La carte postale (Dandurand)/Scène VII
SCÈNE VII.
Tantine ! fais-moi dire ma fable avant.
Non, moi, Tantine !
Je la sais mieux que lui…
Non, elle ne la sait pas mieux que moi. Tu te vantes toujours…
Attendez. Attendez. J’ai une chose à faire avant de vous écouter. Le facteur est certainement passé maintenant. Comme il n’est rien venu de vos parents, il est clair qu’ils n’arriveront pas aujourd’hui. (Un temps. Les enfants baissent les yeux.) Ainsi, il faut que je téléphone pour contremander tous les ordres aux fournisseurs. La crème à la glace, les volailles, les fruits, les pâtisseries, nous n’avons plus besoin de tout cela. (Elle se lève ; comme elle va sortir, Paul et Margot font le même mouvement pour la retenir et tout lui révéler, mais ils s’arrêtent, surpris, et redescendent en scène en se regardant avec défiance.)
Qu’est-ce que Paul voulait bien dire à Tantine ?
Tiens ! je ne serais pas surpris qu’elle l’aurait lue, la petite rusée !
Et tante qui s’en va contremander la crème à la glace !…
Je sais bien ce que je vais faire. Tout à l’heure je courrai chez tous les fournisseurs pour donner un second contre-ordre.
Ah ! je voudrais que le facteur en apporte une autre carte, toute pareille… Ce que je ne la lirais pas !
Voilà qui est fait. Maintenant repassons les fables, car la fête aura lieu demain.
Moi je pense, Tantine, que ça pourrait bien être aujourd’hui.
Moi aussi.
Non, non, c’est impossible, puisque votre papa n’a pas écrit. Commence, Margot. Et toi, Paul, je te préviens, ne fais pas rire ta sœur avec tes singeries, tandis qu’elle récite.
Il n’y a pas de danger, je vais sortir. (À part.) Juste le temps de passer chez messieurs les fournisseurs.
(Avant de sortir il se glisse derrière la table, enlève la carte sans être vu et l’enfonce dans sa poche.)
Ne t’éloigne pas.
Non, tante.