La Vie de Jésus (Taxil)/Chapitre LIV

P. Fort (p. 277-286).

CHAPITRE LIV

DERNIÈRES PARABOLES ET DERNIÈRES MENACES

Pour être Dieu, messire Jésus n’en était pas moins homme ; nous savons qu’il avait deux natures à sa disposition.

La nuit passée à la belle étoile l’éreinta d’une jolie façon. Avec ça, il n’avait pas songé à manger durant cette journée où, triomphateur d’abord, il avait fini par s’esquiver. Les ovations peuvent griser, mais elles ne nourrissent pas : d’autre part, une venette coupe l’appétit, mais d’une manière provisoire ; la venette partie, reste la fringale, d’autant plus vive qu’elle s’est fait plus attendre.

Le lendemain donc de son triomphe si peu coûteux et en même temps si peu réussi (il en avait eu pour son argent), le Verbe sentit des tiraillements atroces d’estomac.

Il était en pleine campagne. Comment satisfaire sa faim ?

— Pierre ! Jacques ! André ! Jean ! Barthélémy ! cria-t-il. Les apôtres accoururent.

— Avez-vous apporté de Jérusalem quelques provisions de bouche ?

— Parfaitement, Seigneur.

— Fort bien, donnez-les moi,

— C’est que…

— C’est que… quoi ?

— Nous les avons mangées hier soir.

Jésus laissa échapper une exclamation de dépit.

— Au moins, peut-on s’en procurer ? ajouta-t-il.

— Par ici ?… Cela nous semble bien douteux.

— C’est bon. Je m’en vais voir sur la route si je ne trouverai pas quelque fruit sauvage.

Et le voilà qui part avec deux de ses fidèles compagnons.

Les jardins des villas appartenant aux richards de Jérusalem bordaient le chemin. Quelques arbres tendaient leurs branches au-dessus des murs des propriétés. Il est bon de savoir que, d’après la coutume juive, tout voyageur avait le droit, pour apaiser sa faim, de cueillir les fruits placés sur le bord de la route, du moment que les branches qui les portaient passaient au-delà des murs de clôture.

Le premier arbre que Jésus aperçut était un superbe figuier. Le Seigneur, affamé, se précipita vers lui. Il écarta les feuilles, chercha des figues ; va te promener ! il n’y avait pas plus de figues que sur ma main.

Le Verbe — nous avons eu l’occasion de nous en convaincre — n’avait pas précisément bon caractère.

Ne trouvant aucune figue sur un si beau figuier, il se fâcha tout rouge. Il apostropha l’arbre avec colère et le maudit dans toutes les règles de l’art. Le figuier en fut très mortifié, et sur l’heure il commença à se dessécher.

Entre nous, cette aventure démontre une fois de plus que le fils du pigeon divaguait comme un pensionnaire d’un hospice d’aliénés. D’abord, ce n’était pas la faute du figuier s’il n’avait pas de figues ; et cela était d’autant moins sa faute que ce n’était pas du tout la saison des fruits de cette espèce. On était, ne l’oublions pas, au lundi avant Pâques ; jamais, en aucun pays, les figues n’ont poussé sur les figuiers au début du printemps. Ensuite, puisque Jésus avait le pouvoir de dessécher les arbres par l’effet d’une simple malédiction, il aurait mieux fait d’user de ses facultés surnaturelles pour inviter l’infortuné et innocent figuier à se garnir instantanément de belles figues bien mûres. Jésus n’avait pas eu le temps, sans doute, de réfléchir à tout cela.

Il maudit le figuier qui n’en pouvait mais, et le figuier se flétrit. Attrape, mon vieux !

L’évangéliste Marc, qui nous raconte cette bonne histoire, mérite d’être reproduit textuellement :

« Le lendemain, dit-il, Jésus eut faim, et voyant de loin sur la route un figuier qui avait des feuilles, il y alla pour voir s’il pourrait y trouver quelque chose ; et s’en étant approché, il n’y trouva que des feuilles, car ce n’était pas le temps des figues. Alors Jésus dit au figuier : « Que jamais nul ne mange de toi aucun fruit. » (Marc, XI, 12-14.)

Le confrère Matthieu, qui relate la même aventure à peu près dans les mêmes termes, ajoute :

« Et au même moment le figuier sécha. » (Matthieu, XXI, 19.)

Jésus était dans detrop belles dispositions pour ne pas aller faire du tapage à Jérusalem. Il se rendit au Temple, et, renouvelant son esclandre d’il y a trois ans, il traita de voleurs les marchands de pigeons et d’agneaux, et bouscula les comptoirs des changeurs de monnaie.

La sainte bande des flibustiers apostoliques était à la dernière extrémité ; il fallait donc se procurer de l’argent et de la volaille par n’importe quels moyens.

Après quoi, il guérit une collection d’aveugles et de boiteux : « d’aveugles et de boiteux », dit l’Évangile ; aucun autre infirme ou malade ne fut soulagé ce jour-là. Par parenthèse, remarquons que, durant son séjour sur terre, Jésus n’a jamais redressé un seul bossu. Aurait-il eu, par hasard, les bossus en aversion ? Mystère.

Un père de l’Église, saint Eusèbe, nous affirme que dans cette journée, dite du lundi-saint, l’Oint guérit encore un lépreux, et cela par la poste. Des étrangers se présentèrent à Philippe, l’un des apôtres, et lui demandèrent à voir Jésus. Philippe les adressa à André. Jésus ne fit pas faire antichambre à ses visiteurs.

— Qu’y a-t-il pour votre service ? interrogea-t-il.

— Nous sommes envoyés par notre maître, Abgar V, roi d’Édesse, qui vous prie d’accepter un asile dans son royaume au cas où vous seriez inquiété par les autorités de votre pays. Le Verbe remercia, mais n’accepta pas cette aimable proposition. S’il avait accepté, en effet, il n’aurait pas sauvé le genre humain du péché de la pomme.

Les envoyés annoncèrent alors que leur maître était atteint de la lèpre ; cette terrible maladie s’attaquait même aux rois, mais les rois lépreux du moins n’étaient pas mis en quarantaine par leurs compatriotes.

Jésus, à qui un miracle de plus ou de moins ne coûtait rien, tranquilisa les nobles étrangers et les assura que Sa Majesté recevrait sa guérison en même temps que la réponse à son message.

L’évangéliste Jean mentionne cette visite des nobles étrangers ; seulement il les donne pour des Grecs, tandis qu’Eusèbe jure par tout ce qu’il a de plus sacré qu’ils étaient les envoyés du roi Abgar V, dont personne, du reste, n’a jamais entendu parler. Cela est de peu d’importance, au surplus.

Le même Jean reconnaît que, le soir de ce jour-là, la peur reprit le Seigneur Dieu.

— « Maintenant, disait-il, mon âme est troublée ! Et cependant que dirai-je ?… Mon père, épargnez-moi cette heure douloureuse… Mais c’est précisément pour cette heure-là que je suis venu en ce monde ! »

Traduction libre :

— Ah ! si c’était à refaire ?… Enfin, puisque ça y est, ça y est !

Le mardi, on recausa un peu, parmi les apôtres, du figuier que Jésus avait maudit.

— Tout de même, disait Pierre, ça n’a pas été long.

— Je l’ai vu ce matin, ajouta Barthélemy ; il était sec comme un clou.

— Il a un pouvoir extraordinaire, notre Jésus ! conclut un troisième.

Le Verbe se mêla à la conversation.

— Mes amis, fit-il, si vous avez la foi, vous accomplirez des prodiges aussi grands que ceux que vous m’avez vu accomplir. Le tout est d’avoir la foi. Pour peu que vous soyez sans hésitation, non seulement vous dessécherez un figuier, mais vous direz à cette montagne : « Déracine-toi pour te jeter dans la mer », et aussitôt elle s’y jettera.

Les apôtres, qui avaient admiré le miracle, furent étonnés d’entendre dire qu’ils pouvaient en faire autant. Dans leur surprise, ils regardaient la colline des Oliviers que Jésus venait de montrer, et leur esprit se perdait à la pensée de soulever un pareil bloc. Mettez-vous une minute à leur place !

Vers le milieu du jour, la bande descendit à Jérusalem. Le patron pérora quelque peu dans le Temple, s’efforçant, selon son habitude, de discréditer les pharisiens. Il les compara à des gens affectant de servir Dieu du bout des lèvres, mais en réalité n’agissant que selon leur caprice.

« Un homme avait deux fils, — telle fut sa parabole, — et venant au premier, il lui dit : Allez aujourd’hui travailler à ma vigne. Il répondit : Je ne veux pas. Mais ensuite, touché de repentir, il y alla. Venant au second, il lui parla de même. Celui-ci répondit : Papa, j’y vais. Mais il n’y alla point. »

Et, de peur que les pharisiens n’aient pas compris l’apologue qui les visait directement, Jésus ajouta :

« En vérité, je vous le dis, cela est votre histoire. Aussi les publicains et les prostituées vous précéderont dans le royaume de Dieu. »

Et, comme ces insolences lui paraissaient encore insuffisantes, il improvisa une autre parabole. Il les mit en parallèle avec des vignerons, qui, chargés de l’entretien d’une vigne, tuèrent tous les serviteurs du propriétaire et même son fils. C’est pourquoi le propriétaire de la vigne viendra et fera périr à leur tour tous les vignerons.

Enfin, il parla d’un amphitryon très grincheux. Ce monsieur se mariait. Il avait invité beaucoup de monde à sa noce. Au beau milieu du banquet, il s’aperçut qu’un des convives n’avait pas mis, comme les autres, son habit de gala. Que fait le nouveau marié ? Il appelle ses serviteurs et leur ordonne de saisir l’invité qui ne fait pas suffisamment honneur à sa noce, de lui lier pieds et poings et de le jeter dans un lieu de ténèbres où il devra pleurer et grincer des dents.

Les pharisiens, émoustilles par cette guerre à coups d’épingles, s’allièrent aux partisans d’Hérode pour se venger de Jésus. Les hérodiens vinrent donc au Temple, feignirent d’avoir entre eux une discussion et, s’approchant brusquement du grand rebouteur pour le prier de prononcer entre eux, ils lui dirent avec de profondes révérences :

Le Jugement, dernier tel qu’il fut annoncé par l’Oint (chap. LIV).
Le Jugement, dernier tel qu’il fut annoncé par l’Oint (chap. LIV).
Le Jugement, dernier tel qu’il fut annoncé par l’Oint (chap. liv).
 

— Rabbi, nous savons que vous vous connaissez en toute chose mieux que quiconque. Veuillez donc nous éclairer sur cette question : nous est-il libre de payer le tribut à César ou de ne pas le payer ?

Le piège, cette fois, était habile. Condamner le tribut, c’était se mettre à dos Ponce-Pilate, procurateur de la Judée au nom des Romains ; le déclarer légitime, c’était, en flattant les conquérants, révolter le patriotisme des Juifs.

Toutefois, Jésus vit immédiatement la malice.

— Mes petits, fit-il, il faut être plus fin que vous pour me pincer. Apportez-moi l’argent dont on se sert pour payer le tribut.

L’un des assistants présenta un denier.

— De qui est cette image et cette inscription ? demanda Jésus.

— De César, répondit tout le monde.

— Rendez donc à César ce qui est à César, et rendez à Dieu ce qui est à Dieu.

À renard, renard et demi. Le Verbe avait éludé la question ; sa réponse était on ne peut plus évasive, mais elle était en même temps une phrase à effet : aussi, fut-elle vivement applaudie par la masse ignorante, qui à toute époque s’est laissée prendre aux mots.

Après les hérodiens, vinrent les saducéens, autre secte juive. Ils lui posèrent la question suivante :

— Un de nous avait six frères. Il se maria et mourut avant sa femme. Celle-ci épousa un des frères du défunt. Ce second mari trépassa à son tour. Madame la veuve épousa le troisième frère ; puis, pour le même motif, le quatrième, et ainsi de suite, toute la famille y passa. Or donc, lorsque tout le monde ressuscitera, duquel des six frères cette femme sera-t-elle l’épouse ?

Jésus répondit :

— Quand tout le monde ressuscitera, les hommes n’auront point de femmes, les femmes n’auront point de maris ; tous seront comme les anges dans le ciel. Par conséquent, la difficulté que vous pensiez voir n’existera pas.

Un scribe vint à la rescousse :

— Maître, puisque vous êtes en train de résoudre des problèmes théologiques, permettez-moi de vous demander quel est le plus important commandement de la loi de Moïse.

— C’est, dit Jésus, le premier du Décalogue : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute la pensée et de toutes tes forces. » Mais il y a un second commandement qui est aussi important que le premier ; c’est celui-ci : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même. »

— Bravo ! fit le scribe ; vous avez très bien répondu.

Ce scribe, sans aucun doute, n’avait pas pour but, comme les pharisiens, les hérodiens et les saducéens, d’embarrasser le Verbe ; mais, à ce moment, Jésus était fatigué de toutes ces questions perfides. Il en avait par dessus la tête.

Il se tourna donc vers le peuple et fit une charge à fond sur ses ennemis. Toutes les injures qui lui vinrent à la pensée, il les appliqua aux pharisiens : il les traîna dans la boue, les mit plus bas que terre ; il les appela « mangeurs de maisons », « filtreurs d’eau », « sépulcres blanchis, pleins d’ossements et de pourritures », « avaleurs de chameaux », et « engeance de vipères » ; enfin, il déclara qu’ils étaient « responsables de tout le sang innocent versé sur terre, depuis Abel le Juste jusqu’à Zacharie, fils de Barachie. »

Accuser quelqu’un du meurtre de Zacharie était, chez les Juifs, la plus grande de toutes les injures. C’était comme si, chez nous, on appelait Dumollard un placeur de bonnes. L’assassinat de Zacharie était regardé par les Israélites comme le crime qui avait le plus irrité Jéhovah et appesanti sa main sur Jérusalem. Bien qu’il remontât à plus d’un siècle, on accusait d’y avoir pris part les gens à qui l’on voulait être désagréable.

Ce Zacharie était un sacrificateur qui avait été massacré par ses collègues entre le temple et l’autel. Or, le sang, ainsi répandu sur les dalles, ne cessait de bouillonner ; rien ne pouvait l’effacer. Quand le roi Nabuchodonosor entra dans le Temple, il trouva étrange ce bouillonnement. Il voulut apaiser le sang de Zacharie en lui offrant une vengeance : il amena en ce lieu les rabbis et les égorgea ; le sang bouillonnait toujours. Il saisit des enfants qui sortaient de l’école et les immola au même lieu ; le sang ne s’apaisa pas. Il fit venir de jeunes prêtres, les massacra ; et le sang continuait de bouillonner. Près de cent mille victimes succombèrent, sans le fléchir. Alors, Nabuchodonosor s’approchant : « Zacharie, Zacharie, dit-il, tu as détruit la fleur de ton peuple, veux-tu que je l’anéantisse entièrement ? » À ces mots, le sang cessa de bouillonner.

Telle était la légende de Zacharie ; on voit que rendre quelqu’un responsable de ce sang-là n’était pas lui adresser une mince insulte. Aussi, les pharisiens qui avaient si souvent pris des résolutions contre Jésus, résolurent-ils cette fois de les exécuter.

Pendant qu’ils conspiraient contre lui, le Verbe se promena un peu par le Temple avec ses apôtres, pour voir où en étaient les travaux. Près d’une terrasse, se trouvaient des troncs disposés pour recevoir les aumônes des fidèles. On sait que de nos jours c’est absolument la même chose dans les églises : tronc pour la chapelle de la Vierge, tronc pour les âmes du purgatoire, tronc pour l’entretien du culte, tronc pour l’œuvre des séminaires, tronc pour le denier de saint Pierre, tronc pour les petits Chinois ; l’énumération n’en finirait plus. Au Temple de Jérusalem, ces troncs étaient au nombre de treize, tous ouvrant des gueules béantes où les fidèles bien calés jetaient avec ostentation de grandes pièces d’argent. Survint une pauvre femme toute honteuse qui déposa à son tour deux minuscules pièces de cuivre de la valeur d’un quart d’as, dit l’Évangile ; or, l’as valait cinq centimes de notre monnaie.

— Vous avez vu cette pauvre femme ? demanda Jésus aux apôtres.

— Oui, maître.

— Eh bien, elle a donné plus que tous les autres riches ; eux donnent leur superflu ; à elle, — qui sait ? — ce dernier sou était peut-être nécessaire.

Il aurait pu ajouter, pour être logique jusqu’au bout, que les riches, même en ne donnant que leur superflu, étaient encore plus généreux que lui ; en effet, ni lui ni ses apôtres ne donnèrent jamais rien du tout.

Passant dans les chantiers de construction, il déclara que ce n’était pas la peine de terminer l’édification du Temple, vu qu’il n’en resterait pas pierre sur pierre un jour. À vrai dire, c’est un peu l’histoire de tous les monuments ; si solidement construits qu’ils soient, ils ne résistent pas à l’action du temps, à la ruine des siècles. Nul besoin d’être prophète pour annoncer cela !…

Enfin, lorsque la nuit fut proche, il emmena ses apôtres sur la colline des Oliviers, dont il avait fait décidément son auberge, et avant de se mettre au lit, c’est-à-dire de s’allonger sur le sol, il leur raconta une dernière histoire :

— Il y avait une fois dix vierges qui devaient accompagner à la noce une de leurs amies qui se mariait. Selon l’usage, le soir, elles se rendirent toutes dix à la demeure de la fiancée. Mais cinq d’entre elles étaient sages, et les cinq autres étaient folles. Conformément au rituel, chacune se munit d’une lampe pour passer la nuit ; seulement, les cinq vierges folles oublièrent de garnir leurs lampes d’huile. Or, il arriva que l’époux, ayant trop fait durer son dernier repas de garçon, tarda à venir ; de sorte que les dix compagnes de la mariée s’assoupirent toutes et s’endormirent. Sur le coup de minuit, un grand cri retentit dans la maison : « Voici l’époux ! allez au-devant de lui ! » Les dix vierges se levèrent comme un seul homme ; mais il y avait cinq lampes qui s’étaient éteintes, celles qui n’avaient plus d’huile. « Chères amies, dirent les cinq vierges folles aux cinq vierges sages, donnez-nous un peu de votre huile. — Plus souvent ! répondirent les cinq vierges sages ; nous risquerions d’en manquer ; allez en acheter. » Les cinq vierges folles coururent chez les marchands d’huile. Malheureusement pour elles, pendant ce temps, l’époux vint ; les cinq vierges qui étaient prêtes entrèrent avec lui et la mariée dans la salle des noces, et l’on ferma la porte, afin de rigoler sans craindre les importuns. Au bout de quelque temps, on fit toc-toc à la porte ; c’étaient les cinq vierges folles qui avaient enfin trouvé de l’huile. Le mari demanda : « Qui est-ce ? » Les vierges folles répondirent : « Nous sommes cinq amies de votre dame ; vous êtes en train de rigoler ; nous venons pour être de la partie. » Le mari répliqua : « Trop tard, mes bichettes ; je ne vous connais point », et il n’ouvrit pas.

Cette niaiserie amusa beaucoup les apôtres.

Ne voulant pas les laisser s’endormir sur des idées gaies, Jésus leur expliqua alors comment se passerait la fin du monde. On connaît cette rengaine.

Tout d’un coup les tombeaux s’ouvriront, tous les squelettes se garniront de chair, les membres dispersés se rejoindront, les individus qui euront eu pour sépulcre l’estomac des anthropophages ou le ventre des animaux féroces en sortiront ; enfin, chacun se retrouvera au complet. Tous les milliards d’individus qui auront vécu sur terre viendront s’empiler les uns sur les autres dans l’étroite vallée de Josaphat. Alors, apparaîtra

Jésus lave, à huis clos, les ripatons de ses apôtres (chap. LVI).
Jésus lave, à huis clos, les ripatons de ses apôtres (chap. LVI).
Jésus lave, à huis clos, les ripatons de ses apôtres (chap. lvi).
 
le souverain juge, perché dans un nuage lumineux. Il y aura beaucoup d’éclairs et de coups de tonnerre. Les anges, munis de trompettes, feront un vacarme des cinq cents diables. Ce sera l’annonce du jugement dernier : « Messieurs, la Cour ! chapeaux bas ! » La Cour se composera de Dieu, formant, à lui seul en trois personnes, le président et ses deux assesseurs. Les débats seront expédiés en un clin d’œil. « Que les brebis passent à droite, dira le Tribunal, et que les boucs passent à gauche. » Les brebis seront tous les individus bien vus des curés, les boucs seront les autres. Le prononcé du jugement sera également très court : « Brebies bénies, fera le président, vous êtes admises pour l’éternité à tous les joies célestes ; boucs maudits, vous êtes condamnés à rôtir pour la même durée de temps, et vous ne fondrez jamais dans votre jus. Quant aux diables qui vous rôtiront, ils seront eux-mêmes rôtis. »

On peut, pour tout ce qui précède, se reporter à l’Évangile. — Entrée de Jésus à Jérusalem : Matthieu, XXI, 1-11 ; Marc, XI, 1-11 ; Luc, XIX, 29-44 ; XXI, 37-38 ; Jean, XI, 55-56 ; XII, 12-19. — Le figuier maudit : Matthieu, XXI, 18-22 ; Marc, XI, 12-14, 20-26. — L’esclandre au Temple : Matthieu, XXI, 12-17 ; Marc, XI, 15-19 ; Luc, XIX, 45-48. — La visite des Grecs à Jésus : Jean, XII, 20-50. — Parabole des deux fils : Matthieu, XXI, 28-32. — Parabole des vignerons meurtriers : Matthieu, XXI, 33-46 ; Marc. XII, 1-12 ; Luc, XX, 9-19. — Le denier de César : Matthieu, XXII, 15-22 ; Marc, XII, 13-17 ; Luc, XX, 20-26 — La question des saducéens : Matthieu : XXII, 23-33 ; Marc, XII, 18-27 ; Luc, XX, 27-39. — La question du scribe : Matthieu, XXII, 34-40 ; Marc, XII, 28-34 ; Luc, XX, 27-39. — Malédiction des pharisiens : Mathieu, XXIII, 1-36 ; Marc, XII, 38-40 : Luc, XX, 45-47. — Le denier de la veuve : Marc, XII, 41-44 ; Luc, XXI 1-4. — La destruction du Temple ; Matthieu, XXIV, 1-2 ; Marc, XIII, 1-2 ; Luc, XXI, 5-6. — Parabole des vierges folles et des vierges sages : Matthieu, XXV, 1-13. — Le jugement dernier : Matthieu, XXV, 31-46.