La Femme et la loi/Droit pénal

Larousse (p. 42-45).


DROIT PÉNAL


D’une manière générale, les hommes et les femmes ayant commis des crimes, des délits ou des contraventions, sont passibles des mêmes peines. Nous n’examinerons donc dans ce chapitre que les cas qui intéressent plus particulièrement les femmes.

Infanticide. — La mère qui a tué son enfant nouveau-né est punie des travaux forcés à perpétuité. Les coauteurs ou complices de la mère sont punis de travaux forcés à perpétuité ou de la peine de mort.

Avortement. — La femme qui se fait avorter est punie de la réclusion ; quiconque lui a procuré les moyens de se faire avorter est passible de la même peine. Les médecins, chirurgiens et pharmaciens qui auraient aidé à provoquer des avortements sont punis des travaux forcés à temps.

Adultère. — Le Code déclare excusable, c’est-à-dire non punissable, le meurtre commis par le mari sur sa femme et sur le complice, lorsqu’il les surprend en flagrant délit d’adultère dans la maison conjugale.

La même excuse n’est pas accordée à la femme qui, dans des circonstances identiques, tuerait son mari et la complice.

L’adultère est un délit, mais il est puni différemment selon qu’il est commis par le mari ou par la femme.

L’adultère de la femme, en quelque lieu qu’il soit commis, peut être puni de 3 mois à 2 ans de prison. Le mari peut faire sortir sa femme de prison en consentant à la reprendre au domicile conjugal. Le complice peut être puni de la même peine d’emprisonnement et, en outre, d’une amende de 100 francs à 2000 francs.

Le mari ne peut être poursuivi que pour entretien d’une concubine au domicile conjugal, et, à son égard, la peine prévue n’est que celle de l’amende de 100 francs à 2000 francs.

Après un jugement de séparation de corps, l’épouse peut encore être traduite en police correctionnelle pour délit d’adultère, tandis que l’époux ne risque plus aucune poursuite, parce que la cohabitation des époux a pris fin.

Attentat aux mœurs. — Les enfants des deux sexes ne sont protégés contre les attentats à la pudeur que jusqu’à l’âge de treize ans. Au-dessus de cet âge, il faut qu’il y ait eu violence ou que le fait ait été commis par un ascendant, pour qu’il soit réputé criminel.

L’âge du consentement pour le mariage est de quinze ans pour les filles et dix-huit ans pour les garçons ; il semble donc extraordinaire qu’il soit abaissé à treize ans pour des faits qui peuvent compromettre à tout jamais la santé et la moralité des enfants. Cet âge est très inférieur à celui qui est fixé dans les législations des pays scandinaves et anglo-saxons, dans les colonies britanniques, et en Amérique, dans plusieurs États de l’Union.

Excitation à la débauche. — Le Code prévoit quatre cas, qui sont tous punis de 6 mois à 3 ans de prison et de 50 à 5 000 francs d’amende :

1o L’excitation habituelle des mineurs à la débauche ;

2o Le détournement ou l’embauchage, même avec son consentement, d’une fille mineure en vue de la débauche, lorsqu’il s’agit de satisfaire les passions d’autrui ;

3o L’entraînement ou l’embauchage, par fraude ou à l’aide de violence, d’une femme majeure en vue de la débauche, pour satisfaire les passions d’autrui ;

4o Le fait de retenir une femme, contre sa volonté, dans une maison de débauche ou de la contraindre à se livrer à la prostitution.

Les tribunaux ont adouci les rigueurs du Code, et il est maintenant admis que, même dans le premier cas, ce sont les agents intermédiaires seuls qui commettent un délit, tandis que les individus qui excitent les mineurs à la débauche dans le but de satisfaire leurs propres passions ne doivent pas être poursuivis. Il est bien évident que cette manière d’interpréter la loi est en contradiction absolue avec le texte lui-même ; elle est fort regrettable, car elle a favorisé la débauche et la prostitution, en ne punissant pas la corruption de la jeunesse.

Enlèvement, substitution, supposition d’enfant. — L’enlèvement d’un enfant, la substitution d’un enfant à un autre, ou la supposition d’un enfant à une femme qui n’est pas accouchée, sont punis de la réclusion. La peine est réduite à 5 ans de prison s’il n’est pas établi que l’enfant ait vécu ; s’il est certain que l’enfant n’a pas vécu, la peine n’est que de 6 jours à 2 mois de prison.

Abandon d’enfant. — Le fait d’abandonner un enfant est puni d’un emprisonnement et d’une amende, mais la durée et la valeur de ces peines varient selon l’endroit où l’enfant a été abandonné et le dommage qu’il en est résulté pour ce dernier. La réclusion et les travaux forcés peuvent être appliqués dans certains cas, notamment lorsque ce sont les parents ou grands-parents qui sont coupables.

Enlèvement de mineur. — L’enlèvement ou le détournement de mineurs sont punis de la réclusion.

Quand la mineure enlevée ou détournée est une fille de moins de seize ans, son ravisseur est puni de travaux forcés à temps, s’il est majeur, et de 2 à 5 ans de prison, s’il est mineur lui-même. Ces peines sont applicables même si la jeune fille était consentante.

En cas de séparation ou de divorce, celui des parents qui enlèverait un enfant ou ne le représenterait pas aux personnes qui ont obtenu la garde par décision de justice serait passible d’un emprisonnement d’un mois à un an et d’une amende de 16 à 5000 francs. Si le coupable avait été déchu de la puissance paternelle, l’emprisonnement peut être élevé jusqu’à 3 ans.

Déchéance paternelle. — La déchéance de la puissance paternelle qui est prononcée contre le père ou la mère produit son effet à l’égard de tous les enfants et descendants sans exception.

Les motifs de la déchéance sont : la condamnation des parents pour excitation de mineurs à la débauche ; la condamnation pour mauvais traitements sur un de leurs enfants ; la condamnation comme coauteur ou complice d’un crime commis par un de leurs enfants ; les condamnations pour vagabondage, pour abandon ou séquestration d’un enfant ; la condamnation aux travaux forcés ou à la réclusion ; l’envoi dans une maison de correction de leurs enfants reconnus coupables de crimes ou de délits.

Enfin, en dehors de toute condamnation, les parents peuvent être déchus de la puissance paternelle pour ivrognerie habituelle, inconduite notoire ou scandaleuse, ou pour mauvais traitements compromettant la santé, la sécurité ou la moralité de leurs enfants.

Lorsque le père est déchu de ses droits, la puissance paternelle peut être donnée à la mère par décision de justice.

La déchéance paternelle est prononcée, suivant les cas, par le tribunal civil, le tribunal correctionnel ou la cour d’assises.

Prostitution des mineurs. — Les enfants de moins de dix-huit ans qui se livrent habituellement à la prostitution comparaissent devant le tribunal civil, qui décide si ces enfants doivent être remis à leurs parents ou placés dans un établissement de réforme morale.

Tribunaux pour enfants. — Des tribunaux spéciaux ont été organisés pour juger les enfants de moins de dix-huit ans. Le juge d’instruction chargé d’une information contre un enfant de moins de treize ans peut faire procéder à une enquête, sur l’enfant et sa famille, par un rapporteur choisi sur la liste que dresse chaque année le tribunal. Les femmes peuvent figurer sur la liste des rapporteurs.

L’enfant de treize à dix-huit ans, reconnu coupable, peut être placé en liberté surveillée sous la garde d’une personne ou d’une institution charitable. Les femmes sont admises comme déléguées à la liberté surveillée.