La Désobéissance punie

La Désobéissance punie
Fables et contes choisisSimpkin, Marshall, & Co. (p. 14-15).

LA DÉSOBÉISSANCE PUNIE.

I. Un jour, un roi qui était à la chasse, se perdit. Comme il cherchait le chemin, il entendit parler, et s’étant approché de l’endroit d’où sortait le son des paroles, il vit un homme et une femme qui coupaient du bois. La femme disait : « Il faut avouer que notre mère Ève a eu bien tort de manger du fruit défendu. Si elle avait obéi à Dieu, nous n’aurions pas la peine de travailler tous les jours. » L’homme lui répondit : « Ève avait certainement grand tort de manger du fruit défendu, mais Adam aurait dû être plus sage, et ne pas faire ce qu’elle disait. Si j’avais été à sa place, et que vous eussiez voulu me faire manger de ce fruit, je n’aurais pas voulu vous écouter. » Le roi s’approcha, et leur dit : « Vous avez donc bien de la peine, mes pauvres gens ? » — « Oui, » répondirent-ils, « nous travaillons comme des chevaux, depuis le matin jusqu’au soir, et encore nous avons bien du mal à gagner de quoi vivre. » — « Venez avec moi, » leur dit le roi, « je vous nourrirai sans travailler. » Dans ce moment, les officiers du roi, qui le cherchaient, arrivèrent, et les pauvres gens furent bien étonnés et bien joyeux. Quand ils furent dans le palais, le roi leur fit donner de beaux habits, un carrosse, des laquais ; et tous les jours ils avaient douze plats pour leur dîner.

II. Au bout d’un mois, on leur servit vingt-quatre plats ; mais dans le milieu de la table, on en mit un grand qui était fermé. D’abord, la femme qui était curieuse, voulut ouvrir ce plat ; mais un officier du roi, qui était présent, lui dit, que le roi leur défendait d’y toucher, et qu’il ne voulait pas qu’ils vissent ce qui était dedans. Quand les domestiques furent sortis, le mari s’aperçut que sa femme ne mangeait pas, et qu’elle était triste. Il lui demanda ce qu’elle avait, et elle lui répondit, qu’elle ne se souciait pas de manger de toutes les bonnes choses qui étaient sur la table, mais qu’elle avait envie de ce qui était dans ce plat couvert. « Vous êtes folle, » lui dit son mari ; « ne vous a-t-on pas dit que le roi nous le défendait ? » Alors la femme se mit à pleurer, et dit qu’elle se tuerait, si son mari ne voulait pas ouvrir le plat. Quand son mari la vit pleurer, il fut bien fâché, et comme il l’aimait beaucoup, il lui dit qu’il ferait tout pour qu’elle ne se chagrinât pas. En même temps, il ouvrit le plat, et il en sortit une petite souris, qui se sauva dans la chambre. Ils coururent après elle pour la rattraper ; mais elle se cacha dans un petit trou, et aussitôt le roi entra, qui demanda, où était la souris. « Sire, » dit le mari, « ma femme m’a tourmenté, pour voir ce qui était dans le plat, je l’ai ouvert malgré moi, et la souris s’est sauvée. » — « Ah ! ah ! » dit le roi, « vous disiez, que si vous eussiez été à la place d’Adam, vous n’auriez pas voulu écouter les discours d’Ève ; il fallait vous souvenir de vos promesses. Et vous, méchante femme, vous aviez toutes sortes de bonnes choses, et cela n’était pas assez : vous vouliez manger du plat que je vous avais défendu. Allez, malheureux, retournez travailler dans le bois, et ne blâmez plus Adam et Ève puisque vous avez commis une faute pareille à celle dont vous les accusiez. »