La Doctrine du fascisme/18
5. Contre le Matérialisme historique et la Lutte de Classes
Une telle conception de la vie fait du fascisme la négation absolue de cette doctrine, qui constituait la base du socialisme pseudoscientifique ou marxiste : la doctrine du matérialisme historique, selon lequel l’histoire de la civilisation humaine ne s’expliquerait que par les luttes d’intérêts entre les différents groupes sociaux et par la transformation des moyens et instruments de production. Personne ne songe à nier que les faits économiques — découvertes de matières premières, nouvelles méthodes de travail, inventions scientifiques — aient leur importance. Mais prétendre qu’ils suffisent à expliquer l’histoire humaine, à l’exclusion de tous les autres facteurs, est une absurdité : le fascisme croit encore et toujours à la sainteté et à l’héroïsme, c’est-à-dire aux actions dans lesquelles n’agit aucun motif économique, proche ou lointain. La négation du matérialisme historique, d’après lequel les hommes ne seraient dans l’histoire que des figurants qui apparaissent et disparaissent à la surface alors que, dans les profondeurs, s’agitent et travaillent les véritables forces directrices, conduit à la négation de la lutte des classes permanente, et inéluctable, conséquence naturelle de cette conception économique de l’histoire, et surtout à la négation de la lutte des classes considérée comme facteur prépondérant des transformations sociales. Une fois qu’on a frappé le socialisme dans ces deux principes fondamentaux de sa doctrine, il n’en reste plus que l’aspiration sentimentale — vieille comme l’humanité — à un régime social, dans lequel doivent être soulagées les souffrances et les douleurs des plus humbles. Mais ici, le fascisme repousse l’idée du « bonheur » économique, qui se réaliserait socialement et presque automatiquement à un moment donné de l’évolution de l’économie, en assurant à tous le maximum de bien-être. Le fascisme rejette la conception matérialiste d’un « bonheur » possible et l’abandonne aux économistes de la première moitié du xviiie siècle ; et il nie par suite l’équation bien-être = bonheur, qui transformerait les hommes en animaux ne pensant qu’à une seule chose : être nourris et engraissés, c’est-à-dire réduits à une vie purement et simplement végétative.