La Vérité sur l’Algérie/05/09


CHAPITRE IX

Les affaires immédiatement réalisables, de bénéfice assuré, sont celles que permettent la conquête et l’occupation… et qui exigent cela.


La direction de la politique de notre pays appartient à des hommes pauvres et qui, lorsqu’ils veulent de l’argent, en ont besoin tout de suite.

Ces hommes pauvres sont élus par une majorité d’hommes également pauvres et qui ont, eux aussi, toujours besoin d’argent, tout de suite.

Dans les affaires coloniales, celles qui permettent le bénéfice immédiat sont basées sur les opérations de conquête et d’occupation.

Cela explique l’apparent illogisme de notre politique coloniale. Des écrivains à l’âme pure gémissent parfois en constatant que nous prenons, que nous occupons, avant de savoir si ce que nous prenons et occupons en vaut la peine. C’est ainsi que plusieurs ont demandé par quelle folie nous intervertissons l’ordre logique de la colonisation pratique dans notre action vers le Sud.

Voyez quelle protection financière, quelle clientèle électorale vit de la moindre opération militaire de reconnaissance, de conquête et d’occupation.

Et comme vous êtes intelligent, je n’insiste pas, vous avez compris.

Naturellement pour faire passer reconnaissances, colonnes, expéditions, occupations, on ne dit pas au peuple : « Il est nécessaire qu’un tel ait telle fourniture pour vivre ; il faut qu’un autre qui ne sait vraiment plus quoi faire trouve un endroit neuf pour y monter un café ; celui-ci, qui a fait avec les indigènes des contrats de louage de chameaux, a besoin de les repasser à l’État ; celui-là ne sait à qui vendre du fourrage, de la farine, etc…, etc… » Depuis le gros marchand de conserves de Paris jusqu’au débitant dont le capital se compose d’une bonbonne d’absinthe, il y a comme cela des gens qui, directement ou indirectement, électeurs ou élus, disposent de la direction politique du peuple et, pour vivre, ont besoin que cette direction impose une action militaire de guerre ou d’occupation.

Mais cette raison-là, personne ne la dit au peuple, car le peuple la trouverait mauvaise et peut-être se fâcherait.

On lui dit donc autre chose, à ce bon peuple.