LE BANYAN


Ô Banyan ! qui t’élèves comme un géant à la tête ébouriffée sur le bord de l’étang, as-tu oublié le petit enfant comme tu as oublié les oiseaux qui nichaient dans tes branches et qui t’ont quitté ?

Ne te souviens-tu pas de lui, lorsqu’assis à la fenêtre, il contemplait tes racines plongeant dans le sol et que leur enchevêtrement le faisait rêver ?

Les femmes viennent remplir leurs cruches à l’étang et ton ombre énorme et noire se tord à la surface de l’eau comme le sommeil qui se débat au moment du réveil.

Les rayons du soleil dansent sur l’eau ridée, comme des navettes menues qui tisseraient sans cesse une tapisserie d’or.

Près des bords herbeux, deux canards nagent, et l’enfant assis, pensif et immobile regarde leurs ombres dans l’eau.

Que ne donnerait-il pour être le vent et souffler à travers tes rameaux murmurants, pour être ton ombre et s’allonger sur l’eau avec le jour qui décroît, pour être un oiseau et percher sur ta plus haute branche, pour flotter comme ces canards, parmi les herbes et les ombres !