Les Siècles morts/La Vision de Nabou-koudour-ousour

Les Siècles mortsAlphonse Lemerre éd.I. L’Orient antique (p. 55-69).


 
27. — Le Roi commença et dit : — N’est-ce
pas là cette grande Babylone que j’ai bâtie pour
la demeure de ma Royauté, dans ma grande force»
et pour la gloire de ma magnificence.

38. — Et la parole était encore dans la bouche
du Roi, qu’une voix tomba du ciel : — Il t’est dit,
Roi Nabuchodonosor, ta royauté te sera enlevée.

29. — On te repoussera du milieu des hommes ;
ta demeure sera en compagnie des animaux des
champs ; tu mangeras de l’herbe comme les
bœufs

DANIEL, chap. IV.





Šamaš brûle. Les murs ardents aux briques peintes
Resplendissent, pareils aux étoiles du ciel ;
Et brillant au soleil, de loin les trois enceintes
Semblent des cercles d’or qu’emprisonne Imgour-Bel.

Les jardins endormis versent en lourdes masses
L’immobile forêt qui s’étage à leurs flancs ;
Dans les canaux profonds les royales terrasses
Baignent les derniers blocs de leurs escaliers blancs.


Tout se tait. A l’odeur des cavales farouches.
On n’entend plus hennir les étalons cabrés ;
Seuls les lions captifs, irrités par les mouches,
Rugissent sourdement dans les enclos sacrés.

Dans le palais muet, nul esclave n’effleure
D’un pied furtif et prompt la splendeur du pavé.
Mardouk et les grands Dieux veillent sur la demeure
De la Royauté sainte et du Trône élevé.

Les chanteuses d’Êlam ont laissé les sambuques
Silencieuses pendre aux deux battants d’airain,
Tandis que, balançant des palmes, les eunuques
Abaissent derrière eux les peaux de veau marin.

Car le Roi de Babel, superbe et plein de gloire,
Nabou-koudour-ousour, serviteur de ses Dieux,
Sur sa couche de cèdre aux pieds d’or et d’ivoire,
A reposé son front auguste et clos ses yeux.

Il est le Fils de Bel, et Mardouk le protège.
C’est lui qui rebâtit la Tour et répara
Le Temple de Larsam et la Demeure où siège
La splendeur de Šamaš, au cœur de Sippara.

Il a percé Moab de ses flèches aiguës,
Et, liant par le cou leurs princes à son char,
De sa lance poussé les nations vaincues
Comme un morne bétail vers le sol de Šchinar.


Ton sang a rejailli, Ziôn, sur tes murailles ;
L’incendie a sifflé sur le seuil éternel ;
Les chiens dans le Parvis ont traîné les entrailles
Des prêtres d’Iahvé, massacrés sur l’autel.

Dans la chambre sculptée où nul rayon ne glisse,
Respirant la fraîcheur des murs silencieux,
Sur une peau rayée, au poil soyeux et lisse,
Il s’étend, confiant en la force des Dieux.

Il dort. Deux lions roux, aux angles de la couche,
Languissants et domptés, griffent les lourds tapis.
Mais voici qu’un cri rauque a convulsé sa bouche
Et qu’un songe a pesé sur ses yeux assoupis.

Voici qu’il a vu croître, au fond du désert sombre,
Un arbre gigantesque où pendent des fruits murs.
Et la bête sauvage habitait sous son ombre,
L’oiseau faisait son nid dans les rameaux obscurs.

Dans le sol déchiré ses racines profondes
Plongeaient ; son dôme noir s’élargissait dans l’air,
Plus haut que les grands caps que, de leurs barques rondes,
Les marins de Zidôn voient monter sur la mer.

Et le vent balançait les branches étoilées,
Quand le Voyant cria : — Le Bûcheron divin,
Comme un cèdre abattu dans les herbes foulées,
Couchera l’arbre mort au travers du ravin !


Colosse mutilé que l’ouragan secoue,
Il croulera, souillé par l’aigle et le vautour ;
Et, pourrissant dans la pestilence et la boue,
Sera comme un roseau dans les marais d’Assour ! —

Et le Roi, redressant sa stature, livide,
Baigné de sueur, plein d’épouvante et d’ennui,
Emplit de sa clameur la salle haute et vide
Où les lions rampants grondaient autour de lui :

— L’effroi religieux étreint ma gorge sèche.
Je suis comme un dormeur en sursaut réveillé,
Comme un guerrier d’Aram que blesse un fer de flèche
Et qui roule sanglant sur le sable mouillé.

Les Keroubim massifs ne barrent plus ma porte ;
Nabou n’est plus gardien de mon palais vermeil
Et ne disperse plus l’horreur vaine qu’apporte
La nocturne Lilith à mon royal sommeil.

Les Khaldéens, pâlis sur les tables antiques,
Ceux qui rêvent la nuit au fond des tombeaux vils,
Ceux qui savent le rang et les nombres mystiques
Des grands Dieux, protecteurs du Pays, où sont-ils ?

Où sont ceux qui, parmi les vents et les tonnerres,
Distinguent dans le ciel la marche de Nirgal,
Et les observateurs des éclipses lunaires,
Et les juges du mois favorable ou fatal ?


Pourquoi devant le Trône, en posture servile,
N’ont-ils pas joint leurs mains et tressailli d’effroi ?
Ils ont fui. Je suis seul ! Babel, ma grande Ville,
Tient ses portes d’airain closes devant son Roi.

A moi tous mes guerriers, pleins de cris et de haines !
Durs vainqueurs d’Ouâbar et de Moušri, frappez !
Coiffez le casque rond et préparez les chaînes ;
Sur la pierre, aiguisez la courbe des harpes !

Vos mains ont agité la lance radieuse
Et la flèche a frémi sur la corde des arcs.
Irrité, j’ai poussé la course furieuse
Des chevaux de combat loin de l’ombre des parcs.

Babel ! entends les pas de mon armée en marche ;
Me voici, rugissant et fort comme un lion.
Je couperai le pont et je fendrai son arche,
Et je t’étoufferai dans ta rébellion.

Et tu verras, hurlant sous les toits qui s’écroulent,
Ramper tes derniers fils sur leurs genoux fauchés ;
Les mères, s’abreuvant des pleurs que leurs yeux roulent,
Bercer des enfants morts sur leurs seins arrachés.

Et tes vierges, en proie au rut des multitudes,
Se tordre et se voiler de leurs sombres cheveux,
En crachant de dégoût sous les étreintes rudes
Des soldats violents, hérissés et nerveux.


Et tes adolescents, la tête rase, imberbes,
Vêtus de laine fine et de colliers massifs,
Pleurant leurs désirs morts sous les palmiers superbes,
Solitaires, errer comme des chiens lascifs.

Le désert se soulève et bout. Le vent d’orage
Court en noirs tourbillons sur le sable enflammé :
L’ombre croît, et Babel comme dans un mirage
Disparaît tout à coup de l’horizon fermé.

Hélas ! Elle n’est plus, la Cité des merveilles,
La Ville chère encore à mon orgueil royal,
Celle que je voyais florissante en mes veilles
Et plus riche que Zour où règne Itthobaal.

Les rameurs se hâtant sur les deux bords du fleuve
Ne débarqueront plus l’orge ni le froment.
Le lit mystique est vide où la prêtresse veuve
N’ouvrira plus ses bras à son rapide amant.

Tout s’est évanoui dans l’obscurité morne ;
La nuit qui monte emplit mon palais déserté,
Et les aveugles Dieux ont abattu ma corne
Et le trône sans gloire où gît ma Royauté.

Et moi, comme un captif sous le fouet qui déchire,
Nabou-koudour-ousour, moi le Roi, le Seigneur
Des nations, je fuis, je tombe, et mon Empire
Est comme un champ qu’on fauche et bon pour le glaneur.


Naguère j’ignorais les noms de ses provinces,
J’étais le Roi puissant d’Akkad et de Šoumer,
Dont le pied s’essuyait au front de tous les princes,
Des montagnes du Nord aux sables de la mer.

Bien loin du soi natal je transplantais les hommes
D’Aq’harrou, de ’Hatti, d’Êlam et des tribus
De Kousch ; et les Gardiens des métaux et des sommes
Dans les coffres de cèdre entassaient les tributs.

Fils des Rois très anciens, Vengeur des Dieux sublimes,
Je clouais les enfants aux portes des cités,
Joyeux des hurlements d’un peuple de victimes
Sur les bûchers tordus par les vents empestés.

Et je dressais sur les remparts des croix sans nombre,
Comme on borde un chemin de cyprès réguliers,
Et je plantais des pals de bois dur où dans l’ombre,
Les yeux crevés, râlaient des vaincus par miniers.

J’ai peur. Qui frappe encor son Roi, comme un esclave ?
La lanière de cuir mord en sifflant ; ma chair
Saigne ; mes lourds genoux fléchissent, et je bave
Ma salive fétide en un sanglot amer.

Où sont mes Dieux, les Dieux augustes de nos Pères,
Ceux pour qui j’ai versé l’huile épaisse et le vin,
Et Celui dont le geste offrait, aux jours prospères,
La corbeille tressée et la pomme de pin ?


Et Nabou, protecteur de ma tête royale,
Et Zarpanit, ma Dame, et Nisrouk et Dagan
Que berce dans ses flots la Mer Primordiale,
Et Bin dévastateur, Seigneur de l’ouragan ?

Dieux ingrats ! Ma vengeance abattra les coupoles
De vos temples dans Mas, dans Ourouk et Nipour ;
Et l’or dont ma splendeur a vêtu vos idoles,
Le fondeur de Thoubal le fondra dans son four.

Je briserai l’autel aux degrés métalliques
Où l’encens fume et monte en nuages légers,
Et ferai, sur les monts, dresser des pieux phalliques
Devant les Baalim et les Dieux étrangers.

Iahvé, mon captif, me relève et me sauve ;
Il sort de sa Maison et me prend en pitié !
Non ! L’Élohim est sourd et cruel. Comme un fauve,
Je m’enfonce au désert, par mes fils oublié.

L’abîme sablonneux déborde et précipite
Sa houle amoncelée et ses replis de feu.
La poussière embrasée en tournoyant crépite
Sous l’éclat ruisselant du ciel obscur et bleu.

L’implacable soleil, qui brûle mes paupières,
Dessèche l’herbe rousse et les buissons rampants
Et fait étinceler sur le sable et les pierres
Les dos noirs et marbrés de monstrueux serpents.


Meurtri, répudié comme un lépreux qu’on chasse
Hors des tentes et loin des cités et des murs,
Vain spectre de moi-même et terreur de ma race,
J’erre, et mon corps saignant nourrit des maux impurs.

Comme un bœuf égaré va broutant l’herbe rase
Et s’arrête et mugit vers les enclos connus,
Tel j’hésite. Ma voix sur les rochers s’écrase
Et le vent de la nuit roidit mes membres nus.

Mon cœur d’homme est séché ; ma poitrine avilie
Abrite un cœur de loup tortueux et grossier.
Au bruit de mots humains que ma mémoire oublie
Ma langue épaisse et lourde adhère à mon gosier.

Et le poil de ma face est comme une crinière
Formidable et sordide où pullulent les poux ;
Et lorsque je me lève, au fond de ma tanière,
Mes cheveux en torrent roulent sur mes genoux.

Le jour meurt. C’est l’instant où les chasseurs nocturnes,
Altérés, les flancs creux et mordus par la faim,
Suivent à pas pesants, courbés et taciturnes,
La piste fraîche encor sur le sable sans fin.

J’entends monter du fond des marais et des plaines
La confuse rumeur des bêtes de la nuit.
Autour de moi, dans l’air plein de chaudes haleines,
Tout un peuple invisible et furieux bruit.

Des souffles courts, des chocs soudains, des bonds énormes,

Des fronts heurtés, un brusque et sourd piétinement,
Et des mufles baveux et des museaux difformes,
Des prunelles de flamme ouvertes fixement.

Horreur ! ils m’ont flairé comme une chose immonde ;
Le sang rougit ma cuisse et coule en longs ruisseaux.
Arrière ! C’est mon tour, ô bêtes ! ma faim gronde
Entre mes crocs, plus durs que ceux des lionceaux !

Va-t’en, chacal, va-t’en loin d’ici ! C’est ma proie,
Le chien mort desséché sous les soleils ardents ;
Je l’ai caché parmi les ronces, et je broie
Sa chair putréfiée où s’incrustent mes dents.

De grands oiseaux velus me frôlent de leurs ailes ;
La meute aux mille cris des carnassiers géants
Me poursuit ; et les becs aveuglant mes prunelles,
Je roule épouvanté dans des gouffres béants.

O Dieux vengeurs ! Je bois à longs traits l’eau saumâtre
Où le reptile glisse en un sillon fangeux !
Je meurs ! Mon corps pourrit sur la vase jaunâtre,
Abject et nu, parmi les joncs marécageux.

Nabou-koudour-ousour n’est plus. Sa chair, plus vile
Que les os dispersés de l’hyène et du bouc,
Ne baignera jamais dans le miel et dans l’huile
Et ne dormira pas dans les tombeaux d’Ourouk.


Et le Roi s’éveilla. Lentement dans la salle
Il promène au hasard ses yeux pesants et durs,
Comme cherchant, au fond de l’ombre colossale,
Le songe encor flottant dans les angles des murs.

Il se lève, et d’un pied brutal et fort repousse
Les deux fauves gardiens de son lit délaissé,
Qui font luire, au travers de leur crinière rousse,
La blancheur de leurs crocs sous le mufle plissé.

Aux cris du Roi, vibrant sous les arcades sourdes,
Les eunuques et les esclaves sont entrés ;
Et leurs bras éperdus relevant les peaux lourdes,
Le jour éblouissant ruisselle en flots dorés.

Les Protecteurs sont là, près des portes massives,
Les yeux toujours ouverts, sculptés selon leur rang :
Adar étouffe encore en ses mains convulsives
Le monstre exaspéré qui le griffe en mourant.

Zarpanit offre encore aux voluptés sans bornes
Sa poitrine de marbre et son ventre divin ;
Bel, assis et le front hérissé des six cornes,
Regarde le Taureau dressé qui lutte en vain.

Alors devant ses Dieux de pierre et de basalte,
Chassant l’effroi du songe au réveil emporté,
Nabou-koudour-ousour en son cœur fier exalte
La gloire de son nom et de sa majesté.


Les perles de la mer et les gemmes étranges
Brillent sur sa tiare en cercle radieux ;
Sur ses sandales d’or sa robe à larges franges,
Deux fois teinte, retombe et traîne en plis soyeux.

Miçraïm a serti l’amulette d’ivoire
Et la pierre d’azur qui pend à ses colliers.
Ses cheveux sont frisés ; sa barbe épaisse et noire
Roule sur sa poitrine en anneaux réguliers.

Et voici que, tenant le sceptre à longue hampe,
En silence il s’assied sous le haut parasol,
Sans voir, poussière vague et muette qui rampe,
Les Mages et les Chefs prosternés sur le sol.

Car là-bas, sous les cieux inaltérés et calmes,
Il regarde onduler, comme un tapis vermeil
Que moire par endroits l’ombre éparse des palmes,
Les moissons du Schinar dans l’orgueil du soleil.

Au loin, s’illuminant de longs reflets de cuivre,
Dort un marais rempli de vastes nénuphars,
Où viennent se baigner et boire et se poursuivre
Les onagres rétifs aux traits doubles des chars.

Coupant avec lenteur la plaine immense et blonde,
Au milieu des canaux, œuvres des anciens rois,
Le Perath nourricier pousse son eau féconde
Vers la Ville Royale, entre les quais étroits.


Là, sous tes pieds, Seigneur des pays, tu contemples
Comme un essaim vibrant ton peuple et ta cité,
Et l’amas éclatant des palais et des temples
Où dorment tous tes Dieux dans leur sérénité.

Ta ville énorme, ô Chef, déborde par ses rues.
Vois ; près des bords vaseux, de l’aube jusqu’au soir,
S’entassent, aux massifs épais de briques crues,
Les lits de roseaux secs sur le bitume noir.

Les radeaux arrondis qui flottent sur des outres
Abordent pesamment aux quais chargés de grains ;
Les captifs aux chantiers traînent les lourdes poutres,
Enchaînés par le col et des cordes aux reins.

Les rudes cavaliers, nombreux, de toutes races,
Au bruit des instruments, ceignent les glaives clairs,
Et sur la courte robe attachant les cuirasses,
Tourbillonnent sans fin dans un cercle d’éclairs.

Tout se confond, les bœufs épais aux cornes fières
Et les chameaux poudreux qui reviennent d’Ophir,
Et les chevaux, faisant sonner dans leurs crinières
Les plaques d’argent fin de leurs harnais de cuir.

Mais ton regard, ô Roi, comme un aigle qui plane.
Par delà l’horizon incandescent et bleu,
A vu s’épanouir sur le ciel diaphane
La rouge floraison des monuments en feu.


Sous un soleil aigu dont nulle ombre n’apaise
L’irritante chaleur et l’éclat aveuglant,
Comme un métal fondu qui sort de la fournaise,
Flambe au long des parois l’émail jaune et brûlant.

Šamaš éblouissant baigne les toits splendides,
Les cent portes d’airain et les triples remparts,
Et fait irradier en haut des Pyramides
Les simulacres d’or dans la lumière épars.

Le grand temple, séjour de Mardouk, où repose
L’antique souvenir, cher au cœur de Babel,
Érige dans l’azur ses murs de brique rose
Et son dôme de cuivre et son faîte immortel.

Gloire de Borsippa, la Tour à sept étages,
— Chacun selon son Dieu sept fois peint et doré, —
Sanctuaire éternel et Maison des Présages,
Découpe son profil sur l’horizon pourpré.

Et partout, revêtus de flamboyantes lames,
Les édifices neufs, de gradins en gradins,
Précipitent des flots de rayons et de flammes
Dans les grands réservoirs striés d’éclairs soudains.

Et Toi, d’un geste immense enfermant les murailles
Et la foule innombrable et le Fleuve et la Tour,
Tu souris gravement, te lèves et tressailles,
Tel qu’un lion s’étire en rugissant d’amour.


Comme un vin qui fermente et déborde le vase,
O Roi, ton cœur gonflé s’échappe dans tes cris ;
Et frémissant de joie et d’orgueil et d’extase,
Tu jettes ta parole aux horizons surpris :

— Babel ! Babel ! Berceau de l’Empire ! ô merveille !
Siège de mon repos et de ma royauté,
Nabou-koudour-ousour, comme un pasteur qui veille,
A protégé ton peuple et gardé ta beauté.

Aussi, quand tu verras les cités disparues
Bossuer le désert où niche le hibou,
Tu t’épanouiras sur leurs cendres accrues,
Comme un pin solitaire au jardin d’Éridou !

Moi-même dédaignant l’immuable poussière
Du Pays sans retour où dorment mes Aïeux,
Pour les siècles futurs ; sur des tables de pierre
J’inscris mon nom royal près de celui des Dieux. —

Alors, parmi la foule autour du trône antique,
Le captif Daniel leva son bras plié ;
Et le Roi vit passer, en son œil prophétique,
L’épouvante prochaine et le songe oublié.