La Satyre Ménippée/Harangue de Monsieur de Lion


Satyre Menippee
Garnier frères (p. 104-121).

HARANGUE DE MONSIEUR DE LION[1] Messieurs, je commenceray mon propos par l’exclamation pathetique de ce Prophete royal David : Quam terribilia judicia tua, etc. « 0 Dieu ! que vos jugements sont terribles et admirables ! » Ceux qui prendront garde de bien prés aux commencements et progrez de notre saincte Union auront bien occasion de crier les mains joinctes au ciel : 0 Dieu ! si vos jugements sont incomprehensibles, combien vos graces sont-elles plus admirables ! et de dire avec l’Apostre : Ubi abundavit delictum, ïbi superabundavit et gratia.

N’est-ce point chose bien estrange, Messieurs les Zelateurs, de veoir nostre Union, maintenant si saincte, si zelée et si devote, avoir esté, presque en toutes ses parties, composée de gens qui, auparavant les sainctes Barricades, étoient tous tarez et entachez de quelque note mal solfiée[2] et mal accordante avec la justice, et, par une miraculeuse metamorphose, veoir tout à un coup l’atheisme converty en ardeur de devotion ; l’ignorance, en science de toutes nouveautez et curiosité de nouvelles ; la concussion, en pieté et en jeusne ; la volerie, en generosité et vaillance ; bref, le vice et le crime transmués en gloire et en honneur ? Cela sont des coups du Ciel, comme dit Monsieur le Lieutenant, de pardieu ! Je dy si beaux que les François doivent ouvrir les yeux de leur entendement pour profondement considerer ces miracles, et doivent là dessus les. gens de bien, et de biens de ce Royaume, rougir de honte avec presque toute la Noblesse, la plus saine partie des Prelats et du Magistrat, voire les plus clairvoyants, qui font semblant d’avoir en horreur ce sainct et miraculeux changement[3]. Car qui a-il au monde de plus admirable, et que peut Dieu mesme faire de plus estrange, que de veoir tout en un moment les valets devenus maistres ; les petits estre faicts grands ; les pauvres, riches ; les humbles, insolents et orgueilleux ; veoir ceux qui obeissoient commander ; ceux qui empruntoient, prester à usure ; ceux qui jugeoient, estre jugez ; ceux qui emprisonnoient, estre emprisonnez ; ceux qui estoient debout, estre assis ? 0 cas merveilleux ! ô mysteres grands ! ô secrets du profond cabinet de Dieu, inconnus aux chetifs mortels ! Les aunes des boutiques sont tournées en pertuisanes : les escritoires, en mosquets ; les breviaires, en rondaches ; les scapulaires, en corselets ; et les capuchons, en casques et salades ! N’est-ce pas une autre grande et admirable conversion de la plus-part de vous autres, Messieurs les Zelez ? entre lesquels je nommeray par honneur les sieurs de Rosne, de Mandreville, la Mothe Serrand, le chevalier Breton [4], et cinquante autres des plus signalez de nostre party qui me feroient faire une hyperbate et parenthese trop longue : que ceux que je ne nomme point m’en sachent gré. N’est-ce pas, dis-je, grand cas que vous estiez n’agueres en Flandres, portants les armes politiquement et employants vos personnes et biens contre les archicatholiques Espagnols en faveur des Heretiques des Pays Bas, et que vous vous soyez si catholiquement rangez tout à un coup au giron de la saincte Ligue ? et que tant de bons matois, banqueroutiers, saffraniers[5], desesperez, hauts-gourdiers[6], et forgueurs[7], tous gens de sac et de corde, se soyent jettez si courageusement, et des premiers, en ce sainct party pour faire leurs affaires, et soyent devenuz Catholiques à double rebras [8], bien loin devant les autres ? 0 vrais patrons de l’enfant prodigue dont parle l’Evangile ! 0 devots enfants de la messe de minuict ! 0 sainct Catholicon d’Espagne, qui es cause que le prix des messes est redoublé, les chandelles benistes rencheries, les offrandes augmentées, et les saluts multipliez ; qui es cause qu’il n’y a plus de perfides, de voleurs, d’incendiaires, de faulsaires, de coupe-gorges et brigands, puis que, par ceste saincte conversion, ils ont changé de nom, et ont pris cet honorable tiltre de Catholiques Zelez et de Gendarmes de l’Eglise militante ! 0 deifiques doublons d’Espagne, qui avez eu ceste efficace de nous faire tous rajeunir et renouveler en une meilleure vie ! C’est ce que dit nostre bon Dieu en parlant à son Pere, en sainct Matthieu, chap. XI : Abscondisti a prudentibus et sapientibus, et revelasti ea parvulis.

Certes, Messieurs, il me semble revoir ce bon temps auquel les Chrestiens, pour expier leurs crimes, se croysoient et alloient faire la guerre oultre mer comme pelerins, contre les mescreants et infideles. 0 saincts pelerins de Lansac[9], et ton bon frere bastard, Evesque de Comminges[10], qui avez fait enroler à la foule en vos quartiers tant d’honnestes gens qui, ressemblants aux menestriers, n’avoient rien tant en haine que leur maison[11] ! Je ne veux icy comprendre maints gentils-hommes et autres qui sont du bois dont on les faict, quoy que soit qui en ont la mine, et se monstrent vaillants coqueplumets[12] sur le pavé de Paris ; lesquels, ayant esté pages à pied, ou servy les princes. Catholiques et leurs adherants, se sont obligez, de gayeté de cœur, à suivre leur party : voire se fussent-ils rendus Turcs, comme ils disent, aymants mieux estre traistres à leur Roy et à leur patrie que manquer de parole à un maistre qui luy-mesme est valet et subjet •du Roy. A la verité, nous sommes grandement obligez à ces gens-là, aussi bien qu’à ceux qui, ayants receu quelque escorne3 ou dommage du tyran ou des siens, se sont, par indignation et esprit de vengeance, tournez vers nous, et ont preferé leur injure particuliere à tout autre devoir3. Et devons aussi beaucoup remercier ceux qui, ayants commis quelque assassinat ou insigne lascheté et volerie au party de l’ennemy, se sont catholiquement jettez entre nos bras pour eviter la punition de Justice, et trouver parmy nous toute franchise et impunité ; car ceux-là plus que nuls" autres sont obligez à

[13]5. C’est le cas de M. de Villeroy qui, ayant reçu, en 1587, une injure du duc d’Epernon pour laquelle le roi refusa de lui faire justice, entra dans la Ligue par ressentiment. tenir bon jusques à la mort pour la saincte Union. C’est pourquoy il ne se faut point defier du baron d’Alegre[14], ni de Hacqueville, gardien du Ponteau-de-Mer, ni du concierge de Vienne[15], et autres, qui ont faict de si beaux coups pour gaigner Paradis avec dispense de leur serment ; ny pareillement de ceux qui ont courageusement mis la main au sang et à l’emprisonnement des Magistrats Politiques[16]. En quoy Monsieur le Lieutenant a eu beaucoup de dexterité pour les engager, et leur faire faire des choses irremissibles, et qui ne meritent d’avoir jamais pardon non plus que ce qu’il a faict. Mais gardons-nous de ces nobles qui disent qu’ils sont bons François, et qui refusent de prendre pensions et doublons d’Espagne, et font conscience de faire la guerre aux marchands et laboureurs. Ces gens sont dangereux et nous pourroient faire un faux bond, car ils se vantent que si le Biarnois alloit à la messe, jamais leurs espées ne couperoient contre luy ny les siens. Qu’il vous souvienne des entrevues et parlements qu’aucuns font si souvent vers Sainct Denis, et des passe ports qu’on reçoit et qu’on envoye si facilement de part et d’autre[17]. Ces gens là, Messieurs, n’oient la messe que d’un genou, et ne prennent de l’eau beniste, en entrant en l’Eglise, qu’en leur corps deffendant. Ha ! pleust à Dieu qu’ils ressemblassent tous à ce sainct pelerin, confesseur, et martyr catholique zelé, Monsieur de La Mothe Serrand, lequel, estant és prisons de Tours pour rendre tesmoignage de sa foy, refusa de disner et prendre sa refection de potage un jour de samedy aprés Noël[18], craignant qu’on eust mis de la graisse en sa soupe ! Et protesta ce champion de la foy, ce Machabée, ce devotieux martyr, de souffrir plustost la mort que de manger soupe autre que catholique.

0 illustres assistants, choisis et triez au volet pour la dignité de ceste notable Assemblée, la pure cresme de nos Provinces, la mere goutte3 de nos


3 ; En Champagne on appelle mère-goutte le plus pur jus du Gouvernements, qui estes venuz icy avec tant de travaux, les uns à pied, les autres seuls, les autres de nuict, et la pluspart à vos depens ! N’admirez-vous poinct les faits heroïques de nos Louchards, Bussys, Senaud, Oudineaux, Moulieres, Crucé, Goudard, et Drouart[19], qui sont si bien parvenuz par la plume ? Que vous semble de tant de Caboches[20] qui se sont trouvez, et que Dieu a suscitez à Paris, Rouen, Lion, Orleans, Troyes, Toulouze, Amiens, où vous voyez les bouchers, les tailleurs, les chiquaneurs, basteliers, cousteliers, et autres especes de gens de la lie du peuple, avoir la premiere voix au Conseil et Assemblées d’Estat, et donner la loy à ceux qui auparavant estoient grands de race, de biens et de qualité, qui n’oseroient maintenant toussir ni grommeler devant eux ? N’est-ce pas en cela que la Prophetie est accomplie, qui dit : « De stercore erigens pauperem ? » Seroit-ce pas crime de passer soubs raisin qui coule naturellement de la cuve après qu’on y a déposé la vendange. silence ce sainct martyr, frere Jacques Clement ? qui, ayant esté le plus desbauché de son couvent (comme sçavent tous les Jacobins de ceste ville), et mesme ayant eu plusieurs fois le chapitre et le fouet diffamatoire pour ses larcins et meschancetez, est neantmoins aujourd’huy sanctifié, et maintenant est là-haut à debattre la preseance avec sainct Iago de Compostelle. 0 bienheureux confesseur et martyr de Dieu ! que je seroy volontiers le paranymphe et encomiaste[21] de tes louanges, si mon eloquence pouvoit atteindre à tes merites ! Mais j’ayme mieux m’en taire que d’en dire trop peu ; et, continuant mon discours, parleray de l’estrange conversion de ma personne propre.

Encore que Caton die : Nec te laudaris, nec te culpaveris ipse, si vous confesseray-je librement qu’auparavant ceste saincte entreprise d’Union, je n’estoy pas grand mangeur de crucifix, et quelques-uns de mes plus proches et qui m’ont hanté plus familierement, ont eu opinion que je sentoy un peu le fagot[22] à cause qu’estant jeune escholier j’avoy pris plaisir à lire les livres de Calvin, et, estant à Toloze, m’estoy meslé de dogmatizer la nuict avec les nouveaux Lutheriens[23]. Et depuis n’ay jamais faict grande conscience ni difficulté de manger de la chair en Karesme, ny de coucher avec ma sœur[24], suyvant les exemples des saincts Patriarches de la Bible. Mais, depuis que j’eu signé la saincte Ligue et la loy fondamentale de cest Estat, accompagnée des doublons et de l’esperance du chapeau rouge, personne n’a plus douté de ma creance et ne s’est enquis plus avant de ma conscience et de mes comportements.

Veritablement je confesse que je doy ceste grace de ma conversion, aprés Dieu à Monsieur le duc d’Espernon, qui, pour m’avoir reproché au Conseil ce dont on ne doutoit point à Lyon touchant ma belle-sœur[25] fut cause que, de grand Politique et un peu Calviniste que j’estoy, je devins grand et conjuré Ligueur, comme je suis à present directeur et ordinateur des affaires secrets et importants de l’estat de la saincte Union, ne plus ne moins que le benoist sainct Paul, qui, de persecuteur de chrestiens, fut faict vaisseau d’election. C’est pourquoy il dit : U bi abundavit delictum, ibi abundavit et gratia. Ne doutez donc plus de demeurer fermes et constants en ce sainct party, plein de tant de miracles et de coups du Ciel, desquels il faut que fassiez une loy fondamentale. Quant aux necessitez et oppressions du Clergé, vous y adviserez, s’il vous plaist ; car, pour mon regard, je mettray peine que ma marmite ne soit renversée, et auray toujours credit avec Roland[26] et Ribault, qui ne manqueront de me payer mes pensions, de quelque part que l’argent vienne : chacun advisera à se pourveoir, si bon luy semble. Et de ma part, je ne desire point la paix que premierement je ne sois Cardinal, comme on m’a promis[27] et comme je l’ay bien merité ; car sans moy manda au roi de lui faire faire réparation, et n’ayant pu l’obtenir, il se déclara pour le parti des Guise et de la Ligue. Monsieur le Lieutenant ne seroit pas au degré où il est, à cause que ce fut moy qui retins le feu Duc de Guise, son frere, qui s’en vouloit aller des Estats de Blois, se deffiant de quelque sourde embusche du tyran. Mais je le fey revenir pour attendre la depesche de Rome, qu’on me devoit apporter dedans trois jours, et ce fut pourquoy Madame sa mere, cy présente, m’a reproché maintesfois que j’estoy cause de sa mort : dont Monsieur le Lieutenant et tous les siens me doivent savoir bon gré, parce que, sur ce pretexte et pour venger ceste belle mort, nous avons excité les peuples et pris occasion de faire un autre Roy.

Courage donc ! courage, mes amis ! Ne craignez point d’exposer vos vies et ce qui vous reste de biens pour Monsieur le Lieutenant et pour ceux de sa Maison. Ce sont bons Princes et bons Catholiques, et qui vous ayment tout plein. Ne parlez point icy de luy abroger sa puissance, qu’aucuns murmurent ne luy avoir esté donnée que jusques à une prochaine tenue des Estats [28]. Ce sont des contes de la cigongne ! Ceux qui ont gousté ce morceau ne demordent ja mais. Demanderiez-vous un plus beau Roy, et plus gros, et plus gras qu’il est ? C’est, par sainct Jacques ! une belle piece de chair, et n’en sçauriez trouver un qui le peze !

Messieurs de la Noblesse, qui tenez les villes et chasteaux au nom de la saincte Union, estes-vous pas bien aises de lever toutes les tailles, decimes, aydes, magazins, fortifications, guet, corvées, imposts et daces[29] de toutes denrées, tant par eau que par terre, et prendre vos droicts sur toutes prises et rançons, sans estre tenuz d’en rendre compte à personne ? Soubs quel Roy trouveriez-vous jamais meilleure condition ? Vous estes Barons, vous estes Comtes et Ducs en proprieté de toutes les places et provinces que vous tenez. Vous y commandez absolument et en rois de carte. Que vous faut-il mieux ? Laissez et oubliez ces noms precieux de Monarchie Françoise, et ne vous souvienne plus de nos ancestres ni de ceux qui les ont enrichis et anoblis. Bref, Qui bien sta, non si move[30].

— Quant à vous Messieurs les Ecclesiastiques, à la verité, j’y perds mon latin, et veoy bien que, si la guerre dure, il y aura moult de pauvres prestres. Mais aussi n’esperez-vous pas vostre recompense en en ce monde caduc, ains au Ciel, où la couronne de gloire eternelle attend ceux qui patiront et mourront pour la saincte Ligue. Se sauve qui pourra ! quant à moy, je suis capable de porter un bonnet rouge ; mais de remedier et obvier aux necessitez et oppressions du Clergé, il n’est pas en ma puissance, et mes gouttes ne me donnent pas loisir d’y penser. Toutesfois je crains une chose : c’est que, si le Roy de Navarre revoque les passeports et les main-levées qu’il a données aux monasteres et chapitres, il y aura danger que vous ne criez tous au meurtre aprés le Sainct Pere, et Monsieur le Legat, et le reverendissime cardinal, cy presents, qui pourroient bien laisser les bottes en France, s’ils ne se sauvent de bonne heure delà les monts. Je laisse à messieurs les Predicateurs de tenir tousjours en haleine leurs devots paroissiens, et reprimer l’insolence de ces demandeurs de pain ou de paix [31]. Ils sçavent les passages de l’Escriture pour accommoder à leurs propos, et les tourner, virer, aux occasions, comme ils en auront besoin. Car jamais ne fut dit pour neant que l’Evangile est un cousteau de tripiere, qui coupe des deux costez : Juxta illud, et de ore ejus gladius utraque parte acutus exibat. Et, comme dit l’apostre sainct Paul : Vivus est sermo Dei, et efficax, et penetrabilior omni gladio ancipiti.

Or, ce qui importe pour le present le plus à nos affaires, c’est de bastir une loy fondamentale par laquelle les peuples François seront tenuz de se laisser coiffer, embeguiner, enchevestrer, et menera l’appetit de Messieurs les Cathedrants[32] ; voire se laisseront escorcher jusques aux os, et curer leurs bourses jusques au fond, sans dire mot ny s’enquerir pourquoy. Car vous sçavez, Messieurs, que nous avons affaire de nos pensions. Mais surtout faictes souvent renouveler les serments de l’Union sur le precieux Corps de Nostre Seigneur, et continuez les confrairies du Nom de Jesus et du Cordon, car ce sont de bons colliers pour menues gens. De quoy nous chargeons l’honneur et conscience de nos bons peres les Jesuites, et leur recommandons aussi nos espions, afin qu’ils continuent de faire tenir seurement de nos nouvelles en Espagne, et reçoivent aussi les mandats secrets de sa Majesté Catholique pour les faire tenir aux ambassadeurs, agents, curez, couvents, marguilliers et maistres des confrairies ; et qu’en leurs particulieres confessions ils n’oublient pas de deffendre, sur peine de damnation éternelle, de desirer la paix, et encore plus d’en parler ; ains faire opiniastrer les devots chrestiens au sac, au sang et au feu, plustost que de se soubsmettre au Biarnois, quand bien il iroit à la messe comme il a donné charge à ses ambassadeurs d’en asseurer le Pape. Mais nous sçavons bien la contrepoison, si cela advient, et donnerons bien ordre que sa Saincteté n’en croira rien, et, le croyant, n’en fera rien, et, le faisant, que nous n’en recevrons rien, si je ne suis Cardinal. Pourquoy ne le seray-je pas, si maistre Pierre de Frontac, estant simple advocat à Paris, du temps du Roy Jean, le fut bien pour avoir diligemment deffendu les causes de l’Eglise[33] ? Et moy, qui ay quitté mon maistre et trahy mon pays pour soubstenir la grandeur du Sainct-Siege Apostolique, je ne le seroy pas ! Si seray ! si je vous en asseure, ou mes amis me faudront. J’ay dit. Aprés que ledit sieur Archevesque eut fini son epiphoneme[34] en grande emotion de corps et de voix, il demanda permission tout bas à Madame de Montpensier de se retirer pour changer de chemise, parce qu’il s’étoit eschauffé en son harnois. Le bedeau de Monsieur le Recteur, qui estoit à ses pieds, luy fit fendre la presse. Puis, s’estant escoulé par dessus les bancs des deputez, mondit sieur le Recteur Roze, revestu de son habit rectoral, souz son roquet et camail d’Evesque portatif[35], ostant son bonnet par plusieurs fois, commença ainsi.

  1. On attribue cette harangue à Nicolas Rapin, Grand Prévôt de la Connétablie de France.
  2. C’est-à-dire que tous avaient quelque peccadille sur la conscience.
  3. D’après de Thou, les plus empressés à embrasser le parti de la Ligue étaient les gens perdus, tandis que les gens d’honneur ou recommandables par leur position lui étaient hostiles.
  4. En 1581 ils allèrent en Flandre avec le duc d’Anjou pour soutenir les protestants. D’après Brantôme, le chevalier Breton était un Piémontais réfugié en France à la suite d’un meurtre commis dans son pays.
  5. Insolvables, parce que l’on peignait en jaune ou couleur safran la maison des banqueroutiers.
  6. ndards.
  7. bricants de fausse monnaie.
  8. ié en double comme un manteau dont on ramène les pans l’un sur l’autre ; par extension renforcé.
  9. nsac, qui amenait, des troupes lovées par lui pour le service de la Ligue, fut battu dans le Maine eu 1590.
  10. bain de Saint-Gelais, fils naturel de Louis de Saint-Gelais, seigneur de Lansac, dut à la protection de Catherine de Médicis l’évèché de Comminges. Les Lansac n’ayant pu obtenir un office auquel ils se croyaient des droits, se jetèrent dans le parti de la Ligue.
  11. ancien proverbe disait : Il est comme les menestriers, il ne trouve point de pire maison que la sienne. Les ménétriers qui allaient aux noces et aux festins se trouvaient mieux, en effet, chez les autres que chez eux.
  12. tteurs de pavé.
  13. elque honte, quelque injure.
  14. 1592 le marquis d’Alègre tua d’un coup de poignard Montmorency-llalot, qu’il avait attiré sous prétexte de se réconcilier avec lui.
  15. Hacqueville et Maugiron livrèrent ces deux villes dont ils étaient gouverneurs.
  16. lusion au meurtre du président Brisson ;
  17. Les Espagnols avaient inutilement tenté de faire nommer Rois de France le jeune duc de Guise et leur Infante. Le duc de Mayenne craignant que la couronne ne passât définitivement à ce jeune prince, son neveu, ouvrit des négociations pour obtenir une trêve du roi, ce qui occasionna de nombreuses entrevues à la Villette, à la Chapelle, à Aubervilliers, et même sur la route de Paris à Saint-Denis.
  18. L’usage de la viande était permis le samedi depuis Noël jusqu’à la Chandeleur.
  19. Membres du Conseil des Seize. Les royalistes politiques leur avaient donné des surnoms : Louchard était le rodomon tadier, Bussi le fendant, Senault le finet-mâdré, Oudineau le pipeur, La Morlière le bizarre, Crucé le résolu, et Drouart le doucet.
  20. Séditieux, appelés ainsi du nom de l’écorcheur Caboche, chef des bouchers révoltés contre Charles VI, en 1412.
  21. m que l’on donnait à l’orateur chargé, à la Sorbonne, de prononcer l’éloge des licenciés en Théologie.
  22. rce que l’on brûlait les hérétiques.
  23. On appelait nouveaux-luthériens les protestants français, par opposition aux anciens ou protestants d’Allemagne. Pierre d’Éspinac assista à leurs assemblées pendant l’année 1563 ; mais il se retira de leur parti dès qu’il vit qu’il y avait plus de danger que de profit et devint même leur persécuteur.
  24. Ce crime lui est reproché dans plusieurs pamphlets du temps. Dans la Confession des chefs de l’Union, entre autres, on lui fait dire :
    Je suis né à l’inceste, et dès mon premier âge,
    J’ay de ma belle-sœur abusé longuement :
    Puis avecque ma sœur je couche maintenant.
    Ayant pour cet effet rompu son mariage.
  25. En 1588 le duc d’Épernon rappela publiquement, et en présence de Henri III, les bruits qui couraient sur la conduite et les mœurs scandaleuses de l’archevêque de Lyon. Celui-ci de-
  26. land, député aux États-Généraux, fut depuis nommé Grand-Audiencier de la Chancellerie.
  27. chapeau de Cardinal lui avait été promis par le roi Henri III après la journée des Barricades, puis plus tard par tes chefs de la Ligue.
  28. Le duc de Mayenne reçut le titre de Lieutenant général de l’Etat et Couronne de France en vertu d’une délibération du Conseil général de l’Union, en date du 4 mars 1589, confirmée par arrêt de la Cour du 7 mai, qui limitait son mandat à la réunion des Etats-Généraux.
  29. Impôt sur les denrées.
  30. Qui s’y trouve bien, y reste. Nous avons conservé l’orthographe moitié française, moitié italienne de cette sentence, telle que la donne l’édition princeps.
  31. A la fin du second siège de Paris, en 1590, des bourgeois se rassemblèrent en armes, demandant à grands cris du pain ou la paix ! Cette espèce de petite sédition fut durement réprimée par les chefs de la Ligue.
  32. Nom des théologiens et philosophes enseignant en chaire, et aussi de celui qui préside à une thèse.
  33. Pierre de Féligny, avocat au Parlement et chanoine de l’Eglise de Paris, ayant soutenu le parti de l’anti-pape Clément VII, fut, en récompense, créé par lui cardinal en 1383 ou 1385.
  34. gure do rhétorique. Réflexion en forme d’exclamation, par laquelle on termine un discours ou un récit.
  35. donnait le nom à’évêque portatif à un évêque in partibus infidelium, ou à un évêque confidenciaire, c’est-à-dire n’ayant que le titre de son évêché dont un autre touchait les revenus. Ce dernier cas était à peu près celui de Guillaume Rose, évêque de Senlis, dont la ville épiscopale se trouvait au pouvoir des royalistes.