La gueuse parfumée/Le clos des Ames/05

Bibliothèque-Charpentier, Eugène Fasquelle (p. 244-245).

V

musée tirse et salle sube

M. Tirse, on le devine, connaissait les mystères du clos des Ames ; seulement, par amitié pour M. Sube, il n’en disait rien. Ce fut pourtant M. Tirse qui, sans le vouloir, causa la fin tragique de M. Sube.

Voici comment :

Un matin, en réfléchissant, M. Tirse s’aperçut que la ville de Canteperdrix était sans musée, et soudain il s’arrêta à la pensée d’en fonder un. On l’appellerait le Musée Tirse. — « Là, disait-il, seront déposés et classés dans leur instructive progression, avec le nom des donateurs en grosses lettres, les haches en silex des vieux Celtes, les outils en cuivre gallo-romains, les médailles, les trépieds, les petits bronzes, les lampes phalliques ou non phalliques, les statuettes grecques, les fragments moyen âge, les curiosités des XVe et XVIe siècles, enfin tous les précieux témoignages d’autrefois que la pioche du paysan fait jaillir chaque jour du sol cantoperdicien, et qui, faute d’un lieu pour les recevoir, vont se dispersant entre des mains ignorantes ! »

Ce projet de M. Tirse obtint le succès le plus vif ; le préfet s’y intéressa, le maire offrit un local ; chacun, à Canteperdrix, tint à honneur d’y apporter quelque morceau rare, et M. Sube, entraîné par l’exemple, promit tout ce que renfermait de curieux le pavillon du clos, à cette condition pourtant qu’une des vitrines du musée Tirse porterait le nom de salle Sube.