La conquête du paradis/XXX

Armand Collin (p. 394-407).

XXX

POISONS

Dans un frais bouquet de palmiers, au bord de la mer, une maison assez petite, isolée, apparaît tout environnée de sables brûlés de soleil. Les tattys, en roseaux tressés, sont baissés devant les fenêtres, et un noir, allant de l’une à l’autre, les arrose sans relâche à l’aide d’une pompe. Ce bruit d’eau qui ruisselle est le seul qui se fasse entendre. La maison semble morte au milieu de ce grand paysage simple, nu, où les solitudes du ciel, de la mer et des sables, se superposent.

Le long de la côte cependant, quelque chose semble rouler, et s’approche avec une extrême rapidité.

Le nuage soulevé laisse deviner bientôt un cavalier couvert de poussière, qui harcèle sans pitié son cheval. C’est vers la maison qu’il se dirige. Il franchit la porte ouverte de la palissade qui l’entoure et, sautant à bas de sa monture, gravit en courant les marches de la véranda.

De l’intérieur, quelqu’un vint au-devant de lui.

— Eh bien, Naïk ? demanda anxieusement celui qui entrait et qui était Arslan-Khan.

Le paria avait le visage inondé de larmes.

— Il est mort ?

— Non, il vit ; mais l’espoir fuit de nos cœurs, comme le vin d’une coupe brisée.

— Allah est grand ! il peut faire un miracle.

Naïk secoua la tête.

— Venez, dit-il, mais ôtez vos armes, la vue de l’acier lui fait peur.

— Bussy a peur d’une épée ! Hélas, il est bien perdu, dit Arslan, les yeux humides. Je suis certain maintenant qu’on voulait m’éloigner en me désignant pour porter au Mogol le tribut du roi. Parti au milieu de la joie et des triomphes, je retrouve, après quelques mois, désastre et malheur.

— L’assassinat de Rugoonat-Dat a été le premier éclair de cet orage terrible, dit Naïk.

— L’assassin, c’est ce misérable Panch-Anan !

— Je n’en ai pas douté un moment ; le ministre avait parlé d’une lettre dangereuse, écrite par lui à la princesse Lila, et qui avait été interceptée. Aussi, quand j’ai vu le cher brahmane mort, une inquiétude affreuse s’est emparée de moi. J’étais sûr de notre cuisinier et tous les plats arrivaient sur la table enfermés et scellés par lui. Mais j’avais supplié le maître de ne pas boire, même une goutte d’eau, hors du palais et il me l’avait promis en riant, ne croyant pas au danger. Malgré cela, je ne vivais pas, j’avais le pressentiment du poison. Hélas ! un jour, en sortant d’une conférence avec le nouveau ministre, Seid-el-Asker-Khan, dont la figure faussement humble me faisait horreur, le maître est tombé évanoui et on l’a rapporté au palais sans qu’il ait repris connaissance. Il m’avoua, lorsqu’il revint à lui, avoir bu quelques cuillerées d’un sorbet qu’il ne pouvait refuser, le ministre lui-même le lui offrant. Il avait très chaud, dit-il, puis un froid subit l’avait glacé. Contre tout espoir, pourtant, il se remit vite et se moqua de ma persistante angoisse. Bientôt son caractère changea ; lui, si séduisant dans ses manières et dont l’accueil, malgré sa grande dignité, était toujours si cordial, devint d’une hauteur extraordinaire avec tout le monde, tellement que M. de Kerjean ne lui parla plus et est encore aujourd’hui mortellement fâché contre lui. Des colères subites, sans cause, lui venaient, et alors il n’épargnait personne, pas même le roi, qui a fait preuve d’une patience bien rare. C’est alors qu’arriva cette nouvelle incroyable, d’un nouveau prétendant, soutenu par les Anglais, s’avançant avec des forces considérables vers Aurengabad. En la recevant le général parut troublé ; pour la première fois son sang-froid l’abandonna, il hésita, et, quand l’ennemi approcha, au lieu de défendre la ville, à la stupeur de tous, il ordonna la retraite et fit partir le roi pour Hyderabad. Je ne reconnus que trop l’action d’un poison lent qui, avant de tuer son corps, allait détruire la gloire du bien-aimé héros. Il eut quelques éclairs encore, puis faiblit, sembla redouter un combat. L’ennemi occupa la ville, confisqua les trésors, et Bussy, le héros de Gengi, le triomphateur, parla de fuir vers Pondichéry. Dupleix, par de prodigieux efforts, atténua un peu le désastre, put tenir dans Hyderabad, et je crois que le capitaine Kerjean a reçu des ordres secrets ; c’est lui qui dirige tout, depuis que la maladie du général, prenant des allures mortelles, nous obligea à l’amener ici, espérant quelque soulagement des fraîches brises de la mer.

Arslan-Khan, la tête dans ses mains, sanglotait.

— Qui le soigne ? demanda-t-il.

— Le médecin du roi est ici, il ne l’a pas quitté, dit Naïk, mais il s’avoue impuissant et ne peut découvrir quel est le poison qui tue lentement un homme si jeune et si robuste. Une fièvre terrible le brûle sans relâche, lui donne des accès de fureur, des colères folles où il retrouve des forces pour tout briser ; mais ces crises cessent depuis quelques jours pour faire place à un délire plus calme, à des craintes d’enfant et à des somnolences funestes qui, au dire du médecin, annoncent la fin.

— Ah ! je le vengerai ! s’écria Arslan, j’en fais le serment sacré, je saisirai ce misérable brahmane et j’inventerai pour lui des douleurs atroces. Je ferai durer son agonie des jours et des mois, je le tuerai lambeau à lambeau. Mais, hélas ! tout son sang impur ne rachètera pas une goutte de celui de notre ami !

— Le maître est éveillé, dit un serviteur qui apparut et disparut aussitôt.

— Crois-tu qu’il me reconnaîtra ? demanda Arslan, qui entra en tremblant dans la chambre.

C’était une salle nue, presque vide, maintenue très fraîche et dans un demi-jour. Au milieu, sur un lit de jonc, sans drap ni couverture, le marquis gisait, enveloppé seulement d’un peignoir de soie. Couché sur le dos, le regard vague, ses cheveux noirs répandus en arrière, on eût pu le croire mort, sans les mouvements nerveux qui l’agitaient par moments et sa respiration haletante.

Arslan s’approcha et contempla avec désespoir ce visage beau encore, mais livide, avec deux cercles noirs autour des yeux, auxquels la fièvre donnait un éclat effrayant. Il s’agenouilla, prit et baisa la main du mourant, et cette main le brûla comme une braise rouge. Cependant, le punka agitait l’air violemment, et Marion ne cessait de mouiller d’eau fraîche le front de son maître.

— Il ne me voit pas ! murmura le guerrier : il ne m’entend pas !

Au son de cette voix, Bussy brusquement se souleva et regarda qui était là, puis il se rejeta du côté de la jeune fille.

— Monseigneur ne reconnaît pas Arslan-Khan ?

— Oui, dit-il, je sais, il vient pour me tuer.

— Quelle punition ! s’écria l’umara.

Mais le malade oublia aussitôt, retomba dans son immobilité et dans son silence.

— Où donc est le médecin ? demanda Naïk.

— Il est allé se reposer ; il ne peut plus rien. « Le malade ne passera pas la nuit, a-t-il dit, et il est inutile de le tourmenter, avec des potions qu’il refuse de prendre. »

— Nous sommes ici trois qui donnerions avec joie notre vie pour le sauver, s’écria Arslan, qui se tordait les bras, et nous ne pouvons rien.

Bussy sommeillait de nouveau ; ses fidèles amis se turent et demeurèrent immobiles, anéantis dans cette attente atroce d’un malheur inévitable.

L’heure passa et la journée, dont la clarté finit brusquement dans un de ces orages subits et terribles, fréquents dans l’Inde. La mer se mit à rugir, le ciel s’embrasa, le vent, la pluie, le tonnerre assaillirent la maison qui semblait vouloir s’écrouler.

Ceux qui veillaient, absorbés dans leur douleur, s’en inquiétèrent à peine. Le médecin, réveillé, était revenu dans la chambre du malade et avait fait assujettir les fenêtres et fermer la porte.

Vers le milieu de l’ouragan, Bussy se souleva sur son lit, le visage contracté, crispant ses mains sur sa poitrine comme si un poids l’étouffait ; puis, après un profond soupir, il retomba en arrière, sans souffle.

— C’est la fin ! dit le médecin.

À ce moment, un tourbillon de vent entra dans la chambre, affolant les lumières ; la porte s’était ouverte et une voix cria :

— Toute fin est un commencement !

Arslan se précipita comme en délire, pour baiser ses genoux, aux pieds de l’être extraordinaire qui venait d’entrer.

— Allah m’exauce, s’écriait-il, il a fait un miracle.

Le nouveau venu, d’une maigreur fantastique, avait des yeux scintillants comme des étoiles sous sa chevelure embrouillée ; il était nu, moins un langouti d’étoffe rouge, et ruisselait de pluie.

— Le fakir ! murmura Naïk en joignant les mains avec un éclair d’espoir dans les yeux.

— Oui, c’est moi ; vous m’embrasserez plus tard, dit Sata-Nanda en laissant glisser à terre un sac en peau de crocodile qu’il portait sur le dos.

Il se hâta d’ouvrir ce sac et en tira plusieurs flacons et une grande quantité de larges feuilles rugueuses et velues fraîchement cueillies. Alors il s’approcha du malade, attacha sur lui, longuement, un regard fixe et lui passa à plusieurs reprises les doigts sur le front, sur les yeux et sur la poitrine.

— C’est un dieu, disait Arslan ; s’il est venu, il le sauvera.

— Demain, il était trop tard, dit le fakir.

Il arracha le peignoir de soie qui enveloppait Bussy, et, sans égards pour la finesse et la blancheur de sa peau, il se mit à la frictionner rudement, avec une poignée des feuilles qu’il avait apportées.

— Tu n’ignores pas, lui dit le médecin, que cette plante contient un poison violent.

— Si je l’ignorais, je ne m’en servirais pas. D’ailleurs, qu’importe, puisque tu juges ton malade mort.

— Quel est ce fou ? demanda tout bas le médecin à Naïk.

— C’est un saint homme qui connaît tous les secrets de la nature. Il a été enterré pendant six mois.

Le médecin du roi haussa les épaules et jeta un regard dédaigneux au fakir, qui se démenait comme un démon, frictionnant toujours, en renouvelant souvent les feuilles.

— Voyez, voyez ! s’écria-t-il après une heure de ce manège, la peau rougit et devient moite.

— Voilà qui serait merveilleux ; nous avons, sans résultat, tout essayé pour obtenir la transpiration.

— Vous n’avez pas fait ce qu’il fallait : à un poison il fallait opposer un autre poison.

— Il est certain qu’une légère moiteur assouplit la peau, dit le médecin au comble de la surprise, en touchant le bras du malade.

— Eh bien, puisque tu ne me crois plus aussi fou, à ton tour de frictionner, je n’ai plus de force ; légèrement maintenant, et moins vite.

Le médecin obéit, prit la place de Sata-Nanda, qui lui passa une poignée de feuilles.

Alors le fakir se fit donner une coupe et y versa le contenu d’un de ses flacons, puis quelques gouttes d’un autre, les mesurant avec le plus grand soin.

— C’est encore un poison, dit-il.

— Mais le malade est hors d’état de rien avaler ; depuis hier il refuse toute boisson.

— Il prendra celle-ci.

Sata-Nanda s’approcha du marquis, dardant sur lui son regard fixe :

— Bois ceci, mon fils, je le veux, dit-il d’une voix impérieuse.

Sans ouvrir les yeux, Bussy fit un effort pour soulever sa tête.

Lentement, le fakir lui fit vider toute la coupe.

— Eh bien, à quoi songes-tu ? dit-il au médecin qui le regardait d’un air un peu effrayé.

— Serais-tu sorcier ?

— Peut-être ! As-tu donc peur des sorciers ? Va, frotte ; ou, si tu es las, donne ta place à un autre.

Le médecin se remit à frictionner, tandis que Sata-Nanda soufflait légèrement sur le front du malade.

Tout à coup celui-ci ouvrit les yeux, se dressa d’un air irrité en criant :

— Finirez-vous bientôt de m’écorcher vif ?

— Il sent le mal, il est sauvé ! s’écria le fakir, qui se mit à exécuter les plus extraordinaires gambades.

Bussy le regardait dans une indicible stupeur, sans manifester de crainte cependant ; puis il se laissa retomber avec accablement, mais d’un mouvement souple et vivant.

— Apportez-moi tout ce que vous avez d’étoffes de laine, dit le fakir qui reprit son sérieux.

Il enveloppa soigneusement le jeune homme et lui ordonna de dormir :

— Repose-toi bien et longtemps ; après cela, je réponds de toi.

Bussy ferma les yeux, et, lui qui depuis tant de jours restait étendu sur le dos, se tourna sur le côté pour dormir.

Pour être moins étrange dans ses manifestations, la joie de ceux qui tout à l’heure touchaient le fond du désespoir, n’en était pas moins violente.

— Eh bien, si vous êtes contents, donnez-moi à manger, dit le fakir en s’asseyant sur le plancher, le menton entre ses genoux ; voilà trois jours que je galope sans avoir avalé autre chose que quelques dattes, saisies au vol en passant sous les arbres.

Naïk sortit en courant pour faire préparer un repas. Le médecin s’assit à côté de Sata-Nanda.

— Allah est grand, dit-il ; ce que je viens de voir m’émerveille. Vends-moi ton secret, je payerai le prix que tu voudras.

— Te le vendre ! pourquoi faire ? Je te le donnerai bien volontiers, et je t’expliquerai comment le poison que j’ai combattu ne s’attaque qu’aux nerfs et a beaucoup de ressemblance, dans ses effets, avec la rage ; mais tout cela plus tard, quand j’aurai mangé et dormi.

— Je m’incline devant ta science et ta générosité, dit le médecin ; tu es vraiment au-dessus des hommes.

L’orage avait cessé, la mer seule grondait encore. Tous, accablés de fatigue, s’endormirent bientôt, excepté Naïk qui, accroupi au pied du lit, regardait, avec une joie muette, son maître dormir d’un sommeil presque calme.

Le fakir s’éveilla dès que le jour parut, étira ses longs membres de sauterelle, et alla relever un store pour laisser entrer du jour. Il vit alors, aplati sur le sol du jardin, les pattes raides, le cou allongé, l’œil vitreux, le chameau qui l’avait amené.

— Pauvre bête, murmura-t-il, je t’ai sacrifiée, mais ta vie sauve celle d’un homme.

Il s’approcha du marquis toujours endormi et le contempla avec émotion :

— Si jeune, si fort, si sain, la mort le prenait, si je ne m’étais pas à temps souvenu de lui, dit-il à demi-voix ; quelques heures d’oubli encore, c’était fini, et ma douleur eût été profonde. Pourquoi ? je ne sais ; quel attrait m’attire vers lui ? pourquoi, parmi ceux qui peuplent ma solitude, est-il le mieux aimé ? est-ce uniquement parce qu’il possède la triade magique : l’harmonieux équilibre du cœur, de l’esprit et du corps, qu’il est bon, intelligent et beau ? N’importe, aujourd’hui que je lui rends la vie, il me semble qu’il est mon fils.

Il se pencha vers le jeune homme, lui releva doucement les cheveux et le baisa sur le front.

Bussy ouvrit les yeux, regarda longuement le fakir, puis un faible sourire desserra ses lèvres.

— Me connais-tu ? demanda Sata-Nanda.

— Tu es quelqu’un que j’aime ; qui ? je ne sais pas.

— Ah ! s’écria Arslan, ce n’est donc pas un rêve ! Il est sauvé !

La convalescence fut longue, les forces lentement revinrent.

Mais l’esprit restait affaibli, et le jeune homme eut une rechute terrible le jour où, sur ses instances, on le mit au courant des désastres qu’avait causés sa maladie : la retraite ordonnée par lui, la fuite du roi à Hyderabad, la capitale occupée par l’ennemi :

— C’est elle ! cria-t-il, elle m’a déshonoré !

Et il tomba comme foudroyé.

Sata-Nanda eut besoin de toute sa science pour le rappeler à lui.

Quand il se releva, ce n’était plus le même homme ; on eût dit que le meilleur de lui-même était mort, qu’il se survivait, et que, subitement, la flamme de sa jeunesse s’était éteinte.

Il promena sur ses amis un regard dont l’expression leur serra le cœur.

— Si vous m’aimez encore, malgré mon abaissement, vous, mes fidèles, dit-il, ne me parlez jamais de Bangalore, et éloignez de moi tout ce qui pourrait me rappeler ce lieu maudit.

— Mon maître !… s’écria Naïk en se précipitant à ses pieds.

Mais le marquis le repoussa, avec une douceur glacée.

— Donne-moi de quoi écrire, dit-il.

Et il écrivit, très posément, une courte lettre.

— Mes amis, dit-il d’une voix grave, lorsqu’elle fut fermée et scellée de son sceau, je demande, au gouverneur de l’Inde, la main de Mademoiselle Chonchon. Je veux voir s’il me jugera encore digne d’être son gendre, ou si, à ses yeux, la honte des derniers jours efface toutes mes victoires.

— Ô père ! dit tout bas Arslan à Sata-Nanda, qui, le menton entre les genoux, regardait d’un air impassible, toi si puissant, toi qui sais tout, le laisseras-tu creuser un tel abîme entre lui et le bonheur ?

— Gagnez le messager qui doit porter cette lettre, et qu’il ne la porte pas, dit le fakir à demi-voix.

En attendant la réponse de Dupleix, le marquis passait ses journées à faire des armes avec Arslan-Khan. De sa maladie, un tremblement lui restait dans le bras droit, qui le désolait. À force d’exercice pourtant, cette faiblesse s’atténua et bientôt disparut complètement.

Un courrier de Pondichéry arriva apportant une lettre très urgente de Dupleix, et qui ne pouvait être encore la réponse à celle que lui avait adressée Bussy.

Le marquis ouvrit la lettre et, quand il eut fini de lire, il se tourna vers ses amis.

— Rien que des malheurs, dit-il froidement. On a intercepté une lettre du traître Seid-el-Asker-Khan au gouverneur de Madras, et l’on tient les fils d’un complot très bien ourdi : les Mahrattes rompent la paix et s’allient à Nazi-ed-din, le nouveau prétendant, et aux Anglais ; le ministre enlève le roi, pour l’arracher à l’influence française, et le conduit vers Aurengabad. On a éparpillé nos troupes de tous côtés, de façon à les affaiblir, et on a tout employé pour les démoraliser. Les renforts que Dupleix attendait ne viendront jamais ; notre compagnon d’armes, le major de La Touche, a brûlé en mer avec les sept cents hommes qu’il amenait. Le gouverneur me supplie, même si je ne suis pas complètement rétabli, de partir immédiatement pour reprendre le commandement de l’armée. « Vous ne serez pas rendu à Hyderabad, me dit-il, que vous sentirez la nécessité de ce voyage et que tout y était perdu sans votre présence. Les lettres que je reçois me font dresser les cheveux. La débauche en tout genre y est poussée à l’excès et la nation tombée dans un mépris que vous seul pouvez faire cesser. »

Le marquis referma la lettre.

— Notre tâche est rude, dit-il, mais je vois dans les yeux étincelants de mon père Sata-Nanda, que je triompherai, ou qu’au moins je saurai mourir de façon à restaurer ma gloire. En route, amis ! et sur l’heure ! Mon départ a tout perdu, mon retour sauvera tout !