, contenant cette résolution, il est dit : « Ceux qui s’exprimaient d’une manière si inconvenante devaient savoir que l’acte de la 14e année de Geo. III, chap. 88, avait été déclaré être en force par toutes les autorités de la métropole ; ils venaient d’être informés que cet acte n’avait pas été révoqué dans la dernière session du parlement impérial, et ils n’auraient jamais dû ignorer que la constitution, ou la législation Britannique ne permet à personne, pas même au roi, d’aller à l’encontre de la lettre de la loi. »

Sur diverses demandes réitérées, faites par la Chambre au gouvernement pour obtenir des informations ou ses secrets, le même historien dit : « On aurait pu croire que cette réponse (du gouvernement) mettrait fin à la disposition inquisitive, ou curieuse de la Chambre. La session de 1829 fut plus extraordinaire peut-être que toutes celles qui l’avaient précédée, par les airs qu’elle se donna, par les pouvoirs qu’elle s’arrogea et par l’esprit qui l’anima.

« Que la détermination était toujours prise d’avance ; que la modération et la conciliation furent toujours dans la minorité, quoique la minorité ne fût pas toujours modérée, on comprendra que l’esprit dont nous parlons est l’esprit de parti. La session de 1829 fut une session d’enquêtes partiales et vindicatives. M. Papineau déclama quelquefois aussi longuement qu’inutilement. »

En parlant de la session de 1830, le même historien dit : « La session de 1830 fut moins bruyante que sa devancière. Quand nous disons moins bruyante que celle de 1829, nous entendons qu’il ne résulta pas au dehors un aussi grand éclat de bruit qu’elle put faire au dedans, car, dans le fait, l’esprit de parti et de vengeance y fit preuve d’expérience et de progrès : flamboyant dans les paroles du docteur Labrie, il parut chaud et véhément dans les discours de M. Viger et sa chaleur porta M. Papineau à déclamer plus chaudement et plus fréquemment que jamais contre la dernière administration, contre le pouvoir exécutif, et contre le pouvoir judiciaire quels qu’ils soient, tellement que ses plus constants admirateurs ne purent s’empêcher de lui en faire des reproches. La virulence des discours de M. Papineau, leur fréquence commençait à déplaire aux plus chauds partisans de la toute-puissance populaire. »

Le même historien, en terminant son histoire du Canada qui comprend le récit des événements qui sont arrivés jusqu’à l’année 1830 inclusivement, fait la remarque qui suit : « Notre beau pays avait été troublé, une partie de notre intéressante jeunesse avait été détournée d’occupations utiles, de l’application aux études nécessaires À son avenir par une malheureuse question de finances qui, de quelque manière qu’elle fût décidée, ne devait faire ni perdre ni gagner annuellement un denier à chacun des individus de la Province. »

Lord Aylmer fut celui qui en octobre 1830 remplaça le gouverneur Kempt, c’est-à-dire dans un temps où il était fort difficile de concilier les esprits et de faire disparaître les dissensions qui existaient alors entre la Chambre d’Assemblée, le Conseil Législatif et le pouvoir exécutif.

Afin d’abréger mon travail et de ne pas fatiguer le lecteur en lui présentant des faits historiques qu’il connaît peut-être mieux que moi-même, je ne citerai que les plus importants qui se passèrent entre 1830 et 1837 et tels qu’ils sont racontés par l’historien Garneau. J’analyserai donc bien brièvement, afin d’arriver aussitôt que possible aux événements de St-Eustache en 1837.

  1. Depuis que ce qui précède a été écrit, un monument a été élevé à Chambly.