La France littéraire, ou Dictionnaire bibliographique/Aux souscripteurs de la France littéraire


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AUX SOUSCRIPTEURS
a la
FRANCE LITTERAIRE,
PAR M. QUÉRARD,
sur le supplément a ce livre.


En mettant sous presse le sixième volume de la France littéraire, qui paraîtra en décembre prochain, il devient important d’indiquer aux souscripteurs à cet ouvrage, qui ne l’auraient pas encore remarquée, une disposition nouvelle dans la période qu’il embrasse ; disposition suivie déjà pour les trois derniers volumes publiés. L’auteur s’est aperçu qu’en s’en tenant trop strictement au point d’arrêt (fin de 1827) qu’il avait fixé, son livre, qui, par sa nature, ne peut être imprimé que lentement, serait bien incomplet avant qu’il ne fût terminé. Pour obvier, autant que faire se peut, à cet inconvénient, il a cessé de limiter le point d’arrêt, et cela dès le troisième volume : les notices des lettres E—G qu’il contient ont été complétées jusqu’en 1830, année où le volume s’imprimait ; il en a été fait de même pour les volumes qui ont suivi ; et c’est ainsi que la dernière livraison du tome Ve et le VIe volume, en entier, comprennent même les auteurs qui n’ont débuté dans les lettres qu’en 1834. Cette détermination, prise dans la vue d’être plus agréable aux souscripteurs, rendra plus difficile le travail du Supplément que l’auteur a promis, mais elle contribuera d’autant plus à diminuer son étendue.

Le Supplément à la France littéraire, que l’auteur prépare depuis l’impression de la première feuille de son livre, ne se composera point, ainsi que quelques personnes pourraient le penser, de la seule récapitulation, toujours par noms d’auteurs, des livres publiés en France, postérieurement à l’impression des notices du premier travail ; ce ne serait ajouter aucun mérite au livre, et l’intention de l’auteur est d’introduire dans son Supplément toutes les améliorations capables de faire de l’ensemble une autorité qui, dans tous les temps, pourra être consultée avec confiance. Aussi, le Supplément de M. Quérard rectifiera-t-il un nombre d’erreurs et d’omissions qui, malgré le soin et la conscience apportés dans sa rédaction, étaient inévitables dans un travail aussi étendu ; il complétera, pour l’époque de son point d’arrêt, jusqu’à l’année où le livre sera terminé (fin de 1835), la nomenclature des écrivains récents de la France et de l’étranger.

Ce Supplément sera le résumé des observations critiques soumises à l’auteur de la France littéraire par toutes les personnes qui s’occupent de bibliographie d’une manière distinguée, et de celles qui lui sont propres ; d’additions et de corrections importantes qui lui ont été fournies par trois de nos savants les plus versés dans l’histoire littéraire, et d’un très-grand nombre de renseignements autographes obtenus par les soins de l’auteur, et qui, non compris la quantité de ceux déjà employés dans les cinq premiers volumes, ne s’élèvent aujourd’hui à rien moins qu’à près de deux mille inédits.

Faire usage de tous ces documents avant que l’impression de la France littéraire ne soit achevée, avant que la table des anonymes, clef indispensable de ce livre, promise par l’auteur, n’ait été publiée, ce serait se mettre dans la nécessité de multiplier les suppléments, toujours fort incommodes ; ce que, dès l’origine, l’auteur a voulu éviter, en annonçant, dans son Avertissement, qu’il ne donnerait qu’un Supplément unique. Le travail sur les ouvrages anonymes doit, d’ailleurs, conduire à la découverte d’un assez grand nombre de noms d’écrivains inconnus jusqu’à ce jour dans la république des lettres, et qui doivent être compris dans ce Supplément.

Cette explication sur la composition du Supplément à la France littéraire, par l’auteur lui-même, est devenue nécessaire, afin de prémunir les souscripteurs contre un livre qui doit lui en tenir lieu, que, dit-on, l’on prépare, et auquel M. Quérard est entièrement étranger. Le prétendu continuateur, soit qu’il ait jugé superflu de réparer les erreurs et omissions du livre qu’il veut compléter, soit que ce travail se soit trouvé au-dessus de ses forces, s’est borné à dépouiller et à mettre en une seule série alphabétique les tables du Journal de la Librairie, pour les années 1828 à 1834, sans même s’inquiéter si ces notices ne feraient pas de doubles emplois avec celles déjà imprimées : et ce qui a été dit plus haut prouve qu’ils seront en très-grand nombre. Nous ne voulons rien préjuger de l’exécution de ce prétendu Supplément, mais nous craignons pourtant que, tout en ne comblant pas déjà les lacunes qui existent dans le livre qu’il doit continuer, première condition que devait pourtant remplir cet ouvrage, il ne rappelle que trop les Suppléments donnés par les abbés de la Porte et Guiot à la France littéraire de 1769. Le même goût se trouve rarement porté chez plusieurs personnes au même degré ; cette courageuse et longue persévérance qui tient lieu de charme jusque dans un travail rebutant ; et, ce qui est encore plus rare par le temps qui court, cette abnégation totale de ses intérêts, sont des qualités difficiles à trouver réunies : elles sont indispensables pour réussir en bibliographie.

Aucun motif d’intérêt n’a dicté les précédentes réflexions ; car on serait grandement dans l’erreur, en considérant la France littéraire comme une spéculation mercantile : c’est un monument en l’honneur de la France, élevé par l’auteur, de concert avec ses éditeurs ; son édification n’emporte avec elle aucune idée de lucre. L’auteur y a consacré les vingt années les plus profitables de la vie d’un homme, et son avenir tout entier : le désintéressement de MM. Didot a fait le reste. Les uns et les autres tiennent à honneur de remplir dignement le but qu’ils se sont proposé. C’est assez dire que ce livre ne peut avoir rien de commun avec tout extrait ou supplément qu’on en pourrait publier, parce que, dans ce cas, nul doute que la soif de l’argent ne soit plutôt le motif de ces publications que l’intérêt exclusif de la science.


Paris, ce 1er  août 1834.




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